Chapitre XXV - Mettre la puce à l'oreille

Avant tout : désolé, un tout petit peu de retard cette semaine ^^' En plus je n'ai absolument pas eu le temps de relire... Du coup je vais décaler la date de fin des votes et ce sera certainement pareil pour la semaine prochaine...

LES INFOS :

🏅 Capella va retenir certaines informations (ne révèle que la position des Seigneurs).


JONDO (en fonction du choix précédent bien sûr) :

🏅Il va tester ses nouveaux pouvoirs, mais va faire n'importe quoi. Il obtiendra des résultats non-escomptés.

SOPHOS :


(proposition d'Eellva) "la réincarnation dans un petit animal, type ragondin, un truc moche et vraiment pas doué" (je lui ai laissé un peu de parole par contre ;) je trouvais cela plus comique)


L'armure de Capella tressaillit.

Sagrymor observait avec impatience. Jondo ne s'était écroulé avec le casque de Capella que depuis quelques battements, mais la chevalière en avait plus qu'assez de devoir toujours attendre.

Autour d'elle, les nomades survivants s'occupaient des blessés et trainaient les cadavres sanglants derrière une dune.

Sentant poindre une nouvelle insolation, Sagrymor entreprit d'ôter son armure. À peine sa cuirasse détachée, qu'Éclair arriva en claudiquant sur trois pattes. La chèvre se posta aux côtés de son maitre étendu dans le sable. De nombreuses égratignures recouvraient le pelage épars de la bête, notamment le long de sa patte arrière qu'elle ne semblait pouvoir poser. Elle tenait dans sa gueule la cordelette d'où pendait sa corne brisée.

Alors que Sagrymor entreprit de renouer la corde autour du cou de la biquette, le garçon fou furieux gémit et se mit à tousser.

Il se releva et jeta un coup d'œil humide de colère aux alentours. Son regard haineux se posa sur Sagrymor et il leva les mains d'un geste brusque.

Rien.

Par réflexe, s'attendant à une vague de feu comme il en avait déversé sur le champ de bataille quelques instants plus tôt, la chevalière s'était réfugiée derrière ses bras, mais rien ne vint. Jetant un oeil entre ses doigts, Sagrymor contempla l'incompréhension partagée du garçon.

— Elles sont où mes flammes ?

La voix stridente de l'enfant n'avait en rien perdu de sa puissance. Il se mit à taper le sable de ses petits poings, tel un gamin auquel on aurait confisqué un jouet. Toutefois, la colère ne dura pas. Les cris disparurent aussi vite qu'ils étaient apparus. Le garçon croisa ses bras et enfonça sa mine boudeuse dans ses épaules.

Alors que Sagrymor se relâchait, dubitative, l'armure de Capella tressaillit. La cuirasse sembla s'ébrouer, puis tendit les bras vers son heaume, toujours sur la tête de Jondo. À peine le casque retiré, le contadin rouvrit les yeux. Son air hagard habituel était de nouveau resplendissant. Qu'il dorme dix battements ou dix nuits, ne changeait rien.

Capella retrouva le grincement familier de son armure. Elle repositionna son heaume sur son gorgerin. L'attache était toujours délicate à fixer. Ses gros doigts métalliques n'arrangeaient en rien l'opération.

Quant à Jondo, il étira ses bras et bailla à s'en décrocher la mâchoire. Après quelques claquements de langue bien sonores, il essuya une larmichette paresseuse d'un revers de main. Il gratouilla la barbichette d'Éclair à ses côtés. La bête ne manifesta, comme à son habitude, aucune émotion. Sagrymor jura toutefois noter une fugace étincelle dans la profondeur abyssale de ses yeux mornes. Jondo se tourna vers Sagrymor.

— B'jour !

La chevalière retint de justesse une réplique cinglante et porta plutôt son attention sur l'armure évidée. Capella était enfin parvenue à fixer son casque et appréciait sa mobilité de quelques mouvements de tête.

— Alors ? s'impatienta Sagrymor.

— « Alors » ?

— Ah ! Vous allez pas vous y mettre aussi, hein ? Que vous on dit les Dieux nom d'un chien !

Capella se releva sans se presser. L'animosité de Sagrymor envers cette magicienne s'accentuait à chaque lent grincement des articulations ensablées.

— Capella a conversé avec l'être supérieur dénommé Elpos.

La sorcière épousseta les plates de son armure. À aucun moment elle ne dirigea la visière de son heaume vers Sagrymor.

— Et ? la pressa la chevalière.

— Et l'Enfant-Rêveur a communiqué à Capella les localisations des quatre autres Seigneurs Démoniaques.

— Mais c'est fantastique ça ! Quoi d'autre ?

Le rire franc de Sagrymor éclata au grand jour. Jondo sursauta au bruit incongru de ce son guttural rauque. C'était la première fois qu'il entendait la guerrière rire. Soit elle manquait de pratique, soit elle ne savait pas du tout comment faire. Dans tous les cas, le paysan préféra s'abstenir. Capella dut partager cette impression, car son casque se braqua brusquement en direction de la chevalière avec un léger mouvement de recul.

— Rien.

— Comment ça rien ? Et les pouvoirs de Jondo alors ?

— Les pouvoirs investis en ce contadin sont de vulgaires résidus.

— Des résidus ? Je l'ai vu guérir une maraudeuse condamnée de mes propres yeux ! Je suis peut-être une profane en ces choses, mais je peux jurer que ce n'étaient pas des résidus !

Sh'Aïna, les côtes sévèrement entaillées, arriva à ce moment. Elle tenait quelque chose enfermé avec délicatesse entre ses deux paumes. Alors qu'elle ouvrit la bouche pour déclarer quelque chose, Sagrymor l'empoigna par le col et la plaça devant Jondo.

— Allez Jon ! Montrez-lui ce dont vous êtes capable ! Soignez-la !

Brusquée, Sh'Aïna grimaça, mais ne lâcha pas ce qu'elle dissimulait entre ses mains. Elle poussa un petit cri et ferma les yeux de peur de percuter le paysan. Jondo, quant à lui, ne parut nullement étonné et ne chercha même pas à reculer pour éviter la nomade qui lui était projetée devant le nez. Il se contenta d'un simple :

— Hein ?

Sagrymor râla et s'empara de sa main droite qu'elle vint plaquer directement sur la plaie de Sh'Aïna, sans aucune autre forme de cérémonie. Cette dernière poussa un petit couinement où se mêlaient surprise et douleur.

— Vous mettez votre main là, vous fermez les yeux et vous vous concentrez pour la soigner ! Comme avec la maraudeuse dans les bois l'autre jour !

L'autorité de Sagrymor imposait l'obéissance. Jondo abaissa ses paupières et se mit à psalmodier :

— Soigner, soigner, soigner, soigner...

— Pas besoin de le répéter ! Concentrez-vous juste !

Jondo rougit aussitôt. Le sang afflua jusqu'à ses oreilles, perdues dans un méli-mélo de mèches encrassées. Sagrymor commençait à connaitre l'animal et sut qu'il avait encore compris de travers quelque chose. Il ne lui fallut guère de temps pour réaliser la méprise en question. Le visage de la chevalière vira au cramoisi à son tour.

— Dévergondé ! « Concentrer » je vous dis ! En un seul mot ! Utilisez le peu de cervelle qu'enferme votre caboche poussiéreuse pour soigner cette petite qui n'a rien demandé à personne !

Acculé par les injonctions de la chevalière, Jondo se crispa comme à l'appréhension d'un coup qui allait lui tomber dessus. Soudain, ses traits contractés furent baignés dans une onde de lueur bleutée.

Se faufilant entre les doigts pressés contre la plaie de Sh'Aïna, la lumière jaillit telle une oasis dans le désert.

Sh'Aïna se mit à rire aux éclats alors que ses yeux s'assoupirent. De son côté, Jondo serrait tant sa mâchoire qu'on sentait les dents compressées prêtes à exploser. Sous une cascade de sueur, de grosses veines pulsaient au niveau de ses tempes. L'empreinte laissée par la larmichette de sommeil s'était noyée dans une rivière de sanglots douloureux.

La blessure de Sh'Aïna se referma à vue d'œil.

Éclair s'interposa et repoussa son maitre avec force. Le contact se brisa. La lumière s'estompa aussitôt et les deux corps s'écroulèrent, inconscients. Jondo convulsionnait tandis que la nomade souriait, apaisée. Les mains de cette dernière s'écartèrent enfin pour libérer une petite bête noire. L'insecte prit son envol et alla se poser sur l'épaulière de Capella.

Sagrymor s'agenouilla auprès de Jondo pour tenter de calmer ses spasmes.

— C'est un résidu de pouvoir ça, vous allez me dire ?

Capella se contenta de hausser les épaules. Le geste perturba le scarabée aux reflets d'azur dorés. Il émit un faible bruit qui fit sursauter Capella dans un vacarme métallique. L'espace d'un instant, Sagrymor crut que l'armure allait se démanteler sous ses yeux tant le bond fut soudain.

— Le coléoptère communique !

— Qu'est-ce que vous racontez là ? Le soleil tape trop fort sur votre ferraille, sorcière !

— Capella vous l'affirme, cet invertébré vient de proférer : « La possession du pouvoir, quelque immense il peut être, ne donne pas la science de s'en servir. ¹»

Sagrymor resta interdite. C'était impossible ! Elle se tourna vers le cadavre qui gisait au loin. De la fumée s'échappait encore de la forme carbonisée qui fut autrefois...

— Sophos ?

L'insecte prit son envol et vint se poser sur l'épaule de la chevalière. Le chuintement était léger, mais intelligible :

— Seul le mystère fonde l'être ². Je ne sais pas comment il y est parvenu, mais il semblerait que mon jeune disciple ait trouvé moyen de sauvegarder mon esprit, faute de sauver mon corps.

— Mais... un scarabée ?

— Dans les yeux de chaque maman scarabée, son petit est une gazelle ³.

— Vos adages ne s'arrangent pas...

Sophos ignora la remarque de la chevalière et poursuivit :

— Je n'ai nul doute que mon cher Ignas ne m'a pas volontairement choisi cette modeste enveloppe charnelle. Il est à parier que ce scarabée s'est retrouvé happé par la passion qu'Ignas a investie dans ses pouvoirs pour me réanimer...

Sagrymor hésita un instant. Elle chercha le soutien de Capella, mais son regard alla se perdre au fond de la visière de l'armure animée.

— Oui... à ce sujet... Ignas est... comment dire...

— Expliquer ne sert à rien. On ne peut que voir, constater et montrer ⁴. Par chance, j'ai vu ce qui s'est passé. J'ai cru reconnaitre là un sort de téléportation n'est-ce pas ?

Soit Capella n'entendit pas la question, soit elle en fit bonne mine. Elle préféra s'éclipser pour rejoindre l'enfant boudeur, prostré un peu plus loin.

— Il y a toujours deux chances pour ne pas retrouver l'ami que l'on quitte : notre mort ou la sienne ⁵. Tâchons de rester en vie et j'ai la certitude que nos chemins se croiseront de nouveau. Pour cette tâche, le fait de ne plus avoir mes mains brûlées pourrait être une opportunité. Permettez, chère amie, que je m'y essaye.

Sur ces mots, Sophos le scarabée s'envola et se posa sur le front suant de Jondo. Une lumière bleue aveuglante jaillit aussitôt de la petite créature. Elle était d'une telle vivacité que Sagrymor dû s'en protéger les yeux.

Lorsqu'elle les rouvrit, Jondo s'éveilla. Il ne tremblait plus et le teint blafard s'effaçait au profit d'une saine rougeur. Alors qu'il était en proie à une cruelle agonie quelques battements plus tôt, le voilà qui se relevait l'air de rien, son sourire niais s'étirant de nouveau en travers du visage.

— B'jour !

***

Porté par des chants funéraires d'une mélancolie affligeante, le soleil alla se morfondre derrière les dunes. Il laissa dans son sillage une lassitude qui vint se mêler à l'éplorement des survivants du carnage.

Les cadavres furent déposés au creux des vallons ensablés. Soulevé par les brises nocturnes, la poussière du désert venait déjà s'abreuver du sang des victimes. « Ceux qui naissent dans le sable, retournent vers le sable », avait soufflé Sophos.

Le vieux sage-scarabée ne manifesta aucun signe de fatigue, si ce n'est le son éreinté de sa faible voix. Il avait passé le restant de la journée à soigner les blessés avec son nouveau pouvoir retrouvé. Capella avait tenté de l'assister, mais après avoir déclenché une éruption cutanée chez un patient, elle avait prétexté ne pas posséder la magie adéquate pour la morphologie nomade.

Jondo avait voulu également prêter main forte, mais n'était pas parvenu à se défaire d'une Sh'Aïna parfaitement rétablie. Bien que guérie, la jeune nomade ne semblait pas dans son état normal. Elle gloussait comme une enfante et ne cessait de tripoter le paysan en susurrant d'une voix suave des mots incompréhensibles qui se rapprochaient davantage d'un roucoulement animal.

Adolphe d'Ire, le Seigneur de la Colère déchu, n'avait quant à lui pas bougé d'un cil. Il continuait de marmonner dans son absence de barbe.

Alors que les chants résonnèrent à l'horizon et que les nomades regagnèrent le sanctuaire de leur mesa, Capella et Sagrymor s'attardèrent avec Sophos sur le bout du doigt. Capella s'était proposée de les téléporter directement sur un des lieux. Cela n'enchantait nullement Sagrymor qui restait toujours aussi sceptique devant les pouvoirs de la sorcière. C'était néanmoins la solution la plus immédiate.

Encore devaient-ils choisir à quel Seigneur rendre visite en premier...


¹ citation d'Honoré de Balzac

² citation de Jean-Claude Renard

³ proverbe tanzanien

⁴ citation de Jacques-Pierre Amette

⁵ citation de François-René de Chateaubriand

Voici les choix pour le prochain chapitre :

ADOLPHE : qu'est-ce qu'on va faire de ce gamin ?

1. Le laisser ici chez les nomades, il aura tout le loisir de bouder

2. L'emmener (de force) avec eux

3. (proposé par zita8987) Capella le téléporte de force dans sa chambre, où il aura tout le loisir de bouder

4. Choix proposé(s) par les lecteurs (si vous proposez un autre choix un minimum cohérent dans l'histoire, je le rajouterai ici)


PROCHAINE CIBLE :

A. Micheline d'Hypocrisie, Seigneuresse du Mensonge, qui se terre au sein même de la Cité-Sainte de Port-Tourbe dans le pays de Bourbenoire, terre des jungles insondables.

B. Bernard d'Avarice, Seigneur de la Cupidité, qui se prélasse dans son bastion, unique vestige bâti de tout Vivebrise, terres des steppes infinies.

C. Gertrude d'Orgueil, Seigneuresse de la Vanité, qui surveille du haut de sa tour, l'ensemble de Hautecime, terres des mille montagnes.

D. Ferdinand d'Effroi, Seigneur de la Peur, qui assiége sans relâche la dernière Cité-Sainte d'Hiverternel, terres des neiges éternelles.


TÉLÉPORTATION :

I. On parle de Capella... ça va foirer ! (Dites-moi comment !)

II. Elle a bien réussi à téléporter Ignas... ça devrait faire non ?

III. (proposé par Eellva) Elle rate et chacun se trouve dans un corps différent (à part Capella et le scarabée)

IV. (proposé par nelle_ousson) Elle ne les téléporte pas au bon endroit, mais là où se trouve Ignas. De plus, Jondo ou Sagrymor manque à l'appel.

V. Choix proposé(s) par les lecteurs (si vous proposez un autre choix un minimum cohérent dans l'histoire, je le rajouterai ici)


Fin des votes dimanche 19/04/2021 à 22h (UTC +2). Chapitre suivant le 29/04 au plus tard.

À vos votes !

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