Chapitre 17-2
Jude et moi échangeâmes spontanément un regard surpris et alarmé. Était-ce une expression qu'il avait employé au hasard...ou avait-il deviné ?!
— Non ?! Ne me dites pas que c'est...
— Non, justement on ne vous a rien dit et vous feriez mieux d'en faire autant, le menaça Jude d'une voix peu amène qui ne donnait pas vraiment envie de plaisanter.
— ça pour ne rien dire, vous êtes les champions du monde toute catégorie, s'emporta-t-il en s'approchant de Jude. Mais si je suis si gênant que ça...pourquoi suis-je encore là ?! Pourquoi vous être donner la peine de m'amener ici avec vous, puisqu'apparemment je suis moins que bienvenu !
— Il y a quelque chose de compliqué à comprendre, dans le fait que notre existence doit rester un secret ? persifla Jude, visiblement au comble de l'exaspération.
— Et donc...quoi ?! Vous tuez tous les humains qui se rendent compte de quelque chose ?! lui demanda-t-il sous le coup de la colère, avant de s'arrêter brusquement, choqué par l'implication de ce qu'il venait de suggérer.
— Bien sûr que non...commença Jude, visiblement aussi choqué que l'inspecteur mais sûrement pas pour les mêmes raisons.
— Là, il parle pour lui, l'interrompit Charles d'une voix de basse terrifiante en entrant dans la pièce.
Le simple fait qu'il soit là, sembla réduire la capacité du salon de moitié. Son aura envahi l'espace comme un orage en plein été, me coupant presque le souffle.
— Charles c'est un...
— Je sais très bien ce qu'il est ! l'interrompit-il de nouveau. Mais, si comme tu le dis, il est digne de confiance...je dois pouvoir lui confier mes plus vils secrets sans risque, n'est-ce-pas ? ajouta Charles en s'approchant de Worth, une lueur rusée dans le regard.
— Pas si ce sont des meurtres de sang-froid, répondit l'inspecteur, d'une voix claire et assurée tandis qu'il soutenait le regard de Charles sans faillir.
Je vis un sourire de triomphe s'épanouir sur le visage du métamorphe à l'entente de ces mots courageux...mais stupides ! Non mais qu'est-ce-qui avait pris à Worth ? Il était censé être intelligent, gémis-je intérieurement mais ne pouvant qu'attendre anxieusement la suite des évènements. Féline sentant mon inquiétude, vint frotter sa douce tête contre moi, en ronronnant doucement pour m'apaiser.
— Ah oui... ?! Alors nous avons un problème de taille...
— Je crois vous avoir prouvé que je n'avais aucune intention de trahir vos secrets ou de dévoiler votre existence, commença à se justifier Worth d'un ton un peu plus précipité, montrant qu'il était conscient de sa bêtise. Mais je suis et reste un policier et si un crime a été commis, métamorphe ou pas, je ne peux pas fermer les yeux.
— Et on ne le vous demande pas, intervint Jude dans une tentative improvisée de temporiser la situation. Juste de nous laisser régler nos problèmes entre nous et à notre manière.
Un silence assourdissant suivit ses paroles, les regards des deux métamorphes braqués sur l'inspecteur attendant tous deux qu'il prononce les bonnes paroles. Bien qu'à mon humble avis, pas pour les mêmes raisons. Charles n'attendait qu'une bonne excuse pour lui sauter à la gorge, alors que Jude lui, cherchait juste à lui sauver la vie.
— Tant que je ne suis pas impliqué, pas de problème...mais...
— Qu'est-ce qu'une Chimère ? demandai-je abruptement. Coupant volontairement la parole à Worth, avant qu'il ne prononce le mot de trop.
Mon intervention eut l'effet escompté, car ils reportèrent tous leur attention sur moi, bien que leurs expressions et regards respectifs diffères légèrement, en revanche ! Worth semblait à la fois surpris et soulagé et Jude atterré par mon intervention. Quand à Charles, il paraissait...au comble du bonheur ! Ce qui était forcément mauvais signe.
— Elle ne sait pas ?! demanda-t-il à Jude avec un sourire sardonique. N'obtenant pour toute réponse qu'un regard noir de l'intéressé.
— De toute évidence non, puisque je vous pose la question ! Rétorquai-je sentant la colère et la rage me gagner, à la vue de cet homme que je haïssais.
Me sentant vulnérable et impuissante, assise sur ce canapé alors que tout le monde était debout, je décidai de me lever. Je savais que j'étais faible et loin d'être totalement remise, mais il était hors de question que Charles s'en rende compte ou s'en serve contre moi. C'est donc les jambes flageolantes et les appuis incertains, que je me redressai et me tint devant mon ennemi, le plus stoïquement que je le pus. Charles sourit devant mes efforts inutiles et me contournant avec une lenteur étudiée, vint prendre ma place sur le canapé.
— Une Chimère est un métamorphe non contraint par une espèce totem et capable de se transformer en n'importe quel animal, dit-il soudain d'un ton docte et condescendant.
À l'entente de ces paroles, je chancelai légèrement. Mon dieu, ce pourrait-il que ce soit ça...que je sois une Chimère ?! Cela signifierait que je n'étais plus un paria, mais une métamorphe à part entière et que ce n'était qu'une question de temps pour que je me transforme enfin. Sa réponse m'apportait tellement d'espoirs que je ne relevai même pas ses manières désagréables sensées me déstabiliser.
— Enfin en théorie, reprit-il me sortant brutalement de mes pensées. Car c'est un mythe, une légende et si vraiment une telle créature existait, elle serait extrêmement rare et puissante...en résumé, aucune chance que ce soit toi, termina-t-il méchamment.
Mon espoir retomba comme un soufflé l'espace d'un instant, avant de revenir en force lorsque je me remémorai mes deux transformations avortées.
— Dans ce cas, pourquoi Shaw vous a-t-il demandé de l'aider à m'enlever. Pourquoi, si comme vous le dites, je n'ai aucune valeur ?
— Parce que c'est un fou et qu'à cause de toi...il tient mon fils, rugit-il en se relevant violement, ayant soudain du mal à calmer sa rage.
Il m'épingla du regard et les poings serrés, s'approcha de moi, jusqu'à n'être plus qu'à quelques centimètres de mon visage. Je n'avais qu'une envie reculer, mais par fierté et par peur de m'étaler de tout mon long, je ne le fis pas et attendis avec angoisse la suite des évènements.
— Pendant la chasse à l'homme, dans les bois, quand son deuxième fils est mort et qu'il a compris qu'il n'arriverait pas à assouvir sa vengeance comme il le souhaitait, Shaw à enlever un de mes hommes. Puis il m'a contacté pour me faire chanter, en me disant que si je ne te livrai pas à lui...il le tuerait et me renverrai son corps en plusieurs morceaux, m'assena-t-il d'une voix sourde et implacable en me foudroyant d'un regard hanté et accusateur avant de se reculer enfin, me laissant interdite.
— Luke ? intervint Jude d'une voix blanche. Ce n'était pas un accident ?
— Non, lui rétorqua Charles en se tournant vers lui. Quand il a compris que je ne céderai pas à son chantage et que je ne lui livrerai pas Christina...il a tenu parole.
Je sentis une vague de nausée me submerger à l'entente de cette phrase, bien plus parlante qu'un discours. Une personne que je ne connaissais même pas était morte à cause de moi...
— Pourquoi ne m'avez-vous pas livré, lui demandai-je d'une voix sourde remplie d'incompréhension.
— Parce que tu venais de risquer ta vie pour sauver ma petite fille, alors que rien ne t'y obligeais...
— Jude, lui, nous a tous sauver et ça ne vous a pas empêcher de le torturer, lui répliquai-je d'une voix que ma culpabilité inutile et la colère, rendaient agressive.
— Jude ! C'était juste un petit bonus, répondit-il en ricanant, tandis qu'il lui jetait un regard de pure haine. Lui et moi avons un compte à réglé et cela ne te concerne en rien. Je ne t'ai pas livré car mon honneur me l'interdisait et que...je l'avais sous-estimé, ajouta-t-il d'une voix amère et douloureuse. J'étais persuadé qu'il bluffait, mais j'avais tort. J'ai retrouvé le corps de Luke dans les bois, à peine une heure avant que tu ne viennes bêtement porter secours à Jude et c'est à ce moment que j'ai décidé de t'utiliser. Je t'avais déjà sauvé la vie une fois...je ne te devais plus rien. Puis, il y a deux jours, il a enlevé mon fils...j'ai donc décidé que sa vie était plus importante que la tienne...et je le pense toujours.
— Alors pourquoi avoir pris notre parti ?! Vous aviez toutes les cartes en mains...
— Parce qu'il m'a trahi et j'ai alors compris que cet homme n'avait aucune parole. Si je t'avais livré à lui, j'aurais signé l'arrêt de mort de mon fils. Mais tant qu'il croit que tu es une Chimère, j'ai encore le pouvoir de négocier.
— Quoi, tu veux la livrer à Shaw ! S'écria Jude d'une voix grondante.
— Et pourquoi pas ?! Elle n'est rien pour moi. Pourquoi sa vie serait-elle plus importante que celle de mon fils ?
— Parce que...c'est véritablement une Chimère, dit soudain Hannah d'une voix tremblante, debout dans l'embrasure de la porte. Je l'ai vu.
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