Deuxième défi : La Couille Abandonnée

                Entendre les hurlements faisait paniquer Antonio. En plus, se retrouver à dix mafieux pour un service d’urgence n’était pas confortable. Ici, vous pouviez être ce que vous vouliez, les infirmières ne vous laisseraient pas avoir le dessus. Mis à la porte du box de soin, il ne savait plus quoi faire. Tournant en rond, il se mordait la lèvre.

                Il avait oublié quelque chose. Cet affreux sentiment le poursuivait depuis l’arrivée de l’ambulance, mais il ne parvenait pas à mettre le doigt sur le problème.

                Lorsque le médecin ouvrit la porte du box à la volée, livide, Antonio fit un bond en arrière. Quoi ? Il était mort ? C’était ça ? Il était…

                -Nous devons le greffer de toute urgence. Avez-vous conservé le morceau dans de la glace ?

                -Le… Le morceau ?

                -Ma couille ! rugit son patron, Martino di Plaza, les mains agrippées sur le draps de l’hôpital. Où avez-vous mis ma couille, bande d’incapables !?

                Le temps parut se figer pour Antonio. Il vit le visage de son chef devenir rouge de rage, comme si une montée en puissance était sur le point de le faire exploser.

                -Vous avez abandonné ma couille ! C’est la tienne ou la mienne, Antonio ! Va la chercher immédiatement !

                Inutile de dire qu’il partit comme un dératé.

                En un temps record il se jeta dans la Lamborghini empruntée à la hâte à son patron. Entre son testicule et sa voiture ? Le choix de Mario serait évident !

                Ecrasant la pédale de l’accélérateur, Antonio s’enfonça dans la nuit, le cœur battant la chamade. Une heure plus tôt, tout se passait encore bien. Ils avaient attrapé des petites racailles cherchant à vendre de la drogue sur leur territoire. Ils leur avaient fait passer un sale quart d’heure. Quand ils avaient voulu annoncer la nouvelle au chef, dans sa grande villa avec vue sur la mer, un hurlement avait retenti.

                Qu’avaient-ils découvert dans la chambre ? Mario, la main sur ses attributs, sa maitresse disparaissant par la fenêtre avec un sourire vengeur. Elle lui avait tranché son testicule ! L’horreur avait saisi tous les hommes présents. Comment une telle cruauté était-elle possible !? S’en prendre aux délinquants, vendre de la drogue, des armes, ça allait. Mais toucher aux testicules du patron !? Elle était folle furieuse, cette nana !                     

                Antonio freina brutalement devant la villa, projetant du gravier de partout. La fontaine glougloutait gaiement, tout le bâtiment était vivement éclairé. Le mafieux s’engouffra à l’intérieur, monta les marches de marbre blanc quatre par quatre. La chambre ! Le testicule de son chef devait toujours être dans le lit.

                Il ouvrit la porte à la volée… Et se figea.

                Un inconnu en costume blanc se trouvait penché au-dessus des draps de satin. Il l’observa d’un air surpris de sous le rebord de son chapeau blanc, sa main gantée de noir tenant une pincette avec…

                -Pose cette couille ! rugit Antonio.

                Avec un sourire narquois, le mafieux en blanc lâcha le morceau de son chef, qui tomba dans un sac isotherme. C’est à ce moment-là qu’il perçut le cliquetis de sécurités que l’on ôtait. Trois autres hommes se trouvaient là, pointant sur lui leur fusil à pompe.

                -Nous avons eu vent de ce léger… incident, fit l’homme à la pincette. Nous ne pensions pas que vous abandonneriez son attribut dans votre précipitation !

                Ils éclatèrent de rire. Antonio serra les poings, son cœur ralentissant progressivement. Se calmer était la clé de la survie dans ce milieu. En observant les hommes, il donna un coup de pieds au derrière de son cerveau. Il ne pouvait pas les laisser partir avec le testicule de Mario. Sinon, ce serait le sien qu’il… Non, il préférait ne pas y penser.

                Il était pour le don d’organe, mais il y avait des limites.

                -Vous avez payé sa maitresse, n’est-ce pas ?

                -Effectivement. Deux mille euros pour mutiler les bijoux de famille de ton patron. Nous allons pouvoir demander une coquette rançon, maintenant !

                Il secoua le sac isotherme, avec un nouveau rire de dément. Antonio sentit son visage perdre de ses couleurs. Ils avaient planifié de… Les monstres ! Les malades mentaux ! Comment pouvait-on planifier d’arracher les… De… Quelle cruauté !

                -Occupez-vous de lui, fit l’homme en blanc. Je contacterai Mario moi-même.

                Deux des mafieux à fusil à pompe restèrent dans la chambre. Les autres passèrent à côté de lui avec des sourires moqueurs. Antonio prit une grande inspiration… Et arracha le sac isotherme des mains du porteur.   

                Aussitôt, les doigts appuyèrent sur les gâchettes, balles fusèrent. Il se jeta hors de la chambre de Mario, refusant de céder à la panique. Le plâtre éclata derrière lui, des cris retentirent. Il fit un roulet-boulet, se remit sur pied dans la foulée.

                -Cretino ! hurlait l’un d’eux. Il a le testicule ! Vous ne devez pas l’abimer !

                Il l’avait ! Il aurait presque sourit en sautant par-dessus la balustrade de l’escalier. Il atterrit avec la souplesse d’une brique en bas, rebondissant sur le canapé pour s’écraser sur la table basse en verre. Cette dernière céda sous son poids, achevant sa chute.

                Bon. Il devrait peut être prendre des cours de cascadeur, histoire d’éviter ce genre d’incident.

                -Il est là ! cria l’homme en blanc, un étage plus haut.

                Cela suffit à faire remettre Antonio sur ses pieds. Bon, tout de suite après, il tourna en rond comme un canard à la tête coupé, le sec isotherme serré contre son torse. Par-là ? Non, par là… Merde, il devait s’enfuir par où !?

                -Antonio !

                Il sursauta en entendant la voix. Debout dans l’encadrement de la porte vitrée, une femme armée d’un pistolet lui faisait signe de le rejoindre.

                -Santa Maria ! Comme je suis heureux de te voir ! cria-t-il.

                -Moi aussi, répondit-elle en tirant sur les mafieux.

                L’un d’eux tomba tête la première dans les escaliers, avec un « crac » sonore à l’atterrissage. Oups.

                -Viens vite ! Ma voiture est là-bas !

                Maria l’attrapa par le poignet, l’entraina dans les jardins de Mario. Les branches des arbres fouettèrent les joues d’Antonio, il tomba dans une flaque d’eau, mais au final, ils atteignirent le mur du fond de la propriété. Cinq mètres de haut. Ils étaient bloqués.

                -Qu’est-ce que tu fais ? siffla Maria. Par-là !

                Oh oui ! Il y avait un escabeau ! Elle avait tout prévu, c’était fantastique. Bientôt ils s’enfermèrent dans sa voiture, une vieille 4L jaune poussin.

                -Merci, Maria, dit-il tandis qu’elle démarrait comme une folle. Sans toi, je serais probablement mort.

                -Derien. Une petite amie, c’est fait pour ça.

                Elle prit le virage de façon un peu violente, plaquant Antonio contre la portière. Surtout, ne pas lâcher le sac, surtout… Il poussa un glapissement aigue en voyant un autre véhicule leur foncer dessus, par une rue adjacente.

                -Accélère !

                Elle appuya sur le champignon, de telle façon que le fou furieux les manqua de peu. Mais il les prit en chasse, l’air particulièrement belliqueux. Le mec en blanc ! Blanco ! Il voulait récupérer la couille de Mario !

                -Antonio, il faut qu’on parle.

                -Quoi ? Maintenant ? Ecoute, Maria, je t’aime et…

                -Pas de ça, crétin ! Donne-moi ce sac.

                Hein ? Il resserra ses bras autour, comme un gosse à qui on voulait piquer ses bonbons.

                -Pourquoi ? demanda-t-il d’un air soupçonneux. Tu ne sais même pas ce qui il y a dedans.

                -Je suis venue ici exprès pour ça. Donne-moi la bourse de Mario.

                -Mais pourquoi ça t’intéresse ? On est ensemble ! C’est mon patron !

                Sans freiner, elle tourna son beau visage vers lui. Brune, les yeux bleus, elle l’avait ensorcelé dès leur première rencontre. Ses seins plantureux avaient bien aidé, aussi. Mais jamais encore il n’avait contemplé un tel masque de colère chez une femme.

                -Je fais partie du Front de Libération des Pingouins d’Occident. Donne-moi cette couille, Antonio ! Avec la rançon, je pourrais sauver tous mes protégés !

                -Jamais !

                -Antonio ! Pour notre amour ! 

                Il la regarda. Lui sourit. Elle en fit de même, rassurée.

                -C’est mon testicule ou toi, ma chérie.

                Se jeter hors d’une voiture en marche était toujours une mauvaise idée. Mais le faire avec un fou furieux qui vous poursuivait en Ferrari, c’était tout autre chose !

                Antonio atterrit sur le capot rouge pétant. La joue appuyée contre le pare-brise, il assista à la stupeur de l’homme en blanc. Qui freina brutalement. Nouveau décollage… Pour rouler sur le bitume, se prendre une poubelle et finir la tête dans un petit pot pour bébé.

                Nuit à la c…

                -Ha ha !

                Le bruit de marche arrière lui fit relever le nez. Maria faisait marche arrière ! Il devait absolument… Le sac ! La couille ! Il l’avait perdu dans sa chute ! Affolé, il fouilla la route du regard… Pourquoi découvrir Blanco se précipiter hors de sa voiture. Son précieux se trouvait entre eux deux.

                -A moi la ran…

                Le petit pot pour bébé percuta le front du mafieux en blanc, le faisant s’écrouler à mi-chemin. Avec un sourire de victoire, Antonio claudiqua jusqu’au sachet, le ramassa.

                -C’est ma c…

                Sa tirade de victoire fut coupée net par le cul d’une voiture lui rentrant dedans. Etalé par terre, il se dit qu’il était quand même sacrément solide. Soit c’était ça, soit l’adrénaline maintenait tous les morceaux en place, car il n’avait pas mal.

                Mais il était complétement sonné.

                Un claquement de talon lui fit légèrement tourner la tête. Maria ramassa le sac isotherme avec élégance. Un clin d’œil, un sourire, et elle remonta dans sa 4L, hautaine.

                La sale garce ! Il n’allait pas abandonner maintenant ! La vieille voiture commença à s’éloigner paisiblement. Non. Non, non, non et non ! Il ne perdrait pas sa couille pour un tas de Pingouins Occidentaux !

                Il prit place derrière le volant de la Ferrari du mafieux en blanc, toujours inconscient par terre, la rage au ventre. Les chevaux rugirent lorsqu’il appuya sur la pédale d’accélérateur. Les yeux rivés sur la 4L, il fonça dans les rues, jusqu’à la rattraper (ce qui, entre nous, ne fut pas bien long. Entre une Ferrari et une 4L, il n’y a pas photo, tout de même). Il se porta jusqu’à sa hauteur sur une route à double sens, baissa la vitre coté passager.

                -Maria ! rugit-il. Maria Antonnella Pétronnela, rends-moi cette bourse !

                -Jamais ! Elle est à moi !

                -Tu l’auras voulu !

                Il percuta le coté de sa voiture, l’envoya dans le décor. Antonio entendit un vague « pour les Pingouins ! », avant qu’elle ne finisse sa course dans la devanture d’un sex-shop. C’est dans une avalanche de godmichets et de boules de geisha qu’il retrouva Maria, à moitié consciente.

                -A moi, siffla-t-il en arrachant le sac isotherme à son ex-petite-amie.

                Il boita jusqu’à la Ferrari, la lueur rouge du sex-shop brillant de mille feux derrière lui. Dix minutes plus tard, le front en sang, la moitié de son corps contusionné par ses multiples atterrissages ratés, il arriva de nouveau aux urgences de l’hôpital. Là, un des hommes de Mario écarquilla les yeux en le voyant sortir de son véhicule.     

                -Antonio ? Mais…

                -Je dois voir le chef, gronda-t-il d’une voix basse.

                -Heu… Oui. Je t’accompagne.

                Le garde jeta un nouveau coup d’œil à la voiture, avant qu’ils ne s’engouffrent dans le service.

                -Comment as-tu fais pour passer d’une Lamborghini à une Ferrari ?

                -Longue histoire, mon ami. Longue histoire.

                Dans le box, il découvrit son chef en train de menacer d’un pistolet le médecin, tout en hurlant des insultes en italien. L’entrée d’Antonio fit tourner toutes les têtes dans sa direction, les yeux s’écarquillèrent. Le sauveur était là.

                -J’ai votre couille, monsieur.        

                ****** 

                Bon… J’espère que cette histoire vous a plu ^^ Désolée pour la constante répétition du mot « Couille », mais mon champ lexical est bloqué à « bourse » et « testicule » ! Sinon, voilà, ce titre défi me vient de ma famille, et j’ai mis un bon bout de temps avant de trouver quelque chose. Je voulais partir sur une guerre entre anges et démons pour garder la couille d’un Saint, mais je me suis dit que c’était un peu trop bizarre (si j’ose dire). Donc voilà le résultat ! Il n’y a plus du tout d’anges et de démons, mais j’ai bien rigolé en l’écrivant ^^

                Bonne continuation sur Wattpad… Et j’espère à un prochain défi, ou pour une autre de mes histoires !

       

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