Chapitre 7 (partie 1)

Coucou,


Ce chapitre est long dans mon ordi, alors il sera séparé en plusieurs parties.


Je vous avertis également que ça ne va pas toujours très bien dans la tête de Kristian et qu'il est mention (tout délicatement) d'automutilation dans ce passage.


Voici donc le début.


Bonne lecture!


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Chapitre 7 (partie 1)


Kristian a énormément de choses à penser alors qu'il se dirige vers le portail magique des Jardins aux Trésors des FierTrèfles. Personne ne s'entend sur le nom de cet endroit. Les Trésors, les Jardins, les Jardins aux Trésors, tout ça est pour le moins confus.

Naturellement, étant originaire de Kakinanga, Kristian est déjà passé plusieurs fois devant cet endroit au fil des ans. Située à quelques portes de la Librairie Astrid, entre un salon de coiffure et une boulangerie dont les odeurs de pains frais, de viennoiseries et de produits capillaires se mélangent en un parfum un peu écoeurant, l'allée étroite couverte de pavés arrondis semble aller nulle part et partout en même temps.

En progressant dans l'allée d'un pas déterminé, Kristian se dit qu'il aurait apprécié que tout les parfums de la ville disparaissent afin de garder en tête l'odeur et la saveur des cupcakes qu'Astrid et Marisol ont sorti en guise de dessert.

— Les Cupcakes de l'amitié! se sont exclamés tous les adolescents en même temps.

Liane et Kristian ont échangé un regard amusé, réalisant que cette tradition, engendrée par leurs parents a certainement inclus leurs pères à une certaine époque.

La coutume veut que les meilleurs amis partagent des cupcakes en les coupant en quarts ou en tiers et en mélangeant toutes les mini-parts afin de reconstituer un cupcake composé d'un peu du gâteau de ou des autres. Kristian a proposé de partagé avec Tommy car Liane a décidé qu'elle attendrait Darcy pour prendre son dessert. Elle a réservé un cupcake aux framboises et un aux bleuets que Matthieu et Tommy ont bien essayé de lui dérober pour la taquiner.

Karl a eu l'impression de voir un fantôme lorsque Lucie a fait tournoyer le contenu de trois assiettes avec une aisance de mage élémentaliste héritée de Raphaël. Raph a dû apprendre ce petit tourbillon spectaculaire à ses enfants.

Kristian a remarqué l'air pétrifié de son père et, plus que jamais, il se demande ce qui a bien pu les éloigner, monsieur Kapesh et lui. Il lui semble que sa vie aurait été moins solitaire si ces trois-là en avaient fait parti. Il a encore une semaine pour faire des recherches avant de se rendre à l'école et qui sait, peut-être qu'une fois à Barbe-Hallay, il trouvera des réponses à ses questions.

Arrivé à la grille, il regarde une dernière fois le médaillon doré sur lequel se retrouve son nom et la directive de le jeter dans la jarre de droite. Il remarque l'énorme pierre qui repose à côté de la jarre de gauche et sourit en constatant que quelqu'un lui a dessiné des yeux et une bouche.

Sans plus attendre, il laisse tomber sa pièce dans la jarre de droite et sursaute lorsqu'un visage apparaît entre les rosiers grimpants.

— Bienvenue dans nos Jardins, Kristian Vestergaard, dit une voix glauque sortant de nulle part et partout à la fois.

Dès que ses doigts entrent en contact avec la poignée ouvragée,une sensation de picotement envahis sa peau et il se retrouve dans un endroit ténébreux et poussiéreux.

Kristian n'est pas brave. Il le sait et bien que cette idée lui fait honte, il doit s'en accommoder. Il se considère même plutôt froussard et lâche. Cependant, il tâche toujours de cacher ses émotions car les brutes comme son cousin ont généralement tôt fait d'exploiter les faiblesses des autres.

Il ne voit pas a plus de quelques centimètres devant lui et se sent tétaniser. Il doit se ressaisir, il y a certainement quelque chose avec quoi il pourrait s'éclairer. À la limite, il connaît des runes lumineuses et il est assez sensible pour percevoir que l'endroit où il est atterri est plein d'énergie qui n'attend que d'être concentrée.

Fermant les yeux, il tente de reprendre le contrôle sur sa terreur en serrant les poings le plus fort qu'il peut.

"Zen, Kris, pense zen..." se sermonne-t-il.

Ça ne fonctionne pas. Il a l'impression que l'air rance se raréfie et qu'il perdra bientôt conscience s'il ne se ressaisit pas.

"C'est ridicule. Les Collecteurs ne spatioporteraient pas des enfants dans des endroits dangereux!"

"Pissou, bébé lala", fait une deuxième voix dans sa tête, un peu trop semblable à celle de Reinhart pour que ça lui rende service.

"Les Pierres d'Étherium servant à atteindre le Spatioportage font parti de la panoplie d'outils à la porté des magiciens pour effectuer des déplacements sur de longues distances", récite mentalement Kristian. Il s'agit d'une de ses meilleurs techniques pour reprendre le contrôle sur lui-même. Sa mémoire phénoménale lui servant à engranger toutes sortes d'informations. "Vestergaard Industries en fait la commercialisation, l'installation et le développement. L'Étherium est une pierre d'origine volcanique chargée d'énergie sur lesquelles des runes sont gravées, afin de focaliser la magie spatiale et temporelle. Il existe des pierres individuelles que les Magiciens transportent sur eux, leur permettant de se déplacer instantanément d'un endroit à un autre dans un rayon de quelques kilomètres, je n'ai pas les détails précis en mémoire, je suis encore trop effrayé."

Puisqu'il s'est rongé les ongles jusqu'à la racine à cause de l'anxiété créée dans l'attente de cette fameuse journée de magasinage pré-année scolaire, Kristian n'arrive pas à s'infliger suffisamment de douleurs pour se ressaisir. Par réflexe, il relève ses manches et tente de son mieux de se griffer l'intérieur des avant-bras, toujours en vain. Désespéré, sur le bord de l'hyper-ventilation, il fouille dans ses poches, peut-être a-t-il quelque chose qui pourra l'aider?

"Après les pierres individuels, il y a les cercles utilisés dans le Réseau de Transport Public Québécois. Généralement assez grandes pour que plusieurs personnes puissent grimper dessus en même temps, ces pierres nécessitent l'utilisation d'un cristal chargé d'énergie et d'un mot d'appel. Les Pierres de transport du Réseau Public se trouvent dans tous les foyers de magiciens de la province et dans des postes comme le Hall des Voyageurs de Kakinanga. Leur taille plus grande assurent une portée plus grande qui s'étend à la totalité de la province, du moins, je crois."

Il étouffe, il va mourir, c'est sûr! L'obscurité et le silence l'avalent petit à petit, bientôt, il s'évanouira et s'éteindra sans que jamais personne ne s'en aperçoive.

"Les voyages internationaux se font à l'aide de sphères d'Étherium où les magiciens entrent en groupe. Des opérateurs activent ensuite la structure runique de l'extérieur, entrechoquant de fines tuiles d'Étherium, ce qui ajoute des ondes sonores à la magie de l'Étherium et fait en sorte que les..."

ENFIN! il a trouvé! Il ne va pas mourir, il est sauvé.

Kristian ignore pourquoi il a gardé ce petit bout de verre, mais maintenant, il est soulagé de l'avoir fait. L'étrange avait attiré son attention un matin la semaine précédente, lorsqu'il se promenait sur la rive du lac près de chez lui. Les reflets arc-en-ciel qu'il projetait avaient capté son regard et Kristian s'était dit qu'il pourrait l'ajouter à sa collection de curiosités.

L'effet est instantané.

La morsure du verre sur sa peau traverse son corps, repoussant toute l'anxiété et surtout, exorcisant la peur. Sa respiration s'apaise et il ouvre à nouveau les yeux alors que le sang perle sur son poignet en gouttelettes rassurantes.

La vivacité de la coupure ancre son esprit et Kristian perçoit une surface plane à quelques dizaines de centimètres de lui.

Rassuré, il tend le bras et dessine, à l'aide d'un peu d'énergie magique, une rune de lumière.

La rune n'éclaire pas très loin, mais après tout ce temps passé dans les ténèbres, il lui semble que cette lumière lui brûle carrément les yeux. Détournant le regard, il perçoit d'immenses bibliothèques faites d'un matériaux sombre.

Incertain sur la marche à suivre dans cet endroit, Kristian avance lentement, posant de nouvelles runes lumineuses au fur et à mesure de sa progression. Un épais tapis poussiéreux étouffe l'écho de ses pas tandis qu'il progresse de manière de plus en plus assurée, examinant des tablettes de pierres gravées de symboles qui lui sont inconnus, des rouleaux de papyrus si anciens qu'il ose à peine respirer en leur présence de peur qu'ils ne tombent en poussière, des quipus incas et encore d'autres méthodes d'archivages utilisées par les humains depuis la nuit des temps sont entreposés dans cet endroit.

"Si je marche sur un tapis, je dois forcément me trouver à l'intérieur, ce qui veut logiquement dire que je finirai bien par aboutir à un mur." raisonne Kristian. "Je me demande vraiment où est-ce que j'ai atterri et ce que je dois faire ici?"

Après encore quelques pas, des flambeaux en bouts de rangées s'allument d'eux-même, probablement alertés par les runes de Kristian. Des flammes de toutes les couleurs s'étendent à perte de vue dans cette gigantesque salle d'archives. Maintenant qu'il voit bien où il va, il se laisse emporter par son enthousiasme et sa passion des livres et des antiquités et poursuit son exploration, le sourire aux lèvres.

S'arrêtant près d'une bibliothèque terminée d'un flambeau à la flamme rose, Kristian laisse errer ses doigts sur les reliures de factures plus modernes de toute sorte de livres. Dans cette section, on retrouve des romans, des essaies ainsi que des biographie. Le prénom "Ayato" attire momentanément son attention, mais pas autant que le magnifique piano à queue qui se retrouve sur la couverture..

— Tien, comme c'est intéressant! fait une voix derrière lui, le faisant sursauter.

Kristian était tellement absorbé par son exploration qu'il sursaute comme un voleur pris sur le fait. Il sent son bout de verre lui mordre la paume et il réalise qu'il a oublié de le remettre dans sa poche.

Il se retourne vers la voix, les bras levés de manière à se protéger d'une éventuelle menace.

— Personne, depuis au moins vingt ans n'a fait ressurgir le Coeur de la Mémoire. En fait, je croyais que nous l'avions perdu.

— Le quoi? balbutie Kristian, encore complètement affolé.

— Le Coeur de la Mémoire. Il contient tous les souvenirs de tous les êtres vivants qui ont vécu dans cet univers depuis la nuit des temps. Toi aussi, un jour, tu te retrouveras ici. Enfin, pas strictement toi, mais ta mémoire.

Se sentant ridicule, Kristian baisse les bras. Visiblement, cette personne ne lui veut aucun mal. Il est également bien trop curieux et intéressé pour avoir peur.

La personne qu'il découvre est de stature androgyne. Kristian ne pourrait dire s'il s'agit d'un homme ou d'une femme. Iel porte une robe rappelant la tenue d'un moine, un tissus simple et sans doute beaucoup plus utile que tout autre chose, d'un gris anthracite. Sur sa tête pousse une chevelure hirsute d'un ton impossible à définir dans l'éclairage changeant et multicolore des nombreux flambeaux. Ce qui intrigue le plus Kristian à propos de cette personne n'est ni sa taille démesurée, ni ses traits sans âges mais plutôt les marguerites qui poussent dans ses cheveux.

— On m'appelle Coquelicot, dit-iel. T'a-t-on expliqué les règles du Jardin? À l'époque, les magiciens qui se retrouvaient ici avaient tendance à tomber directement, sans introductions formelles.

— J'ai bien peur que ce soit encore le cas, répond Kristian, ne se souvenant pas d'avoir entendu quelque règlement que ce soit à part la recommandation de ne rien tenter de prendre qui ne lui soit pas destiné. Si ça avait été le cas, je m'en souviendrais, j'ai une excellente mémoire.

— Bon, j'ai pensé que peut-être la réapparition du Coeur de la Mémoire voulait dire que ce problème avait été résolu. Peu importe! C'est très facile. Ne prend rien qui ne t'appartient pas car tu risques de le regretter amèrement. Tu finiras par trouver ce que tu cherches, ou bien c'est cette chose qui te trouvera.

Eh bien, finalement, on lui avait tout expliqué.

— Cet endroit ne me semble pas être propice à trouver des focus magiques, commente Kristian, regardant autour de lui, dubitatif.

En l'entendant, Coquelicot sursaute et frappe son front d'une longue main pâle, quasi fantomatique.

— Oh! Nom d'une punaise des parchemins! s'écrit-iel. Je te trouvais jeune pour chercher la mémoire d'un disparu. Je suis désolé, c'est ta taille qui m'a induit en erreur. La dernière fois que j'ai vu de jeunes humains apprentis, ils étaient beaucoup plus petits que toi. Encore désolé.

Et, tout bonnement comme ça, avant que Kristian n'ait le temps de dire quoique ce soit, ou encore prendre son souffle, le sol s'ouvre sous ses pieds et il tombe!

... Il tombe longtemps, le souffle coupé, son corps paralysé de terreur. »

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