PRESSURE
Children of Fire
chp5 - Pressure.
Un rire enfantin s'éleva dans les airs. Shikamaru secoua doucement la tête et rappela à sa fille la raison de sa présence ici, alors qu'il devrait être à son bureau. La nuit dernière, Mitsuha avait débarqué dans la chambre de ses parents vers vingt-deux heures, déclarant haut et fort qu'elle souhaitait que son père l'entraîne un peu demain. Et bien qu'il avait un tas de boulot qui l'attendait, le brun avait cédé presque immédiatement sous le regard moqueur de son épouse. C'était fou ce que la bouille de Mitsuha le rendait docile. Et elle ne faisait pas cet effet qu'à lui. Temari, Shikadai, Ino ; ils étaient tous sous le charme de l'enfant.
La petite fille lui tira la langue et lui balança plusieurs brins d'herbes au visage. Il échangea un regard amusé avec la blonde, installée sur le perron de la demeure familiale.
Temari avait su à l'instant où Mitsuha avait fait sa demande que son époux allait dire oui. Elle soupçonnait d'ailleurs la brune d'être totalement au courant de son pouvoir de persuasion d'un simple sourire. Son regard se perdit un instant sur la silhouette du neuvième hokage et elle esquissa un sourire. Si quelqu'un avait dit à la petite Temari âgée de treize ans qu'elle tomberait amoureuse de ce fainéant, qu'elle déménagerait à Konoha et qu'elle aurait trois enfants, elle aurait rit et aurait frappé cette personne. Et pourtant, l'amour qu'elle ressentait envers son époux ne faisait que prendre de l'ampleur, encore plus lorsqu'elle l'observait prendre soin de leurs trois enfants. Et pour son grand plaisir, Shikadai suivait les pas de son père. Le petit garçon qu'elle avait mis au monde devenait un homme et il la rendait si fière. Quelques heures en arrière, quand elle avait eu la maison d'édition Toshi au téléphone, la fameuse maison d'édition qui avait publié les livres de l'un des trois shinobis légendaires, elle avait senti cet étau dans sa cage thoracique. Parce que son bébé grandissait et qu'en même temps, le voir prendre son envol ainsi, ça la rendait terriblement heureuse. Ces trois enfants que Shikamaru lui avait offerts la rendait terriblement heureuse.
- "concentre toi un peu, Mitsuha." entendit-elle.
Le quarantenaire tentait tant bien que mal de paraître sévère, mais l'amusement se ressentait dans sa voix. Face à lui, la brune enchaînait les signes avec ses mains, mimant un tas de techniques en riant. Et comme d'habitude, rien ne se passait. Le professeur principal de Mitsuha avait été clair lors de la dernière réunion parents-élèves, elle ne serait sûrement jamais un shinobi. Elle possédait bien un chakra, comme tous les humains de ce monde, mais il ne lui servait à rien. Mitsuha avait eu beaucoup de mal avec cette constatation, elle rêvait d'être un shinobi puissant. Et apprendre que son rêve ne serait sûrement jamais une réalité, ça avait brisé le cœur de Temari.
Elle se souvenait parfaitement de l'instant où elle avait croisé le regard terrifié de cette petite fille à l'hôpital de Suna. Et quand Shikamaru l'avait amenée à leur demeure, elle avait eu du mal au début. Du mal à aimer ces deux enfants soudainement plus que présents dans la vie de son époux après plus d'un an d'absence. Mais les jours passaient, et Mitsuha était sa fille à elle aussi. Elle la protégerait au péril de sa vie, s'il le fallait.
Un cri anormalement aiguë résonna un instant dans le jardin, le cri de son époux. D'un bond agile, elle se hissa sur ses deux pieds et son regard tomba immédiatement sur le problème. D'un côté, Mitsuha se tenait droite comme un pic, une expression totalement apeurée sur le visage. Et de l'autre, Shikamaru se protégeait tant bien que mal sous son ombre, déployée comme une tente sur lui, les fesses vissées sur le sol. Et juste au-dessus, une énorme boule de feu.
*
Takeshi était mort.
Une constatation qui tournait encore et encore dans la tête de Shikadai. Le vieil homme n'était plus et ça lui brisait le coeur. Il se rendait compte maintenant qu'il n'était plus un enfant à quel point ses parents l'avaient protégés de la cruauté du monde extérieur. Un soupir anéanti mourut au coin de ses lèvres et il continua d'avancer dans les rues de Konoha, les mains dans les poches. Sayaka était à ses côtés, silencieuse, elle aussi. Elle l'avait rejoint dans les vestiaires, elle ne l'avait pas jugé une seule seconde pour l'état de la pièce et il s'était passé ce truc.. ils avaient échangés un baiser. Court, mais doux. Et puis, Sakura était rentré dans la pièce, ils avaient à peine eu le temps de se séparer l'un de l'autre, que la rose avait annoncé qu'ils avaient pour ordre de retourner à leurs demeures, elle refusait de les voir à l'hôpital aujourd'hui. Perdre quelqu'un n'était pas une chose aisée, elle était bien placé pour le savoir. Elle avait perdue ses deux maîtres, son meilleur ami et son époux. Des pertes qui resteraient marqués en elle, éternellement.
- "je.. je n'ai pas envie d'être seule là tout de suite."
La voix presque tremblante de la blonde flotta un instant dans les airs et il se rendit compte qu'ils étaient déjà arrivés à l'intersection à laquelle ils se séparaient habituellement. Il prenait à droite, elle prenait à gauche. Mais quelque part, le sentiment de Sayaka était partagé. Le brun ne désirait pas être seul là tout de suite et elle était la seule à comprendre ce qui se passait dans sa cage thoracique. Un petit sourire déforma le coin de ses lèvres et il passa un bras autour des épaules de la jeune femme.
- "mange à la maison." dit-il.
- "je ne veux pas déranger ta mère, Shikadai."
- "tu déconnes ? ma mère t'adore. elle sera ravie d'apprendre que tu restes pour le repas. si ça ne tenait qu'à elle, tu vivrais sûrement dans la chambre à côté de la mienne."
Un petit rire s'échappa des lèvres du brun. Quand la question d'un logement s'était posée pour la blonde, Temari, Sakura, Shikamaru et Ino s'étaient retrouvés dans le salon pour en discuter. Et lui, âgé de quinze ans, avait écouté aux portes. La sunienne avait immédiatement proposé qu'elle prenne une des chambres de libres dans la demeure familiale, elle adorait Sayaka, mais Shikamaru s'y était opposé, pas parce qu'il n'en voulait pas, mais parce que la blonde avait dix-huit ans à l'époque et vivait seule depuis plus d'un an, alors à ses yeux ce n'était peut-être pas la meilleure idée de la faire soudainement vivre avec toute une famille. Ino s'était rangé de son côté et finalement, il avait été décidé qu'un appartement serait mis à disposition de la blonde et que tous les frais seraient pris en charge par le clan Nara. Sakura avait tenté de payer elle-même, mais Shikamaru n'avait laissé le choix à personne.
- "allez, dis oui." souffla-t-il.
- "ne me fais pas ces yeux là, tu sais très bien que je vais dire oui tout de suite." grogna-t-elle, amusée.
Il la libéra de son emprise et ouvrit la marche, assez fier de lui. Dans les vestiaires, il lui avait montré une partie totalement brisée de lui-même. Une partie qu'il gardait camouflé au fond de lui, scellé dans un coffre-fort. Et il se refusait à lui montrer encore une fois.
Sayaka esquissa un sourire et s'avança à la suite du garçon. Le brun était une sorte d'anesthésiant et sûrement qu'il ne s'en rendait même pas compte, mais chaque fois qu'un proche à lui allait mal, il suffisait d'un regard ou d'un mot, et il parvenait à faire taire un petit peu de leur peine. Il lui faisait cet effet à elle. Là, tout de suite, elle mourrait d'envie de se fondre dans ses draps, de pleurer à chaudes larmes pendant des heures, pourtant elle était là, debout, dans la rue, à côté de lui et il dégageait ce quelque chose qui la maintenait à flot. Il tenait ça de ses parents. Temari possédait une aura forte à laquelle on se confrontait tout de suite, mais au fur et à mesure, Sayaka s'était rendu compte que Shikamaru possédait lui aussi une aura forte. Elle était un peu plus calme et cachée que celle de son épouse, mais bien là. Et Shikadai était un parfait mélange des deux adultes. D'une certaine manière, elle admirait cette famille.
La demeure familiale se dessina doucement au gré de leurs pas et le brun ne retint pas sa grimace en reconnaissant la silhouette qui claquait la porte de la maison. Presque immédiatement, il fit volte-face, s'apprêtant à attraper la main de la blonde pour prendre la fuite dans le sens inverse, mais son prénom résonna dans la rue. Et bien trop rapidement pour un vieil homme, le doyen se rapprocha des deux jeunes adultes.
- "où crois-tu aller ?" s'exclama le doyen.
Un soupir mourut au coin des lèvres du brun et il se tourna vers cet homme. Le doyen le fixait d'une aura si colérique qu'il n'eut aucun mal à comprendre qu'il était sûrement au courant pour la maison d'édition.
- "c'est une honte." ajouta-t-il, d'une voix forte. "je suis au courant pour la maison d'édition, c'est scandaleux."
- "doyen, je-." tenta le brun.
- "non, tu te tais. il est clairement temps pour toi d'arrêter de faire l'enfant capricieux et de reprendre ton poste de shinobi. tes parents te laissent bien trop de liberté. le clan n'a pas besoin d'un écrivain dans ses rangs, tu m'entends ? c'est un scandale."
Un dernier regard colérique et il s'échappa au détour d'une rue. Un soupir fort passa le cap des lèvres du garçon et il jeta un regard désolé à la blonde, près de lui. Elle semblait totalement perdue.
- "qu'est-ce qu'il vient de se passer ?" interrogea-t-elle, les sourcils froncés.
- "le doyen du clan." lâcha le brun.
- "mais.. il a le droit de te parler comme ça ?"
- "il est en colère. le clan n'est pas très bien vu par les anciens depuis le mariage de mes parents."
Il s'attarda un instant sur la moue encore plus perdue de la blonde et fourra les mains dans ses poches.
- "pour nous, ce n'est pas important. mais à l'époque, un mariage entre deux villages différents, ce n'était pas très bien vu. encore plus dans le cas où l'épouse était la sœur du kazekage." expliqua-t-il. "les anciens de Suna ont accusé le clan Nara de vouloir mettre la main sur le poste de kazekage et les anciens de Konoha ont accusé mon oncle Gaara d'utiliser ce mariage pour prendre possession du village en cas de guerre. et ça ne s'est pas arrangé avec ma naissance."
- "comment ça ?" souffla-t-elle.
- "à la différence du poste de hokage, le poste de kazekage se transmet de génération en génération. mon arrière grand-père, mon grand-père, mon oncle. et je suis actuellement le seul enfant qui porte le sang du kazekage. alors si mon oncle se retire ou qu'il meurt, je suis censé prendre le poste. et un kazekage métisse, qui appartient autant à Suna qu'à Konoha, les anciens ne l'accepteront pas. c'est contraire aux coutumes du village."
- "t'es sûr sûr sûr que je ne devrais pas faire de révérence à chaque fois que je te vois ? prince de Suna et futur kazekage." lâcha-t-elle, un sourire amusé au coin des lèvres.
Un "n'importe quoi, toi" s'échappa de la bouche du garçon et elle s'accrocha doucement à son bras, le visage un peu plus sérieux.
- "je trouve ce raisonnement idiot." avoua-t-elle. "quand je regarde tes parents dans la même pièce, je ne vois pas un quelconque moyen de pression ou de s'approprier quelque chose, je vois juste.. deux personnes qui s'aiment."
Un sourire déforma le coin des lèvres du brun et il hocha de la tête, déposant chastement un baiser sur le front de la blonde. Elle avait raison, lui aussi il ne voyait que ça quand il se confrontait à la vision de ses parents dans la même pièce.
La porte de la maison s'ouvrit brutalement et une Temari armée d'un éventail apparu sur le pas. Elle jeta un coup d'œil aux deux jeunes adultes et secoua doucement la tête, de droite à gauche.
- "je comprends mieux pourquoi j'ai entendu la voix de ce vieux débris." lança-t-elle. "dommage, j'espérais qu'il me cherche la bagarre hors de la maison. je suis sûr que ton père m'aurait pardonné si j'avais détruit une petite partie de la rue. il t'a encore embêté ?"
Shikadai haussa simplement les épaules. Il connaissait assez sa mère pour savoir que s'il lui répétait exactement chaque mot du doyen, elle irait le trouver pour lui faire la peau. La preuve, à ce jour, elle ne sortait son éventail que lorsque ça touchait ses enfants ou son époux. Et là, elle le tenait dans ses mains. Le brun se doutait que le doyen avait dû avoir une conversation avec elle, avant de tomber sur eux dans la rue.
- "d'ailleurs, qu'est-ce que tu fais là ? tu sèches ?" demanda-t-elle.
- "Sakura nous as donné notre journée." répondit-il simplement, une pointe de tristesse tout de même présente dans la voix.
- "bonjour Temari." salua doucement la blonde, dans le dos du garçon.
Le visage de la quarantenaire s'alluma immédiatement de mille feux et elle attrapa les mains de la jeune femme, la tirant à sa suite dans la demeure familiale. Shikadai échangea un regard amusé avec son amie et haussa simplement les épaules. Il lui avait dit. Temari adorait Sayaka.
*
Un tas de feuilles de papier traînaient sur la surface du bureau. Des dossiers, des demandes, des recommandations. Ce n'était pas si facile que ça, être le chef d'un village. Pendant des années, il avait été le conseiller personnel du sixième, puis du septième. Il connaissait déjà les rouages du métier, et pourtant, à l'époque il n'avait pas idée de ce poids sur les épaules. Naruto avait toujours pris les choses avec le sourire.
Ce satané sourire lui manquait.
Son regard s'attarda un instant sur les photographies des anciens chefs, accrochés sur un mur de la pièce et il tomba sur le sourire du blond. Les premiers mois, Shikamaru n'avait pas supporté l'idée d'être seul dans cette pièce. Même si l'immeuble avait été reconstruit, ça restait l'endroit où le blond avait tant de fois traîné à remplir la paperasse. Temari, Ino et Sakura s'étaient réparties les jours pour qu'il ne reste jamais seul, qu'il soit toujours accompagné de quelqu'un pendant ses heures de travail. Et puis, un jour, il avait fondu en larmes. Ino avait immédiatement réagit, comme si elle s'y attendait. Elle l'avait pris dans ses bras, l'avait serré contre elle et ensuite, elle lui avait offert un rire cristallin, parce que les larmes du garçon avait effacé une partie de la page sur laquelle il bossait. Et il avait ris de bon coeur avec elle. Et le lendemain, il était revenu seul.
Le crissement léger de la porte le tira de ses souvenirs et il échangea un petit sourire avec la tignasse rose qui entrait dans la pièce. Il ne regrettait pas une seule seconde d'avoir fait d'elle sa conseillère. Ils formaient une bonne équipe, tous les deux.
- "je t'apporte un nouveau dossier." lança-t-elle, en le déposant sur le bureau.
- "qu'est-ce que c'est ?" demanda-t-il.
- "une demande d'agrandissement pour l'école primaire, près des quartiers du clan Hyuuga."
Le quarantenaire attrapa la feuille, un soupir épuisé au bord des lèvres, ignorant le rire amusé de la rose. Le côté paresseux du neuvième cokage reprenait parfois le dessus sur ses tâches et elle l'avait surpris plus d'une fois en train de faire la sieste, affalé sur son bureau.
- "à mon avis, ça ne va pas être la seule école du coin à demander un agrandissement." annonça-t-elle.
Le massacre avait touché tout le pays du feu. Konoha avait été le premier village à connaître une reconstruction complète et s'en était suivi les autres villages ensuite. Mais certains habitants avaient éprouvés le besoin de s'en aller, de quitter leurs villages natales qu'ils avaient connu à feu et à sang durant une période bien trop sombre, pour vivre ailleurs et Shikamaru, ainsi que Gaara, avaient pris la décision d'agrandir officiellement leurs villages respectifs, offrant un nouveau départ à ces âmes meurtries. Et de nombreux orphelins avaient été accueillis dans le lot.
Shikamaru acquiesça et traça sa signature au bout de la feuille. Il la rangea sur une pile pas très haute et tomba dans le regard légèrement inquiet de sa conseillère.
- "tout va bien ?" demanda-t-elle, doucement. "tu n'as pas beaucoup avancé depuis que tu es arrivé."
Une grimace déforma le coin de la bouche du brun. Elle n'avait pas tort. Il s'était à peine posé sur trois dossiers et pourtant, il était là depuis au moins quatre heures. Sakura contourna le bureau en bois et s'installa au bord de celui-ci, en prenant soin de ne pas mettre le bordel dans les piles de dossiers.
- "raconte moi tes malheurs." dit-elle.
- "malheur est un grand mot. c'est juste que.." un frisson le prit au souvenir de sa matinée. "il s'est passé quelque chose ce matin, avec Mitsuha."
- "quelque chose ? c'est-à-dire ?"
- "tu te souviens que son professeur principal nous avait dit à Temari et moi que Mitsuha n'avait aucune connexion à son chakra ?"
La rose acquiesça. Bien sûr qu'elle s'en souvenait. Être un shinobi avait toujours été un rêve pour la petite brune, malgré ses traumatismes du passé.
- "il s'est trompé." ajouta-t-il. "ce matin, elle a.. fait apparaître une boule de feu énorme au-dessus de ma tête. une boule de feu, Sakura. j'étais à deux doigts de me retrouver chauve."
Un léger rire échappa à la quarantenaire. Elle secoua doucement la tête, amusée. Un mélange de fierté et de doute traînaient dans le fond des prunelles brunes du garçon.
- "tu as des enfants exceptionnels, Shikamaru."
- "tu dis ça, parce que Shikae ne t'a encore jamais ramené de vers de terre dans ton salon." lança-t-il, dans un petit rire. "il est doté d'une curiosité insatiable. il est constamment en vadrouille, en train de faire une bêtise."
- "je le trouve plutôt adorable, moi."
- "il craque totalement sur toi, j'espère que tu le sais ça."
Oh que oui, elle le savait. Chaque fois qu'elle apparaissait dans son champ de vision, le petit brun se noyait dans un tas de bégaiements et de rougissements. Et il était étonnamment sage dans ces moments-là.
- "il est épuisant." lâcha-t-il, amusé. "et Mitsuha, aussi. ce n'était pas pareil avec Shikadai."
Dix-huit ans déjà que son fils était venu au monde, mais il se souvenait de tout comme si c'était hier.
- "il a toujours été un enfant si sage. ça a même fini par agacer Temari une fois, elle a essayé de lui apprendre à faire des bêtises." souffla-t-il. "et même maintenant, il est juste incroyablement sage et discret."
Shikadai lui mettait du baume au cœur par sa simple présence. Les relations tendues qu'ils avaient eues à une époque, quand il était revenu traumatisé du massacre, n'étaient plus. Et ça lui faisait un bien fou de retrouver son fils.
Et pourtant, le raclement de gorge de la rose lui arracha un froncement de sourcils.
- "c'est bien que tu parles de Shikadai." avoua-t-elle. "un conseil, Shikamaru. essaie d'avoir une conversation avec ton fils, assez rapidement. il a besoin de son père."
Elle ne lui laissa pas le temps de demander plus d'informations et s'extirpa du bureau ; après tout, ce n'était pas à elle de dire ces choses-là. Les sourcils froncés, Shikamaru observa un instant les moulures du plafond. Elle était forcément au courant de quelque chose pour dire ça. Est-ce que Shikadai s'était confié à elle ? Un petit soupir s'échappa de ses lèvres. Il allait se fier aux conseils de la rose. Il aurait une conversation avec son fils, dans les prochains jours. Il s'empressa de se remettre au boulot, se disant dans le fond qu'il était bien content que son fils ait Sakura à ses côtés.
*
Un ton orangé se glissait doucement, mais sûrement, dans le ciel bleu. Le rendu lui coupait le souffle. Comme toujours. Un bol rempli de morceaux de pastèque l'arracha à cet oeuvre-d'art et il tomba sur le sourire étincelant de sa petite-soeur. Mitsuha lui fourra le bol dans les mains et après avoir déposé un baiser sur la joue de Sayaka, retourna à l'intérieur de la demeure. Il déposa le bol entre leurs deux silhouettes, installés silencieusement sur le perron et ramena ses genoux contre son torse. Comme il l'avait prévu, Temari avait forcé Sayaka à déjeuner le midi avec eux. Le repas s'était bien passé. Shikae avait fait le cancre, en tentant de mettre le plus de morceaux de pain possible dans sa bouche. Ils avaient un peu oubliés pendant un court instant, juste un peu, puis la réalité était revenu d'un coup et Sayaka avait tenté de camoufler ses larmes. Mais Temari l'avait prise dans ses bras et bercé jusqu'à ce que les larmes se taisent d'elles-mêmes.
Takeshi était mort.
Et ça, c'était douloureux. Tellement douloureux qu'il avait saccagé les vestiaires en l'apprenant. Il n'avait quasiment jamais perdu le contrôle de soi-même, depuis le jour où il avait provoqué une crise chez Mitsuha en brisant brutalement le cadre qui contenait une photo d'elle et de Shikae. L'image du visage effrayé de sa soeur ne l'avait jamais réellement quitté, il refusait de redevenir ce gamin là. Pourtant, dans les vestiaires, il avait été dans l'incapacité de retenir quoi que ce soit. Il avait renversé la table, jeté l'une des chaises contre un mur et frappé son poing dans un casier. Et il aurait sûrement continué encore longtemps si Sayaka n'était pas entré dans la pièce. Elle avait pris un peu de sa peine en le tenant contre elle et il avait tenté de prendre un peu de sa peine en la tenant contre lui. Et ils s'étaient embrassés. Lequel avait embrassé l'autre en premier ? Est-ce que c'était lui ? Ou est-ce que c'était elle ? Il n'en avait aucune idée. Le souvenir restait flou. Tout ce qu'il restait, c'était cette sensation pressée contre ses lèvres et ce goût salé, à cause des précédentes larmes.
L'émeraude de ses prunelles s'accrocha à la silhouette de la blonde, à côté de lui. Elle restait silencieuse, le regard perdu dans l'immensité du ciel, mais il savait. Il reconnaissait la tristesse et l'épuisement dans les traits de son visage. Elle restait belle, malgré ça. Il l'avait toujours trouvé belle, dès l'instant où il l'avait croisé dans les couloirs de l'hôpital de Suna, mais là.. quand est-ce qu'elle avait grandit autant ? L'adolescente s'était changé en une jeune femme et il n'avait rien vu, sûrement parce qu'ils se côtoyaient tous les jours. Ils se côtoyaient tous les jours, et pourtant, ce baiser, il ne l'avait pas venu venir. Est-ce qu'elle l'avait vu venir, elle ? Un petit soupir s'échappa de ses lèvres et il rencontra presque immédiatement les yeux de la blonde.
- "ça va ?" interrogea-t-elle, doucement.
- "oui, oui. je.. je pensais à quelque chose."
- "à quoi est-ce que tu pensais ?"
Merde, ça aussi, il ne l'avait pas vu venir. Ses joues lui semblèrent bien chaudes soudainement et il était quasiment sûr qu'elles se teintaient d'une petite poudre écarlate là tout de suite.
- "tu.. tu sais.. tout à l'heure. quand.." bégaya-t-il. "on a.."
Un doux sourire déforma le coin des lèvres de la blonde et elle ramena à son tour ses genoux contre sa poitrine, le regard accroché au visage du garçon. Il rougissait et bégayait, et pendant un instant, elle hésita à le laisser continuer sur cette lancée. Mais finalement, décida de mettre un mot sur ce qu'il n'arrivait pas à décrire.
- "le baiser." dit-elle.
Les rougissements du garçon s'accentuèrent furieusement et il enfouit son visage dans ses bras, acquiesçant faiblement aux mots de la blonde.
- "tu.. veux en parler ?" proposa-t-elle.
Shikadai resta silencieux un instant. Il se sentait honteux de ressentir autant de gêne et de réagir ainsi. Elle devait le prendre pour un gamin. Pourtant, quand il releva les yeux vers elle, il se confronta à cette teinte rosée sur ses joues à elle aussi et il se surprit à aimer ça. Alors il acquiesça positivement.
- "est-ce que c'était ton.. premier baiser ?" demanda-t-il, curieusement.
- "non. le fils d'un voisin m'a pris mon premier baiser l'année de mes quatorze ans. mais tu es le second. et toi ?"
- "non. enfin.. oui et non. sarada m'a embrassé une fois, je faisais une crise d'angoisse et elle m'a aidé à reprendre le dessus. mais ça été la seule et unique fois qu'une fille m'a.. embrassé et c'était uniquement pour m'aider."
- "sarada, hein." souffla la blonde.
Une petite grimace étira le coin des lèvres du garçon. Il n'aimait pas tant que ça parler de Sarada, ça revenait juste à remettre sur la table le passé. Ils n'étaient même plus amis, maintenant. Ils s'étaient éloignés encore et encore, pour finir par se voir uniquement quand ils traînaient en bande. Et tout ça, parce qu'ils avaient les mêmes amis.
- "tu l'aimes encore ?"
La question de la blonde lui arracha un petit sursaut, mais il se reprit vite et acquiesça.
- "je crois." dit-il. "je suis pas mal perdu."
- "qu'est-ce que tu ressens quand tu la vois ?"
- "j'ai mal." lâcha-t-il, honnêtement. "ça fait beaucoup moins mal qu'au début, mais je ressens toujours ce petit étau dans ma cage thoracique."
Un soupir échappa au garçon.
- "je ne sais pas vraiment ce que je ressens." ajouta-t-il, au bout de quelques secondes. "mais je sais une chose. quand je suis avec toi, je suis bien."
La sincérité dans les mots du garçon accentua leurs rougissements. Shikadai s'empressa de fixer un point imaginaire au loin dans le paysage et Sayaka camoufla la moitié de son visage, entre ses bras.
- "je ne veux pas te perdre." dit-il.
Quelque part, il était effrayé. Le jour où il avait avoué à Sarada les sentiments qu'il avait à son égard, était également le jour où il l'avait perdu. L'amitié qui les reliait jusque là s'était éteinte, d'un coup, comme un coup de vent éteindrait une flamme vacillante.
- "je ne pense pas qu'on soit obligé de mettre une quelconque étiquette sur ce baiser." déclara-t-elle. "je ne veux pas te perdre, moi non plus."
Il reporta son regard sur elle.
- "prenons juste notre temps." continua-t-elle. "si ça ne se reproduit pas, tu resteras Shikadai à mes yeux. et si ça se reproduit, eh bien soit. j'ai.. j'ai plutôt apprécié ce baiser."
Le rouge s'accrocha de nouveau aux joues du garçon et il tourna la tête, se concentrant sur le ciel orangé, un petit sourire au coin des lèvres.
- "moi aussi."
Prochainement : Sexuality.
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