Chapitre 9-1
Je me précipitai dans le couloir, mon but étant de ne pas m'attarder à cet étage et de rejoindre l'escalier de secours le plus rapidement possible. Même si les flammes n'avaient pas encore envahi le couloir, la chaleur était étouffante et à la limite du supportable. Mais le plus problématique était la fumée. Bien que le masque me permette de respirer à peu près normalement, le nuage presque opaque qui flottait à environ un mètre du sol, m'ôta toute visibilité au bout de quelques secondes.
Dans un premier temps, comme je connaissais ce couloir comme ma poche, je tentai de m'orienter de mémoire. Mais après m'être cognée trois fois dans un mur, dont la dernière assez fortement pour avoir été sonnée quelques secondes, je fis la seule et dernière chose qu'il me restait à faire et me couchai sur la moquette élimée.
Une fois au ras du sol, je me rendis compte que j'avais beaucoup trop dévié de ma trajectoire. En fait je n'avais fait que tourner en rond et me trouvais, à présent, en plein milieu du couloir. Je m'orientai donc dans la bonne direction et commençai à ramper...avant de m'arrêter en gémissant au bout de quelques secondes, terrassée par la douleur. Le mouvement avait été trop brusque et surtout beaucoup trop violent pour mon bras gauche, rouvrant la blessure, qui à défaut d'être guérit, avait déjà commencé à se refermer.
Comprenant bien que je ne pouvais pas rester là à faire la carpette au beau milieu d'un immeuble en flamme, je serrai les dents et tentai de me remettre debout à la seule force de mes jambes. J'y arrivai, mais le mouvement trop rapide, conjugué à l'effort important que cela m'avais demandé, me fit tourner la tête. Je fermai les yeux dans l'espoir que le malaise se dissipe...mais cela ne fit que l'empirer, au contraire. Je titubai, le sol semblant se dérober sous mes pas et finis par m'écrouler sur une porte, qui s'ouvrit brutalement sous mon poids. Le feu qui faisait rage à l'intérieur paraissait avoir une vie propre et vouloir m'engloutir. Mais je m'écartai du brasier dans un mouvement réflexe qui arracha le masque de mon visage, tandis que je retombai sur ma main blessée dans un hurlement de douleur.
Cette fois-ci c'était fini, je ne me relèverai plus, me dis-je tandis que je commençai lentement à suffoquer, intoxiquée par les vapeurs toxiques, que l'incendie de plus en plus important répandait alentours. Je ne voulais pas finir comme ça, mais...mes forces m'abandonnaient. Je me sentais glisser avec soulagement dans l'inconscience, mes yeux gonflés et larmoyants se fermant sans doute pour la dernière fois. C'est alors que je me mis à délirer, ayant l'agréable sensation que des bras puissants me saisissaient et m'emportaient à l'abri, loin de toute cette chaleur et de toute cette souffrance.
— Respire Christina...respire, crus-je entendre quelqu'un me supplier à l'oreille d'une voix angoissée.
« Je ne peux pas, c'est trop dure ». Avais-je envie de répondre à cette voix imaginaire, venue sans doute de mon subconscient. Je n'avais plus qu'un désir, arrêter de lutter et me reposer enfin, ce que mon esprit têtu n'avait pas l'air de comprendre.
— Christina !
Mon prénom, hurlé dans un cri affolé proche du désespoir, me ramena à la surface quelques secondes. Assez longtemps pour que je me rende compte, que ce n'était pas un rêve. J'étais bien dans les bras de quelqu'un, qui faisait tout ce qu'il pouvait pour me sauver et me mettre à l'abri. Qui que soit cette personne, j'aurai voulu lui parler, la remercier...mais plus aucun son n'arrivait à sortir de ma bouche, ni aucun souffle à y entrer d'ailleurs.
Je sentis confusément des soubresauts de plus en plus heurtés, tandis que je me sentais partir de nouveau. Avant de sombrer totalement, je cru entendre le fracas d'une porte métallique que l'on ouvrait brutalement. Puis mon corps atterri durement sur le sol froid et humide, tandis que des mains dures malmenaient mon thorax et que des lèvres inquisitrices se posaient durement sur les miennes, faisant pénétrer de force de l'air dans mes poumons.
Je luttai contre ce traitement violent et douloureux, je ne voulais qu'une chose...que ça s'arrête.
— Christina, je sais que tu m'entends...mais respire bordel !
Cette voix...je crois que c'est cette voix, plus que le massage cardiaque, qui me donna la force de reprendre une grande inspiration douloureuse, qui me brula atrocement les poumons. J'essayai instantanément de parler et d'ouvrir les yeux pour confirmer ce que j'avais entendu...pour être sûre. Mais mon corps ne semblait plus m'obéir et tout ce qui sortit de ma bouche, furent des quintes de toux violentes et des hauts le cœur spasmodique.
— Oui, c'est bien...c'est ça, m'encourageait la voix désormais moins paniqué de Jude.
Car c'était lui. Maintenant que je reposai à l'abri de ses bras, ses doux cheveux frôlant ma joue, j'en étais certaine. Désormais sûre d'être en sécurité dans les bras de l'homme que j'aimai et en qui je faisais toute confiance, je me laissai aller. Soulagée et heureuse que nous soyons tous les deux en vie. C'est la pluie, froide et pénétrante qui me força à ouvrir les yeux, rencontrant immédiatement le visage inquiet de Jude, penchée sur moi. Je n'avais pas rêvé pensais-je avec soulagement, en essayant de faire le point sur son regard.
— Tu...tu es vivant. Arrivai-je à prononcer d'une voix rauque, suivit d'une nouvelle quinte de toux, qui m'arracha la moitié de la gorge et du poumon au passage.
— Bien sûr que je suis vivant, s'exclama-t-il surpris. Qu'est-ce qui a bien pu te faire penser le contraire ?
— Les cheveux...la mèche...sur la porte de l'appartement...je te croyais à l'intérieur...tentai-je maladroitement de lui expliquer avec ma voix défaillante.
Il me fixa un instant perplexe, ne semblant pas comprendre ce que j'essayai péniblement de lui expliquer. Puis son expression changea, passant de l'inquiétude à l'exaspération en quelques secondes.
— Quand vas-tu enfin te servir de tes pouvoirs et de notre lien, bon sang ? me sermonnât-il de son ton Judesque habituel.
Ce qui, d'un certain côté, me rassura sur mon état. Si son charmant caractère soupe-au-lait reprenait le dessus, c'est que je n'étais plus en danger de mort immédiat ! Mais cela eut aussi pour effet, de réactiver mes neurones défaillant et mon caractère de cochon.
— Quand tu m'apprendras, lui rétorquai-je aussitôt d'une voix plus claire, mêlée d'une pointe d'agacement.
C'était fou ce qu'un peu d'air frais et de remarques sarcastiques, pouvaient-être profitable à la santé !
— Où sont les autres, lui demandais-je en me redressant doucement. Et, au fait, pourquoi sommes-nous sur le toit ?
— Parce que tu avais un besoin urgent d'air frais, me rétorqua-t-il d'un ton montrant qu'il soulignait une évidence. Quant aux autres, je ne sais pas où ils sont. D'ailleurs, pourquoi t'ont-ils laissé toute seule dans cet enfer ?
— On a été séparé par l'incendie. On devait se retrouver au première étage, mais toutes les portes étaient fermés et...peu importe, m'interrompis-je toute seule. Il faut aller les rejoindre.
Joignant le geste à la parole, je commençai à vouloir me lever, quand Jude me stoppa d'un geste impérieux.
— Non mais tu crois aller où comme ça ? Tu es folle ou quoi ! Ta main est mal en point, tu t'es pris une balle et tu viens de passer à deux doigts de la mort...deux fois ! Alors métamorphes ou pas...tu restes là, m'ordonna-t-il d'un ton excédé et sans réplique. D'ailleurs, comment t'en es-tu sortie ? Ta chute...je t'ai senti tomber, me demanda-t-il d'une voix troublée en cherchant mon regard.
— Ce n'est pas toi qui m'a aidé, lui demandai-je à mon tour d'une voix surprise.
— Moi...comment aurais-je pu t'aider ? Je me trouvai à l'autre bout du bâtiment, au prise avec un commando particulièrement résistant, qui du coup à bien failli m'avoir.
— Tu es blessé, m'exclamai-je, soudain inquiète.
— Ne t'inquiète pas pour moi et ne change pas de sujet, reprit-il plus gentiment en s'agenouillant devant moi pour être à ma hauteur.
— Je ne sais pas au juste...j'ai eu la sensation que je volai...que j'étais devenue un oiseau. Cela a freiné ma chute et m'a permis de m'accrocher à la rambarde d'un balcon.
— Je n'y suis pour rien, me dit-il avec un sourire doux et rassurant. C'est toi et ta seconde nature qui s'affirme. Ta première vraie transformation est sûrement pour bientôt. Mais ne t'inquiète pas, je serais avec toi et tout se passera bien, me dit-il en me caressant la joue comprenant que tout cela m'effrayait.
Mais ce qui me faisait le plus peur n'était pas ma future probable transformation en rapace, mais plutôt le fait que je me sois presque transformé en panthère. Je n'osais pas lui en parler, peur que cela le contrarie ou ne me classe encore une fois dans la catégorie des bêtes de foire.
— Il faut que l'on rejoigne les autres, dis-je à la place pour changer de sujets.
— Hors de question. Il y a une petite armée là, dehors. Notre seul moyen de fuir, c'est par les toits.
— Par les toits ! Dis-moi, tu es au courant que le feu se propage toujours de manière ascendante ? Et puis...on ne peut pas les abandonner...
— Je vais aller les chercher. Toi reste...
— Tu rêves ! On ne se sépare plus. On voit bien ce que cela à donner la dernière fois...je viens avec toi.
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