2 - SAMUEL.

Il fait nuit noire dehors et, réveillé prématurément par les petits ronflements de Warren, je profite de l'obscurité pour observer les lumières de Manhattan. La neige a cessé de tomber et une petite brise semble s'être levée. La cime des arbres ondule doucement, comme de grands fantômes veillant sur les avenues et les boulevards de l'île.

Jamais je ne me lasserai de cette vue. J'étais amoureux de Paris, de la vue époustouflante de la Tour Eiffel depuis les quais de Seine, mais j'aime encore plus New-York. Depuis que j'y ai posé mes valises, après avoir tout plaqué en France pour prendre un nouveau départ avec Warren, je me rends compte que je n'aimerais être nulle part ailleurs. C'est ici, chez moi, désormais.

Une tasse de thé bouillant à la main, je sirote mon breuvage tout en rêvassant, les yeux rivés sur l'East River que j'aperçois au loin. Les images de nos ébats récents avec Warren me reviennent en mémoire, et je me surprends à sentir encore la caresse de ses mains partout sur ma peau. Si l'on m'avait dit, la première fois que j'ai croisé son regard, qu'on en serait là aujourd'hui tous les deux je ne l'aurais pas cru.

J'ai pas mal morflé dans ma vie. Les quelques années avant notre rencontre ont été des plus chaotiques. Cette relation toxique avec mon ex, elle me bousillait et j'en garde encore des séquelles. Lorsque Warren et moi nous sommes croisés pour la première fois, je n'étais clairement pas prêt à envisager une nouvelle relation. D'ailleurs, de nous deux, c'était lui qui avait fini par faire le premier pas. Et si j'ai eu peur au début, je ne le regrette pas.

— Hey.

Je ferme les yeux lorsqu'il referme ses bras autour de moi, son corps entièrement nu collé contre le mien. Je me fonds contre son torse, appréciant son souffle chaud qui glisse le long de ma gorge. Il pose ses mains fraîches sur mon ventre, dépose une pluie de baisers sur mes épaules, frotte doucement son nez contre ma nuque. Il hume mon odeur comme un camé, et je me gorge de chaque caresse, chaque baiser et chaque frisson qui nait sur ma peau à son contact.

— Reviens au lit.

Je ne me fais pas prier et abandonne ma tasse de thé sur la commode. Nous tombons enlacés sur le lit, en ricanant comme deux adolescents, avant de nous tortiller pour rabattre la couette sur nos corps. Cette fois-ci, c'est Warren qui vient poser sa tête sur mon torse et m'enlacer de son bras finement musclé.

— Ça va être nul, Noël loin de toi.

Sur ces mots, le sommeil le rattrape à nouveau et je sens que je le perds. Un petit sourire triste étire mes lèvres et je m'endors à mon tour, alors qu'une idée germe dans ma tête.

Seulement, je suis déjà bien trop dans les vapes pour y penser véritablement.

X X X

Le jour s'est levé et le soleil est haut dans le ciel, même si les nuages le dissimulent. Je n'ai toujours pas quitté le lit, alors que l'heure sur ma montre m'indique qu'il est à peine midi passé.

Dans la salle d'eau, j'entends que l'eau cesse de couler. Quelques secondes plus tard à peine, Warren fait son apparition dans la chambre, seulement vêtu d'une serviette de bain enroulée autour de sa taille. Je me délecte du spectacle qu'il m'offre, avec son teint hâlé et ses longues jambes musclées, et les gouttes d'eau qui perlent de ses cheveux le long de son dos.

— Tu aimes ce que tu vois ?

Il me tourne le dos, les mains fourrées dans le tiroir de la commode, mais je sais qu'il sourit. Je l'entends. Mes lèvres s'étirent à mon tour et je lui réponds, sur le même ton :

— J'aimerais encore plus si tu retirais cette serviette.

Aussitôt dit, aussitôt fait. Elle coule sur la moquette de la chambre sans un bruit et j'ai alors le loisir d'observer ses fesses bombées. Il profite d'être nu sous mes yeux pour se diriger vers la penderie, de laquelle il sort son pantalon, une chemise et sa veste récupérée la veille chez le pressing.

Comme toujours, il commence par enfiler son slip – qui, d'ailleurs, lui fait un cul d'enfer. Ensuite, il s'assoie au pied du lit pour enfiler ses chaussettes. Je regarde ses muscles rouler sous la peau de son dos, tout en me faisant violence pour ne pas le toucher ; je sais qu'il déteste être en retard, et le chauffer maintenant ne serait clairement pas judicieux.

Il finit par se relever, enfile son pantalon, et s'éclipse dans la salle d'eau. Le sèche-cheveux se met en marche et, moins de cinq minutes plus tard, il réapparaît devant moi les cheveux secs et brillants. À une époque, quand il se préparait à partir comme ça, devant moi, je bavais. Littéralement. Je restais là la bouche grande ouverte à le contempler en crevant d'envie de lui sauter dessus. C'est toujours le cas aujourd'hui, mais j'ai au moins appris à fermer la bouche. Je ne me contente plus que de le dévorer des yeux, avachi dans le lit, en pensant à son retour.

— Tu m'aides ?

Il a passé sa chemise et a fixé sa montre à son poignet. Il me tend sa cravate, bleue marine comme sa veste et son pantalon, et je me lève pour la lui nouer.

— Tes mains tremblent.

Affairé à nouer cette foutue cravate, je lève les yeux pour croiser son regard. Un regard qui s'avère être rempli de douceur et pétillant de malice. Je craque. Encore une fois, planté devant lui et l'aidant à se préparer, je tombe amoureux.

— Tais-toi.

Je fais mine de bouder, car il sait très bien pourquoi mes mains tremblent : je le désire et il est si beau, si sexy, que j'en suis mal à l'aise. C'est tout le temps pareil ; il s'amuse toujours de l'effet qu'il me fait.

Je le regarde enfiler sa veste une fois sa cravate nouée et, une fois de plus, je suis bouche bée. Ébloui par sa beauté, par le charisme qu'il dégage soudainement avec ces vêtements. Je tends le bras vers lui, pose mes doigts sur l'écusson en forme d'ailes fixé du côté de son coeur.

Le voir ainsi, dans sa tenue de pilote, me rappelle le jour où nous nous sommes rencontrés. Et j'ai subitement envie de l'embrasser.

— Viens-là.

Je l'attire doucement à moi par les revers de sa veste. Il sourit, se mord la lèvre et vient m'embrasser de lui-même. Nos langues se trouvent et entament une danse hypnotique et sensuelle. Sa bouche a le goût mentholé de son dentifrice, et la peau de son visage sent l'after-shave.

Les battements de mon cœur commencent à perdre le rythme lorsqu'il me hisse contre lui pour m'asseoir sur la commode. J'écarte les jambes pour le laisser s'approcher, et il pose ses mains sur ma taille. Il me tient fermement mais tendrement à la fois, et j'adore ça. J'adore ce sentiment de douceur mêlé à celui de la sécurité que me procure sa force. Ses gestes sont sûrs, et ça m'aide à avoir confiance ; en lui, en nous, en tout.

— Il faut que j'y aille...

J'aimerais le garder ici un peu plus longtemps, mais je sais que cela ne ferait que retarder l'inévitable. Il doit travailler ; repartir pour Paris avant de rentrer, dans quelques jours, de la même façon qu'il est parti.

Quand j'y pense, je suis vraiment déçu. Parmi tous ces pilotes de la compagnie Delta, il a fallu que ça tombe sur lui. Je pense à ces gens qui seront en famille le soir de Noël et lors du réveillon du 31 Décembre, et je les envie. Aujourd'hui nous sommes le 24 Décembre et, alors que tout le monde s'apprête à se retrouver, moi je dois le regarder partir. Et ça fait mal. J'aurais aimé que notre premier Noël ensemble se passe autrement.

— Tu m'appelles quand tu atterris, hein ?
— Comme toujours.

Oui, c'est vrai. C'est notre petit rituel. J'ai beau savoir que l'avion est le moyen de transport le plus sûr de ce siècle, je ne peux m'empêcher de me faire du souci. Surtout lorsqu'il part sur de longs courrier, qu'il traverse l'océan, et change de continent.

— Oui, c'est vrai.

Je l'accompagne jusqu'au vestibule de l'appartement alors qu'il traîne derrière lui son bagage. Je profite des quelques secondes de battement devant la porte d'entrée pour le contempler une dernière fois, pour me gorger de la vision de cet homme sexy et accompli que Warren est. Et putain, je suis si fier de l'avoir dans ma vie.

La porte se referme sur lui après un dernier baiser et un « à dans une semaine » murmuré dans un souffle. Je me précipite au balcon de notre appartement et regarde en contrebas. Je l'aperçois, presque minuscule sur le trottoir, tandis qu'il hèle un taxi qui passe par là.

Et alors qu'il s'engouffre dans le véhicule en direction de JFK, je décide que je refuse. Je refuse de laisser son boulot gâcher nos fêtes de fin d'année. Alors s'il ne peut être là pour le réveillon, je m'arme de mon téléphone et fais en sorte d'emmener le réveillon à lui.

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Hey. Voilà c'était le chapitre 2 ! J'espère qu'il vous a plu ? RDV lundi pour le 3 !

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