Chapitre II - En avoir sa claque

Votes : 19

🏅 Jondo va passer un sale moment...

Baffes (Tags) : 70

🏅 Jondo se réveille (un peu sonné quand même !)

🏅 Le son des claques résonne dans le vallon et la mâchoire de Jondo est engourdie.

🏅 Le visage de Jondo est couvert d'hématomes. Les marques de main vont rester un moment...

🏅 Un des tympans de Jondo se perce. Il va être complètement sourd d'une oreille pendant un bon moment...

Merci à tous pour votre participation à ce premier chapitre ! Garnath, tes 23 baffes t'ont octroyé le droit de passer ta main dans la glace. En récompense, ton choix dans ce chapitre comptera double ;)

Sagrymor attrapa le jeune homme par le col de sa chemise de lin. Son corps était flaccide et sa tête ballotait. Elle commença par quelques tapes légères sur les joues mal rasées, pour tenter de le ranimer.

Treize ans.

L'Ordre des Chevaliers de l'Aube Rouge Écarlate avait cherché pendant treize longues années en réponse à la prophétie de la Vieille Chouette. Ses frères et sœurs d'armes avaient parcouru le continent entier, bravant les éléments et les démons qui pullulaient désormais sur les terres. Ce fut sous les Grandes Montagnes d'Argent, dans le Dédale des Murmures Oubliés qu'ils avaient déniché ce précieux parchemin, bruni par le temps.

Le fermier n'ouvrait toujours pas l'œil. Sagrymor intensifia quelque peu son va-et-vient, envoyant valser la tête du jeune homme de droite à gauche.

Une fois la carte trouvée, il avait fallu traverser de part en part le monde connu pour se diriger vers la Colline Divine. Vingt-sept chevaliers émérites de l'Ordre affaibli avaient quitté le Monastère pour cette sainte quête. Le voyage avait été long, éprouvant et mortel. Seule Sagrymor était arrivée en ce jour sur la fameuse butte, unique rescapée des vingt-sept.

Contrairement à sa peau tannée qui rougissait à vue d'œil, le paysan ne manifestait aucune réaction aux séries de gifles. Le peu de patience dont pouvait faire preuve Sagrymor s'amenuisait à chaque nouvelle claque qui résonnait à travers le vallon.

Treize années et elle avait échoué à deux doigts du but. À seize pas pour être tout à fait exact. Seize petits pas du Cercle des Dieux où elle aurait dû se trouver, épée brandie vers les cieux. La foudre aurait dû s'abattre sur elle. Elle aurait dû être l'Élue. C'était sa destinée, elle en avait la certitude. Mais voilà qu'au dernier battement, elle avait été prise de court par ce maudit cul-terreux sorti de nulle part.

La frustration se mêlait maintenant à l'impatience. Le bruit sec de la peau se heurtant à une autre aurait eu de quoi soulever les cœurs sensibles. Les joues du jeune fermier étaient désormais marquées de l'empreinte rouge cramoisi des doigts de la chevalière. Les pommettes viraient au violacé et la main de Sagrymor s'engourdissait.

— Mais vous allez vous réveiller oui ? grogna Sagrymor.

À ce moment, le paysan rouvrit les yeux et la bouche, comme s'il s'était tenu en apnée jusque-là.

— Foutredieux ! s'exclama-t-il.

Une ultime taloche, plus forte que toutes les autres, vint s'écraser une dernière fois contre sa joue. Un filet de bave gicla et le jeune homme manqua de s'en mordre la langue.

— Pas de blasphème ! vociféra la chevalière hors d'elle.

☆☆☆

— Po deux places fermes ? répondit Jondo, éberlué.

Il porta une main à son visage qu'il sentait tout enflé. Que s'était-il passé ? Pourquoi cette vagabonde l'agrippait-elle par le col en lui assénant des coups ? Comment se faisait-il qu'elle ait une peau couleur terre qui tranchait à merveille avec l'argent métallique de son armure ? Pourquoi se tenait-elle si proche de lui avec ce regard noir malgré des yeux gris aux teintes d'améthyste et de fatigue ? Pourquoi sa mâchoire à lui et son corps étaient-ils ainsi engourdis ? Et pourquoi n'entendait-il plus rien de l'oreille gauche ?

La femme ignora la question posée, mais sembla déceler les interrogations dans les yeux du contadin.

— Vous avez reçu la foudre divine. Les dieux vous ont choisi. Vous êtes... l'Élu, annonça avec difficulté la femme en soupirant.

Jondo fixa un instant cette femme aux traits sévères. Il ne se laissa pas intimider par sa mâchoire carrée ni ne s'attendrit devant son épuisement.

— Hein ?

La femme soupira à nouveau et se contenta d'empoigner le bras droit de Jondo. Tournant la paume pour qu'il l'ait juste sous le nez, il ne put que contempler, impuissant, l'étoile à sept branches qui y était incrustée. C'était comme si sa main avait été marquée au fer des années auparavant. La lueur bleue venait de s'y estomper.

— Voilà ! Vous voyez cette marque, là ? C'est la preuve que vous êtes l'Élu ! É-LU ! Ce n'est pas compliqué !

Les yeux de Jondo s'écarquillèrent un peu plus.

— Crévinnom ! Mais qu'est-c'est y c'machin là ? gueula-t-il.

Il entreprit d'essuyer la marque contre le sol, ses habits et même de la gratter avec les ongles crasseux de son autre main.

— Vous êtes marqué, crétin ! Ça ne s'enlève pas comme ça ! Plutôt que d'essayer de vous en débarrasser, vous devriez être honoré d'arborer ce sceau divin ! s'agaça la femme en armure, en se redressant.

— Mais y'ai rien d'mandé moué ! M'en tamponne ben de vot' seau de vinasse à la con ! répliqua Jondo en se relevant à son tour.

Il ne se laissait pas impressionner par la grandeur impressionnante de la chevalière qui le dépassait aisément d'une tête. La petite balafre sous son œil gauche, l'état de ses oreilles aux hélix entaillés et lobes arrachés, le nez nubien empâté et cassé au centre de son arête étaient autant de preuves que cette femme en avait vu d'autres, mais Jondo ne flancha pas pour autant.

— Attention ! Vous êtes à deux mots du blasphème là ! À voir les contusions sur votre visage, ma main a pris goût à vos joues, alors faites gaffe !

Alors qu'il s'apprêtait à lui dire qu'il pouvait bien se la mettre où il pense sa main, un bruit résonna depuis le contrebas de la butte. Malgré le sifflement de son oreille gauche, le son semblait s'intensifier. La chevalière devait également l'avoir entendu, car elle se figea, le bras toujours levé. On eût dit un chaos de piaillements suraigus.

Le visage de la chevalière se décomposa alors qu'elle distinguait une masse grouillante émergeant d'un sous-bois à moins d'un quart de lieue.

— Non... nous avons fait trop de bruit. Ils nous ont trouvés, fit-elle avec gravité.

— Qu'est-c'est y ça donc ? demanda Jondo.

La chevalière se tourna vers lui stupéfaite.

— Vous n'allez quand même pas me faire croire que vous errez seul dans cette campagne maudite et que vous n'avez jamais croisé de diablotins ?

Jondo se contenta de hausser les épaules. Il regardait impassible la nuée de créatures couleur rouille qui accouraient vers eux. Elles faisaient moins d'un mètre en taille et étaient d'une maigreur à faire peur. Des muscles nerveux tendus à l'extrême transparaissaient à travers leur peau glabre. Il était étonnant de voir à quelle vitesse elles avançaient en se bousculant de toutes parts, tant leurs deux jambes étaient courtes. Leurs longs bras maigres, aux doigts osseux et affutés de griffes scintillantes ballotaient en tous sens. Dans la cohue, certaines lacéraient leur voisines, ou les piétinaient, sans aucun scrupule. Sous une paire de cornes aux tailles et formes variables, Jondo distinguait d'ici une gueule large, brillante de petits crocs ensalivés.

Une scène d'horreur, agrémentée de cris à vous glacer le sang. Pourtant, Jondo ne broncha pas, ne laissant transparaitre aucune peur.

— Mais d'où vous sortez vous ? souffla Sagrymor devant l'indifférence du fermier.

Elle secoua la tête à la fois incrédule et pour reprendre esprit. Les créatures étaient trop proches. La fuite n'était plus une option. Elle ramassa son heaume et tira son épée.

— Si je ne peux être l'Élue, au moins puis-je le défendre de ma vie, marmonna-t-elle en enfilant son casque.

La visière était une ligne droite, surplombée d'un demi-soleil aux sept rayons. Ses yeux gris brillaient dans la pénombre de la petite fente. Au-dessus d'eux, les nuages noirs de l'orage éphémère s'étaient volatilisés et l'armure de la chevalière brillait de mille feux. Jondo était presque émerveillé par l'aura de cette femme d'acier.

— Ma force, glaive des faibles, murmura-t-elle.

Un lourd écu calé contre son torse, la femme avança vers l'ennemi. Précédé uniquement de leur cacophonie, la horde de diablotins n'était plus qu'à quelques pas, progressant le long du flanc de colline.

— Ma foi, bouclier contre l'obscurité, poursuivit la chevalière d'une voix plus claire.

Puis brandissant son épée par-dessus sa tête, elle s'élança en hurlant.

— Ma chair, étendard du dernier rempart ! 

Malgré le poids de son armure, elle parcourut sans mal les dizaines de pas la séparant de la nuée. Son écu se fracassa contre les crânes des premiers rangs dans un claquement écœurant. La lame balaya autour d'elle, libérant des gerbes de sang noir.

Jondo n'avait toujours pas bronché. Sa serfouette encore à la main, il se contentait d'observer la lutte de la chevalière, qui peinait déjà à contenir le flot de féroces petits monstres. Ils lacéraient et s'agrippaient aux plates de l'armure de leurs longues griffes, cherchant à ouvrir cette gigantesque boite de métal pour en dévorer le contenu, sans aucun doute.

Pour la première fois de sa vie, Jondo était tiraillé. Il ne savait que faire. D'un côté, il ne voulait pour rien au monde prendre part à toute cette folie et les conneries que lui avait déblatérées la chevalière. D'un autre côté, il craignait pour ses navets. Car si la chevalière tombait, ces diablotins ne manqueraient pas de venir piétiner ses précieuses cultures, dont le champ se trouvait de l'autre côté de la colline.

Alors que faire maintenant ?

Voici les choix pour le prochain chapitre :

● Craignant trop pour ses navets, Jondo est prêt à tout sacrifier. Armé de sa binette, il charge pour assister Sagrymor du mieux qu'il peut.

● Toujours aussi impassible, Jondo préfère rester où il est et voir comment la chevalière s'en sort. Au besoin, il agira, mais qu'en dernier recours.

● Jondo se dit qu'il peut peut-être faire diversion pour attirer les bestioles dans une autre direction que son précieux champ.

● Jondo n'en a plus rien à secouer. Il se dit qu'il vaut mieux se casser d'ici et qu'au pire les navets, et bien il les replantera après que ces diablotins soient passés. Vivre pour mieux replanter non ? D'ici là, direction la maison !

Fin des votes samedi 12/09/2020 à 22h (GMT +2). Chapitre suivant quelques jours après.

À vos votes !

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