Chapitre 26

Riad plaça ses mains en porte-voix autour de sa bouche et appela :

« Capitaine !

- Quoi ?

Rugit le rouquin en se tournant vers son second. Ce dernier montra Leïje d'un mouvement de la tête.
Le voleur se retenait de ne pas rire, trouvant tout cela fort distrayant mais les négociations risquaient d'être ardues si il se moquait ouvertement du capitaine.
Ce dernier jura et ordonna aux deux autres de venir le rejoindre sur la gaillard arrière. En retenant toujours son hilarité en se mordant l'intérieur des joues, Leïje suivit le jeune second qui, à en juger par ses yeux bruns, trouvait tout cela fort amusant lui aussi. Ce devait donc être de l'ironie lorsqu'il parlait d'une mauvaise journée.
Alors qu'ils rejoignaient le capitaine, ce dernier donna un coup supplémentaire contre la porte de la cabine en suppliant à travers le battant de bois :

- Allez, ouvre-moi, je t'en prie. Ou alors passe-moi au moins une chemise ! On a de la visite.

- Laisse-moi tranquille !

Lui répondit une voix féminine qui paraissait furieuse. Le rouquin soupira en s'adossant contre la cabine. Il ferait sans chemise.
La conversation risquait d'être compliquée.
Il croisa les bras sur sa poitrine et un prit un air décontracté comme si tout était parfaitement normal puis il détailla le jeune homme vêtu d'un long manteau bleu nuit.

- Alors, qui êtes-vous, que voulez-vous et pourquoi êtes-vous sur mon navire ?

- Et bien...je ne sais pas si...

- Je vous assure que vous pouvez faire confiance à Riad. Au fait, moi c'est Lédé, capitaine du Dragon Bleu et...

- ...Et le plus grand imbécile des océans !

Ajouta la femme enfermée dans la cabine avec hargne. Lédé eut un sourire tiré et gêné.
Cette fois, Leïje éclata de rire en prenant appui sur le bastingage à côté de lui. Ne pouvant se retenir davantage, Riad joignit son hilarité à la sienne et les deux jeunes hommes s'esclaffèrent à l'unisson.
Lédé pinça les lèvres en une moue vexée. Comment garder le respect de l'équipage lorsque même un inconnu se moquait de lui ?
Agacé, il grogna :

- Lorsque vous aurez fini de vous briser les abdos, vous pourrez m'expliquer ce que vous faîtes à mon bord.

- Oui, pardonnez-moi, s'excusa Leïje en s'essuyant le coin des yeux. Bon, je ne vais pas y aller par quatre chemins. Je sais que vous êtes le chef de la guilde des pirates.

- Comment ?

- Si je vous dis que c'est une déesse qui m'a communiqué l'information, vous me croyez ?

Lédé et Riad échangèrent un regard interloqué puis ce fut au tour du rouquin de s'esclaffer.
Il vint donner une forte tape amicale dans le dos de Leïje qui se sentit tout de suite plus à l'aise.
Le capitaine du Dragon Bleu déclara :

- Il me plaît, lui ! Alors, pourquoi as-tu besoin d'un équipage de pirates ?

- Laissez-moi vous raconter toute l'histoire depuis le début.

- En général, c'est mieux. Commenta Lédé, moqueur.

- J'appartiens à la guilde des voleurs ou plutôt, j'appartenais puisque tout le monde me pense mort, je m'appelle Leïje. J'ai été le chef l'an passé et ce n'est pas pour me venger d'avoir perdu mon pouvoir que je viens vous raconter tout ça mais il y a quelques semaines, j'ai découvert une conspiration entre différents chefs de guildes dont le mien avec pour but de prendre le contrôle du Conseil des Mages. En tout, il y a cinq chefs de guildes impliqués ainsi qu'un membre de la haute aristocratie. Moi, j'ai décidé de faire quelque chose de bien pour changer et je veux absolument stopper ce complot avec deux de mes amies avant qu'il ne soit trop tard, histoire de protéger l'équilibre de Welkonn et ses habitants.

- D'accord, vous êtes quelqu'un de bien mais quel est le rapport avec mon équipage ?

- Je pense que l'instigateur de cette conspiration a tenté de recruter davantage de personnes que ces six comploteurs et, pour avoir les meilleures chances de les déjouer, je dois connaître les détails ainsi que le but précis de ce complot. Pour cela, je dois trouver les personnes qui ont été invitées à y participer. Je pense, non je suis sûr, que vous faîtes partie de cette catégorie, Lédé.

- Encore une information fournie par votre déesse ? Plaisanta Lédé.

- Oh, mais ferme la un peu !

S'énerva à nouveau la femme dans la cabine en ouvrant la porte, faisant chuter Lédé sur les planches de la gaillard puisqu'il y été adossé. Raid se mordit les lèvres et Leïje observa la personne en conflit avec Lédé.
Il s'agissait d'une jeune femme d'un peu plus de vingt ans aux cheveux bruns très foncés légèrement frisés, à la peau hâlée et aux yeux presque noirs. Ses pommettes étaient joliment marquées tout comme ses lèvres dont le coin gauche était décoré d'un petit grain de beauté. Elle n'était pas bien grande et sa taille très fine contrastait avec le reste de ses formes voluptueuses. Elle plût immédiatement à Leïje qui eut un sourire appréciateur.
Le visage de Lédé s'éclaira et il se redressa sur un coude en s'enthousiasmant :

- Eniraa ! Tu es sortie !

La dénommée Eniraa ne répondit pas au soulagement mêlé de joie du capitaine.
Sans quitter son air contrarié, elle lâcha le vêtement noir qu'elle tenait sur le visage de Lédé en lui lançant :

- Tu voulais une chemise.

Pendant que le capitaine se rhabillait avec satisfaction, Eniraa détailla Leïje comme il l'avait fait avec elle.
La jeune fille s'interrogea sur les raisons qui le poussait à porter un manteau aussi long en pleine saison chaude alors qu'elle-même était en nage alors qu'elle n'était vêtue que d'un chemisier en lin très léger, certes, à manches longues.
Elle fit un pas vers le voleur en prenant la parole :

- Leïje, c'est bien ça ? J'ai tout entendu de l'autre côté et le moins que l'on puisse dire c'est que vous êtes un malin mais comment être certains que ce n'est pas un piège et que ce ne sont pas les conspirateurs qui vous envoient pour faire taire d'éventuels témoins gênants ?

- Ils ont essayé de me tuer ! C'est tout de même une preuve ! (il prit la main d'Eniraa dans la sienne en la caressant du pouce). Regardez-moi et dîtes-moi si vous doutez toujours de ma sincérité. Laissez-moi vous dire ce que, moi, je vois. En général, je vois le monde comme un défis à relever, depuis quelques semaines, je vois un danger à stopper et, en ce moment même, je vois une superbe jeune femme à la fois sombre et lumineuse et que j'aimerais apprendre à mieux connaître.

Lédé se saisit violemment Leïje, écartant Eniraa du même coup.
Le voleur se retrouva plaqué contre le bastingage, la moitié du corps dans le vide.
Le rouquin siffla :

- Rassure-moi, tu ne serais pas suffisamment stupide pour tenter de séduire ma compagne sous mes yeux alors que tu réclames notre aide ?

- Euh...pas du tout.

Mentit Leïje d'une voix étranglée.
Avant que l'incident ne devienne réellement grave, Eniraa se mit à rire.
Décidément, on s'amusait beaucoup sur ce navire.
La jeune fille sépara les deux hommes, ramenant Leïje sur les planches, et elle posa ses mains sur le bras de Lédé, l'apaisant.
Elle assura :

- Nous pouvons lui faire confiance. Viens, allons parler dans la cabine.

Leïje acquiesça à l'invitation d'Eniraa et impatient à l'idée de découvrir enfin de nouveaux éléments sur la conspiration.
Lédé ouvrit la porte de la cabine, laissant entrer Eniraa puis Leïje. Lorsque le voleur passa devant lui, le capitaine du navire lui envoya un regard, le menaçant clairement.
En s'installant sur le bord de la couchette aux draps désordonnés, Leïje se promit de se rappeler qu'il ne fallait jamais tenter de séduire l'amante d'un pirate.
Le couple s'adossa contre la paroi en face de Leïje, épaule contre épaule. Ils échangèrent quelques regards, se demandant visiblement lequel prendrait la parole en premier.
Finalement, ce fut Eniraa, dotée de davantage d'éloquence que son compagnon :

- Pour commencer, saches que tu as vu juste. Un homme nous a effectivement contactés pour nous parler d'une "association qui serait profitable à tous ses membres", comme il l'a vendu. Nous l'avons fermement prié de déguerpir. Nous ne sommes pas intéressés par le pouvoir, nous voulons seulement vivre tranquillement en toute liberté. Sauf que l'homme a insisté. Il nous a expliqué les détails de ce complot. Leïje, le but des conspirateurs n'est pas de contrôler le Conseil des Mages mais de le remplacer.

Leïje écarquilla les yeux à cette annonce, complètement stupéfait.
Durant quelques secondes, il peina à assembler ses pensées.
Lorsqu'il retrouva ses esprits, il bondit en s'exclamant :

- Quoi ? Mais comment ?

- Ça, c'est bien la seule chose sur laquelle il n'a pas été particulièrement précis.

Répondit Lédé en se décollant de la paroi.
Leïje grommela en se rasseyant. Il avait l'impression qu'à chaque fois qu'il faisant un pas en avant, il en faisant autant en arrière.
Le voleur soupira, déconfit mais les paroles que prononça Eniraa lui redonnèrent un peu d'espoir et de courage :

- Mais je pense qu'ils vont obligatoirement user de magie.

- Sûrement mais le seul qui est magicien n'est pas des plus talentueux. Ce n'est pas logique... A moins qu'il y est une conspiration dans la conspiration !

- Là, ça devient tordu, commenta Lédé.

- Il y aurait donc des conspirateurs qui bénéficient de l'aide d'un magicien, réfléchit Leïje, mais pourquoi ne pas mettre les autres dans la confidence ?

- Ça me paraît évident. C'est pour être seul à profiter du pouvoir sans avoir à le partager avec ses complices, supposa Eniraa. Il me semble que le plus susceptible de faire ça est celui qui a eu l'idée du complot.

- Donc, c'est forcément Gammon, le chef des mercenaires et son appui magique officie depuis le palais du Conseil, j'en suis certain. Le seul problème est qu'il va me falloir des preuves et je ne sais pas où les trouver...

- Il y a bien notre témoignage.

Proposa Eniraa. Leïje pesa le pour et le contre puis haussa les épaules.

- J'ignore si ce sera suffisant mais vous pouvez toujours m'accompagner à Orquia si ça vous tente.

- Malheureusement, ce ne sera pas possible.

Refusa Lédé en pinçant les lèvres en une moue navrée.
Leïje fut d'abord déçu puis il se rappela qu'il repartait avec plus que ce avec quoi il était venu et que, alors qu'il piétinait depuis des jours et des jours, une avancée n'était pas négligeable.
Ne suivant pas le cheminement des pensées du voleur, Eniraa baissa le regard en murmurant :

- Désolée...

- Ce n'est pas grave, la rassura Leïje. Je comprend très bien et vous m'avez déjà bien aidé, croyez-moi. Je ne vais pas vous importuner davantage, vous et votre équipage.

Les deux pirates acquiescèrent puis ils sortirent tous les trois de la cabine. Eniraa se sentit soulagée de constater qu'ils avaient tout de même été utiles.
De retour sur la gaillard, Riad lui adressa un regard interrogateur, se demandant visiblement ce qu'ils s'étaient dit à l'abri des oreilles indiscrètes. Ni son capitaine ni la compagne de ce dernier ne lui expliquèrent. Peut-être attendaient-ils que Leïje ne soit plus à bord.
Le voleur se dirigea vers la corde qui se balançait toujours contre le flanc du Dragon Bleu pour redescendre sur le quai.
Il la saisit dans sa main droite et, avant de s'y suspendre, il se tourna vers les trois pirates qui l'avaient accompagné jusqu'ici pour le saluer.

- Merci pour votre aide et votre accueil. Avant d'y aller, puis-je me permettre de vous signaler que vous formez un très beau couple ?

Les joues d'Eniraa se teintèrent légèrement de rouge et la jeune fille chercha à se dissimuler derrière ses cheveux bruns. Contrairement à elle, Lédé ne parut absolument pas mal-à-l'aise de cette remarque, semblant plutôt s'amuser de la gêne de sa compagne.
À côté d'eux, Riad éclata encore de rire en répliqua à Leïje :

- C'est que tu ne les as pas vu se disputer ! Ils passent pourtant leur temps à ça !

- Méfie-toi si tu ne veux pas que je te mette au récurage du pont ! Menaça Lédé.

- Mais ils s'adorent et ne pourraient pas passer une journée l'un sans l'autre. »

Ajouta Riad avec un clin d'œil adressé à son capitaine. Ce dernier prit un air renfrogné alors qu'Eniraa souriait.
Leïje les salua d'un signe de la main puis se laissa glisser le long de la corde.
En quittant ce navire, il se sentait étrangement détendu et enjoué. C'était que l'ambiance régnant chez les pirates était totalement différente de celles qu'il avait pu observer chez les autres guildes. Les mercenaires étaient tous plus sanguinaires les uns que les autres et les voleurs étaient bien trop nombreux pour que ne flotte pas des animosités ou des rivalités entre eux, alors qu'ici, l'entraide et la camaraderie primaient. En même temps, lorsqu'on se retrouvait en cœur d'une tempête en pleine mer, il valait mieux pouvoir faire confiance aux autres.
Leïje se retourna vers le Dragon Bleu et il vit Eniraa et Lédé en train de s'embrasser contre le bastingage.
Le voleur regagna l'auberge où il avait laissé Brume avec un sourire flottant sur les lèvres. Il paya la petite palefrenière puis enfourcha Brume et prit la direction d'Orquia, pressé de ne plus laisser Dabielle et Maige seules.

***


Maige et Myrthe avaient vérifié toutes les issues de la demeure et elles étaient toutes verrouillées. Mêmes les fenêtres du rez-de-chaussée avaient été bloquées.
Impossible de sortir.
Myrthe ne comprenait pas et ne cessait de répéter son incompréhension à voix basse mais Maige savait très bien à qui elle devait cet emprisonnement à domicile.
Prise d'une très, très rare montée de fureur, elle se rendit à la chambre de Lidian. Elle ouvrit la porte sans frapper.
Son cousin sursauta en se retournant vivement puis il soupira de soulagement en constatant qu'il ne s'agissait que de Maige.
Il lui reprocha :

« Tu pourrais t'annoncer.

- Rend-moi la clé.

- Je ne vois pas de quoi tu parles.

Prétendit Lidian en se replongeant dans les documents éparpillés sur son bureau qu'il étudiait.
En temps normal, Maige aurait baissé la tête et serait repartie sans plus insister mais présentement, la rage l'emplissait ainsi que la pensée de Dévlin et la trahison de Lidian la poussait à se battre ouvertement.
Elle referma violemment la porte, ramenant l'attention de Lidian sur elle et elle s'écria :

- Tu m'as enfermée dans ma propre maison où je t'ai accueilli !

- C'est pour ton bien.

- Mon bien ? Te moquerais-tu de moi ? Comment comptes-tu faire si jamais j'accouche, hein ? Tu n'es qu'un vulgaire criminel, Lidian. J'ai peine à croire que nous soyons de la même famille.

- Moi, un criminel ? Tu as tout faux ! Tu parles de la famille et c'est exactement de cela qu'il s'agit ! Tu veux savoir ce qui peut me motiver à m'allier à des hors la loi de la pire espèce ? C'est toi, toi et tous les De Iyrté, qu'ils soient morts ou vivants ! Tu sembles beaucoup moins véhémente tout d'un coup. Tu ne comprends toujours pas alors je vais te donner davantage d'explications puisque cela semble être l'instant des révélations. Notre famille régnait sur ce monde ! Nous étions les puissants parmi les puissants, les grands parmi les grands et pour une stupide histoire d'équilibre ou d'équité ridicule, on nous a tout prit, on a usurpé notre place, notre trône ! On nous a même chassé de notre maison et volé tout ce qui nous était cher ! Notre palais royal n'existe même plus aujourd'hui ! Regarde-nous ! Notre situation est pitoyable ! Nous sommes rangés avec les autres bourgeois sans intérêt ni substance comme si nous étions pareils mais nous sommes radicalement différents ! Nous valons mieux que ça, notre sang vaut mieux que ça ! Il nous rend spéciaux, nous fait léviter au-dessus de la masse grouillante des gens sans valeur ! C'est pour notre sang que je m'abaisse à ce niveau, pour regagner la place qui nous est dû, celle qui est la notre et que nous n'aurions jamais dû quitter. Le sang des De Iyrté, le sang de la royauté coulent dans nos veines ! Si je fais tout ça, c'est parce que nous le méritons et que c'est notre place, celle de notre sang !

Maige recula jusqu'à ce que son dos heurte le mur derrière elle.
Sa fureur l'avait complètement abandonnée pour céder l'espace à une grande frayeur. Elle avait l'impression d'écouter discourir un dément.
Visiblement, Lidian était totalement obsédé par les origines royales de sa famille. C'était ridicule. Il n'était même pas le descendant directe des anciens souverains. Si la monarchie avait encore été en place, ce serait Maige qui serait assise sur le trône.
La jeune femme se plaqua une main sur la bouche pour s'empêcher de s'exclamer sur sa détresse.
Lidian éclata d'un rire effectivement dément avant de reprendre à peine plus calmement :

- Avec ces grands yeux écarquillés, tu ressemble à une biche apeurée.

- Tu es fou. »

Elle n'attendit pas l'éventuelle réponse de Lidian et s'empressa de sortir en refermant la porte derrière elle.
La jeune femme tituba quelques mètres dans le couloir puis elle ouvrit une fenêtre, celles du premier étage n'étant pas verrouillées, et elle vomit le contenu de son estomac mêlé de bile infecte, bouleversée d'avoir découvert que son cousin qu'elle chérissait tant et avec qui elle avait grandi n'avait pas toute sa raison.

***

Pas toute sa raison ?
Au contraire, Lidian avait l'impression d'être le seul à être sensé. Pourquoi personne ne voyait ce qui était pourtant évident à comprendre ? Pourquoi Maige avait-elle réagi de la sorte ? C'était pour elle qu'il faisait tout ça, pour son enfant à naître, pour leur famille. À moins que ce ne soit lui qui ce soit trompé ?
Le seul moyen d'être sûr était de consulter un autre membre de sa famille et pour cela, une unique solution.
Lidian ouvrit l'un des deux placards meublant sa chambre et en sortit plusieurs flacons emplis de poudre de différentes couleurs. Il les déposa devant l'âtre qu'il remplit de bûches qu'il avait eu la présence d'esprit de monter au cas où.
Le feu mit un peu de temps à prendre mais une fois qu'il y parvint, les flammes s'élevèrent rapidement en léchant les parois de la cheminé.
Lidian s'installa devant et déboucha la première fiole. Il versa une partie du contenu dans sa paume puis le jeta dans le feu qui gonflèrent. Il ajouta une pincée de poudre grise qui fit se dégager un nuage de fumée qui envahi la pièce. Le rouquin continua à vider une partie des flacons pour les brûler puis il ferma les yeux pour davantage de concentration et se mit à réciter une incantation.
Peu à peu, une zone de la fumée se densifia en s'opacifiant puis commença à prendre forme humaine. En quelques minutes, une vieille femme à l'air sévère et au corps entièrement translucide apparut devant Lidian.
Peronne De Iyrté regarda autour d'elle avec une expression quelque peu hagarde puis elle posa ses yeux incolores sur son neveu qui se relevait.
Le jeune homme prit le temps d'éteindre le feu et d'ouvrir la fenêtre pour chasser la fumée de la chambre avant de s'adresser à sa défunte tante :

« Bonjour, ma tante, comment allez-vous ? Votre nouvelle condition ne vous incommode pas trop ? Vous y êtes-vous habituée ?

- Je t'en prie, j'ai suffisamment communiqué avec des esprits pour savoir comment ça se passe et être capable d'y faire face. La seule chose qui m'inquiète est que Maige risque de faire des bêtises si je ne suis plus là pour la surveiller.

- Je m'occupe d'elle, soyez-en certaine.

- Bon, que veux-tu ? Je sais que l'on n'appelle pas les esprits pour parler de la météo. Alors ?

- Je voulais savoir...

- Comment je suis morte.

Termina Peronne en pensant avoir deviné le questionnement de Lidian.
Ce dernier demeura interdit un court instant, ne s'attendant pas à cela. Il était vrai que le meurtre de sa tante restait une interrogation dont il voulait la réponse ainsi qu'un crime qu'il désirait punir alors, tenant l'occasion d'obtenir des explications et remettant à plus tard les doutes sur ses motivations, il acquiesça.
Peronne prit quelques minutes pour réunir ses souvenirs et elle débuta son récit :

- Je sortais de la maison lorsque j'ai senti toutes mes forces me quitter dans une insupportable souffrance puis plus rien, j'étais morte. Sur le moment, j'ignorais totalement ce qu'il m'arrivait mais, comme tu le sais, les esprits ont une vision bien plus large que les vivants alors j'ai tout comprit en perdant la vie. C'est un sortilège très ancien qui m'a tué. Un sortilège qui a pour but de voler la magie.

- Quoi ? Mais c'est ignoble ! Savez-vous qui a osé vous faire une telle chose ?

- Oui. C'est un jeune apprenti magicien mais il l'a fait pour le compte de quelqu'un d'autre, pour un homme mauvais et sanguinaire qui est à la tête d'une conspiration qui vise à détrôner le Conseil. »

Lidian sentit l'air se bloquer dans ses poumons.
C'était Gammon qui avait ordonné la mort de Peronne, qui l'avait indirectement causé. Le mercenaire l'avait trahi, s'était servi de lui et avait fait tué sa tante.
Le complot avait attaqué sa famille. Sa famille ! Rien ne justifiait qu'on s'en prenne à un membre de son sang !
Après tout, il n'avait besoin de personne pour reprendre le trône qui lui revenait de droit.
Cela serait la deuxième étape, celle qui viendrait après sa vengeance sur Gammon.

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