Chapitre 18 : Rapprochement de corps


Le reste de cette nuit de pleine lune du vendredi 29 janvier se déroula ainsi : Cat, trempée jusqu'aux os, conduisit Vince jusqu'à l'endroit où sa cape d'invisibilité était restée accrochée à une souche, et tous les deux cherchèrent le vêtement, à tâtons dans l'obscurité, utilisant leur Lumos pour y voir plus clair. Ils retrouvèrent finalement la cape (Cat avait marché dessus pendant un bon moment, sans s'en rendre compte, rendant ainsi la quête plus difficile), et la brunette dut subir les quelques remontrances de son ami, car après tout, c'était lui le propriétaire de ce manteau magique, et celui-ci se retrouvait atrocement déchiré.

Les Serdaigle repartirent ensuite en direction du château, marchant clopin-clopant (surtout Cat, dont les chaussures étaient remplies d'eau et produisaient un bruit de succion chaque fois qu'elle posait un pied par terre). Arrivés devant les deux portes géantes de l'école, la jeune fille eut un rire nerveux, et demanda à son camarade comment il comptait s'y prendre pour ouvrir les grandes portes. Le garçon, lui, eut un sourire amusé, et il tapota le bout de sa baguette magique contre l'interstice entre les deux battants, jusqu'à ce que l'un d'eux s'entrebâille.

- Code secret ! lança-t-il, en entrant à la suite d'une Cat interloquée. Il suffit de taper cinq fois, d'attendre une seconde, et de donner deux derniers petits coups. Après quoi, la porte s'ouvre, et permet de passer !

- C... Comment tu connais ça ? se stupéfia la brunette, en réalisant en même temps que c'était précisément ce code secret qu'avait utilisé Mr Lupin, quelques minutes plus tôt.

- Je l'ai découvert un peu par hasard..., chuchota Vince. En fait, c'était en cinquième année : j'étais adossé contre la porte d'entrée, en train de m'ennuyer, et je tapais distraitement son bois, avec ma baguette magique, reproduisant un rythme qui me passait par la tête... lorsque l'un des battants s'est ouvert, et m'a fait comprendre que je venais de composer un code secret ! Je t'assure qu'il m'a été dur de retrouver ce code. Mais, au prix de nombreux essais, je suis finalement parvenu à l'avoir de nouveau.

Demeurant profondément surprise (et un peu sceptique aussi), Cat se laissa recouvrir par la cape d'invisibilité que lui déposa Vince sur la tête, et se retrouva bientôt avec lui, sous cet ample vêtement.

Maintenir la cape sur eux deux, tout en gravissant les marches du grand escalier de marbre, n'était pas évident, d'autant plus que le tissus était déchiré, et qu'un trou béant se laissait voir au niveau du dos de Cat. Cette dernière tentait péniblement de ramener derrière elle le morceau de tissus qui se détachait, afin de rester entièrement invisible, et Vince se serrait contre elle, pour être sûr que la cape ne le découvre pas, lui non plus.

- Arrête de me coller comme ça, bon sang ! Je n'arrive même plus à marcher ! se plaignit Cat, à voix basse.

- Et toi, fais attention à la marche ! T'as failli nous faire tomber tous les deux ! riposta Vince, en un murmure.

- On aurait été dans de beaux draps...

- Allez, maintenant, on part à droite...

- Mais non ! C'est à gauche !

- Mais non ! A droite ! Reste avec moi, sinon la cape va nous lâcher !

Au bout de dix longues minutes, durant lesquelles les deux amis peinèrent à coordonner leurs mouvements et à se mettre d'accord sur les directions à prendre, Cat et Vince arrivèrent enfin à la tour ouest des Serdaigle, et se félicitèrent de n'avoir croisé ni Miss Teigne ni Rusard dans les couloirs obscurs qu'ils venaient de traverser. Dans la salle commune, occupée par une vingtaine d'élèves, le châtain dut expliquer aux regards inquisiteurs qui dévisageaient Cat qu'il avait lancé à celle-ci un sortilège de Jet d'eau, lors d'un prétendu règlement de compte dans un couloir du troisième étage. La jeune fille quitta finalement son ami, non sans lui dire bonne nuit, le remercier encore une fois pour lui avoir sauvé la vie, et lui promettre de raccommoder sa cape d'invisibilité dès que possible.

Le lundi midi, premier jour de février, l'appréhension était presque à son comble, pour Cat. Elle tremblait de partout, et Cerise, qui mangeait en face d'elle, interprétait ces secousses comme une réaction naturelle au froid qui régnait dans la Grande Salle.

- Mais non ! disait Anna. Tu vois bien qu'elle appréhende déjà pour le match de Serdaigle contre Gryffondor, samedi prochain. Si notre équipe perd, nous n'aurons plus aucune chance de remporter la coupe. Ne t'inquiète pas, Cat, la rassura celle aux cheveux argentés, en posant une main compatissante sur la sienne. Je suis aussi anxieuse que toi. J'essaye juste de ne pas le montrer.

Mais ce n'était pas pour ça que Cat avait peur. Elle savait que, dans un peu plus d'une heure, avait lieu son cours de Défense contre les forces du mal. Et elle ressentait un étrange serrement à l'estomac, à la pensée que le professeur Lupin allait poser les yeux sur elle... Car la dernière fois qu'il l'avait fait, c'était lorsqu'elle l'avait suivi dans la nuit et qu'il s'était retourné vers elle, alerté par le craquement qu'il avait entendu derrière lui. L'avait-il dès lors reconnue ? Non... Si ça avait été le cas, Cat aurait eu des répercussions durant le week-end : Mr Lupin serait venu la trouver, à l'heure des repas, ou dans la salle commune des Serdaigle, pour pouvoir s'entretenir en privé avec elle, et lui demander ce qu'elle faisait à ses trousses, dans la soirée du vendredi 29 janvier, et alors que le couvre-feu avait sonné depuis belle lurette. Et puis, il avait fait tellement sombre, cette nuit-là... Les chances pour que Mr Lupin ait clairement distingué les traits du visage de Cathie étaient minimes. D'autant plus qu'une dizaine de mètres avaient séparé les deux individus à ce moment-là, et que la jeune fille n'avait pas laissé grand temps à son professeur pour qu'il puisse l'identifier, se jetant directement dans l'eau pour se cacher.

Cependant, si jamais l'enseignant avait vaguement reconnu son élève, il y avait de gros risques pour que, cet après-midi, en la voyant à nouveau, ses soupçons deviennent des certitudes, et qu'il la démasque pour de bon. Il la retiendrait alors à la fin du cours, lui demanderait des explications, et elle aurait beaucoup de mal à les lui fournir...

Désemparée, Cat jeta un coup d'oeil à Vince, assis à sa droite, pour chercher en lui un peu de réconfort. Mais naturellement, le garçon n'avait pas idée de ce qui tracassait son amie - elle ne lui avait rien dit -, et tout ce qu'il trouva de bon à faire fut de lui sourire et de lui présenter sa fourchette, au bout de laquelle était accroché un encornet dégoulinant de sauce tomate.

- Tu n'en veux pas ? s'étonna-t-il. C'est bon, pourtant, les calmars !

Et il engouffra le morceau de mollusque dans sa bouche, heureux de voir que sa plaisanterie fonctionnait toujours, et que Cat détournait la tête avec dégoût. Elle savait qu'il faisait exprès de la provoquer : depuis samedi midi que Vince s'était adonné à un régime de calmars, rien que pour le plaisir de rappeler à Cat sa mésaventure du vendredi soir.

¤~

Le cours de Défense contre les forces du mal arriva plus vite que prévu, et, pour la première fois de sa vie, Cat s'y rendit avec crainte. Lorsqu'elle franchit la porte près de laquelle se tenait Mr Lupin, elle baissa les yeux et tâcha de passer le plus vite possible à côté de lui, déjà pleine de culpabilité. Pendant toute l'heure, elle porta un intérêt bien étrange aux ongles de sa main droite et ne perturba cette observation que pour prendre quelques notes de ce que racontait l'enseignant.

Cependant, lorsque le cours se termina et que Cat se leva pour quitter la salle, elle voulut jeter au moins un regard à son prof, histoire de se soulager la vue, et de ne pas être trop en manque de lui. Et alors, tout fut fini.

Leurs yeux se croisèrent, et la jeune fille lut dans ceux de l'homme une profonde méfiance et un profond ressentiment. Même son pâle visage semblait contracté. Le coeur de Cat se glaça.

Paniquée, flageolante de peur, la malheureuse se fraya un chemin parmi les élèves de sa classe qui se dirigeaient vers la sortie, les repoussant nerveusement sur les côtés, pour quitter les lieux le plus rapidement possible, avant que Mr Lupin ne la rattrape et ne la coince.

- Encore enfie de fomir ? s'inquiéta Axelle.

- Euh... Oui, oui ! lança sa camarade, avant de s'enfuir en courant dans le couloir.

Le lendemain matin fut pire que tout. A son réveil, Cat s'estima énormément chanceuse d'avoir pu survivre au dîner de la veille et à la soirée qu'elle avait passée dans la salle commune, sans avoir été interceptée par le professeur Lupin. Elle refusa cependant d'aller prendre son petit déjeuner avec ses amies, prétextant qu'elle se sentait à nouveau malade et incapable d'avaler quoi que ce soit.

A la récréation de dix heures - à laquelle elle réchappa également de façon miraculeuse -, la brunette envisagea très sérieusement de sécher le cours de Défense contre les forces du mal. C'était la première fois de sa vie qu'elle s'apprêtait à prendre une telle décision, mais elle sentait au fond d'elle que c'était pour son bien, que c'était là la garantie de pouvoir rester hors de portée de Mr Lupin, de sa colère, et de son besoin d'obtenir des explications cohérentes. Jamais elle n'aurait cru qu'un jour elle en viendrait à souhaiter manquer le cours du professeur Lupin. Aujourd'hui, pourtant, cela lui paraissait indispensable.

A onze heures, avec tout le courage dont elle était capable de faire preuve et qu'elle avait réussi à amasser dans son coeur, Cathie Mist se tenait debout, rangée au milieu d'une file d'élèves, attendant dans le couloir, à côté de la salle de Défense contre les forces du mal. C'était, sans aucun doute, une preuve de bravoure exceptionnelle, qu'elle manifestait ici ! La jeune fille, aidée par sa bonne conscience, avait réussi à refouler cette lâcheté qui l'avait initialement poussée à se dérober aux yeux de Mr Lupin. Mais c'était aussi un courage qui avait le goût d'une faiblesse, dans le sens où Cat n'avait pas osé tenir la résolution qu'elle s'était donnée dès le début. Car, qu'est-ce qui était le plus courageux ? Risquer de sécher le tout premier cours de sa vie, avec le danger d'obtenir une retenue ? Ou bien faire face à l'homme sur qui elle avait commis une faute - celle de le suivre à son insu -, et qui menaçait de le lui faire payer ?

En dépit de toutes les craintes de la brunette, le cours se passa bien. Ou plutôt, il se déroula d'une manière totalement neutre, et jamais Mr Lupin ne s'attaqua à Cat durant la leçon, pas même à la fin de l'heure, lorsque les élèves rangèrent leurs affaires et que Cat fut la plus susceptible d'être abordée par le professeur.

Notre amie quitta cependant la salle avec un brin de regrets, car pendant tout le cours, elle n'avait pas une seule fois levé la tête pour regarder Mr Lupin, et à présent qu'elle s'en allait, elle commençait déjà à éprouver un semblant de manque. Depuis hier après-midi qu'elle n'avait pas vu son visage... Elle aurait au moins pu lui jeter un petit regard en biais - il ne l'aurait sûrement pas remarqué. Mais la peur de croiser à nouveau ses yeux accusateurs, la culpabilité aussi, lui avaient fait garder la tête baissée.

A midi, dans la Grande Salle, Cat s'en voulait d'avoir été aussi craintive. Après tout, le professeur Lupin ne lui avait rien dit, elle s'en était encore une fois tirée sans dommage. Peut-être qu'elle avait mal interprété le regard que lui avait lancé Mr Lupin, la veille, à la fin de son cours... Peut-être que ce regard n'avait jamais rien eu de méchant... Si c'était cela, alors elle avait été bien bête de ne pas avoir profité de l'enseignant au cours de onze heures. Car maintenant, le vide qu'elle ressentait dans son coeur se faisait de plus en plus grand, et cette sensation lui était insupportable. Elle ne cessait de tourner nerveusement la tête, en direction de la table des profs, mais Mr Lupin était beaucoup trop loin, et les coups d'oeil qu'elle parvenait à lui jeter ne duraient jamais plus d'une fraction de seconde, car elle redoutait que ses copines ne s'aperçoivent de son micmac. Cette situation ne lui plaisait guère, et lui convenait encore moins. Si seulement elle n'avait pas eu peur d'affronter son regard, ce matin... Si seulement elle avait été... invisible !

Ses yeux s'agrandirent d'eux-mêmes, suite à ce déclic qui venait de se produire dans sa tête. Etre invisible ! Mais bien sûr ! C'était ce qui lui restait à faire ! Puisqu'elle avait son après-midi de libre, puisque ses copines allaient l'abandonner pour, comme à l'habitude, s'enfermer toutes les trois dans la salle commune des Gryffondor et perdre leur temps avec le petit ami de Cerise... C'était le moment d'en profiter pour faire ce qu'elle voulait ! En l'occurrence : enfiler sa cape d'invisibilité et s'infiltrer une nouvelle fois dans un des cours de Remus Lupin !

Cat ne perdit pas de temps : dès la fin du déjeuner, elle monta jusqu'au dortoir des Serdaigle, pour y chercher le vêtement magique, et à deux heures de l'après-midi, lorsque la sonnerie retentit, notre amie était déjà à l'intérieur de la salle de Défense contre les forces du mal, placée à un point stratégique, qui, si tout allait bien, lui permettrait de rester en sécurité durant l'heure entière, tout en lui offrant une très bonne vue sur le professeur Lupin.

Elle se tenait debout, légèrement appuyée contre le rebord de la table installée devant une des grandes fenêtres de la salle, et qui était jonchée d'objets en tous genres. Son dos était chauffé par les rayons du soleil qui traversaient les carreaux, et devant elle se trouvaient le bureau de l'enseignant et la première rangée de tables d'élèves. Mr Lupin, après les quelques notes qu'il avait prises sur son petit calepin, se leva de sa chaise, et se dirigea vers la porte ouverte qui menait au couloir, pour dire à ses élèves qu'ils pouvaient entrer.

La pièce se remplit peu à peu d'adolescents aux allures décontractées. Les étudiants, qui s'installaient à leurs tables et déballaient tranquillement leurs affaires, arboraient les couleurs rouge et or des Gryffondor sur leur uniforme. Le lion dessiné sur leur écusson certifiait qu'ils appartenaient bien à la maison des élèves les plus courageux de l'école. Observant attentivement leur visage, Cat cherchait à deviner quel âge ils pouvaient bien avoir, mais lorsqu'elle vit les chevelures rousses de Fred et George Weasley, assis au fond, à droite de la classe, elle comprit tout de suite qu'il s'agissait des cinquième année Gryffondor.

Oh ! Quelle serait la tête d'Axelle et celle de Cerise, si jamais elles apprenaient que leur camarade s'était retrouvée dans la même salle que les deux jumeaux Weasley, et qu'elle avait pu les regarder pendant une heure ! La pensée de ces deux Serdaigle jalouses à en crever fit sourire Cat, d'autant plus qu'elle savait qu'elle n'accorderait aucune importance aux Weasley, durant le cours. Ces deux imbéciles, elle n'en avait que faire. Elle, tout ce qui l'intéressait, c'était le professeur Lupin.

Ce dernier paraissait jovial. Après avoir refermé la porte de la salle, il avait rejoint son bureau, et, à présent, il s'adressait à ses élèves avec une bonne humeur qui s'entendait dans sa voix. Son visage - que Cat voyait de profil, compte tenu de sa position - était éclairé de délice, son sourire habituel était encore plus distinct, et rehaussait les pommettes de ses joues. Il semblait vraiment prendre plaisir à enseigner. Ce plaisir en résultait qu'il était un prof excellent. Ses élèves l'écoutaient avec dévotion - même les frères Weasley, réputés pour être assez turbulents en cours, paraissaient passionnés par la leçon -, et ils participaient au cours de Mr Lupin avec une joie manifeste.

Cat, elle, ne cessait de l'admirer. Elle aurait pu le regarder ainsi pendant une éternité, sans se lasser. La douceur, la délicatesse des traits de son visage, son charme aussi, subjuguaient ses yeux. Le regarder, c'était comme... manger du chocolat, écouter du Avada Kedavra... En tout cas quelque chose de très très bon !

Souriant de bonheur sous sa cape, la brunette sentit alors que le morceau de tissu magique déchiré - qu'elle avait pourtant coincé derrière elle, contre le rebord de la table sur laquelle elle prenait appui, pour éviter qu'il ne bouge - venait de glisser sur le côté. Ouvrant des yeux horrifiés, Cat se dit que ça y était : son dos était découvert, à présent ! Même si cette partie de son corps était uniquement tournée vers la fenêtre, elle n'en était pas moins vulnérable, maintenant, et avait tous les risques d'être remarquée par certains élèves. Et si jamais quelqu'un la voyait, si jamais Cat était démasquée... Ce serait la disgrâce à jamais !

Paniquée, la jeune fille leva son bras gauche, pour tâtonner derrière son dos, récupérer le morceau de tissu baladeur, et le replacer convenablement. Mais lorsqu'elle eut réussi cette tâche, et qu'elle voulut abaisser son bras, pour le reposer le long de sa jambe, son coude heurta violemment une cloche de verre posée sur la table.

Dans un tintement assourdissant, l'objet percuta le sol, fit deux ou trois rebonds sur les lattes vernies, puis, à son dernier contact avec le plancher, le couvercle se détacha de son socle et laissa s'échapper une petite coquille d'escargot nacrée.

Ebahie par le fait que la cloche et le coquillage soient restés intacts malgré le choc qu'ils avaient reçu, Cat n'eut cependant pas le loisir de s'extasier de ce miracle, car elle releva immédiatement la tête, et se confronta à une trentaine de paires d'yeux qui observaient ses pieds.

Tous les Gryffondor, sans exception, fixaient le couvercle de verre et la coquille, la surprise et l'inquiétude se lisant dans leur regard. Même le professeur Lupin paraissait intrigué. Il s'était brutalement arrêté de parler, et fronçait à présent les sourcils en direction de Cat.

Celle-ci était tétanisée. Elle n'osait plus bouger, elle n'osait plus rien faire, elle était véritablement figée, les yeux écarquillés d'effroi, son corps tout entier parcouru de tremblements incontrôlables. Elle avait même peur qu'en restant trop collée contre cette table, ses spasmes finissent par secouer la planche de bois et fassent vibrer les objets qui se trouvaient dessus. Mais elle ne pouvait plus remuer d'un pouce, maintenant, car sinon le morceau déchiré de sa cape allait glisser à nouveau, et si cela se produisait, elle était perdue...

Elle l'était déjà, de toute manière. Toute la classe avait les yeux rivés sur elle, et tout le monde savait bien qu'un objet ne tombait pas tout seul de l'endroit sur lequel il était posé. Seule la présence d'un être invisible pouvait justifier ce fait étrange. Cette fois-ci, Cat venait elle-même de signer son arrêt de mort. Et, ciel ! C'était le professeur Lupin en personne qui allait être son bourreau, car il s'approchait d'elle à pas déterminés. C'était fini, Cat était morte, Mr Lupin allait lui retirer sa cape d'invisibilité, et tous les Gryffondor allaient se moquer d'elle. Elle ne pouvait pas s'échapper, il n'y avait pas d'issue, il ne lui restait plus qu'à attendre, attendre l'infamie.

Avec des yeux terrifiés, elle vit l'enseignant arriver à sa gauche. Son cerveau s'embrouilla aussitôt avec mille excuses et justifications qu'elle pourrait présenter. Son coeur s'emporta, et jamais auparavant il n'avait battu aussi vite que maintenant, pas même lorsque Cat avait failli être dévorée vivante par le calmar géant du lac. Ces tambourinements dans sa poitrine étaient phénoménaux. Cat sentait affreusement qu'elle était à deux doigts de faire une crise cardiaque. Et si jamais elle s'évanouissait, elle allait tomber directement dans les bras de Mr Lupin, car à présent il se tenait tout près d'elle.

Paralysée de peur, entendant son glas sonner, la brunette vit alors l'enseignant se baisser devant elle, et ramasser la cloche et le coquillage qui se trouvaient à ses pieds. En se penchant ainsi, les pans de sa vieille robe de sorcier glissèrent légèrement, attirés vers le sol, dans un bruissement de tissu agréable à l'oreille, de même que les mèches de ses cheveux châtains qui composaient sa frange, et qui tombèrent un peu en désordre sur son front. En le voyant ainsi, dans cette position presque vulnérable, comme s'il s'inclinait face à elle, à quelques centimètres de son corps invisible (elle n'avait qu'à tendre le bras pour lui toucher les cheveux), Cat ne put s'empêcher d'être séduite, et désormais son coeur ne battit plus seulement de peur.

Lorsque l'homme se redressa, la lueur d'affairement qu'il avait dans les yeux certifia à la jeune fille qu'il ne portait intérêt qu'à l'objet qu'il venait de ramasser, et qu'il n'avait nullement détecté sa présence clandestine dans sa classe. D'ailleurs, il ne semblait même plus se demander pourquoi ce coquillage était tombé, car, tout en le replaçant sur la table, à côté de Cat, il reprenait son cours, comme si de rien n'était, et continuait de parler.

- Les Bullicamps sont donc des créatures dont il faut se méfier, surtout lorsque l'on va nager dans les étangs ou les lacs...

Mais Cat n'écoutait rien de ce qu'il disait, bien trop pétrifiée par la situation dans laquelle elle se trouvait.

Le professeur Lupin n'était qu'à quelques centimètres d'elle, à sa gauche, occupé à ré-assembler le socle de bois, la coquille d'escargot et le couvercle de verre. Il était tellement près... Et il ne se doutait pas que Cat, elle aussi, était juste à côté de lui.

Le bras gauche du sorcier, qui s'activait avec l'autre bras à remettre en place l'objet qui était tombé, touchait presque le bras gauche de la brunette. C'était incroyable comme l'espace entre ces deux membres était infinitésimal : il ne s'agissait à peine plus que d'un demi millimètre ! Incroyable comme la chance de Cat était immense ! Celle-ci avait retenu son souffle, et s'était légèrement penchée en arrière, ses reins écrasés contre le dur rebord de la table, pour prendre un peu plus de distance par rapport au prof. Mais elle n'avait pu arrêter son coeur de battre à tout rompre. Jamais elle n'avait vu Remus Lupin d'aussi près.

Ses mèches de cheveux, qui tombaient, éparpillées, sur le côté droit de son front, avaient une sorte de négligence excitante. La jeune fille pouvait voir chaque détail de sa peau avec une précision extrême, la rougeur et le relief de ses deux grandes cicatrices, le bouton qu'il avait près de son oeil droit, et même les trous minuscules qui parsemaient légèrement ses joues, signes de l'emplacement d'un poil ou d'une coupure faite en se rasant. Sa moustache, elle, qui frisait élégamment sa lèvre supérieure, était si proche, que Cat pouvait en compter les nombreux petits poils bruns. Et ses lèvres... Oh ! Ses lèvres ! Roses et invitantes... Cat sentait les siennes frémir, tellement elle désirait les coller contre celles de Mr Lupin. Elle cette palpitation qu'elle ressentait sur le bout de sa bouche, elle se propageait partout dans son corps. Partout... Elle avait chaud... Elle avait envie de lui... Son coeur battait la chamade... Elle avait une pleine vue sur sa cravate... Celle-ci glissait légèrement hors de sa veste, elle n'était pas très droite... Cat aurait aimé la replacer correctement, mais il fallait se contrôler... Même si cela était dur, avec le torse de Mr Lupin qui manquait de frôler sa poitrine, avec son cou blanc qui était à deux doigts d'être chatouillé par son nez, et avec ce léger parfum qui se dégageait, si discret qu'il semblait presque inexistant, mais qui était bel et bien là, frais et chaleureux à la fois, faisant penser à la senteur des bois et des fruits, peut-être même mélangé à l'odeur mentholée de sa mousse à raser... Le désir était à son comble... Cat était enivrée... Elle aurait, plus que jamais, aimé fermer les yeux, savourer cet instant, et, lentement, déposer un baiser dans son cou, pour le remercier de lui offrir un tel plaisir.

Mais bientôt ce rapprochement de corps si divin se termina, et Mr Lupin retourna à son bureau pour continuer son cours, laissant derrière lui un objet réparé et une jeune fille toute chamboulée. Celle-ci regarda son prof s'éloigner avec des yeux charmés, troublés par toutes les sensations que ce corps à corps avait fait naître en elle. Il lui fallut un certain temps pour se remettre de ses émotions, mais alors, lorsqu'elle y arriva, plus qu'une seule pensée affluait dans son esprit, une pensée qui résumait toutes les autres : elle l'aimait. Elle l'aimait plus que tout, elle l'aimait à la folie !

Sans que Cat s'y soit attendue, la sonnerie de quinze heures retentit, et provoqua un sursaut chez la brunette, qui faillit renverser à nouveau le coquillage nacré.

- La semaine prochaine, nous commencerons à étudier les Détraqueurs, annonça le professeur Lupin, tandis que ses élèves rangeaient leurs affaires. C'est un chapitre plutôt difficile ; il nous faudra donc voir un peu de théorie, avant de débuter la pratique, qui consistera à repousser un Détraqueur. N'oubliez pas d'apporter votre livre des Forces du mal surpassées !

Cat attendit sagement que tous les étudiants mettent leur sac sur leur dos et disent au revoir à Mr Lupin, avant de pouvoir enfin quitter sa place de prédilection, prenant soin de tenir le lambeau de cape derrière son dos, pour s'assurer de rester entièrement invisible aux yeux de la dernière personne présente dans la pièce : le prof. Mais, en franchissant la porte et en adressant un dernier regard à son bien-aimé, elle repensa aux dernières phrases qu'il avait prononcées... Les Détraqueurs... Les cinquième année Gryffondor allaient étudier les Détraqueurs la semaine prochaine... Or, si le programme de Défense contre les forces du mal était le même pour tous les cinquième année, la classe de Cat allait, elle aussi, aborder les Détraqueurs, la semaine prochaine... Pourquoi, dans ce cas, le professeur Lupin n'avait-il pas prévenu les Serdaigle lors du cours précédent, comme il venait de le faire pour les Gryffondor ? Franchement, il y avait du favoritisme dans l'air...

¤~

Le dimanche matin, l'ambiance qui régnait à l'intérieur de l'école était des plus étranges. Cat n'avait encore jamais vu des Serdaigle arborant une mine aussi dépitée, ni des Gryffondor montrant de tels signes de fatigue sur leur visage. C'était l'heure du petit déjeuner, et tous se rendaient dans la Grande Salle, en descendant les marches de l'escalier de marbre avec des allures de zombies, la tête baissée, les cheveux en pétard, les yeux à moitié clos, et les bras ballants. La mollesse des élèves faisait qu'ils n'avançaient pas fort vite. Aussi ce ralentissement général provoqua-t-il un bouchon, et la vitesse de pointe des étudiants ne dépassa pas les deux marches par dizaine de secondes.

Cat était amusée par cette lenteur surprenante, encore jamais vue, et dans laquelle elle était entraînée malgré elle. Elle, contrairement à ses camarades de maison, se sentait parfaitement réveillée et joyeuse. Elle interprétait l'état de ses compagnons comme résultant du score du match de Quidditch de la veille : les Serdaigle étaient désespérés, parce qu'ils avaient perdu, et parce qu'ils n'avaient désormais plus aucune chance de remporter la coupe ; les Gryffondor étaient exténués, parce qu'ils avaient gagné, et parce qu'ils avaient fait la fête toute la nuit.

Mais lorsque Cat arriva enfin en bas des marches de l'escalier, une tout autre option s'ajouta à celles qu'elle avait imaginées. Face à elle, devant la porte d'entrée géante du château, se trouvait le professeur Flitwick (« Et fous afez fu comme il est tout petit, par rapport à la porte ! » avait soufflé Axelle), et il tenait entre ses mains un grand poster représentant la figure de Sirius Black. Il porta bientôt la photo en lévitation, à l'aide d'un Wingardium leviosa maîtrisé à la perfection, et une fois que l'affiche fut à égale distance du sol et du plafond, le directeur des Serdaigle utilisa à nouveau sa baguette magique pour créer un lien argenté entre la porte d'entrée et le poster flottant.

- Oh non ! s'exclama Cerise, en plaquant une main contre sa bouche, le souffle court. Sirius Black est revenu !

- Quoi ? sursauta Cat.

- Il s'est à nouveau infiltré dans le château ! répéta la jeune fille aux cheveux longs. C'est pour ça que le professeur Flitwick a fouillé notre salle commune, et qu'il a inspecté notre dortoir, cette nuit !

- Ah bon ? Il a inspecté notre dortoir, cette nuit ? s'étonna la brunette, qui n'était visiblement pas au courant.

- Oui, évidemment, toi tu étais la seule qui continuait de dormir à poings fermés, quand c'est arrivé..., expliqua Cerise. Mais maintenant, c'est pour ça qu'il ensorcelle la porte d'entrée avec une photo de Sirius Black : c'est pour l'empêcher de laisser passer une nouvelle fois le criminel.

- Ca veut donc dire que Sirius Black est ressorti du château..., conclut Cat, qui considéra ceci comme un point positif.

- Je me demande comment il a encore fait pour entrer... Et comment il a pu être repéré par les professeurs...

- Moi, je peux te le dire ! lança un Gryffondor aux cheveux roux et aux tâches de rousseur, qui ressemblait à s'y méprendre aux jumeaux Weasley, et qui suivait de près les quatre Serdaigle. Sirius Black a essayé de me tuer !

- Oh ! s'exclama Axelle, en plaquant à son tour sa main sur sa bouche, comme horrifiée par ce que venait de dire le garçon.

Ce dernier sourit.

- J'étais tranquillement en train de dormir..., raconta-t-il, manifestement réjoui de se lancer dans le récit d'une histoire passionnante. Lorsque, soudain, j'ai entendu un grand déchirement au-dessus de ma tête... J'ai d'abord cru qu'il s'agissait de mon rêve, mais bientôt j'ai senti un puissant courant d'air frais souffler sur ma nuque... Alors je me suis immédiatement redressé dans mon lit, et là je l'ai vu, à quelques centimètres de moi, debout, avec le rideau de mon baldaquin à ses pieds... Il était affreux... Avec des yeux blafards, et une tête de mort... Et le pire, c'est qu'il tenait entre ses mains noueuses un immense couteau, qui avait pratiquement la taille d'une épée... Il l'a lentement soulevé au-dessus de ma poitrine, et tout de suite j'ai compris qu'il allait me tuer... Alors je me suis mis à hurler, et j'ai plongé ma main sous mon oreiller, pour attraper ma baguette et me défendre... Mais lorsque je l'ai saisie entre mes doigts, Sirius Black était parti... Après quoi, le professeur McGonagall est arrivée, et elle a sonné l'alerte générale...

- Ouaaah ! commenta Axelle, qui était vraisemblablement la seule des quatre Serdaigle à être estomaquée. Tu as de la chance de t'en être tiré !

- Eh oui ! certifia le rouquin, avec un grand sourire étincelant, qui montra toutes ses dents. Je suis Ron Weasley ! Le garçon qui a survécu !

Sur ce, le Gryffondor disparut parmi la foule des élèves qui se traînaient vers la Grande Salle, et Cat, Axelle, Cerise et Anna passèrent à côté du professeur Flitwick, qui continuait de lancer ses sortilèges sur le poster de Sirius Black.

« Tant que ce n'est pas ma photo... » se rassura Cat, en songeant à l'idée saugrenue qu'un enseignant ensorcelle la porte d'entrée pour empêcher Cathie Mist de sortir la nuit et de poursuivre Mr Lupin dans la cour de Poudlard.

Lorsque les quatre copines atteignirent la table des Serdaigle dans le réfectoire, une nouvelle bizarrerie se présenta aux yeux de Cat. Pour la première fois depuis son réveil, celle-ci remarqua qu'Axelle et Cerise soutenaient chacune sur leur épaule une Anna apparemment mal en point. Elle semblait, en effet, grandement affaiblie, et incapable de marcher toute seule. La blonde et la brune déposèrent avec un peu de peine leur amie aux cheveux argentés sur le banc, en face de Cat, qui s'était déjà attablée sans ménagement.

Lorsqu'Axelle vint enfin s'installer à côté d'elle, et que Cerise s'assit à la droite d'Anna, en demandant à cette dernière si tout allait bien, la brunette comprit alors pourquoi sa camarade était en aussi mauvais état. Encore une fois, cela était dû au résultat du match de Quidditch disputé la veille. L'équipe des Serdaigle avait perdu, elle n'avait plus de chances de remporter la coupe... Il était vrai que pour une aussi grande supportrice qu'Anna, il y avait de quoi être anéantie. Mais tout de même ! Cat crut rêver lorsqu'elle vit Cerise porter une cuillerée de marmelade vers les lèvres de la désespérée.

Pour éviter de rigoler face à cette situation qui n'avait en fait rien de drôle, la brunette baissa la tête sur son bol de chocolat chaud, qu'elle touilla doucement. Ce fut à cet instant que le songe qu'elle avait fait durant la nuit lui revint en mémoire. Par un flash aussi soudain qu'inattendu, elle se revit, elle, tenant dans une main un vieux fer à repasser, tout fumant, et tenant dans l'autre la cravate jaune accrochée au cou de Mr Lupin. Et elle demandait : « S'il vous plaît, monsieur, est-ce que je pourrais repasser vos habits ? ». Mais le professeur semblait réticent, et elle persistait à vouloir le convaincre : « Ne vous inquiétez pas ! Ca ne vous coûtera rien ! Je le ferai gratuitement ! Et avec tout mon amour ! ». Buvant pensivement une gorgée de sa boisson chocolatée, Cat se dit que ce rêve était décidément le plus absurde qu'elle ait jamais fait...

Devant elle, Cerise tapotait l'épaule affaissée d'Anna, tout en lui chuchotant des mots à l'oreille, pour tenter de la réconforter.

- Il avait un Eclair de Feu, tu sais... Personne ne pouvait gagner, contre un Eclair de Feu...

Et le professeur Lupin continuait de refuser l'offre, pourtant si tentante, de la brunette. « J'aimerais tellement toucher vos chemises, les caresser, en prendre soin... Je vous assure que je ferai de mon mieux pour ne pas faire de plis, en les repassant ! ». Face à l'entêtement de son enseignant, Cat se mettait maintenant à le supplier : « S'il vous plaît ! Laissez-moi au moins repasser votre cravate ! Rien que votre cravate ! ». Elle était prête à se laisser tomber à genoux, entraînant avec elle Mr Lupin, à qui elle restait agrippée par la cravate (tant désirée). Mais l'homme rejetait toujours sa proposition, et bientôt la jeune fille s'énerva : « Très bien. Dans ce cas, je ne vois plus qu'une solution ». Et, jetant son fer à repasser, elle sortit sa baguette de sa poche, et la pointa sur Remus Lupin. « Mais vous êtes complètement folle ! » dit celui-ci. « Oh oui, je suis folle de vous ! » répondit Cat.

Sur ce, la brunette ne put s'empêcher de glousser dans son bol de chocolat chaud. Cerise leva vers elle des yeux révoltés.

- Et ça te fait rire ? grinça-t-elle des dents.

- Hihihi ! Oui !

- Ne fais pas attention à elle, Anna. Elle est sans coeur.

Mais puisque Cat était surtout folle de Mr Lupin, elle allait tout faire pour s'en rapprocher encore plus ; un peu comme mardi dernier, lorsqu'elle s'était pratiquement collée à lui.

Normalement, les Serdaigle cinquième année devaient étudier les Détraqueurs à partir du lendemain, lundi. Mr Lupin les en avait seulement avertis vendredi matin. Comme ce chapitre de Défense contre les forces du mal semblait être particulièrement coriace, Cat voyait là une bonne occasion de tenter sa chance pour approcher à nouveau le professeur Lupin. Le plan machiavélique qu'elle construisait à présent dans sa tête, tout en mangeant ses toasts, la réjouissait. Car, si elle était suffisamment habile pour faire semblant de ne rien comprendre à la leçon, pour faire exprès de tout rater aux exercices pratiques, peut-être que, comme Harry Potter, elle aurait droit à des cours particuliers avec Remus Lupin...

  


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Hey ! Excuser moi, j'ai énormément de travail, et cette histoire prend du temps à traduire, ce n'est pas que les mots sont dur, c'est que les chapitre sont juste super long. Donc voila, passer une bonne journée ;) 

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