Lit Blanc

Les deux amis arrivèrent enfin devant une grande institution, où une croix bleue au fond blanc était placardée sur la devanture. Kate râla auprès de Matt, qui n'allait pas assez vite à son goût. La jeune femme était dépendante de quelqu'un pour se déplacer, difficile de faire plus frustrant. Ils furent accueillis par une jolie brune qui leur indiqua la chambre, même si Matt connaissait déjà le numéro.

La fille à l'accueil reconnut Kate, elle avait vu ses amis défiler dans le hall et ne dit rien quant à son allure pâle et fatiguée. Ses traits étaient tirés et de petits cernes bleutés commençaient à prendre forme sous ses yeux noirs. Les deux jeunes défilèrent dans plusieurs couloirs et prirent l'ascenseur, avant d'arriver devant la chambre quatre cent quarante-neuf.

La jeune fille tremblait, elle avait tellement envie de la voir, de savoir, mais elle était aussi terriblement effrayée. Matt jeta un œil à sa patiente, hocha la tête et ouvrit la porte. Ils entrèrent. De sa hauteur, Kate pouvait apercevoir une petite tête pâle dépasser du lit recouvert de blanc.

La chambre était vide et froide, plus l'infirmier approchait le fauteuil, plus elle remarquait les petits détails. Un tube sortait de la bouche de l'endormie et était relié à un respirateur. Plusieurs sondes étaient implantées dans ses bras et reliées à des poches suspendues. Le bruit de sa respiration était artificiel, mais bizarrement rassurant. La petite Christie était vivante, endormie – même comateuse – mais vivante.

La jeune femme lâcha un soupir de soulagement, la blondinette semblait si calme, si sereine. Son visage était aussi enfantin que la première fois qu'elle l'avait vu. La petite blonde ne semblait pas souffrir. Kate continuait de l'observer sans rien dire, quand Matt décida de s'éclipser quelques instants et de la laisser tranquille avec son amie.

La blonde tendit sa main vers celle de Christie, elle était froide. C'était une sensation étrange et vraiment désagréable, mais elle ne la lâcha pas. La jeune femme se releva pour la voir de plus près.

— Tu vas t'en sortir ma belle, t'as encore plein de bonnes choses et d'années à vivre, murmura-t-elle, à son oreille.

Puis la malade se rassit, son pansement commençait à s'imbiber de sang un peu trop rapidement. Matt refit surface quelques minutes après.

— C'est le moment de rentrer Kate, tu as besoin de te reposer.

La blonde ne répondit rien et le laissa la ramener à l'orphelinat, dans le silence. Elle se sentait soulagée, la voir l'avait rassurée : il y avait de l'espoir. Puis ils passèrent la porte d'entrée et le jeune homme la reprit dans ses bras avant de gravir les marches. Kate colla sa tête contre son torse et se laissa bercer.

Elle profitait plus de cet instant après avoir vu Christie, c'était comme si la jeune fille parvenait à mieux respirer. Arrivé en haut des marches, Matt ne la lâcha pas et continua de la porter. Ce qui ravit la jeune femme, elle ferma les yeux et profita de chaque seconde. Cela faisait longtemps qu'elle ne s'était pas sentie aussi bien.

Ils entrèrent dans la chambre et l'infirmier vint s'asseoir sur son lit, Kate toujours dans ses bras, il ne desserra pas son étreinte.

— Vous êtes arrivée à destination, annonça-t-il avec un grand sourire.

Elle le remercia, sans lâcher l'emprise sur son cou. Le garçon continua de la fixer, elle n'arrivait pas à détacher ses yeux des siens, ils étaient si beaux, si grands, si vert. Et ses lèvres, Kate se mordilla la lèvre inférieure à cette pensée. Il le remarqua et sourit légèrement avant de bloquer son avant-bras dans son dos et d'approcher doucement son visage du sien.

La fille ne dit rien et continua de fixer le bas de son visage, tentant de contrôler le rouge qui piquait son teint. Puis les lèvres du garçon s'abattirent sur les siennes. Elles étaient douces et chaudes, Kate mit quelques secondes à reprendre le contrôle de ce baiser. La blonde baladait ses doigts dans les cheveux du garçon.

Matt plaqua ses mains sur ses joues, ce qui eut un effet rafraîchissant, elle devait être d'un rouge vif. Elle savourait chaque seconde qu'ils passaient, collé l'un à l'autre. Le jeune homme était doux, patient et passionné. Il continuait de l'embrasser, tout en la berçant de ses longs bras.

Parfois, ils s'arrêtaient en souriant et se fixaient, avant de s'engouffrer de nouveau dans la bouche de l'autre. Un raclement de gorge insistant les sortit de leur transe. La blonde réalisa que cela faisait plusieurs minutes que quelqu'un les observait dans la pièce, mais ils étaient bien trop loin pour s'en préoccuper.

Elle rit à cette pensée, en se demandant qui de Ninon ou de Mélanie était présente dans la pièce, jusqu'à ce que son regard croise celui de Peter. La fille sursauta, un sentiment désagréable la parcourut soudain. Kate se détacha immédiatement du garçon à l'haleine mentholée. Matt n'y fit pas attention et se releva.

— Salut Peter, lança le garçon gêné, en se frottant la nuque.

— Salut Matt, répondit Peter, d'une voix glaciale.

— Je vais y aller, vous avez sûrement pas mal de choses à vous dire, déclara-t-il avant de se tourner vers Kate, je reviendrai plus tard pour tes pansements.

— Je peux très bien le faire, affirma Peter sèchement.

— Je ne préférerais pas, les plaies sont encore fragiles, il vaut mieux que ce soit quelqu'un d'habitué qui s'en occupe, expliqua Matt, sans se préoccuper du comportement désagréable de Peter.

— À tout à l'heure, lança Kate à Matt, avec un grand sourire.

Matt lui rendit son sourire et lui envoya un baiser de la main, avant de quitter la pièce. Peter en profita pour se rapprocher du lit de la patiente et s'y asseoir. Le jeune homme semblait en colère, mais elle ne comprenait pas bien pourquoi.

— Ça va ? lui demanda-t-elle, soucieuse.

— Parce que ça t'intéresse ? envoya Peter, toujours aussi froid.

— Si c'est pour être aussi désagréable, je préférerais que tu ne viennes pas me voir.

— Comme Irina, tu veux dire ?

À l'évocation de ce prénom, la rage qui avait disparu ces dernières heures, refit surface et la main de la jeune femme partit sans qu'elle ne puisse l'arrêter. Peter ne dit rien et se tint la joue en portant son regard sur la porte.

— Si c'est pour la défendre, tu ferais mieux de partir.

— Tu gifles maintenant ?

— N'attends pas d'excuses de ma part.

— T'inquiète pas pour ça, j'ai l'habitude.

— Sors.

— Pardon ?

— Je t'ai demandé de sortir, alors vas t'en.

— Non, dit-il sec.

— Tu te fous de moi ?

— Tu vas faire quoi ? Tu peux même pas tenir sur tes jambes, énonça-t-il, narquois.

Une nouvelle gifle siffla, la blonde n'était pas d'humeur à supporter autant aujourd'hui sans rien dire. Le jeune homme fixa Kate plein de colère, puis il détourna les yeux de nouveau.

— Tu n'es qu'un crétin, vociféra-t-elle.

— Un crétin qui t'a sauvé la vie.

Kate ne répondit rien, cette rage continuait de bouillir en elle, il fallait qu'il sorte tout de suite où elle allait exploser. La jeune femme n'arrivait pas à se retenir, dans aucun domaine.

— S'il te plaît, va-t'en. Si tu m'as un tant soit peu appréciée, si tu me remercies un minimum d'avoir sauvé la vie d'Irina, alors vas t'en, supplia Kate, à bout de souffle.

Peter se figea, son expression avait changé et la blonde put y déceler de la culpabilité.

— Je, je suis désolé, je voulais pas dire ça.

Le jeune homme cherchait ses mots, puis il se tourna vers la malade, le visage triste.

— Je ne voulais pas être aussi glacial et désagréable, c'est juste que.

— Que quoi ? Tu m'en veux à cause de ce que j'ai dit à Irina, ce matin ?

— Je l'ai quittée. Matt m'a envoyé un message et expliqué ce qu'elle t'avait fait. Je venais pour m'excuser pour tout ce que tu as fait, tout ce que tu as sacrifié.

— Tu l'as quittée à cause de ça ? demanda la jeune femme, étonnée.

— Non, pas que.

— Alors qu'est-ce qu'il y a ? Qu'est-ce qui te met dans cet état ?

— C'est, c'est que, bégaya-t-il.

Le jeune homme posa ses yeux dans ceux de la jeune fille allongée.

— Matt est un gars cool, j'espère que tu seras bien avec lui, je vais le chercher pour qu'il fasse tes pansements.

Le garçon aux yeux clairs sortit de la pièce, Kate était confuse. Son comportement n'avait aucun sens. La jeune femme s'assoupit en attendant ses soins, un sentiment familier l'envahit. Elle se sentit littéralement soulevée par des nuages, elle regarda autour d'elle, c'étaient bien des cumulonimbus. Après quelques secondes, ses pieds touchèrent enfin le sol.

Kate reconnut la personne en face d'elle qui la fixait, l'air désapprobateur.

— Kate, tu ne m'as pas écoutée.

— Ça ne va pas recommencer. Normalement ce genre de cauchemars bizarres, on les fait une seule fois, on ne les continue pas.

— Ça va être plus compliqué que ce que je pensais, fit la vieille femme, en soufflant longuement.

— S'il vous plaît, faites que je me réveille comme la dernière fois. Je n'ai pas le temps pour tout ça en ce moment.

— Je ne contrôle rien. C'est ton don, pas le mien. Je suis là, parce que tu en as besoin et que tu es totalement en dehors du chemin que tu devrais suivre.

— Le chemin que je devrais suivre ? ria Kate, mon inconscient est très philosophique. Donc quoi, je devrais me concentrer sur Peter plutôt que sur Matt, c'est ça ?

— Je ne suis pas là pour t'aider en matière de garçon. En tout cas, pas pour le moment. Je suis là pour que tu réalises qui tu es et quelles sont tes capacités. Ton prochain voyage risque d'arriver dans peu de temps et nous ne savons pas dans quel endroit tu vas atterrir. C'est très dangereux, surtout si tu ne connais pas les règles et que tu ne sais pas contrôler tes passages.

— Comment vous voulez que je croie ça ?

— Tu te souviens lorsque tu étais à Pitisburg, des souvenirs de ton enfance te sont revenus.

— Oui, mais.

— Tu te souviens de tes parents ? l'interrompit-elle.

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