Chapitre V - Tomber dans l'oreille d'un sourd
Votes : 10
🏅 Si le nombre de votes se termine par 0, pas de grands boulversements. Peut-être un moment de répit dans cette folle aventure ?
Choix des lecteurs :
🏅 Tenter de trainer le fermier vers la chaumière pour éventuellement essayer de le sauver, ou sinon l'enterrer.
Quand bien même elle l'aurait souhaité, Sagrymor ne pouvait abandonner un innocent, aussi puant et stupide soit-il. Qui plus est un innocent marqué par les dieux.
Elle ne parvenait plus à plier son bras gauche. Du sang perlait de la cubitière, mais la chevalière n'osait la retirer de peur que la plaie ne soit plus colmatée. Il lui restait son bras droit, bien qu'une griffe de diablotin devait toujours jaillir de son omoplate tel un étendard morbide.
Poussant l'outil béni des dieux du bout du pied, Sagrymor parvint à le poser sur le torse du paysan. Puis, se saisissant d'une cheville, elle entreprit de trainer le corps inerte. Par chance, le fermier était plutôt gringalet et la pente descendante. Cela épargnait un tant soit peu son épaule droite endolorie.
Jetant des coups d'œil vers le visage du jeune homme, Sagrymor crut voir sa langue terreuse remuer et les yeux s'agiter sous ses paupières encrassées. La chevalière soupira. Il devait être en vie. Pour le meilleur comme pour le pire.
Elle se trouvait à présent à mi-chemin de la chaumière située au pied de la colline. Aucun mouvement visible jusqu'à présent. L'habitation semblait vide.
Peut-être était-ce la demeure de ce fermier ? C'était le plus probable étant donné la proximité avec son champ. Par ailleurs, si c'était une bâtisse désertée lors de l'Exode, elle aurait été en ruine depuis tout ce temps. Non qu'elle ne fût dans un état resplendissant, loin de là, mais elle paraissait habitable. Toutefois, si c'était bien la demeure du fermier, cela épaississait davantage le mystère entourant ce jeune homme. Comment avait-il pu survivre en plein territoire diablotins en étant sédentaire dans une chaumière clairement visible depuis n'importe quelle colline ou butte avoisinante ?
Les questions se bousculaient dans l'esprit fatigué de Sagrymor et elle ne remarqua pas la pente qui s'accentuait. Ce n'est que lorsqu'elle vit le corps du fermier rouler à ses côtés, qu'elle réalisa. Trop tard. Le corps emporté par son élan, la chevalière n'eut pas la force de retenir la cheville.
Sagrymor ne put qu'assister impuissante au roulé-boulé désarticulé du paysan. Elle grimaça en le voyant rebondir sur une motte de terre, puis lorsque la tête heurta une pierre. Le corps termina sa course dans une fosse à proximité de la chaumière.
Elle accourut aussi vite que la fatigue l'autorisait. Le trou n'était pas très profond, mais suffisait à rendre l'extraction du corps inerte fastidieuse. Sagrymor jeta un œil aux alentours, et sans réfléchir davantage, se saisit d'un bâton à proximité de la fosse. Cela lui permettra peut-être de faire levier.
C'est alors que le fermier ouvrit les yeux depuis le fond de son trou. C'est aussi à ce moment que Sagrymor réalisa qu'elle s'était saisi non pas d'un bâton, mais d'une pelle.
Un silence ambigu et pesant s'installa confortablement entre le jeune homme allongé au fond de sa fosse à purin et la chevalière, en contre-jour d'un soleil déclinant, pelle à la main.
— Ce n'est pas du tout ce qu'il parait, finit par déclarer Sagrymor.
☆☆☆
Sagrymor se retint de vomir.
— Oh la vache ! étouffa-t-elle d'une main sur sa bouche.
— Ah non ça, j'ai po d'vaches, fit le fermier.
— C'est bien ça qui m'inquiète ! Ça prend le nez, c'est affreux ! J'ai l'impression que ça va me ronger les yeux tellement ça pue.
— J'pife rien moi, fit le jeune homme en reniflant bruyamment.
— Vu votre odeur, ça ne m'étonne pas en fait ! fit Sagrymor en retenant un hoquet douteux. Reste à savoir si ça vient de vous ou de cette piaule...
L'intérieur de la petite chaumière était le reflet de son extérieur. Ni abandonnée, mais impossible d'imaginer que quelqu'un puisse y vivre. Du linge crasseux et des sacs de jute éventrés trainaient à même le sol boueux. Une paillasse jaunie par la sueur et la saleté avoisinait un pot de chambre débordant de liquides opaques. Une table bancale tailladée sur toute sa surface, seul mobilier de la pièce, présentait quelques ustensiles de cuisine à peine visibles sous une nuée de mouches.
Le paysan, tout à son aise chez lui, entreprit de retirer sa chemise incrustée de terre et autres déjections.
— Je vais attendre dehors, fit Sagrymor ne tenant plus.
☆☆☆
— Tiens Sacrémort, fit le jeune homme en tendant une coupe d'eau à la chevalière.
Elle était agenouillée dans l'herbe à dix pas de la chaumière, les yeux fermés, savourant à pleins poumons l'air pur
— Merci, souffla-t-elle.
La chevalière s'empara de la coupe par instinct, mais s'immobilisa net. Ce n'était pas en raison de la couleur grisâtre de l'eau.
— Comment m'avez-vous appelé ? fit-elle interloquée.
— Sacrémort. C'est ben comme ça que tu t'blazes ?
— Sagrymor, mais peu importe, comment vous savez ça ?
La chevalière s'était relevée pour faire face au fermier, l'air grave. La coupe d'eau tomba dans l'herbe à ses pieds.
— C'est l'gouillon qui m'l'a dit, fit simplement le jeune homme.
— Un quoi ?
— L'gouillon là. L'gromiau, l'galurin, l'poulbot, l'mouflet quoi ! insista Jondo devant la grimace de la chevalière.
— La vache, je pige rien à ce que vous dites, se crispa Sagrymor.
— L'gamin là, dans l'noir. El'poch ou j'sais po quoi, répondit le paysan d'un geste agacé.
— Elpos ! Le dieu Elpos ! Vous avez vu l'Enfant-Rêveur ?
Sagrymor empoigna fermement de sa main droite l'épaule du fermier, ne prêtant plus attention à sa douleur.
— Ouais v'là, le « dieu », c'est ça qu'y l'a bagoulé l'mioche, approuva le cultivateur qui cherchait à se dérober de la poigne de la chevalière.
— Qu'est-ce qu'il vous a dit ? poursuivit Sagrymor en resserrant son emprise.
— J'sais po moi ! commença à s'agacer le jeune homme, comme quoi j'devais sauver l'monde de cinq machins sinon quoi y l'inonderait mon champ. Pis que j'devais rester avec toi là. Pis que j'ai des pouvoirs et tout ça quoi.
— Quels pouvoirs ? insista Sagrymor.
Le fermier sembla réfléchir un instant, supportant le regard intransigeant de la chevalière. Elle eut envie de le secouer pour que ça mouline plus vite dans sa tête ! Le Dieu des Rêves l'avait contacté ! Elle allait enfin connaitre la prochaine étape de cette quête divine infernale, mais aussi savoir quel arsenal les dieux leur avaient légué pour ces épreuves à venir. Peut-être allait-elle apprendre comment se servir de l'outil béni qui décimait les diablotins, mais pas les chevaux ?
Enfin, le fermier ouvrit la bouche :
— J'sais plus.
— Comment ça ? hurla presque Sagrymor.
— Y m'a dit des choses-trucs à c'sujet, j'suis sûr d'mon affaire. Même qu'il caquetait tout plein. Mais m'rapopelle pas.
S'en fut trop. Sagrymor poussa un cri qui retentit à travers le vallon. Un cri nécessaire, vital même. C'était ça où elle défonçait davantage cette foutue face impassible qui se tenait devant elle. Plus rien n'a fiche des diablotins. Ils pouvaient l'entendre. Les cinq maudits Seigneurs en personne pouvaient rappliquer. Peu importe ! Elle leur balancerait cet imbécile en pâture et en emporterait autant que possible dans l'au-delà.
Le soleil jeta un coup d'œil orangé à la scène, avant de se lasser et de disparaitre derrière l'horizon. Il fallut que la noirceur s'installe pour que la furie de Sagrymor se calme enfin. Elle n'avait toujours pas lâché l'épaule du fermier. Ses doigts gantelés profondément enfoncés dans sa chair. Ce dernier n'avait pas bronché, et ne laissait transparaitre aucun inconfort. Il se contentait de regarder, l'air penaud, la chevalière essoufflée.
— Quel est votre nom, jeune homme ? fit Sagrymor.
— Jondo.
— Une simplicité qui vous sied.
Un froncement de sourcil du fermier ne laissa aucune illusion sur le fait qu'il n'avait pas compris la pique.
— Écoutez Jondo, je suis épuisée et blessée. Vous-même, entre votre égratignure au bras et votre tronche boursoufflée, vous n'êtes pas au mieux de votre forme, même si vous semblez le vivre plutôt bien. À moins de choper la peste au passage, je doute que vous ayez de quoi nous soigner dans votre taudis là, n'est-ce pas ?
Jondo se contenta d'hausser les épaules.
— Voilà. Donc, on va panser au mieux nos blessures avec, si possible, quelque chose dont vous ne vous êtes pas servi pour vous torcher un orifice. Ensuite, on va passer la nuit ici. Avec un peu de chance, Elpos vous réapparaitra en rêve et cette fois vous ferez l'effort de retenir ce qu'il vous dit !
Jondo haussa de nouveau les épaules.
— Bien. Maintenant, commencez par aller récupérer votre étrange outil béni on-ne-sait-comment. Il est resté là-bas, fit Sagrymor en pointant la colline.
— C't'une serfouette, maugréa Jondo en obéissant néanmoins.
Cette fois, vous pouvez choisir deux options et je sélectionnerai les deux ayant le plus de votes ! Possibilité de choisir une action longue et une courte ou deux courtes.
Je compte sur vous pour donner des propositions ! 🙂
Voici les choix pour le prochain chapitre :
Actions longues :
1. Des diablotins attaquent, alertés par le cri de Sagrymor.
2. Des maraudeurs attaquent pendant la nuit.
3. La nuit se passe sans encombre.
4. (proposée par DanielleLikhana et quelque peu remaniée par moi 😉) Sagrymor et Jondo passent la nuit à discuter et se chamailler. Le lendemain, ils ne vont pas être frais !
5. (proposée par Ahmeiral) Jondo ronfle. Impossible pour Sagrymor de dormir qui va passer la nuit à essayer de l'arrêter.
Actions courtes :
6. Sagrymor s'évanouit en raison de l'odeur.
7. Talion réapparait.
8. (proposée par Ahmeiral) Le ventre de Sagrymor cri famine. Elle va se retrouver à manger ces fameux navets.
9. Choix proposé(s) par les lecteurs (si vous proposez un autre choix un minimum cohérent dans l'histoire, je le rajouterai ici)
Fin des votes dimanche 27/09/2020 à 22h (GMT +2). Chapitre suivant le 29/09 au plus tard.
À vos votes !
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