Ils étaient enfin arrivés à Penarth. Leur père leur avait souvent parlé de la rue raide qui menait à la mer et du petit port qu'il était parti voir quand la famille d'Araxie vivait encore en Arménie.
Araxie attendait avec impatience de descendre de la voiture. Quand il y avait des sorties avec les Yeramian, elle sentait toujours une espèce d'excitation bizarre à la perspective de passer plus de temps en compagnie de Zohrab, même s'il l'ignorait la plupart du temps. Elle vérifia discrètement dans le reflet de l'écran de son téléphone que son mascara n'avait pas coulé.
Alors qu'elle attendait sur le côté du parking que son père et sa mère descendent, elle aurait voulu faire une seule chose. Courir à la rencontre des Yeramian. Pourtant, personne ne pouvait deviner les sentiments qu'elle nourrissait à l'égard de Zohrab, pas même lui.
Elle aurait tellement aimé qu'il manifeste rien qu'un semblant d'interêt à son égard... Que de temps en temps un sourire ou un regard espiègle lui montre qu'elle n'était pas seule dans cette désillusion. Si seulement... Ils feraient un joli couple, non? Elle n'était pas si moche que ça en plus, pourquoi est ce qu'il ne s'intéressait pas à elle?
Après avoir attendu ce qui semblait une éternité, ses parents allèrent rejoindre Zaven et sa femme et commencèrent à marcher en direction du port.
— Les enfants, on va aller voir la mer de l'autre côté, vous voulez venir?
— Non, répondirent Mihran et Lévon. On va rester sur le port regarder les bateaux.
Seule comme à son habitude, Araxie observa les bateaux et observa le petit puits sur la place. Il y avait du verglas sur les rebords.
Pourquoi est-ce que Zohrab ne venait pas lui parler enfin!
Finalement, à son propre étonnement elle fit le premier pas et alla le rejoindre. Il était debout sur le quai, observant l'eau en contrebas. Il n'y avait pas de barrière. C'est dangereux, réfléchit-t-elle. Et si il tombait?
— Je m'ennuie un peu, haha, dit-elle se maudissant intérieurement, s'arrêtant à quelques mètres de lui.
Elle espérait que Mihran et Lévon n'allaient pas la remarquer. Que Zohrab ne la traiterait pas comme de la boue.
— Coucou, dit-il en souriant. ça fait longtemps qu'on ne s'est pas parlé!
Elle jubilait. C'était bien au-dessus de toutes ses attentes.
— Alors, tu as fait de nouveaux dessins? demanda-t-elle en le fixant dans les yeux.
Ses yeux, elle aurait pu s'y perdre.
Elle peina à briser le contact. Apparemment, il y avait quelque chose entre eux?
— Oui, dit-il, j'ai beaucoup d'inspiration en ce moment.
— Est ce que je pourrais les voir? Je trouve que tu as beaucoup de talent, ajouta-t-elle.
Il regarda au loin, fixant les maison dans les montagnes.
— Pourquoi pas, répondit-il simplement.
Elle s'attendait à un compliment en retour, une remarque légère sur elle, mais rien ne vint. Le silence s'étira, et elle eut soudain l'impression de s'être rendue ridicule. Pourquoi se donnait-elle autant de mal alors qu'il semblait si indifférent ?
Elle fixa ses deux mains de nouveau.
Un mouvement dans l'eau en contrebas attira son attention. Sans doute un vilain poisson qui se nourrissait de poubelles. Elle réalisa d'un coup la hauteur à laquelle ils se trouvaient. Un soudain vertige l'envahit.
— Araxie. Je sais que tu éprouve des sentiments pour moi, mais...
Surprise, elle se retourna vers lui et glissa sur le verglas. Zohrab tenta de lui rattraper le bras mais sans succès, Araxie tomba la tête la première dans l'eau.
D'un coup, elle sentit chaque centimètre de son épiderme glacé, dans un choc thermique qui la fit trembler de la tête aux pieds.
— Aidez-moi! Aidez-moi! cria-t-elle d'une voix stridente.
Zohrab s'empressa de descendre les escaliers qui menaient à la berge où les petits vaisseaux débarquaient. Il sentit son estomac se nouer. Il l'avait vue glisser, mais tout s'était passé si vite! Pourquoi je n'ai pas été plus vigilant ? Pourquoi est-ce que je l'ai appelée aussi brusquement?
Il voulait seulement lui dire ses vrais sentiments envers elle...
— Lévon! cria-t-il. Lévon! Viens tout de suite!
Lévon qui était occupé à nourrir des oiseaux et qui avait été alerté par les bruits se doutait que quelque chose de grave était en train de se produire.
Mihran quant à lui était allé aux toilettes. Il courut vers Zohrab, pour découvrir sa sœur dans l'eau, à sa plus grande surprise. Sans chercher à comprendre, il s'écria: "Je vais chercher mes parents!"
— Non, s'écria Zohrab, reste ici avec moi, comment je vais faire pour la remonter de l'eau, tout seul?
Mais Lévon était déjà parti.
Araxie qui était à moitié morte de froid replia ses jambes sur elle même dégoutée par l'eau sale qui lui rentrait dans la bouche et les narines, crachant et suffoquant. Son gros manteau, alourdissait et gênait ses mouvements et c'est avec difficulté qu'elle arriva à atteindre la berge.
Hélas, il n'y avait pas d'échelle et elle devait se hisser seule hors de l'eau. Paniquant, et d'un geste maladroit elle essaya mais retomba violemment et de tout son poids dans l'eau glacé, suffoquant s'étouffant presque.
Zohrab qui venait d'arriver, surpris de ne pas la voir à la surface, plongea les mains dans l'eau après quelques secondes de flottements. Il plongea les bras dans l'eau jusqu'aux avant-coude sans pourtant trouvé le corps d'Araxie. Pris de panique il chercha encore avant de toucher un doigt. Il avança son bras jusqu'à l'épaule et put saisir le poignet et avec toute la force, et aussi l'inquiétude qui l'habitait, il la remonta à la surface.
Quand elle émergea Araxie suffoquait, et peinait à respirer. Son visage était pâle, à la limite du violet et ses dents claquaient essayant de cracher l'eau immonde de détritus qui l'assaillait de toute part.
— Je ne peux pas nager, mon manteau est plein d'eau il me ramène vers le bas, distingua Zohrab entre ses claquements de dents.
A ce moment, Lévon revint.
— J'ai croisé Mihran en chemin et je suis revenu. Il va les alerter, dit-il essoufflé. T'as besoin d'aide?
— Oui, vite, viens m'aider.
Araxie fondit en larmes et en petits cris stridents. Ses doigts blancs n'arrivaient plus à se maintenir à la berge à cause du froid qui les engourdissait. Ses yeux étaient dilatés et effrayés et de gros sanglots l'étouffaient presque.
— Sors, moi de là, sors moi de là, sors moi de là, s'il te plaît, gémissait-elle d'une voix suppliante et perçante. Dans un sens, elle lui faisait vraiment de la peine. Ses grands yeux effrayés le regardaient comme la seule issue. S'il te plaît, cria-t-elle, aide-moi.
— Ne t'inquiète pas Araxie. Respire. Respire.
Je ne peux pas! Et elle éclata en sanglots.
— Araxie t'inquiète, c'est pas grave, on va te sortir de là, fis son jeune frère qui s'était approché.
Il tendit la main et attrapa son bras en essayant à grand peine de la remonter. Zohrab voyant qu'il galérait saisi l'autre bras d'Araxie.
— Arrêtez! cria-t-elle, vous allez me déboîter l'épaule. Il la lâchèrent et dans un grand plouf elle retomba. Elle émergea haletante. Lévon essaya une seconde fois de la hisser hors de l'eau sans grand succès.
— Zohrab fais quelque chose! Aide-moi! supplia-t-il.
Jusque là, Zohrab avait essayé de se maintenir un maximum à l'écart, peut-être par pudeur, peut-être par timidité, pourtant à ce moment-là, craignant pour elle, toute retenue sans alla d'elle-même. Quand il jeta sa veste sur le côté, il avait l'air d'avoir la situation sous contrôle.
Zohrab prit Araxie par les aisselles et essaya de la hisser hors de l'eau. En tant normal elle devait peser ses 60 Kg, mais à ce stade là elle était beaucoup plus lourde. encore une fois elle tomba dans l'eau.
Pourtant avec le sport qu'il avait commencé à faire, il savait qu'il pourrait la porter, si seulement elle ne glissait pas.
— Retourne toi mets toi dos à moi, lui ordonna Zohrab.
— Sortez-moi de là, sortez-moi de là! cria-t-elle d'une voix aiguë. Aidez-moi.
— Araxie, regarde moi.
Toujours grelottante, elle fixa ses grands yeux dans les siens. Puis éclata d'un rire hystérique.
— Oh non! Elle est partie en crise de nerfs, annonça Lévon.
— Araxie mets toi dos à moi! Dos à moi je te dis!
Il lui asséna une claque sur la joue et elle fondit en larme.
Zohrab fut surpris de sentir que chaque sanglot était comme une aiguille aiguisée qui transpersait son coeur. Une douleur physique qu'il n'avait jamais ressentie auparavant.
— Mets toi dos à moi, s'il te plaît Araxie, dit-il plus doucement.
Il la guida d'un mouvement de bras et elle se retourna. Il passa ses bras autour de son torse entoura sa poitrine et tira vers lui. Avec beaucoup de peine et d'efforts il y arriva. L'effort fut si soudain, qu'il fut propulsé en arrière avec Araxie sur lui.
Il sentit son pouls s'accélérer malgré lui.
Lévon aida Zohrab à se dégager.
Sortie de l'eau, Araxie avait toujours aussi froid et prit le vent comme une claque glacée. Elle avait l'air d'une misérable petite chose, grelottante et toute pâle. Ses cheveux qu'elle avait soigneusement brossés et apprêtés ce matin à la perspective de voir Zohrab avaient perdu tout leur volume et retombent en mèches poisseuses collé à son crâne.
— Lévon, tu peux l'aider à enlever sa veste? Faudra peut-être enlever son pull et ses chaussures...
— Et c'est bon! Je ne suis pas morte non plus, fit-elle un peu énervée.
Elle s'était suffisamment ridiculisée comme ça, et pourtant elle avait l'impression d'avoir vécu ce sauvetage comme un film, comme si elle avait été étrangère à une scène qui s'était déroulée sous ses yeux.
Elle essaya d'enlever son manteau, mais n'y arriva pas à cause de toute l'eau et aussi car il collait à son pull et était trop serré.
— Argh, s'énerva-t-elle en agitant les bras. J'ai froid et j'en ai marre! dit-elle avant de leur jeter à tous un regard noir. Pourquoi ça m'arrive que à moi des trucs pareils!
Zohrab se mordit les lèvres s'abstint de tout commentaire même si en temps normal il serait mort d'envie de la taquiner. Il regarda de l'autre côté. Elle avait un crush sur lui, elle mourrait de honte si en plus il la scrutait. La pauvre. Il serait mort de honte si la même chose lui arrivait devant Selana.
Lévon s'approcha de sa grande sœur et l'aida progressivement à enlever son manteau puis son pull.
Zohrab l'observa enlever son manteau. Ses vêtemenst étaient collés à son corps, soulignant ses formes, sa poitrine.... Il ne pouvait pas penser à ça maintenant. Zohrab ramassa sa propre veste et la tendit à Lévon.
— Tiens, mets lui ça!
Araxie ne protesta pas. C'est à ce moment-là que les parents déboulèrent sur le quai.
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