Chapitre 4
« Je te promets que je vais tuer ce salaud de revendeur ! C'est forcément lui qui nous a dénoncés !
Fulmina Leïmy en se tordant les poignets en tous sens pour tenter de se défaire des liens qui l'attachaient à une solide chaise, tout comme Negg à côté d'elle.
Lorsqu'ils étaient sortis de la boutique et qu'ils avaient découvert la vingtaine d'homme de la Garde, ils n'avaient pas hésité. Ils avaient dégainé leurs lames et s'étaient lancé dans le combat. La rue, déjà peu fréquentée, s'était alors instantanément vidé. Même si ils avaient réussi à blesser plusieurs soldats dont certains gravement, les trois voleurs n'avaient pas pu résister face au surnombre écrasant. Leïje avait été le premier à tomber et il avait été suivi de Negg et de Leïmy.
Une fois maîtrisés et désarmés, ils avaient été conduits à la prison la plus proche. Leïje et les deux mercenaires avaient été séparés.
À présent, Leïmy et Negg se trouvaient fermement ligotés dans une petite pièce de la prison aux murs suintants d'humidité et couverts de moisissures et éclairée par une mauvaise lanterne dont l'huile dégageait une odeur désagréable en se consumant.
Negg cessa un instant de se débattre avec les cordes qui commençaient à lui brûler la peau puis regarda autour de lui avant de constater :
- Il y a quelque chose d'étrange.
- Je suis bien d'accord. Avec l'argent qu'a le Conseille, il pourrait faire nettoyer les prisons. C'est insalubre !
- Je ne parlais pas de ça. As-tu remarqué que j'ai presque sectionné le bras d'un des gardes pourtant, nous n'avons pas la moindre blessure ou alors tout juste une ou deux égratignures donc...
- La Garde nous veut en bon état. Pourquoi ?
Negg secoua négativement la tête en signe d'ignorance et ils n'eurent pas le temps d'échanger davantage de paroles.
La porte s'ouvrit en grand, déversant la lumière des torches éclairant le couloir dans la petit pièce. La lueur, plus vive que celle à laquelle les deux mercenaires s'étaient habitué, leur blessa la rétine et ils en furent aveuglés, si bien qu'ils ne distinguèrent rien de plus qu'une silhouette se découpant à contre-jour. Leur acuité visuelle revint à la normale et ils purent sans peine détailler l'homme leur faisant face.
Il était plus grand que Negg et large d'épaules. Il avait le même visage en triangle et le même nez que Negg mais les lèvres légèrement plus charnues. Ses yeux noisettes striés de vert étaient plissés à leurs commissures mais pas au point d'être bridés. Ses cheveux d'une couleur intermédiaire entre le châtain et le roux étaient réunis en une natte lui arrivant en-dessous de l'épaule.
- Dévlin ! S'exclama Leïmy avant de se tourner vers Negg. C'est pour ça qu'il n'était pas chez lui, il nous tendait un piège !
- Tu viens nous chercher ?
Demanda Negg à son frère en ignorant Leïmy.
Dévlin referma la porte et s'avança vers les deux mercenaires. Le bas de la cape blanche qu'il portait ramassa toute la poussière salissant le sol.
Il répondit à Negg :
- En quelques sortes. C'est moi qui vous ai faits venir. Nous avons découvert qui revendait ce que vous dérobez. Il a suffi de le surveiller en attendant votre prochain passage.
- Ni toi ni la Garde n'avez de véritables preuves que Negg et moi avons commis des actes répréhensibles, rien que des rumeurs.
- Je le sais parfaitement. Répliqua Dévlin.
- Oh non ! Soupira Leïmy. Ne me dis pas que c'est pour nous faire la morale sinon, même avec les mains attachées, je t'en mets une !
- Nous avons mis des mois ainsi que d'importantes ressources pour trouver et remonter votre piste alors, non, ce n'est pas seulement pour vous faire savoir que je désapprouve votre manière de vivre. Il se passe quelque chose de très grave.
- Welkonn aurait-il encore envie de se suicider ? Soupira Negg qui espérait tout de même que ce n'était pas le cas.
Non, rassurez-vous mais tout le Conseil veut s'entretenir avec vous alors je vous donnerai de plus amples explications au palais.
- Lorsque le Conseil fait appel à des personnes dans notre genre, ce n'est pas bon signe, je parle par expérience.
Pesta Leïmy. Negg opina. La dernière fois que les Conseillers avaient eu recourt à ses services, Welkonn était sur le point de sombrer. Cela ne présageait rien de bon.
Dévlin dégaina la rapière qu'il avait au côté droit à la poignée ouvragée et s'en servit pour sectionner les cordes retenant les deux mercenaires. Negg se massa les poignets qu'il avait endoloris et Leïmy se leva.
Ils sortirent, Dévlin en tête. Ils ne firent que quelques pas puis tombèrent nez à nez avec le Capitaine Oriol.
Ce dernier posa un regard réprobateur sur les deux mercenaires.
Negg lui donna une tape dans le dos en venant à sa hauteur comme si ils étaient de vieux amis.
- Capitaine ! Comment allez-vous depuis la dernière fois ?
- Il faut que je vous parle. Déclara Oriol à l'attention de Dévlin en ignorant parfaitement Negg.
- Je n'ai pas vraiment le temps. Répondit le Conseiller.
- C'est à propos d'un cambriolage qui a eu lieu dans la demeure secondaire des Simmbel hier soir. Précisa le capitaine.
- Ne perdez pas de temps, intervint Leïmy. Nous sommes coupables. Peut-on y aller à présent ? Plus vite ce sera réglé, plus vite nous pourrons retourner à nos occupations.
- Nous verrons cela plus tard.
Assura Dévlin à Oriol avant de le contourner.
Leïmy adressa un signe de la main moqueur accompagné d'un sourire narquois au capitaine avant d'emboîter le pas aux deux frères.
Ils ressortirent à l'extérieur et la lumière du soleil permit à Dévlin qui, lui n'avait pas une vue entraînée, de voir clairement les mercenaires.
Il ne les avait pas recroisés depuis près d'un an, depuis que Welkonn avait été sauvé. Ils n'avaient pas beaucoup changé. Les cheveux de Negg avaient peut-être un peu poussé mais sinon, ils étaient identiques au souvenir que le nécromancien conservait, égaux à eux-mêmes.
De son côté, Leïmy se livrait à la même analyse avec Dévlin. Contrairement à lui, elle l'avait vu récemment puisque, sur demande de Negg, ils passaient régulièrement vérifier comment se portaient Dévlin et Maige.
La mercenaire baissa les yeux sur la belle rapière dont le fourreau était passé à la ceinture du Conseiller. Elle ne se rappelait pas qu'il ait eu une quelconque connaissance en matière de combat.
Elle lui lança :
- A quoi elle te sert ? Ouvrir ton courrier ?
- Très amusant. Tu sais que tu as un peu moins de tissus sur toi à chaque fois que je te vois ?
- Toi, tu es toujours aussi laid.
- Désolé d'interrompre une conversation aussi adulte, ironisa Negg, mais j'ai cru comprendre que nous étions attendus.
Dévlin acquiesça et, après un regard de colère à Leïmy, il se mit en route en se dirigeant vers le palais du Conseille des Mages.
Il y avait quelque chose qui avait changé en fin de compte chez le nécromancien. Il y avait un an en arrière, il n'aurait jamais osé se comporter avec Leïmy comme il venait de le faire. Par égard pour Negg, la mercenaire ne lui reprocherait pas ce manque de respect.
Ils évitèrent les grandes artères de la capitale pour privilégier les ruelles et les rues peu fréquentées. Ces détours leur firent perdre du temps mais ils préféraient rester discrets pour des raisons évidentes.
En tant que criminels, Leïmy et Negg avaient toujours le réflexe d'être prudents dans un lieu peuplé. Quant à Dévlin, le Conseil ne souhaitait pas divulguer le problème qui le préoccupait et se montrer en compagnie des deux mercenaires était un aveu silencieux.
Le palais ne méritait pas vraiment cette appellation car, si le Conseil régissant Welkonn y siégeait bien, il n'avait que la taille d'un manoir et ne comportait que cinq bureaux, un pour chaque Conseiller, quelques chambres car il arrivait souvent que les magiciens travaillent trop tard pour rentrer chez eux, une salle de réunion, une petite cuisine puisque les gardes mangeaient sur place, et une immense bibliothèque.
Dévlin, qui ouvrait la marche, poussa la lourde porte de bois et ils entrèrent. En se déplaçant dans les couloirs décorés de moquettes et de tapisseries éclairés par de grandes chandelles, Leïmy remarqua l'absence de vie à l'intérieur. Le palais était vide. Aucun bruit ne filtrait de sous les portes devant lesquels ils passaient.
La jeune fille demanda :
- Vous avez fait vider les lieux en notre honneur ?
- Nous tenons absolument à ce que l'affaire reste secrète.
- Vous n'avez pourtant pas été particulièrement subtiles lorsque vous avez fait appel à Leïmy la première fois, rappela Negg. Vous aviez fait placarder des affiches la sommant de venir dans toutes les villes.
- Le contexte était différent.
Répondit Dévlin d'un ton que les deux mercenaires jugèrent étonnamment grave. Que pouvait-il bien se passer pour que le nécromancien soit aussi tendu ? Si la destruction de Welkonn était de nouveau d'actualité, il aurait été hystérique et non inquiet comme il l'était. Ayant parfaitement saisi qu'ils n'obtiendraient des explications détaillées que lorsqu'ils seraient face au Conseil complet, ni Leïmy ni Negg n'interrogea Dévlin.
Le garde en faction devant les portes de la salle de réunion, seule présence qu'ils croisaient depuis qu'ils étaient entrés, se posta au grade-à-vous en voyant Dévlin venir vers lui et il adressa un regard empli de méfiance aux deux mercenaires qui répliquèrent par des expressions moqueuses.
À l'intérieur de la pièce, les Conseillers étaient déjà réunis.
La doyenne, Domilla, âgée d'une bonne soixantaine d'années, aux cheveux couleur d'argent, était une mentaliste, Marga et Garhil avaient tous deux la cinquantaine. Le premier contrôlait l'eau ainsi que le vent quant au second, il maîtrisait le feu et la terre. Le dernier membre du Conseil était arrivé il y avait à peine un an. Il se nommait Iquion et remplaçait Erio, l'ancien magicien du temps. C'était le deuxième moins âgé avant Dévlin, avec cinq ans de plus que le nécromancien. Il était également le seul qui n'avait jamais rencontré les mercenaires et cela l'angoissait.
Lorsque le trio qu'ils attendaient entra, Iquion fut, certes, impressionné par le frère de Dévlin mais il fut surtout fasciné par Leïmy. Il avait bien évidemment déjà entendu des descriptions de sa beauté mais elles étaient toutes en-dessous de la vérité.
À l'inverse, la jeune fille ne leur lança qu'un regard dédaigneux avant de se tourner vers le reste du Conseil à qui elle s'adressa :
- Bon, inutile de s'embarrasser avec les politesses du types : comment allez-vous depuis la dernière fois ? C'est plutôt pas mal que Welkonn ait survécu. C'est fou ce que vous avez vieilli... Et passons aux raisons pour lesquelles vous nous avez faits venir en interrompant nos occupations.
- Je suis ravi de constater que certaines choses ne changent pas.
Grogna Garhil, celui qui possédait le plus d'inimité avec les mercenaires. Negg lui envoya un regard lui indiquant que ce sentiment était partagé.
Dévlin rejoignit son siège placé à côté de celui d'Iquion avec qui il échangea quelques mots.
Personne ne parlait. Visiblement, les Conseillers redoutaient la réaction des mercenaires après la remarque de Garhil donc, Negg menaça, principalement pour faire avancer la conversation :
- Nous pouvons repartir si notre présence vous importune or, la situation doit être désespérée pour que vous ayez besoin de nous.
- Les esprits s'échauffent après quelques minutes seulement alors le mieux est est de se calmer, conseilla Domilla. Tout le monde est-il d'accord ?
Les magiciens acquiescèrent gravement tout comme Negg, même si il le fit avec moins de sérieux que les Conseillers puisqu'ils ignoraient le sujet de cette réunion, et Leïmy marmonna son assentiment.
Satisfaite, Domilla continua :
- Je suppose qu'il est inutile de vous demander si vous vous souvenez de Rilin.
- Comment l'oublier ? Répondit Leïmy. Vous aurait-il envoyé une lettre depuis son exile ?
- Pourriez-vous me laisser parler ? La tança Domilla.
- Je vous en prie.
Leïmy effectua une courbette moqueuse avant de se taire.
Dévlin soupira en pensant que, si la mercenaire continuait à se comporter de la sorte, ce serait long. Il trouvait également qu'elle était encore plus irrespectueuse et intenable que la première fois qu'ils avaient fait appel à elle. D'après l'expression de Domilla, elle partageait ses observations.
Conservant admirablement son sang-froid, la doyenne du Conseil reprit :
- Il m'a effectivement envoyé un message, mental bien sûr. Il a survécu au désert de Soow mais ce n'est pas le plus important. Si il est toujours vivant, ce n'est pas entièrement grâce à ses capacités.
- Pourriez-vous en venir directement au fait ? S'impatienta Negg.
- Il a découvert une ville.
Lâcha Dévlin sans le moindre détour.
Leïmy, qui avait sorti une lame qu'elle faisait danser entre ses doigts pour signifier qu'elle en avait déjà assez de cette conversation, échappa son poignard malgré sa grande dextérité sous le coup de la surprise. L'arme tinta sur le sol.
Elle ne savait pas si elle devait éclater de rire ou faire un malaise d'étonnement. Devant le sérieux marquant les visages des Conseillers et les yeux écarquillés de Negg, elle choisit la seconde option. À présent qu'elle était fixée sur le véracité des propos de Dévlin, elle peinait à formuler ses idées.
Le Conseil pourrait au moins se vanter de lui avoir fait perdre ses moyens.
Negg se méfia pour elle :
- Le principe d'un désert est pourtant qu'il n'y ait rien à cet endroit.
- Merci pour cette précision. Ironisa Leïmy, qui avait retrouvé l'usage de sa langue.
- Pour une fois, je suis du même avis que Leïmy, renchérit Dévlin avant de poursuivre. Il est vrai que nous ignorons énormément de choses sur ce qui se trouve de l'autre côté de la Mer Désertique mais apprendre qu'il y a une civilisation évoluée à cet endroit est un choc aussi bien pour nous que pour vous. Nous ne pouvons oublier que Rilin nous ment peut-être et que...
- Il ne ment pas, coupa Leïmy. Je suis sûre qu'il est sincère.
Toutes les personnes présentes dans la salle, exceptée Leïmy, échangèrent des regards circonspects après cette déclaration.
N'ayant pas de temps à perdre en s'attardant là-dessus, Marga prit le relai :
- Quoi qu'il en soit, si il y a réellement une population civilisée et accessible, nous nous devons d'aller à sa rencontre. Rilin y est mais il n'est pas notre envoyé et inutile de préciser que le voyage est extrêmement dangereux et...
- Donc, c'est nous que vous envoyez risquer notre vie. Termina Negg.
- Ce n'est pas ça, le détrompa Iquion qu'ils n'avaient pas entendu jusqu'ici. Nous avons simplement pensé que, après l'aide précieuse que vous nous avez fournie l'année dernière, il nous a semblé que vous étiez les personnes les plus indiquées pour...
- Vous n'étiez même pas là, vous ! L'interrompit Leïmy.
- Vous avez raison, déclara Garhil, il faut que nous obtenons des informations sur cette cité chimérique et pour cela, nous avons besoin de personnes dont les chances de survie sont élevées donc, qui ont de grandes capacités. Je pense que vous vous reconnaissez dans cette description, tout comme nous un peu plus tôt. Vous sembliez être le choix le plus évident du moins, pour certains d'entre nous.
- Si je comprends bien, résuma Negg, vous nous demandez de trouver un navire car je présume que le Conseil n'en a pas à son nom, de traverser la Mer Désertique puis le désert de Soow dont presque personne n'est jamais revenu et de gagner une ville alors que ses habitants sont peut-être hostiles.
- Pas tout à fait. Nous vous assisterons de mieux que nous pouvons et l'un d'entre nous vous accompagnera. Nous ne vous faisons pas suffisamment confiance pour vous laisser vous charger seuls de cette affaire.
- Ne dîtes rien, coupa Leïmy. C'est Dévlin qui vient avec nous !
- En effet. C'est le seul capable de vous maîtriser un tant soit peu.
- Il ne peut pas partir ! S'opposa Negg. Surtout pour un voyage aussi risqué ! Sa femme va bientôt accoucher. Cet enfant pourrait être privé de père avant même de venir au monde !
- Negg, ta sollicitude me touche mais...ma décision est prise.
Le rouquin leva un sourcil, peu convaincu par la déclaration de son frère et même Leïmy nota l'incertitude dans la voix du nécromancien.
Il n'était pas difficile de déterminer d'où provenait ce manque flagrant d'enthousiasme. Dévlin n'avait pas la moindre envie de s'éloigner de Maige. Il était fort peu probable que ses collègues aient fait pression sur lui jusqu'à ce qu'il cède alors quoi ?
En réalité, il ne se sentait plus légitime en tant que Conseiller depuis qu'il avait été déchu et ce malgré sa réhabilitation et son retour à son poste. Il avait donc accepté la tâche qu'on lui confiait sans protester, même si c'était totalement à contrecœur.
Iquion s'était bien proposé mais il ne connaissait pas les deux mercenaires et ce serait fait piétiner. Le fait que Dévlin et Negg soient frères facilitait grandement les choses.
Domilla prit le silence se prolongeant pour un assentiment général et elle voulut conclure la réunion :
- Le mieux est que vous vous mettiez en route le plus rapidement possible et que vous...
- Nous n'avons rien accepté, la contredit Leïmy, et je vous signale que nous ne gagnons absolument rien en vous obéissant.
- Bien sûr que si, lui apprit Marga. Même si vous n'êtes plus des mercenaires, vous conservez toujours du sang sur les mains et vous restez des criminels. En contrepartie de votre aide, vous obtiendrez l'immunité pour tous vos crimes passés et non futurs, évidemment.
- Y compris le vole chez les Simmbel d'hier soir.
Ajouta Dévlin.
Leïmy et Negg échangèrent un regard d'incertitude. Leïmy haussa les épaules. Cela méritait réflexion.
Negg demanda :
- Devons-nous vous donner notre réponse immédiatement ou bénéficions-nous d'un temps pour réfléchir ?
- Vous avez jusqu'à demain pour vous décider. Nous vous attendrons ici, trois heures après le levé du soleil.
- Comme la dernière fois.
Soupira Leïmy puis elle se dirigea vers la porte sans saluer personne. Negg adressa un signe de la main à son frère puis il la rejoignit dans le couloir.
Alors que la jeune fille allait déjà pour sortir du palais, Negg s'adossa contre le mur et patienta. Leïmy comprit qu'il souhaitait s'entretenir avec Dévlin. Elle leva les yeux au ciel en soupirant. Elle se résigna et revint vers lui.
Negg lui sourit et elle lui répondit par un regard agacé. Le sourire du rouquin s'élargit davantage.
Les Conseillers ne tardèrent pas à sortir. Les trois plus âgés les regardèrent chacun d'une manière différente. Domilla espérait, Marga leur sourit presque et Garhil était haineux. Dévlin et Iquion s'arrêtèrent à leur à la hauteur.
Le nécromancien se passa une main sur le visage sans dire un mot.
- Tu n'est pas obligé de venir, lui assura Negg. Ton collègue s'est porté volontaire alors...
- Alors rien du tout ! S'exclama Leïmy. Regarde le (elle montra Iquion). Il ne tiendra pas trois jours.
- C'est exactement ce que tu disais pour moi, lui fit remarquer Dévlin, mais n'insistez pas. Je vous accompagne, point final.
- Et su tu meurs ? Imagina Negg. Y as-tu pensé ? Que fera Maige ?
- Tu feras en sorte que cela n'arrive pas.
Sur cette déclaration emplie de confiance pour son frère cadet, Dévlin fit volte-face et disparut à l'angle du couloir.
Leïmy grogna d'agacement sans savoir réellement ce qui l'énervait. Était-ce le fait que Dévlin soit de nouveau leur compagnon ou que Negg fasse tout pour qu'il ne le soit pas ?
Ne trouvant pas la réponse, elle passa sa frustration sur Iquion, qui n'avait pas emboîté le pas à son confrère nécromancien. Elle lui lança hargneusement en montrant les dents tel un molosse mécontent :
- Vous voulez quelque chose ?
Sous la surprise et un peu effrayé, Iquion recula d'un pas puis se reprit. Leïmy ne s'en prendrait pas à lui, pas ici, ou alors, elle ne ferait que le frapper sans lui laisser de séquelles plus graves que des hématomes. Il osa donc poser une question à la mercenaire :
- Je me demandais quelque chose à propos de vos incroyables capacités pour la magie du temps et j'aimerais savoir...
- Vous pensez sincèrement que je vais vous renseigner ? Permettez-moi de vous détromper. Je vais vous laisser seul avec vos interrogations (elle s'éloigna avant de revenir vers eux, non pour entraîner Negg à sa suite mais pour rappeler une chose à Iquion). Au fait, notre ami avec qui vous nous avez fait arrêter est toujours en prison. Veillez à l'en faire sortir. Negg, tu viens ? Je n'ai pas envie de rester davantage ici.
- Moi non plus.
Opina Negg et les deux mercenaires ressortirent du palais du Conseil.
Fidèles à leurs habitudes, ils empruntèrent les ruelles peu fréquentées et mal famées.
Ils marchèrent en silence durant plusieurs minutes puis Negg le rompit en soupirant :
Il ne nous reste qu'à rentrer chez nous et réfléchir.
- A quoi bon ? Rétorqua Leïmy avec violence. Nous savons parfaitement l'un comme l'autre que nous allons accepter ! Nous pouvons rester à attendre l'heure du rendez-vous ! J'en ai assez ! J'ai l'impression d'être le chien du Conseil !
- Calme-toi, Leïmy. Ce n'est pas seulement obéir au Conseil mais peut-être l'une des découvertes les plus incroyables de notre histoire ! Égalant la réunification des magies ! Aurais-tu donc totalement perdu ton aptitude à rêver ? Nous aimions pourtant énormément les légendes. Je t'en ai d'ailleurs appris la plupart. Ne te souviens-tu pas que nous rêvions tellement de quitter les mercenaires que cela ne nous effrayait pas de devoir traverser la Mer Désertique pour cela. Tu souhaitais explorer le monde puisque le nôtre était trop sordide et sanglant.
- Qui affirme que celui du désert est mieux ?
- Il n'y a qu'un moyen de savoir. »
Leïmy haussa les épaules mais le sourire expressif de Negg eut rapidement raison de son humeur bougonne et les commissures de ses lèvres s'étirèrent doucement.
Dans un silence, à présent détendu, ils quittèrent la capitale d'Orquia. Prenant instinctivement une cadence de marche rapide, ils laissèrent les bâtiments dans leurs dos.
Après une heure, ils longeaient le petit village de Sango et le cœur de Leïmy se serra.
Elle avait fait le deuil de la vie qu'elle aurait pu mener dans le bourg mis elle n'avait pas terminé celui de Léyan. Devinant sans peine à quoi son amante pensait, Negg lui posa une main sur l'épaule en la serrant avec sollicitude. La jeune fille effleura ses doigts du bout des siens. Ce simple contact l'aida à se sentir mieux.
Après tout, un voyage au cœur des légendes de Welkonn, cela se révèlerait certainement être intéressant.
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