Chapitre XXIV - Parler à la troisième personne

IGNAS :

???

--> J'ai bien pris note de vos souhaits, je garde tout ça sous le coude pour le moment ;)


ELPOS, JONDO & CAPELLA :

(Proposée par Zita8987)

On en apprend enfin un peu plus sur les causes de l'envahissement du monde par les monstres (je sais plus comment tu avais appelé cela). Quelque chose me dit que Capella a eu un rôle dans cette histoire.

--> Je garde le rôle de Capella sous le coude ;)


SOPHOS :

???

--> Je n'avais pas la place dans ce chapitre, je vous révèle au prochain chapitre ce qui va lui arriver ou pas ! ;)

Jondo savourait la noirceur environnante et ce calme absolu. Il aimait se retrouver toutes les nuits dans ce songe où son unique préoccupation était de contempler son tas de navets.

La douceur de leur galbe parfait, l'éclat de leur robe parme, la rondeur de leur arôme terreux. Un délice ! Seul dans l'obscurité, il avait tout le loisir de jouir de ce petit plaisir coupable.

Sauf qu'une main d'une pâleur extrême vint atterrir sur son épaule.

— Fatche de claouis velus d'biquette !

Son sursaut fut tel qu'il surprit également l'intruse. Avec ce brusque mouvement de recul, la chevelure argentée de la femme inonda son visage blafard. Bien qu'elle se fût attendue à cette réaction, elle n'avait pas anticipé pareil juron.

— T'm'as flanqué une d'ces piquette mon conaud !

Jondo se tenait le cœur, comme s'il le sentait réellement battre pour la première fois de sa vie. S'était une sensation extrêmement désagréable.

D'une certaine manière, l'intruse fut rassurée de voir une réaction humaine chez cet individu. Le vide abyssal de sa tête l'avait plus que surprise : cela l'avait véritablement effrayé. Quel esprit malade pouvait avoir pour seul et unique contenu un vulgaire tas de navets ?

— L'erreur est celle de Capella. Sans l'approche furtive de Capella, vos réflexes de survie ne se seraient pas déclenchés et cette montée d'adrénaline liée à une panique instinctive et primale ne vous aurait pas submergé.

Jondo dévisagea la femme dont l'âge était tout aussi indéfinissable que son expression. Il n'avait absolument rien compris.

— Qui c'est-y qu't'es toi ? Pis qu'est-ce tu fous là ici-là dans m'caboche ?

— Capella est Capella.

— Hein ? Z'êtes deusse ?

— Négatif. Capella parle d'elle à la troisième personne.

Jondo parut complètement déboussolé et se mit à scruter de toute part.

— Gné ? Y'a un troizio gus qui s'cache par-ci-là ?

— Vos facultés intellectuelles sont drastiquement limitées vous, non ?

Les sourcils froncés du paysan ne laissaient aucun doute quant à l'effort cérébral en cours. Un effort qui menait de toute évidence à un résultat nul.

— J'y ai pas ben capté c'que t'baragoules ma cocotte. Moué j't'escrache un truc simple : qui c'est qu't'es la pâlotte ?

— Capella.

Aucune réaction.

— Notre rencontre ne date pas d'il y a plus de vingt-huit battements. La probabilité que vous ayez oublié Capella est inférieure à 2 %.

Toujours rien.

— L'armure vide.

— Tu m'parais ben en lard pour une coquille vide.

— L'armure n'est pas l'apparence véritable de Capella. En esprit, Capella conserve sa forme originelle. Et, à titre informatif, avant sa désincarnation, Capella avait un taux de graisse tout à fait en norme avec son rapport poids, taille et âge.

La femme balaya une main devant elle pour se désigner dans son ensemble. Jondo se perdit un instant dans le regard d'acier de la sorcière. Elle était clairement plus âgée qu'il ne l'était, à en juger par la teinte de ses cheveux et le terne de ses pupilles. Pourtant, aucune trace de vieillesse sur son visage lisse : pas une ride sur le front, pas une ridule au coin des yeux. Un manque d'expression absolu.

— Ne perdons pas de temps. Comment contacter Elpos ?

— Qui ça ?

— Celui que l'on surnomme l'Enfant-Rêveur. La divinité de l'Espoir, des Rêves, de la Liberté, de...

— Ah ! El'Poch ! L'mioche ?

— Euh... Affirmatif, hésita Capella.

Elle n'avait pas coutume d'être surprise, mais la rudesse de ce personnage dépassait toutes ses statistiques.

— Ah bah ça doit être l'gosse qui chiale là-bas. M'demandais ben c'qui foutait encore là, c'mouffetard !

Capella se tourna vers la direction indiquée par Jondo. Au loin, bien après le tas de navet, dans un remous obscur de ce néant sans fond. Elle distingua en effet une infime silhouette accroupie et perçut les échos d'un pleurnichement enfantin.

— On est foutu... foutu.

La voix de l'enfant se clarifia alors que Capella s'approcha.

— Elpos ?

Le garçon tourna sa petite tête blonde. Ses deux grands yeux bleus étaient rougis par les larmes qui ruisselaient le long de ses joues bouffies de chagrin.

— Capella vous vient en aide. Une aide qui parait nécessaire à 102 %.

— Capella ? fit Elpos en s'essuyant le nez d'un revers de manche. La Mère-Régente des Chevaliers de l'Aube Rouge Écarlate ? Celle qui s'est détournée de sa déesse, Virtae ? La païenne adoratrice d'arcanes interdits ?

— Affirmatif.

Elpos éclata à nouveau en sanglots.

— Après l'abruti, voilà l'hérétique ! C'est bien ton fils qui est devenu Seigneur Démoniaque, et par ta faute en plus, non ?

— Nous avons vaincu Adolphe ce jour.

Les larmes disparurent en un instant. Elpos écarquilla grands les yeux et sourit.

— Il est mort ? Extra ! Plus que quatre à tuer !

— Adolphe n'est pas mort. L'arme bénie que vous avez confiée au paysan semble l'avoir purgé du Mal qui corrompait son âme. Une masse noire non-identifiée s'est extirpée de son organisme et la plaie s'est autosuturée.

Elpos parut consterné par cette annonce.

— C'est bizarre ça... La bénédiction était supposée faire en sorte que l'arme puisse détruire le Mal.

— Si votre bénédiction devait extrapoler l'utilité d'une arme, cela demeure cohérent. Ma théorie est qu'une arme étant conçue pour occire, elle aurait dû occire le Mal... Cet outil agricole, « binette », étant fait conçu pour déraciner, il permet donc de « déraciner » le Mal.

— Ouais, ça se tient, j'imagine...

Certaines choses ne changeraient jamais. Ces Dieux restaient toujours aussi approximatifs dans leurs interventions, se dit Capella. Si imbus de leurs pouvoirs, ils s'étaient totalement coupés de la réalité.

De son côté, l'Enfant-Rêveur ne semblait pas vraiment enclin à se confier. Il connaissait bien Capella. Sa puissance inquiétait grandement les Sept Divins.

Depuis leur ascension, les Dieux observaient de très près tous les êtres qui faisaient preuve de forces surnaturelles. La Septinité s'était forgée à sept et il devait en rester ainsi. Pour une question d'équilibre. Tous ces êtres exceptionnels étaient des dangers potentiels : ils pouvaient faire de l'ombre aux Sept, ou pire, détruire leurs cultes sources de leurs pouvoirs divins.

— Il faut que je demande à mes copains divins... je ne peux pas...

Capella sentit l'hésitation d'Elpos. La sorcière faisait peur et jamais les autres Dieux n'accepteraient de l'assister, de peur qu'elle ne vienne concurrencer leurs divines positions. Elle savait aussi que des Sept, Elpos était le plus influençable. Elle devait tenter le tout pour le tout avant qu'il ne consulte les autres.

— Les Dieux et Capella ont un but commun : sauver le monde. Nous avons déjà perdu assez de temps ! Aidez-vous en aidant Capella. Exposez les faits et ce que vous attendez de ce fermier que vous avez désigné comme Élu.

Le rouge qui monta aux joues du garçon n'avait plus rien à voir avec son précédent désespoir. Il pointa son petit doigt sous le menton de Capella avec toute la menace qu'un enfant de huit ans pouvait manifester.

— On n'a jamais élu cet imbécile ! C'est clair ?

Capella se contenta de lever les mains en signe de résignation passive. Elpos grommela dans ses boucles blondes et renifla une dernière fois, comme pour ponctuer son affirmation.

— Si t'es là, c'est que l'autre demeuré n'a toujours rien retenu, j'imagine, hein ? Bon... C'est d'accord...

Elpos se lança alors dans l'explication de la situation. Il voulut résumer comment les Cinq Seigneurs Démoniaques avaient surgi et dévasté les Terres lors de l'Éclipse de Six Jours. Comment ils avaient été là, tapis dans l'ombre depuis des années, des siècles peut-être, attendant le moment propice. Comment la terreur avait régné en maitresse dans la Longue Nuit et comment l'Exode s'était mis en place dans le chaos. Expliquer que l'Exode consistait en ces semaines où toutes les populations du monde cherchèrent refuge dans les quelques Cité-Saintes. Il aurait voulu dire qu'à l'aube de l'Éclipse, le Soleil s'était levé sur une mer de sang et de dévastation. Dévoiler comment les cultes de la Septinité avaient été meurtris, leurs fidèles les ayant abandonnés soit dans la mort, soit dans le parjure. Comment, ayant perdu subitement la grande majorité de leurs pouvoirs, les Dieux prirent le parti de protéger autant qu'ils le pouvaient les seules Cité-Saintes et de délaisser par la même occasion tout le restant des Terres Émergées.

Il aurait voulu, mais à peine avait-il commencé que Capella l'interrompit.

— Capella sait déjà toutes ces informations. Dis à Capella ce qu'elle ne sait pas.

Elpos, qui n'en menait déjà pas large, se sentit rapetisser davantage. Que l'aura de cette sorcière était impressionnante !

Il comprenait ce que Capella attendait de lui, alors il s'y attela : les Sept Divinités avaient investi une partie de leur pouvoir restant en Jondo. Bien malgré eux. Il insista fortement sur ce dernier point.

En apposant l'heptagramme incrusté sur sa paume et en se concentrant un minimum (ce qui ne serait pas une mince affaire, souligna l'enfant), l'Élu devait pouvoir prodiguer un des sept pouvoirs divins.

Artos, dieu des Arts, lui avait conféré la possibilité d'exacerber un talent quelconque.

Paxae, déesse de la Sérénité, lui octroyait la faculté de calmer, voire d'endormir.

Phylae, déesse de la Protection, avait attribué le don de soigner.

Hilaros, dieu du Bonheur, lui permettait de faire rire sur simple contact.

Virtae, déesse de la Vérité, avait confié le pouvoir d'imposer la diction de toute vérité.

Erae, déesse de l'Amour, lui donnait la magie du coup de foudre juste par un toucher.

Enfin, lui-même, Elpos, avait accordé à Jondo la possibilité de lire les rêves.

Capella écouta attentivement l'énonciation. Elle ne jugea pas opportun de relever que ces pouvoirs étaient quand même sacrément inutiles face aux puissances démoniaques. Cela ne faisait que renforcer sa conviction que ces « Dieux » étaient dépassés. Elle-même avait désormais bien davantage de pouvoirs qu'eux.

Si elle le souhaitait, elle aussi aurait pu assembler un amas de brebis en manque de croyance et s'imposer comme une Déesse à leurs yeux. Leurs prières décupleraient sa puissance. Peut-être était-ce là une meilleure solution que les dons ridicules du paysan-élu ? C'était tentant.

— Il faut donc que Jondo neutralise les quatre autres Seigneurs et le monde sera sauvé ?

— Moui... enfin, ce n'est pas sûr... Ils sont très forts. Plus qu'ils ne l'ont jamais été. Ils se nourrissent du mal qui pourrit le monde depuis des siècles. Mais...

— Mais vous avez la conviction qu'il y a un autre élément perturbateur ? Cela commence à faire beaucoup.

— En effet... Paxae, qui est très sensible à ces choses-là, perçoit autre chose. Ce n'est pas clair. Toi qui sais plein de trucs, t'as rien remarqué ?

Capella songea à cette nuée de diablotins dont elle ignorait l'existence jusqu'à il y a quelques battements et l'apparition fugace de Bêêlzébuth. Elle soupçonnait le monstre d'être camouflé sous la forme de cette chèvre blessée qui avait protégé l'Élu. Tout cela restait mystérieux et Capella n'avait pas pour habitude de propager les incertitudes. Quand bien même elle aurait eu des explications, elle ne faisait pas assez confiance aux Dieux pour les mettre dans la confidence.

— Négatif.

— Dommage... bon garde l'œil ouvert au cas où et tu me dis, hein ?

Elpos tanguait sur ses petits pieds, balançant son poids d'une jambe à l'autre. Il cafouillait avec ses doigts et se mordait la lèvre.

— Tu as autre chose à énoncer ?

— Non... non, je dois pas... les autres vont pas être d'accord...

— Elpos.

La voix de Capella reprit cette teinte métallique inhumaine. Sa froideur aurait pu faire frissonner les os.

— On a plus ou moins réussi à cerner où se trouvent les quatre autres Seigneurs...

— Dis-moi.

Acculé, Elpos dévoila à Capella les positions de chacun d'entre eux avec autant de précision que possible.

N'ayant plus rien à lui apprendre, la sorcière décida qu'il était temps de partir. Elle rejoignit Jondo pour l'éveiller. Ce dernier fit un signe d'adieu de la main à Elpos. L'Enfant-Rêveur rétorqua avec un geste grossier. Geste que Jondo ne comprenait visiblement pas la signification puisqu'il sourit en réponse et s'amusa à le reproduire.

Capella posa un doigt sur le front du paysan et les ténèbres les engloutirent tous deux, bercés par les insultes outrageusement vulgaires de l'Enfant-Rêveur.

Voici les choix pour le prochain chapitre :


- LES INFOS :

1. Capella va révéler toutes les informations qu'Elpos lui a donné.

2. Capella va retenir certaines informations (lesquelles ?)

3. Choix proposé(s) par les lecteurs (si vous proposez un autre choix un minimum cohérent dans l'histoire, je le rajouterai ici)


- JONDO (en fonction du choix précédent bien sûr) :

1. Il va tester ses nouveaux pouvoirs sur les nomades et Éclair, notamment pour les soigner.

2. Il va tester se nouveaux pouvoirs mais va faire n'importe quoi. Il obtiendra des résultats non-escomptés.

3. Les autres vont vouloir qu'ils testent ses pouvoirs, mais sous la pression, il ne va pas y arriver.

4. Choix proposé(s) par les lecteurs (si vous proposez un autre choix un minimum cohérent dans l'histoire, je le rajouterai ici)


N'hésitez pas à faire d'autres suggestions !


Fin des votes dimanche 11/04/2021 à 22h (UTC +2). Chapitre suivant le 14/04 au plus tard.

À vos votes !



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