Les confessions
J'avais un peu peur de ce qui allait se passer ce soir.
Mais j'avais surtout très hâte.
Maxence s'installa derrière le volant et démarra la voiture. Le trajet jusque chez lui s'effectua dans un doux silence peuplé d'œillades échangées aux feux rouges et de sourires en coin.
Au bout d'une dizaine de minutes, Maxence gara la voiture devant un duplex en briques rouges. Un tilleul aux branches dénudées se dressait fièrement devant le bâtiment et une fine couche de neige recouvrait le sol comme un tapis de velours blanc. C'était joli. Invitant.
— Voilà, c'est ici, m'indiqua inutilement Maxence.
Nous sortîmes de la voiture et je le suivis jusqu'à la porte, qu'il déverrouilla. Il me fit signe de passer devant lui et je pénétrai dans le logement plongé dans la pénombre.
Maxence me rejoignit et tâtonna pour trouver l'interrupteur au mur. Une douce lumière se répandit alors dans le hall.
Le duplex avait cette odeur caractéristique de construction récente, comme un mélange de bois coupé et de peinture fraîche. Un léger parfum masculin flottait aussi dans l'air, preuve que le logement était bel et bien habité.
Je retirai mes bottes. Les doigts de Maxence effleurèrent les miens lorsqu'il récupéra mon manteau.
J'étais certaine que c'était délibéré.
— Bienvenue dans mon humble demeure, lâcha-t-il en posant le bout des doigts dans mon dos pour m'inciter à avancer. Promis, ce n'est pas un champ de mines, fais comme chez toi. Je te sers une bière?
— S'il te plaît.
Je découvris avec plaisir l'endroit où Maxence habitait. Le mobilier était moderne, les pièces étaient propres, avec juste ce qu'il fallait de petites babioles et de désordre pour rendre l'endroit chaleureux.
Je pris place sur le divan anthracite du salon et repliai mes jambes sous moi en faisant attention pour que le bas de ma robe ne remonte pas trop haut sur mes cuisses.
Mes yeux poursuivirent leur découverte de la pièce. Au sol, un tapis couleur crème recouvrait une partie des lattes de bois sombre du plancher. Une table basse en verre était posée par-dessus, tout près du fauteuil. Des stylos à l'encre bleue – la préférée de Maxence – traînaient sur la table, de même que quelques feuilles annotées, une tasse vide et son ordinateur.
Le chercheur me rejoignit alors sur le fauteuil avec une bouteille de bière froide dans chaque main. Il m'en tendit une, puis la cogna contre la sienne en me regardant dans les yeux.
— Merci. Santé, ajoutai-je avant de boire une longue gorgée.
J'essuyai ma bouche du revers de la main lorsqu'une goutte coula à la commissure de mes lèvres.
— C'est l'heure des confessions, Maxence, annonçai-je alors.
Ce dernier n'avait allumé qu'une lumière diffuse, de sorte que le salon était plongé dans une ambiance tamisée et intime. Le cadre parfait pour les confidences.
— Encore? s'étonna-t-il. Je croyais que tu m'avais déjà cuisiné lorsque nous sommes allés au congrès à Montréal.
Je secouai la tête.
— Ce n'était que le début.
— Que veux-tu savoir, Charlie?
Je fis mine de réfléchir.
Qu'avais-je envie de savoir à son sujet?
Des dizaines de choses. On pourrait y passer la nuit. Toutefois, une question en particulier me brûlait les lèvres, mais je ne devais surtout pas la poser. Ça risquait de plomber l'ambiance.
Mais j'étais trop curieuse.
— Disons... Comment s'est terminé ta dernière relation amoureuse?
Maxence haussa les sourcils. Il ne s'attendait manifestement pas à cette question.
Je sentis la nervosité gagner du terrain en moi et avalai une gorgée de bière pour la chasser.
— Oh, on aborde les sujets qui fâchent, lâcha Maxence sur un ton badin, pas offusqué le moins du monde. Je vois. Pour tout t'avouer, je me suis fait jeter comme une vieille chaussette.
— Nooon?
— Eh oui. Elle trouvait que je travaillais trop.
Quelle idiote.
— Tu as dû être triste...
— Non. Pas vraiment. Notre rupture m'a permis de travailler davantage.
— Mais tu es impossible! m'exclamai-je en lui donnant une légère tape sur le genou.
Nous partageâmes un rire, puis Maxence redevint sérieux.
— Je plaisante, mais elle avait raison, reconnut-il. Ça m'a fait réfléchir. Maintenant, j'essaie que le travail ne déborde pas trop sur ma vie personnelle. Et toi? Tu t'es fait jeter comme une chaussette?
— Oui, avouai-je alors avec une grimace.
Maxence eut l'air étonné.
— Vraiment? Pourquoi?
— Il me trouvait « trop intense ».
Mon interlocuteur me dévisagea sans ciller avant de lâcher d'un ton léger :
— Je ne vois pas ce qu'il a voulu dire par là...
Je le fusillai du regard. Il resta sérieux encore une seconde avant d'éclater de rire.
Je lui balançai un coussin, qui s'écrasa contre son torse.
— C'est ça, moque-toi!
— Tu avoueras qu'il a raison, quand même!
Je joignis mon rire au sien. Je ne pouvais pas nier.
Le chercheur prit une gorgée de bière, un sourire aux lèvres. Je suivis des yeux le mouvement de sa pomme d'Adam lorsqu'il déglutit. Il posa sa bouteille sur la table, puis se rapprocha de moi sur le divan. Glissa son bras sur le coussin derrière ma tête. Il ne me touchait pas, mais je sentais la chaleur qu'il dégageait partout sur ma peau.
— Intense n'est pas toujours une mauvaise chose, lâcha-t-il à voix basse.
Mon regard se posa alors sur sa bouche. Je me remémorai notre baiser enflammé à l'arrière de sa voiture, deux semaines auparavant. J'avais enfermé ce souvenir dans un petit coffre de mon esprit, mais Maxence semblait posséder toutes les clés pour déverrouiller mes pensées et mes sentiments.
J'avais une furieuse envie de l'embrasser à nouveau. Cette pensée m'obnubilait, m'empêchant de poursuivre la conversation.
Je pris une gorgée de bière pour me donner du courage, puis posai ma bouteille à moitié pleine sur la table basse. Mes mains étaient froides à cause de la nervosité. Je les frottai l'une contre l'autre pour les réchauffer.
— Tu as froid? s'enquit Maxence en inclinant la tête.
— Un peu.
Mon interlocuteur posa sa main sur la mienne et recroquevilla mes doigts dans sa paume chaude. Son pouce se mit à dessiner des demi-cercles sur le dessus de ma main.
Le silence nous enveloppa.
Si Maxence ne ressentait pas la tension qui s'était installée entre nous, alors c'est que je n'y connaissais rien en relations humaines.
L'heure était venue pour un autre genre de confession. Je devais me jeter à l'eau.
— Tu sais, ce baiser dans ta voiture... Ce n'était pas une question de survie. Pas pour moi.
Maxence cessa de caresser le dessus de ma main. Tout son corps devint parfaitement immobile. Ses yeux bleus me dévisageaient avec toute l'attention du monde.
— Qu'essaies-tu de me dire, Charlie?
— Que si tu voulais recommencer, je n'opposerais pas de résistance, soufflai-je, le cœur battant la chamade.
Quelques secondes s'écoulèrent. Maxence leva la main vers mon visage, remit une mèche de cheveux derrière mon oreille. Sa paume se nicha ensuite dans le creux de mon cou et je sentis son pouce caresser la ligne de ma mâchoire.
Maxence était un homme réfléchi. Il ne prenait pas de décision précipitée comme moi. Il prenait son temps pour faire chaque chose correctement.
Mais là, il me faisait carrément languir, et il le savait.
Mon corps se consumait d'impatience en attendant ses lèvres sur les miennes. N'y tenant plus, je me redressai pour m'asseoir sur mes talons, posai les deux mains sur son torse et comblai la distance qui nous séparait pour l'embrasser.
Il ne fallut pas de temps pour que Maxence me rende mon baiser et que son côté réfléchi se perde dans la brume.
Ce n'était pas doux. C'était un baiser qui disait : « donne-m'en davantage ».
Les mains de Maxence semblaient enflammer ma peau partout où il les posait. Je frissonnai lorsque ses doigts s'attardèrent sur ma clavicule avant de glisser sous le tissu de ma robe, dénudant mon épaule au passage. Je sentis son pouce taquiner la bretelle de mon soutien-gorge.
— Dentelle noire? s'enquit alors Maxence en se détachant pour me regarder, un air entendu sur le visage. Tu avais besoin de booster ta confiance en toi?
— Non. J'espérais que tu la vois.
— Alors tu devrais probablement retirer cette robe.
— Fais-le toi-même.
Maxence ne se le fit pas dire deux fois. Il se leva, m'attrapa par la taille et me balança sur son épaule telle une poche de pommes de terre. J'éclatai de rire et passai un bras autour de son cou tandis qu'il m'emmenait vers sa chambre.
Ce soir-là, je lui laissai voir toute la dentelle qu'il voulait.
***
Ils sont choux mes petits choux hein! (Ceux qui ne sont pas d'accord, je vous raccompagne à la sortie.)
Je prévois que les prochains chapitres soient un peu plus longs à écrire, donc les publications risquent de s'espacer un peu. C'est que ça complique l'écriture quand les problèmes s'invitent...
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