Chapitre 3 : Avec un chaudron sur la tête


Ce matin-là, le hibou d'Anna avait repris ses bonnes vieilles habitudes, et s'était mis à hululer joyeusement, pour réveiller tout le monde. Car, non content de ne pas ressembler suffisamment à un aigle aux yeux d'Anna, Aiglou se prenait maintenant à jouer au coucou. Mais bon... Cela ne dérangeait pas la jeune sorcière, car tant que son animal pouvait lui servir de réveil, et lui éviter d'être en retard au premier cours de la matinée...

Toutes les filles du dortoir des Serdaigle s'étaient donc levées, habillées, puis étaient descendues dans la salle commune, avant de quitter l'aile ouest de Poudlard, pour se rendre dans la Grande Salle, pour le petit déjeuner. Toutes, oui... Sauf une... Une qui n'avait pas entendu le hululement du réveil. Une qui avait été trop assommée par les événements de la veille au soir, à savoir : la montée des Détraqueurs à bord du Poudlard Express (à la recherche de Sirius Black), l'arrivée du train à la gare de Pré-au-lard, et la cérémonie de répartition des nouveaux élèves. Une qui avait été littéralement assommée par une panière à chat de dix kilos, qui lui était tombée sur la tête... Tous ces facteurs l'avaient épuisée, et, une heure après que tout le monde se soit levé, Cathie Mist dormait toujours à poings fermés, enveloppée dans les chaudes et douces couvertures de son lit à baldaquin. Oui, tout cela était très bien, sauf que le prochain cours allait commencer dans un quart d'heure...

- Cat ! Cat ! Debout ! Réfeille-toi ! chantonna Axelle, qui venait juste de remonter dans le dortoir des filles, pour voir si son amie était toujours là. Auchourd'hui, mercredi 2 septembre, première chournée de cours ! Cat ! Le cours fa bientôt commencer ! Il faudrait peut-être que tu te lèfes ! Ca-aaat ! Tu as entendu ce que che t'ai dit ? Bon, très bien, tu ne me laisses pas le choix : che fais te chanter une petite chanson pour te réfeiller ! Große, große, große Kartofeeel ! Den ich fange mit meine Löffeeel ! Groß, groß, groß, groß, groß Schinkeeen ! Den ich...

- Raaahh ! La ferme !!!

- Ah ! Ca y est ! Tu es réfeillée ! Un peu plus, et ch'allais secouer ton lit pour t'en faire tomber !

- Un peu plus, et j'allais croire qu'il y avait un tremblement de terre à Poudlard ! ajouta la brunette, en s'aidant de ses coudes pour se redresser un peu sur son matelas.

Ses cheveux mi-longs étaient atrocement en bataille, tellement décoiffés qu'ils semblaient irrécupérables (« Mais non ! Ne soyons pas pessimistes ! »), et ses yeux couleur chocolat étaient à moitié recouverts de lourdes paupières endormies.

- Bon, c'est pas le tout, Cat, mais il faudrait peut-être que tu ailles te préparer ! conseilla la blonde, en s'asseyant nonchalamment sur le rebord d'un lit inoccupé. Notre premier cours de la matinée commence dans dix minutes !

- QUOI ??? s'écria la brune, avec un violent sursaut qui la fit complètement sortir de son lit. Mais pourquoi tu ne me l'as pas dit plus tôt ?

- C'est ce que che me tue à te répéter depuis cinq minutes..., répondit Axelle, avec des yeux méfiants. Et encore heureux que che sois remontée pour foir si tu étais réfeillée. Cerise et Anna ne s'en sont même pas donné la peine. A l'heure qu'il est, elles doifent déchà être en train d'attendre defant les cachots...

- Graaah ! Les traîtresses ! Les lèche-bottes ! Elles me le payeront ! grogna Cat, en fouillant avec des gestes frénétiques et précipités dans son sac, pour trouver ses vêtements. Les ca... Les ca... Les cachots ? balbutia-t-elle alors, avec un léger train de retard. Mais... C'est quoi notre premier cours du matin ?

- Potions...

- POTIONS ??? répéta la brunette, en un cri qui dut s'entendre dans toute l'aile ouest de Poudlard. Oh non, oh non ! Je suis perdue ! Je suis fichue ! Je suis anéantie ! Je vais arriver en retard ! Rogue va me donner une retenue ! Je vais me faire coller ! Me faire coller le tout premier jour de la rentrée ! Evidemment, ma mère va apprendre le scandale, elle va m'envoyer une Beuglante, et je vais encore me faire remarquer !

En débitant toutes ces plaintes de désespoir suicidaire et de malheur, Cat paraissait ne plus savoir où aller, ni où donner de la tête. Avec sa robe de sorcière et autres (sous) vêtements pendant à ses bras et gigotant avec elle, elle faisait de nombreux petits pas dans un sens, puis dans un autre, et tout ceci ressemblait à une sorte de mini danse effrénée et ridicule.

- Cat, appela l'Allemande d'un air inquiet, la salle de bain est par là...

- Je sais ! riposta la sorcière fébrile, en plissant les yeux de contrariété.

Puis elle disparut à la vitesse de la lumière à l'intérieur de la pièce, refermant la porte en un claquement. A peine deux secondes suffirent à ce que le dortoir s'emplisse à nouveau des cris de la folle.

- AAAAAAAAARRRG !!! MAIS QU'EST-CE QUE J'AI SUR LE VISAGE ???!!!

Vraisemblablement, Cat venait de voir, grâce au miroir de la salle de bain, les deux petites griffures qui tailladaient sa joue droite. Avait-elle oublié que son chat lui avait administré de méchants coups, la veille au soir ? Non, mais elle avait oublié combien deux balafres cicatrisées pouvaient faire moches sur sa figure...

- AAAAAAAAARRRG !!! ET MES BRAS !!! QUELLE HORREUR !!!

Là, vraisemblablement, elle venait de découvrir les multiples cicatrices qui rayaient ses avant-bras. Mais, franchement, elle devait avoir été bien endormie pour ne pas avoir vu plus tôt l'état critique de sa peau lacérée...

- Pattemplomb ! J'aurais deux mots à te dire !!!

Cinq minutes plus tard, la porte de la salle de bain s'ouvrit à la volée, et une brune affolée en sortit, vêtue de sa robe noire de sorcière - ample vêtement à capuche, et au bord des manches bleu. En-dessous, elle était habillée d'une chemise blanche, recouverte d'un léger pull noir, et d'une jupe grisâtre (même si elle haïssait les jupes).

- Ma cravate ! Ma cravate ! Où ai-je mis ma cravate ? s'écria Cat, en sautillant bizarrement sur place, comme si ses bonds allaient l'aider à avoir une meilleure vue sur l'ensemble du dortoir et à trouver plus facilement sa cravate.

Axelle, elle, l'observait d'un oeil de plus en plus inquiet.

- Mais aide-moi donc, toi ! rugit la brune hystérique, à l'adresse de sa copine. Ne reste pas plantée là !!!

- A quoi bon chercher ta crafate, alors que tu sais très bien que tu n'arriferas même pas à la mettre ? Tu fas encore passer trois heures à essayer de faire le noeud !

- Ah ! La voilà ! Je l'ai trouvée ! s'exclama Cat, en pointant son index triomphant vers le dessous de son lit, et en se précipitant vers sa couchette.

VLAM ! La jeune fille s'étala de tout son long sur le sol, la face écrasée et les deux bras tendus parallèlement devant elle. Comme de coutume, elle venait de se prendre les pieds dans Pattemplomb. Le gros chat roux marcha tranquillement jusqu'au visage de sa maîtresse, couchée sur le ventre, dans un état misérable, et s'assit à côté, pour la regarder de ses beaux yeux verts innocents.

- Qu'est-ce que tu fais là, toi ? grinça Cat, entre ses dents serrées.

- Il me semble que tu l'afais appelé, tout à l'heure, quand tu étais dans la salle de bain, expliqua Axelle. Il a dû t'entendre et fenir...

- C'est bien la première fois que Pattemplomb répond à un de mes appels...

¤~

Cat et Axelle eurent malgré tout de la chance dans leur malheur. D'une part, lorsqu'elles dévalèrent les escaliers quatre à quatre, elles ne loupèrent aucune marche. D'autre part, sur leur chemin, elles ne croisèrent pas Peeves, l'esprit frappeur. Et, enfin, quand elles arrivèrent devant les cachots... Les élèves de Serdaigle et de Poufsouffle cinquième année étaient toujours là, stationnant dans le couloir, en train d'attendre l'arrivée du professeur Rogue.

- Je ne comprends pas, se plaignit Cerise, adossée contre le mur de pierres rustiques, et regardant sa montre. Ca fait vingt minutes que nous sommes là, et cinq minutes que le professeur Rogue aurait dû arriver...

Tandis qu'Axelle rejoignait Cerise et Anna parmi la file des élèves, Cat, elle, s'était agenouillée au milieu du couloir, levant sa tête et tendant ses deux bras vers le plafond, remerciant le Seigneur de lui avoir offert tant de grâce, et d'avoir fait que le professeur Rogue soit lui aussi en retard.

- Merci, mon Dieu ! Merci ! gémissait la brune, en essuyant, avec sa cravate à rayures bleues et argentées qu'elle tenait à la main, les larmes d'émotion qui coulaient de ses yeux.

Lorsqu'elle eut enfin fini son cinéma, elle se remit debout, ramassa son sac et son chaudron, et vint retrouver ses copines dans la rangée d'élèves.

- Euh... T'es sûre qu'on la connaît, celle-là ? demanda Anna à Cerise, en s'écartant légèrement de Cat, comme si celle-ci était atteinte d'une maladie contagieuse (communément appelée la folie).

- Et tu comptes trimballer ta cravate à la main, pendant toute la journée ? voulut savoir Cerise.

- Non, répondit Cat. Je vais essayer de me l'attacher, sur l'heure de midi.

- Ahrr ! Au fait, Cat ! s'exclama soudainement Axelle. Regarde ce que ch'ai acheté !

Sur ce, l'Allemande brandit à deux mains un énorme chaudron en cuivre, à la surface lisse et étincellante, flambant neuf.

- Oooooh ! Un nouveau chaudron ! s'enthousiasma Cat. Ca, c'est merveilleux !

- N'est-ce pas ? ajouta Axelle. Auchourd'hui, ce sera sa première utilisation en cours de Potions ! Alors tu sais ce qu'il nous reste à faire !

- Ouiii ! Le baptême du chaudron ! C'est partiii !

- Oh non, mon Dieu, elles remettent ça, susurra Cerise.

Avec énergie et vivacité, la brune et la blonde retournèrent chacune leur chaudron, pour le vider et se débarrasser des bouquins et autres affaires qu'il contenait. Une fois que tout le contenu fut déversé sur le sol, les deux filles levèrent leur récipient métallique et se l'enfoncèrent sur la tête. L'effet était comique à voir : c'était comme si elles avaient un chaudron à la place de la tête. Elles ne voyaient plus rien, n'entendaient pas beaucoup plus, et leur voix résonnait en multiples échos à l'intérieur du chaudron.

- Ah, c'est sûr ! On a l'air plus malignes, avec un chaudron sur la tête ! ironisa Cerise.

- Euh... Axelle ? Je te vois pas ! T'es où ? appela Cat, en tâtonnant l'air de ses mains.

- Che suis à ta droite, che crois..., répondit une voix métallique.

- Ah ! D'accord ! Bon, t'es prête ?

- Prête !

- C'est partiii !

Les deux sorcières s'élancèrent alors l'une contre l'autre, et se cognèrent volontairement la tête (casquée du chaudron), avec un énorme KLANG ! qui retentit dans tout le couloir. Et voilà ! C'était ça le baptême du chaudron. Amusant, non ? Oui, sauf que ce qui allait suivre, Cat et Axelle ne l'avaient pas prévu, et cela n'allait pas être amusant du tout.

- Un peu de silence, ici ! dit soudain une voix froide et menaçante. Et rangez-vous sur le côté, par deux !

Prises au dépourvu, Cat et Axelle agirent de manière totalement irréfléchie et irraisonnée, titubant sur les côtés comme deux tortues saoules, tendant les bras en avant et palpant l'air de leurs mains, comme deux taupes complètement myopes, pour essayer de rejoindre le plus vite possible leur place, dans la file d'élèves. Tout cela, alors qu'elles auraient très bien pu, tout simplement, retirer leur chaudron de leur tête. Mais la panique avait été telle qu'elles n'y avaient pas pensé, et ce fut là leur grande erreur, car quelqu'un s'approcha d'elles, et prononça le sortilège :

- Perpetuo viscum ! ... Vous autres, entrez dans la salle et attendez-moi en silence.

Des bruits de pas confus indiquèrent que tous les élèves pénétraient à l'intérieur du cachot. Mais Cat et Axelle, elles, restaient dans le couloir, car, apparemment, elles avaient un léger problème.

- Eh, Cat ! Tu fas pas le croire ! s'exclama Axelle, à moitié paniquée. Ch'arrife plus à enlefer mon chaudron ! Ch'ai la tête coincée dedans !

- Evidemment ! répondit la brunette, d'un ton extrêmement contrarié. Y'a un crétin nous a jeté un sort de Glu perpétuelle, pour nous coller le chaudron sur la tête...

- C'est bizarre, ajouta Axelle d'un air inquiet, car la foix de ce crétin ressemblait étranchement à celle du professeur Rogue...

- Ah... Ah... Ah ? Tu crois ? balbutia Cat, comme si sa voix commençait à se paralyser.

- Bah, attends, on n'a qu'à réécouter ! S'il fous plaît, monsieur, est-ce que fous pourriez parler encore un peu, qu'on puisse fous identifier ?

- Très bien..., répondit la voix masculine glaciale. Cela fera donc vingt points de moins à Serdaigle, pour manque de respect envers un professeur.

- Ah... Ben oui, c'est bien la voix du professeur Rogue..., conclut Cat.

- Tu fois ! s'exclama joyeusement Axelle, comme si de rien n'était. Ch'afais raison ! C'était bien lui !

- Axelle, tais-toi... Je crois qu'on est mal barrées...

- Et, laissez-moi réfléchir, poursuivit Rogue avec son air redoutable, dix points de moins à Serdaigle, pour détérioration et mauvais usage des chaudrons...

- Ah ça c'est pas frai ! protesta vivement Axelle. Fous afez fu comme mon chaudron est lisse ? Il est tout neuf ! Che l'ai acheté il y a à peine deux chours ! Fous poufez le toucher, allez-y !

Et, croyant s'approcher de Rogue, pour qu'il touche le chaudron qu'elle avait sur la tête, Axelle s'approcha du mur, et le percuta de plein fouet, dans un nouveau KLANG ! retentissant, avant de vaciller dangereusement en arrière.

- Silence !!! rugit le maître des Potions. Allez-vous vous taire, une bonne fois pour toutes ? Je ne pensais pas que des Serdaigle pouvaient égaler les Gryffondor au point de vue idioties et imbécillités. Eh bien, grâce à vous, je me rends compte que je m'étais trompé... Ou bien votre don inné pour la sagesse et la réflexion vous a-t-il soufflé qu'il serait intéressant d'étudier de plus près l'intérieur d'un chaudron ? Puisque cela semble particulièrement susciter votre curiosité, vous me rendrez, pour mercredi prochain, trois rouleaux de parchemin sur les chaudrons et leur histoire, depuis la date de leur création, jusqu'aux différents types de chaudrons existants, sans oublier les caractéristiques du métal dans lequel ils sont fabriqués, et leur vulnérabilité face à certains ingrédients toxiques. En attendant, comme vous paraissez ravies d'avoir adopté un nouveau style vestimentaire, vous allez pouvoir rejoindre vos camarades de classe, pour leur montrer à quel point un chaudron sur la tête vous va bien. Allez-y ! Je ne vous l'enlèverai qu'une fois rentrées en classe !

Ne cherchant plus ni à répondre ni à protester - car elles savaient que ce serait inutile -, Cat et Axelle suivirent bêtement les ordres de Rogue, et se mirent à marcher d'un pas incertain, pour tenter de trouver la porte d'entrée du cachot. C'était vraiment catastrophique, le comble du ridicule ! Les deux sorcières tendaient leurs bras en avant, comme des momies, pour se protéger d'un éventuel obstacle. Elles faisaient des tours sur elles-mêmes, des pas chancelants sur les côtés, le tout sous le regard effaré de Severus Rogue, qui commençait déjà à se demander si son idée avait été la bonne. De nombreux autres KLANG ! ponctuaient cette parade grotesque, lorsque les deux filles en venaient à se rencontrer ou à embrasser un mur.

A la fin, Axelle fut rendue tout au bout du couloir, totalement à l'opposé de la salle de classe, continuant à s'éloigner dans la direction qu'elle croyait être la bonne. Cat, elle, était restée pratiquement au même endroit, perdurant à faire des pirouettes sous le nez de Rogue.

- Très bien, ça suffit ! lança-t-il finalement avec colère.

- Non, non, mais attendez ! On finira bien par la trouver, cette entrée ! assura la brune, en se dirigeant de manière instable vers lui. Là ! Vous voyez ? Je crois bien que je viens de trouver un élève ! Regardez ! Je le sens, je le touche !

- C'est moi, idiote ! siffla Rogue d'un ton glacial.

Et, en effet, la jeune fille était en train de passer ses mains sur le torse du professeur et de caresser sa chemise noire boutonnée.

- Ah... Pardon ! Excusez-moi ! dit Cat, en s'écartant vivement, et en virant au rouge pivoine sous son chaudron.

- Finite incantatem ! prononça Rogue, en levant sa baguette magique vers la tête casquée de Cat, puis vers celle d'Axelle. Enlevez-moi ça de votre tête, ramassez vos affaires et rentrez en classe immédiatement ! Et que ce genre d'incident ne se reproduise plus, c'est compris ?

- Compris..., répondirent-elles, d'une petite voix penaude.

Comme il fallait s'y attendre, lorsqu'elles firent leur entrée dans le cachot, elles n'eurent pas vraiment l'embarras du choix des places : il en restait seulement deux, et elles se trouvaient tout devant, au premier rang, et au milieu, précisément en face du bureau de Rogue. Elles tâchèrent de se faire les plus discrètes possibles en s'installant, ce qui n'aurait évidemment pas été réalisable si Rogue leur avait laissé leur chaudron sur la tête. Ce dernier pénétra à son tour dans la classe avec furie, et referma brutalement la porte derrière lui.

- Aujourd'hui, vous allez apprendre - du moins j'espère - à préparer l'Elixir cérébral de Barufio, lança-t-il.

Juste devant lui, Cat étouffa un rire soudain. Rogue posa sur elle ses yeux noirs et la scruta froidement.

- Quelque chose vous fait rire, Miss Mist ?

Cette fois-ci, c'était plus fort qu'elle, et ce fut une véritable explosion de rire qu'elle tenta de camoufler, en se plaquant violemment la main contre la bouche. Mais Axelle, elle, n'arriva pas à se retenir, et laissa tout échapper. C'était toujours comme ça : à chaque fois que Rogue appelait Cat « Miss Mist », cela provoquait chez la nommée et chez sa copine un inévitable fou rire. Les deux mots « Miss » et « Mist » se ressemblaient tellement phonétiquement, que, lorsque Rogue les disait à la suite, cela avait un effet presque comique.

- J'avais initialement pensé à vous faire préparer un Philtre calmant, pour ces deux excitées, continua-t-il, mais je pense qu'un Elixir cérébral conviendra mieux, étant donné l'état déplorable de leur cerveau. Une telle potion, même ratée, ne peut que leur faire retrouver quelques neurones, car je suis convaincu que cela ne peut pas être pire.

Les élèves s'appliquèrent donc, durant toute l'heure, à réaliser l'Elixir de Barufio le plus potable possible. Deux Serdaigle, en particulier, prenaient cette préparation très à coeur, étant donné qu'elles allaient ensuite devoir la goûter. Cat et Axelle touillaient le contenu de leur chaudron avec une méticuleuse attention, veillaient étroitement à ce que la température d'ébullition ne soit pas trop forte, bref, elles y mettaient tout leur amour. A la fin du cours, contemplant le résultat de leur travail, elles se rendirent compte que jamais, ô grand jamais, elles n'avaient autant réussi une potion. Elles s'apprêtaient donc à la tester, plongeant une louche dans leur chaudron, lorsque Rogue lança d'une voix venant du fond de la classe :

- Vous deux ! Vous allez pouvoir me goûter l'Elixir qu'a préparé Miss Petipois !

Sentant venir le piège, Cat fut, pour une fois, plus maligne qu'Axelle, et plus rapide à réagir que d'habitude. Elle prit une quantité généreuse d'Elixir dans sa louche, et la porta immédiatement à ses lèvres, pour tout boire d'un trait.

- Trop tard ! J'ai déjà goûté le mien ! s'exclama-t-elle, avec un grand sourire et une voix presque chantante, à l'adresse de Rogue, qui débarquait devant elle avec le chaudron d'Anna dans les mains.

Ce dernier lança à la brune le regard le plus mauvais et le plus noir qu'il eut jamais fait, un regard qui aurait pu tuer une âme trop sensible. Il posa avec violence le chaudron sur la table de Cat et d'Axelle, faisant gicler quelques gouttes du liquide visqueux et verdâtre qu'il y avait dedans. Axelle se pencha naïvement sur ce nouveau récipient, et observa avec dégoût son contenu mal odorant.

- Baaah ! fit-elle, avec une grimace. Mais c'est pas bufable, ça ! Elle n'est pas réussie, sa potion !

- Justement ! rétorqua Rogue, avec une étincelle dans les yeux. En la goûtant, vous allez pouvoir nous dire ce qui ne va pas dans cette potion : si des ingrédients auraient dû être rajoutés, ou bien si elle aurait dû être préparée autrement.

Ce que Cat avait pressenti s'était donc révélé juste, et elle se félicitait d'avoir esquivé le piège de Rogue avec autant de rapidité. Ce qui la surprenait cependant, c'était que l'enseignant n'ait pas plus insisté pour lui faire boire l'Elixir. Il aurait très bien pu lui ordonner d'en prendre une deuxième gorgée. Mais non. Il préférait s'acharner sur une seule des deux filles - Axelle, en l'occurrence -, remplissant une louche à ras bord du liquide infecte, et la brandissant vers le visage de la blonde. Celle-ci recula avec sa chaise dans un mouvement d'autodéfense instinctif, se cognant le dos contre la table de derrière.

- Naaannn, che fous dis ! Che ne la boirai pas !

Elle lutta avec réticence pendant cinq bonnes minutes, faisant perdre à la classe son temps d'inter-cours (car tout le monde devait rester pour observer les effets de la potion ratée sur Axelle), emplissant les cachots de cris d'horreur et de supplication : « Non, non ! Pitié ! Pas ça ! Che ne la boirai pas ! Plutôt mourir ! Fous allez m'empoisonner ! », tandis que Rogue essayait vainement de lui faire avaler l'Elixir. Ce ne fut que lorsqu'il la menaça de lui rajouter dix rouleaux de parchemin supplémentaires à lui rendre sur les chaudrons qu'Axelle abandonna. Avec une mine dégoûtée, plissant les yeux de répulsion, elle but l'entièreté du contenu verdâtre de la louche.

- AAAAAAAAAAAAAARRRG !!! CHE FAIS MOURIIIIIIIIIR !!! hurla la Serdaigle allemande, lorsqu'elle fut enfin sortie des cachots, dans le couloir.

- Hmmm, fit Cat, d'un air pas très convaincu. Et moi, bizarrement, je ne me sens pas plus intelligente qu'avant... Il faut croire que mon intelligence atteignait déjà le maximum...

- Eh ! Doucement ! s'exclama Cerise, qui suivait derrière les deux autres. Tu oublies que c'est moi, ici, qui fais un complexe de supériorité !

- Ah ! Tu es là, toi ! lança Cat, en se retournant et en remarquant juste la présence de sa camarade. En quelle matière va-t-on, après ?

- Eh bien... En ce qui me concerne, je vais en Arithmancie !

- Arithmancie ? répéta Cat. Mais... C'est ton option... Ca veut dire que je ne suis pas avec toi... Axelle ! En quoi on va ?

- Aaaaaaaarrrg, continua de gémir la blonde, en se tenant la gorge avec ses deux mains, comme si elle s'étranglait.

- Oh, Axelle, ça suffit ! se fâcha la brune. Si tu avais vraiment été empoisonnée, tu serais morte il y a déjà longtemps !

- Bon, très bien..., se résigna l'Allemande, en cessant de jouer la comédie. Alors, sachant que Cerise fa en Arithmancie - option qu'elle a choisie depuis sa troisième année, et option que nous deux n'afons pas choisie -, nous, nous allons donc à l'option que nous afons choisie !

- Ah... Oui... Ca, ça m'aide m'aide beaucoup, Axelle, ironisa Cat, avec un regard blasé. Je suis d'autant plus contente de voir que l'Elixir cérébral de Barufio a eu quelque effet positif sur tes capacités de réflexion !

- Arrête de te moquer de moi, Cat ! Nous allons en cours de Difination.

- QUOI ??? s'écria alors la Serdaigle. Divination ??? Mais c'est tout en haut de la tour nord !!! Et pour l'instant on est à coté des cachots, au sous-sol !!! Il va bien nous falloir vingt minutes pour arriver jusque là-haut... Et toi, arrête de te marrer !!! répliqua-t-elle, à l'adresse de Cerise, qui était tordue de rire. Bon, bon, bon, reprit Cat, avec un brin d'énervement contrôlé dans la voix. Pour l'instant, je constate que notre emploi du temps est absolument pourri... Mercredi matin : Potions, Divination... Y a-t-il au moins quelque chose de bien, dans le restant de la journée ?

- Ben, après, c'est l'heure de mancher..., répondit Axelle, la tête baissée sur le petit bout de papier qui indiquait ses horaires et ses cours.

- Mais encore ?

- Défense contre les forces du mal...

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