Chapitre 15-2


Je commençai à essayer d'insérer la clef dans la minuscule serrure d'une main tremblante, quand je sentis quelqu'un me saisir par derrière et poser le canon froid d'une arme sur ma tempe.

— Maintenant que j'ai ce que je veux, dit Shaw, dont les hommes étaient entrés dans la pièce sans faire le moindre bruit, nous allons partir.

Je vis Jude me lancer un regard désespéré, lorsqu'il se rendit compte de la posture précaire dans laquelle je me trouvais.

— Brûlez tout, ordonna soudain Shaw à ses hommes d'une voix triomphante, tandis qu'il se dirigeait vers la porte de derrière, un sourire éminemment satisfait aux lèvres.

Un hurlement sauvage de bête blessé retentit soudain dans la pièce me tétanisant sur place et me vrillant les tympans.

— Pas si vite, rugit Charles d'une voix à peine humaine, avant de se mettre à fixer Jude d'un regard inquiétant et se mettre à courir dans sa direction.

À ma grande surprise Jude, au lieu de tenter de me venir en aide, se mit à faire de même. Parvenus à environ un mètre l'un de l'autre, je vis à ma grande horreur, Charles glisser sa main gauche dans son dos et en ressortir une arme qu'il pointa en direction de Jude.

— Maintenant, lui hurla-t-il en lui lançant le révolver, au moment où Jude sautait et attrapait l'arme au vol, avant de se réceptionner d'un bond sur le sol, sans qu'aucun des gardes présents dans la pièce n'aient le temps de réagir.

Puis les deux métamorphes se lancèrent un dernier regard, se mirent dos à dos et commencèrent à ouvrir le feu.

Les balles se mirent aussitôt à fuser de tous côtés, transformant rapidement la salle en enfer sonore. Mon ravisseur me poussa sans ménagement en avant m'étranglant d'un bras, tandis qu'il me forçait à louvoyer entre les balles perdues et les piliers, cherchant à me faire atteindre la porte du fond où nous attendait Shaw.

— Attention crétin, je la veux vivante ! persifla ce dernier des quelques mètres qui nous séparait encore, tout en le foudroyant d'un regard assassin.

Même à cette distance, cela faisait froid dans le dos et je compris de quoi il avait peur, lorsque l'homme me plaqua violement contre un mur, m'empêchant de me prendre une balle perdue. Ils ne tiraient pas seulement pour faire diversion et pouvoir m'emmener en toute tranquillité, non...ils tiraient pour tuer, avec leurs munitions spéciales métamorphes. J'aurai voulu prévenir Jude, mais j'avais peur de le déconcentrer en l'interpellant, que ce soit verbalement ou mentalement.

Lui et Charles étaient toujours au centre de la salle, faisant des cibles parfaites pour les trois tireurs, intelligemment planqués derrière les grandes poutres en chêne, décidemment bien pratique. Ils parvenaient, par des tirs habiles et bien maîtrisés, à maintenir leurs adversaires à couvert et ainsi à éviter les balles assez facilement...enfin, pour l'instant. Si cette situation s'éternisait, leur chance allait fatalement finir par tourner.

Un coup de coude dans les côtes, assortit d'une brusque poussée dans le dos me firent trébucher, me ramenant subitement à ma triste situation. Bien que curieusement, cette dernière ne m'affolait pas autant qu'elle aurait dû. J'étais terriblement angoissée pour Jude et Féline et même un peu pour Hannah...mais pas pour moi. À croire qu'à force de me faire kidnapper, frapper et tirer dessus, je commençais à en prendre l'habitude...constatation limite inquiétante !

Non...le plus plausible était que mon expérience me disait, que l'homme qui me tenait en joug ne tirerait pas. Shaw me voulait vivante et son sbire avait l'air assez terrorisé par lui pour ne pas lui désobéir. Néanmoins je n'étais pas à l'abri d'un accident, une balle égarée...à moins que le coup ne parte tout seul. Ce qui vu ma chance légendaire était encore du domaine du possible ! À cette pensé, je sentis un petit frisson de peur me traverser, ce qui me rassura presque.

— Avance ! m'ordonna le gorille d'une voix peu amène en resserrant encore sa prise autour de mon cou, me coupant presque la respiration.

J'entraperçus du coin de l'œil le regard impuissant et limite paniqué de Jude, qui n'arrivant pas à se débarrasser de ses assaillants, ne pouvait que me regarder me faire emmener sans réagir.

— Je t'ai dit d'avancer ! répéta l'homme à mon oreille, tout en m'assenant un coup sur la joue de la main tenant son arme, ce qui m'arracha un gémissement que je regrettai aussitôt.

Jude, alarmé par mon cri, tourna par reflexe la tête dans ma direction...ce qui failli lui être fatal. Mon sang se figea dans mes veines, quand je vis l'un des tireurs viser Jude et lui tirer dans le dos. Je n'eus même pas le temps de lui crier « attention », que Charles d'un mouvement ultra-rapide, poussa Jude sur le côté lui permettant d'éviter in-extrémis la balle, qui passa à un centimètre de son oreille.

La stupeur et l'adrénaline me sortirent de ma torpeur et je passai à l'action dans un mouvement reflexe. De mes mains toujours menottées, je saisis son arme par le canon et tirai dessus d'un coup sec, l'arrachant à la main de son propriétaire ce qui le déstabilisa au passage. J'en profitai pour me retourner et lui envoyer un grand coup de genoux bien placé, ce qui l'envoya à terre dans un grognement étouffé. J'en profitai pour ouvrir les bracelets encerclant mes poignets, qui tombèrent sur le sol dans un tintement métallique des plus satisfaisant.

— Maintenant tues-le, m'ordonna Charles dans un grondement autoritaire mais concentré tandis qu'il esquivait habilement un nouveau projectile, tout en tirant à son tour. Malheureusement il ne toucha que le bois, sa balle envoyant des esquilles voler dans tous les coins.

Je pointai le canon de l'arme sur l'homme recroquevillé sur le sol et...hésitai. Tirer sur quelqu'un dans le feu de l'action, pour sauver sa vie c'est facile, ça tient presque du reflexe. Mais le faire de sang-froid, à bout portant, c'est une tout autre histoire. Alors que je m'apprêtai à l'assommer avec la crosse de mon arme ne me sentant pas la force de tirer, une balle vint se loger entre ses deux yeux...le tuant sur le coup.

— Il ne faut jamais hésiter, me dit Charles d'une voix implacable alors qu'il parvenait à abattre un deuxième tireur dans la foulée, déconcentré à son tour par le cri de son comparse.

Puis il me lança son regard hautain et dégouté habituel, avant de braquer ses yeux froids et implacables sur Shaw, toujours planqué dans l'embrasure de la porte. Ce dernier contemplait la scène d'un regard furieux, ne semblant pas en croire ses yeux. Voyant que Charles avançait vers lui d'un air plus que menaçant l'arme à la main, il rappela son dernier homme et s'enfuit comme un rat par la porte de derrière. Charles tira...mais trop tard. La balle n'atteignit que la partie vitrée de la porte, qui explosa en un millier d'éclats coupant, se déversant alentours. Poussant un cri de rage et de frustration impressionnant, Charles s'empressa de se lancer à sa poursuite.

— Charles, laisses-le s'enfuir...nous le rattraperont plus tard ! Hannah a besoin de toi, l'interpella Jude, à présent agenouillé à côté de cette dernière, un air plus que soucieux sur le visage.

— Hors de question, rugit Charles. Il tient Isaac ! Je dois lui faire dire où il le détient, expliqua-t-il dans un grondement douloureux, avant d'ouvrir violement ce qu'il restait de la porte et de s'élancer à l'extérieur, un air meurtrier déformant ses traits.

— Qui est Isaac, ne pus-je m'empêcher de demander à Jude tandis que je m'accroupissais à côté de lui.

— C'est...

— C'est mon frère, le coupa soudain Hannah d'une voix angoissée, bien qu'à peine audible. Le père d'Aria, ajouta-t-elle en ouvrant doucement les yeux et en tentant instinctivement de se redresser.

— Son comportement vous prouve bien lequel de nous deux il préfère, continua-t-elle d'un ton acide et sarcastique, tout en s'asseyant avec l'aide de Jude.

Là n'est pas la question, lui dit vivement Jude. Il ne faut pas traîner ici. Je doute que Shaw abandonne si facilement, continua-t-il comme pour lui-même alors qu'il s'apprêtait à reprendre Hannah dans ses bras.

— Non mais tu fais quoi là, lui demanda-t-elle d'un ton outré, un peu gâché par la faiblesse de sa voix.

— Je te portes car tu n'es pas en état de marcher. Il y a deux minutes...tu respirais à peine. C'est l'adrénaline qui te permet de tenir, mais dès que son effet se sera estompé tu risques de t'effondrer à nouveau, alors...ne discutes pas !

À ma grande surprise elle ne dit rien. Signeévident qu'elle était très mal en point, si vous voulez mon avis. Nousréussîmes à sortir de la salle sans problème et sans croiser âme qui vive. Ilne nous fallut pas longtemps pour rejoindre le couvert des arbres. La marche ensous-bois n'ayant jamais été mon fort, je me laissais vite distancer par Jude,qui malgré ses blessures, semblait avoir fait ça toute sa vie. J'allais luidire de m'attendre, quand j'entendis le bruit caractéristique d'un tir de carabineà air comprimé. Avant que je n'aie eu le temps de réagir, je ressentis une vivedouleur dans le bras et m'effondrai mollement et sans un bruit sur le sol de laforêt. 

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