Chapitre 7 (partie 2)
Coucou!
Encore moi. ;)
Voici une autre entrée.
Normalement, les scènes qui sont décrites dans le chapitre 7 se déroulent plutôt simultanément, alors je conseille au lectorat de les lire assez rapidement.
Bonne lecture!
______________________________
Chapitre 7 (partie 2)
« Liane Valmont-Kapesh, à votre tour. Prière de déposer ce médaillon dans la jarre à droite de la porte avant d'entrer."
Matthieu, Tommy et Stella ont entamé une partie de Labyrinthe peu après que Kristian ait quitté pour se rendre aux Jardins des FierTrèfles. Liane aurait bien voulu jouer, mais elle se doute que son rendez-vous viendra bientôt alors elle se contente de regarder.
Labyrinthe est un jeu collaboratif où les joueurs doivent sortir d'un Labyrinthe qui est fabriqué au fur et à mesure des tours, selon le hasard des cartes pigées. Il faut réussir à sortir avant que tous les joueurs se fassent dévorer par le Minotaure et ce en franchissant des étapes qui peuvent les mettre en danger. Le principe est simple, mais le jeu nécessite la collaboration de tous les joueurs pour gagner.
Matthieu, Lucie et Liane adorent jouer avec leur père et cette année, Raphaël a décidé d'en offrir un exemplaire à son fils pour son anniversaire. Comme Matthieu est né au début septembre et qu'ils seront à Barbe-Hallay pour l'occasion, Raphaël a commandé le jeu que Matthieu a reçu en se présentant à la librairie pour ramasser ses livres scolaires.
Lorsque Liane se lève, rangeant son cahier de dessins et brandissant son médaillon doré, Stella pousse un cri de joie. Matthieu lui fait une accolade en lui ébouriffant les cheveux et Tommy sourit à pleine bouche aussi excité pour elle que pour tous les autres.
— Cool! Let's go, friend! l'encourage-t-il en lui présentant son poing.
Liane le frappe de son propre poing et sort, le sourire aux lèvres et le pas léger, Kauapat sur les talons.
Elle n'a jamais pensé à la famille Vestergaard avant aujourd'hui. Il faut dire qu'en général, lorsqu'ils sont avec les Nadeau-Villanueva, Marisol ne parle pas de Karl Vestergaard à Raphaël. Ou du moins, elle ne le fait pas lorsque leurs enfants sont là pour les entendre.
La jeune fille a bien ressenti le malaise de monsieur Vestergaard à les avoir dans la boutique de son épouse, Lucie, Matthieu et elle. La perspective que monsieur Vestergaard interdise à ses enfants de les fréquenter l'attriste, mais en même temps, leurs parents ne seront certainement pas là pour contrôler leurs amitiés une fois à l'école.
Liane trouve que Kris ressemble un peu à son père parce qu'il est très grand pour son âge et qu'il fait preuve du même genre de retenue. Monsieur Vestergaard à l'air très sérieux et froid et Liane l'imagine mal être ami avec la pétillante Marisol et Raphaël. Son père est silencieux, certes, mais c'est un passionné et dès qu'il se met à raconter une histoire, ses mots prennent vie. Liane sait qu'il a déjà travaillé pour la Sûreté Magique du Québec, il y a parfois de ces anciens collègues qui viennent lui rendre visite à l'Anse-à-l'Orignal et qui tente de le convaincre de reprendre le travail, mais Raphaël refuse toujours, prétextant que son métier d'écrivain le satisfait parfaitement.
Il ne parle jamais de la raison pour laquelle il a quitté la SMQ, mais lorsque ses enfants constatent la douleur au fond de ses yeux, ils se doutent que ça n'a pas dû être facile. Depuis, il a transformé ses talents de conteur en un nouveau métier. Il a commencé par écrire des livres pour enfants et s'est aussi lancé dans la littérature pour adolescents et pour adultes. Depuis quelques temps, il travaille sur un recueil de mémoires qui mettra à l'écrit les histoires racontées par les Anciens du peuple des Sentinelles. C'est un projet qui lui a été inspiré par les pertes de mémoires de son grand-père.
Ce n'est pas un projet évident car plusieurs Anciens pensent que si les écrivains mettent toutes les histoires à l'écrit, les jeunes n'iront plus les visiter pour les écouter et la tradition orale se perdra. Liane ne croit pas que ce soit possible. Certes, elle aime bien lire les histoires de son père, mais elle aime encore davantage s'asseoir près du feu avec Lucie, Matthieu et ses cousins aux pieds de kukum et l'écouter raconter. Sa vieille voix la transporte dans ses souvenirs et l'espace d'une soirée, le temps s'arrête et se tord, lui faisant vivre de grandes et de petites aventures.
— LIANE! Oh mon dieu, Liane!!!
La voix de Darcy, pleine d'enthousiasme la fait sursauter, la sortant de ses rêveries. Elle était tellement loin dans sa tête qu'elle ne l'a jamais entendu arriver jusqu'à ce qu'il l'interpelle.
Puisqu'elle le connaît à peine, Liane a du mal à déchiffrer son expression. Ses yeux verrons sont écarquillés et brillants et un drôle de rictus à la fois heureux et paniqué lui déforme le visage tandis qu'il l'enveloppe dans ses bras et la soulève de terre en exécutant une danse ridicule.
Pour une raison qu'elle ne peut expliquer, il est pieds-nus et ses espadrilles cognent contre ses reins avant qu'il les lâche pour mieux serrer son amie contre lui.
— J'ai vu... j'ai vu!... c'était incroyable!
"On dirait que je vais devoir attendre qu'il se calme", pense Liane, s'agrippant de son mieux aux frêles épaules de son ami. Darcy pousse des exclamations étranges et dit des mots qui ne font aucun sens, en tout cas, pas dans l'ordre qu'il les lance.
— Requin... choisi... fleurs dans les cheveux... peur qu'il l'ait avalée... neige... phoques, plein de phoques!
— Darcy, tu m'écrases, dit péniblement Liane, tentant de le repousser gentiment.
Subitement, les paroles de Liane le ramènent sur Terre. Il s'écarte, la tenant par les épaules les bras étendus, l'air ahuri. En général, la petite taille de Liane ne la dérange pas. Elle aime bien être la plus petite car cela signifie qu'elle a pu faire des choses de petite fille plus longtemps que les autres, comme se faire transporter sur les épaules de son père ou de son oncle Rob, ou encore grimper sur le comptoir pour regarder et aider sa tante Gaby à cuisiner. Mais d'autres fois, elle a l'impression que sa petite taille et sa légèreté encouragent les plus grands à la considérer comme leur poupée.
— Excuse-moi! J'ai... je suis désolé, balbutie Darcy, s'empourprant.
— Ça va, Darcy, lui répond Liane, attrapant son bras pour qu'il la laisse aller. C'est mon tour d'aller aux Jardins.
Darcy est clairement encore à moitié là-bas dans sa tête. Ça prend un moment avant que ce qu'elle lui dit n'arrive à son cerveau. Contrairement à avant le dîner sur la Place, il n'y a aucune panique dans son regard mais plutôt une sorte d'émerveillement rêveur.
— Lotus FierTrèfles a dit que je suis un Sorcier, Liane. Mais nous aurons le temps d'en reparler plus tard, n'est-ce pas?
Ça y est. L'inquiétude et la timidité de ce matin reprennent un peu leurs droits. Liane serre gentiment sa main dans la sienne, lui faisant un sourire. Elle l'aime déjà, son nouvel ami Darcy.
— Bien sûr qu'on pourra en reparler! J'ai déjà hâte, dit-elle. Je dois y aller. J'espère qu'on pourra se dire au revoir avant que vous repartiez pour la ville?
— Ça va dépendre de Sandy, répond l'adolescent, le sourire aux lèvres.
Liane a confiance de revoir son nouvel ami. Elle a vu partir Lucie, Luna et Sandy avec des gars de leur classe, alors elle doute fort qu'elles soient prêtes à rentrer de sitôt.
Darcy ramasse ses espadrilles et se glisse dans la ruelle alors que Liane s'approche de la grille fleurie. Elle s'apprête à laisser tomber son médaillon dans la jarre de droite lorsqu'Anya Vestergaard apparaît près d'elle, tenant une baguette magique à deux mains, les yeux écarquillés d'effroi et la bouche tremblante. Elle ne remarque pas Liane lorsqu'elle la contourne, s'écrase sur un banc et fond en larmes, laissant tomber sa belle tête blonde entre ses genoux.
Liane a envi d'aller vers elle. Elle n'aime pas voir les gens tristes et même si Anya est une amie de sa cousine Rosie, elle veut essayer de la consoler.
Liane a du faire un mouvement ou un bruit quelconque car subitement, Anya lève la tête et se retourne vers elle,.
"Comment trois paires d'yeux partageant les mêmes teintes peuvent-elles être aussi différentes?" se demande Liane, pétrifiée d'horreur. Astrid Vestergaard lui a donné l'impression d'être une mère douce et compréhensive qui aime ses enfants. Même la distance et cet indéchiffrable sentiment qu'elle perçoit dans les yeux de Kristian pâlit en le comparant à la haine qu'elle lit au fond des prunelles d'Anya Vestergaard. Ce sentiment violent et intense lui fait froid dans le dos et Liane ose à peine se retourner pour laisser tomber son médaillon dans la jarre et pénétrer dans les Jardins. À ce moment précis, Anya Vestergaard la terrifie.
☪️ ☪️ ☪️
— Fais bien attention, ma puce, lorsque tu seras à l'école en septembre. Les émotions que nous ressentons peuvent influencer la magie autour de nous. Et même celle que nous manions peut se voir modifiée par une intention mauvaise ou mal dirigée.
Papa m'avait emmenée faire une course avec les Gardes. C'était l'hiver dernier, lorsque nous avions fait mon inscription à l'École Barbe-Hallay. Je supposais qu'il avait offert les mêmes explications à Lucie et Matthieu avant leur Secondaire 1.
— Ces émotions peuvent même affecter les résultats que nous essayons d'obtenir de façon imprévisible. Chaque Magicien possède son approche individuelle et les prochaines années te serviront à trouver la tienne.
☪️ ☪️ ☪️
"C'est bien le moment de me souvenir de ça", pense amèrement Liane au moment où sa main agrippe la poignée ouvragée du portail de fer. "Peut-être n'est-il pas trop tard?" Elle tente de chasser le regard haineux d'Anya Vestergaard de son esprit alors que la voix spectrale - n'est-elle pas plus menaçante que ce matin ? - l'invite à entrer, lui rappelant de ne prendre que ce qui lui est destiné.
Il est évidemment trop tard.
Le vide l'avale d'une seule bouchée, alors que la main glaciale de la terreur enveloppe son coeur dans ses serres cruelles. Pendant un moment, Liane a tellement peur qu'elle ne voit ni n'entend plus rien. Elle hurle, ou du moins, elle croit qu'elle hurle, souhaitant de toute son âme que cette indicible terreur lui sorte du corps. Elle tend les mains, espérant trouver quelque chose à quoi se raccrocher et des voix s'infiltrent dans sa tête.
☪️ ☪️ ☪️
— Ne fais pas ça! On peut négocier.
Une supplication, pleine d'une profonde douleur, comme une blessure mortelle qui paralyse.
— Il est trop tard pour négocier! crache une voix emplie d'un dédain sans nom. Laisse-moi partir, il ne lui arrivera rien.
Des larmes, de la peur, mais aussi une grande colère pleine de détermination, aussi froide que le plus froid des hivers. Cette voix a déjà été chaude et rassurante, mais la colère a tout effacé.
— S'il te plaît, descends. On va parler.
Des cris, des hurlements. Un grognement bestial et soudain, le vide, la chute.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top