32. Parabellum
-Vous avez exactement deux minutes pour démonter puis remonter vos armes, annonça Pike. Les retardataires auront le plaisir de recommencer cette nuit une bonne trentaine de fois, dans le noir, pour s'entraîner... Allez top chrono!
La dizaine de recrues ne se le fit pas dire deux fois; depuis le début du programme, ils avaient appris que chaque seconde perdue pouvait se payer très cher...
Sam essayait de se concentrer sur son pistolet, sans penser à la menace d'être privé d'un peu de son précieux temps de sommeil en cas d'échec. C'était loin d'être la première fois qu'il se livrait à cet exercice, et les instructeurs conseillaient de travailler avec calme et méthode. Mais le garçon sentait bien qu'il perdait du temps en manipulations inutiles, autant à cause du stress que de la fatigue, ce qui le poussait encore plus à l'erreur. Le présence de Pike ne l'aidait pas vraiment non plus à rester calme et concentré; l'instructeur surveillait les recrues avec un sourire mauvais, les yeux caché derrière les verres fumés des lunettes de soleil qu'il gardait même à l'intérieur des bâtiments.
Lors de son premier jour à CHERUB, Zara avait assuré à Samuel que les missions de l'organisation n'étaient que rarement dangereuses. Mais depuis près de trois mois que durait le programme d'entraînement initial, le garçon avait put constater que les agents étaient largement préparés aux opérations les plus difficiles. Les langues étrangères, techniques d'espionnage et initiation aux nouvelles technologies ne représentaient qu'une petite partie des cours dispensés; les techniques de survie en milieu hostile, le combat au corps à corps ou avec diverses armes ainsi que les tactiques commandos occupant la majeure partie des journées. Dans tous ces domaines les recrues recevaient un enseignement poussé, d'autant plus que les instructeurs étaient tous d'anciens militaires.
Depuis le cinquantième jour, Pike et Speaks avaient durcit l'entraînement, les conditions de vie et les punitions, une chose que leurs stagiaires n'auraient pas cru possible au début du programme. Mais malgré ce régime violent, aucune des recrues n'avait abandonnée, sans doute le meilleur signe que la formation fonctionnait bien. Vu les souffrances et les vexations subies au quotidien, les pires épreuves ne leurs inspiraient plus beaucoup de craintes. Épuisés et surveillés en permanence, ils n'avaient tout simplement plus le loisir d'avoir peur de grand chose. Pour preuve, après cinq jours de stage éprouvant passés dans les montagnes d'Écosse, les recrues étaient même heureuses de retrouver le camp d'entraînement érigé dans les murs du campus, au confort pourtant spartiate. Une douche froide valait mieux que pas de douche du tout.
Malheureusement pour eux, il n'était pas question d'en profiter pour le moment. Ils n'étaient rentrés que depuis quelques minutes, quand les instructeurs les envoyèrent tous en direction du stand de tir, situé entre la piscine et l'armurerie. On leur avait remit un pistolet à chacun avant de les installer dans un petit local où Pike avait lancé le nouvel exercice. Depuis on entendait que le bruit des armes en train d'être démontées, et une odeur d'huile flottait dans l'air confiné de la pièce.
Sam n'aimait pas vraiment les armes à feu. Il ne les détestaient pas non plus; elles n'étaient que des outils de plus à maîtriser pour devenir agent opérationnel de CHERUB. Sa nouvelle coéquipière, Linda, n'était pas comme lui. Le garçon lui jeta un rapide coup d'œil. Elle venait de terminer son remontage, et alors qu'elle vérifiait le fonctionnement du pistolet, elle souriait insensiblement, prenant un plaisir manifeste à cette tâche.
Sam baissa à nouveau les yeux vers son arme à moitié assemblée, sentant une pointe de tristesse l'assaillir, comme à chaque fois qu'il repensait à Nathaniel.
La chute du garçon s'était soldée par une fracture du tibia, l'éliminant du programme pour plusieurs mois. Il allait devoir recommencer une nouvelle session de cent jours depuis le début, dès qu'il serait guéri de sa blessure. Les instructeurs avaient annoncé la nouvelle à son coéquipier juste après avoir emmené le blessé, et il n'avait même pas put dire se dire au revoir. Le programme continuait, sans laisser le moindre instant de répit, mais après toutes les épreuves traversées ensembles, le départ de Nathaniel lui laissait encore un sentiment amer de culpabilité. Sam avait même failli démissionner, mais ça aurait été abandonner sa nouvelle coéquipière, et gâcher la chance que son ami n'avait pas eu. Il n'avait put se résoudre ni à l'un ni à l'autre.
-Terminé, annonça Pike à l'instant précis où le garçon finissait son remontage. Inspection des armes.
Samuel jeta un regard circulaire, et s'aperçut avec soulagement que tous leurs camarades semblaient avoir finis à temps. Il connaissait surtout Dean et Will depuis les quelques heures partagées dans la grotte, mais si le programme lui avait bien apprit une chose, c'est qu'on ne s'en sortait pas en ignorant les autres. Et plus pragmatiquement, si un seul d'entre-eux terminait en retard, les instructeurs s'assureraient qu'il ait de la compagnie.
Soudain il sentit Linda lui toucher discrètement le coude. Il se tourna vers elle, et constata qu'elle regardait son pistolet, l'air pressant. Sam s'aperçut alors qu'il avait oublié de remettre la sûreté après ses mesures de sécurité, une erreur que Pike ne pourrait pas manquer. L'air dégagé, le garçon remit le petit levier en place avec son pouce, aussi discrètement que possible. Heureusement, l'instructeur était occupé à inspecter d'autres armes, et sembla ne pas entendre le discret claquement que produisit l'opération.
-Correct, lâcha-t-il en vérifiant le pistolet quelques instants plus tard. T'as terminé juste à temps, fais gaffe ''loin du ciel''...
Le garçon ne répondit rien, se contentant de baisser la tête. Depuis des semaines, Pike ne perdait pas une occasion de se moquer de sa taille, essayant d'être aussi blessant que possible, sans grand succès. Pour être tout à fait honnête, Sam devait reconnaître qu'il faisait ça avec tout le monde, sans s'acharner particulièrement sur lui. Mais répondre à ses remarques aurait été vraiment stupide, suicidaire même.
L'instructeur finit de vérifier les armes, puis se dirigea vers la porte du petit local où ils se trouvaient.
-Sam et Linda, suivez moi. Les autres, entraînez vous à démonter et remonter. À mon retour vous devrez y arriver en une minute trente.
Les deux recrues désignées échangèrent un regard vaguement inquiet, mais emboîtèrent le pas à l'instructeur sans discussion. Le trio traversa plusieurs couloirs bétonnés, avant de d'arriver dans le stand de tir.
Ils arrivèrent d'abord dans une salle tout en béton. Une table dans un coin permettait de compter les munitions et de remplir les chargeurs sans gêner les tireurs. D'un côté de la pièce, une cabine en verre blindé permettait de contrôler les cibles et les haut parleurs du stand. En face, une estrade en béton et des fenêtres pare-balles étaient aménagées pour le tir à longue portée, le tout pouvant accueillir pas moins d'une dizaine de tireurs simultanément.
Sur les côtés, deux portes permettaient de pénétrer sur le pas de tir. C'est vers l'une d'elle que se dirigea Pike, Sam et Linda sur ses talons.
La zone de tir mesurait plus de trois-cent mètres de long, et le plafond était aussi haut qu'un immeuble de trois étages. Les murs en béton étaient constellés d'impacts de balles perdues, et le sol était recouvert de sable, régulièrement ratissé par le personnel ou les agents punis.
Les cibles pouvaient être placées sur de gros caissons blindés, qui les faisaient basculer en cas d'impact et pouvaient aussi les relever automatiquement. Mais aujourd'hui les dispositifs étaient vides, et le petit groupe marcha jusqu'à la butte de sable tout au fond du stand de tir, ce qui prenait un certain temps.
Pour une raison que le Sam ignorait, il faisait toujours froid à l'intérieur du stand de tir, mais il ne frissonna pas bien qu'il ne porte que le T-Shirt réglementaire bleu ciel portant son numéro cousu dans le dos. Le programme l'avait endurcit, physiquement et mentalement. En revanche, l'odeur âcre de poudre qui saturait l'air l'empêchait de respirer aussi librement que d'habitude. Le silence à l'intérieur du stand était total, seulement perturbé par le bruit de leurs pas et de leurs respirations, amplifié par l'absence d'autre son.
Alors qu'ils avançaient, Sam remarqua, deux gros sacs étaient posés par terre juste devant la butte. Monsieur Speaks, l'instructeur en chef, les attendait là.
-Bienvenue, bienvenue, lança-t-il avec une chaleur inhabituelle qui mit aussitôt les deux recrues sur leurs gardes. Il y a des tenues pare-balle dans les sacs, équipez vous.
Linda et Sam échangèrent à nouveau un regard inquiet, mais ne dirent rien. Après un mois en binôme, ils n'avaient plus vraiment besoin de parler pour communiquer.
Exécutant docilement l'ordre donné, ils commencèrent à enfiler les tenues, s'entraidant pour aller plus vite. Moins d'une minute plus tard, ils étaient équipés et casqués de la tête aux pieds.
-Parfait, parfait, lança Speaks, tout sourire. Maintenant est-ce qu'un de vous peut me dire quelle est la vitesse d'une balle de 9mm parabellum à la sortie du canon?
Lors de leurs cours d'armement les recrues devaient apprendre par cœur des fiches techniques entières, si bien que Sam aurait put déterminer sans effort le modèle, le calibre et même le poids à vide ou chargé du pistolet qu'on lui avait remis. Il savait aussi bien neutraliser, saboter ou réparer les armes à feu les plus répandues, ainsi que les manier. Mais la question de l'instructeur lui semblait trop facile et suspectant un piège tordu, il hésita à répondre, si bien que sa coéquipière le devança.
-350 mètres par seconde monsieur, lança Linda, sûre d'elle.
-C'est parfaitement exact, lâcha Speaks, l'air ravi. Viens par ici ma grande.
La jeune fille s'avança, et l'instructeur la prit par les épaules pour la faire se retourner vers son coéquipier. Ainsi placées les deux recrues étaient face à face, Linda tournant le dos à la butte de sable. Deux instructeurs pour deux recrues... C'était plutôt inquiétant. Speaks se tenait à côté d'elle, alors que Sam sentait la présence de Pike derrière lui.
-À quelle distance est tu certain de toucher cette cible? demanda ce dernier en s'avançant, une grosse assiette orange à la main.
Le garçon prit un instant pour réfléchir.
-Fixe ou en mouvement? finit-il par demander.
-Fixe, répondit patiemment l'instructeur.
-Trois mètres, lâcha finalement Sam.
En fait jusqu'à cinq mètres il était certain d'y parvenir sans effort, mais il craignait toujours un piège.
Pourtant Pike hocha tranquillement la tête avant de lancer le disque à Speaks, qui l'attrapa au vol. Puis il se tourna à nouveau vers Sam, et lui tendit un un petit cylindre doré, une munition de 9mm.
-Charge ton arme recrue, ordonna-t-il.
Alors que le garçon allait s'exécuter, quand il vit avec effroi le second instructeur accrocher la cible au milieu du gilet pare-balle de Linda.
Il la fit ensuite s'avancer de deux pas pour qu'elle se trouve environ à trois mètres de son coéquipier.
-Tu attends quoi minus, un ordre de mission? lança durement Pike en secouant sèchement le garçon par l'épaule. Bouge toi de me charger ce flingue!
La bourrade fit réagir Sam, qui dégaina son pistolet d'un geste mécanique, tira la culasse pour ouvrir la chambre et introduisit la munition avant de la refermer. L'arme produisit un claquement sec, prête à servir. Pour autant il ne se sentait pas mieux; terrorisé serait le mot juste.
D'un pas tranquille, Speaks s'éloigna de Linda et vint se placer à côté de son collègue.
-Bien, feu dès que prêt, lâcha-t-il tranquillement.
Sam releva la tête, croisant le regard de Linda derrière la visière de son casque pare-balle. Il y lut la même stupéfaction teintée de peur que celle qui devait se lire dans ses propres yeux.
-Allez, on ne va pas y passer la journée, lâcha Pike.
Le garçon hésita avant de lever son pistolet en ôtant la sûreté, comme on le lui avait appris. Sa respiration renvoyée par le casque lui semblait assourdissante, et une goutte de sueur roula sur son front. Ses mains tremblaient légèrement.
Il suffit de viser la cible et de tirer. Je l'ai fait des centaines de fois.
Mais Samuel n'avait jamais reçu de vraie balle, encore moins tiré sur quelqu'un. Et si le gilet avait un problème? Et si Linda était blessée?
Malgré le froid, le garçon transpirait abondamment sous sa tenue pare-balle, et le pistolet chargé dans sa main lui semblait peser des tonnes.
Ça ne pouvait pas être lui, pointant une arme chargée sur son amie. Non, ça ne pouvait être qu'un cauchemar absurde.
Il resta immobile de longues secondes, paralysé.
-Dis moi recrue, lâcha Speaks d'une voix mielleuse en s'approchant tout près de son visage. Puisque son gilet arrêtera la balle, j'aimerais que tu m'expliques; est-ce que c'est en toi ou en elle que tu n'as pas confiance? Parce que tu m'as dis que tu étais certain de toucher ta cible à cette distance ridicule, je dois en déduire que c'est elle le problème. Si tu n'as pas confiance en ta coéquipière, pourquoi elle aurait confiance en toi? Pourquoi resterait-elle immobile à attendre que tu lui tire dessus?
Le visage de la jeune fille était livide. Mais derrière sa visière, Sam vit ses lèvres articuler un seul mot, ses yeux résolument plantés dans les siens.
Tire.
C'était exactement ce dont Sam avait besoin. Il raffermit sa prise sur son arme, visa soigneusement l'assiette et pressa la détente. La détonation résonna dans le stand de tir, assez forte pour faire siffler les oreilles du tireur. Malgré le coup de feu, il entendit distinctement l'assiette se briser, puis tomber en morceaux sur le sol.
Presque aussitôt Linda porta les mains à son ventre, là où le projectile l'avait frappée, et pendant une horrible seconde Sam crut qu'elle était blessée. Mais elle leva rapidement la main devant elle.
-Toujours vivante, lâcha-t-elle d'une voix blanche, tenant la balle écrasée par l'impact entre ses doigts.
Quelques minutes plus tard, les deux coéquipiers étaient de retour dans le camp d'entraînement. Armés de pelles, ils creusaient péniblement le sol dur. Les instructeurs avaient décidé de les punir en leur faisant creuser leurs tombes, sous prétexte que Sam avait fait feu trop lentement, et que sur le terrain, hésiter les ferait tuer. Dès que Pike s'était éloigné, le garçon s'était répandu en excuses, mais Linda avait simplement haussé les épaules.
-T'as fait ce qu'il fallait, t'inquiètes, ils nous auraient punis de toute façon, avait-elle lâchée en continuant à creuser. C'est qu'un prétexte.
Samuel acquiesça, rassuré qu'elle ne lui en veuille pas, puis se remit à creuser lui aussi. La tâche n'était pas facile, épuisante même, mais elle avait le mérite de leur laisser le temps de se remettre de leurs émotions. Ils étaient tous les deux plus pâles que d'habitude, et l'expérience mettrait un peu plus de temps à guérir que les habituels sévices infligés par les instructeurs. Linda ne devait sa vie qu'à quelques millimètres de kevlar, et c'était Sam qui l'avait visée avant de presser la détente. Mais après tout c'était le rôle du programme de les préparer au pire...
Tandis qu'ils creusaient, la fatigue se faisait cruellement sentir et de la terre s'insinuait dans les cheveux et les vêtements des deux recrues. Pourtant, Samuel ne ressentait plus l'épuisement physique et moral qui l'étouffait les premiers mois du programme. Les épreuves et les brimades devenaient une routine comme une autre, plus effrayante mais qu'il fallait simplement encaisser. Un jour de plus, puis un autre...
Le garçon s'aperçut qu'il ne savait même plus précisément à combien de jour de la fin du programme ils étaient. Vingt, peut-être quinze, voir dix?
La fin approche. Il faut juste tenir jusque là...
Il souleva une nouvelle pelletée de terre, et jeta un regard vers Linda, qui lui tournait le dos. Ses cheveux roux avaient un peu repoussés, de quelques centimètres depuis le début de la session, mais elle avait toujours l'air d'un garçon manqué. Seule une longue tresse très fine qu'elle avait laissée pousser au niveau de la tempe dépassait, ondulant au rythme de ses mouvements. Il se fit soudain la réflexion que l'avoir gardée au milieu de cet enfer avait peut-être un sens.
-Ta tresse, lança-t-il sans vraiment réfléchir. Elle sert à quoi?
Linda se retourna vers lui, surprise.
-Je l'ai laissée pousser depuis mon premier programme, répondit-elle finalement. J'attends d'avoir mon T-Shirt gris pour la couper... Pourquoi tu me demande ça?
Samuel haussa les épaules.
-Je suis du genre curieux.
Les deux recrues travaillèrent pendant plus d'une heure. Dean et Will les avaient rejoints, en se chamaillant comme si de rien était. À l'entendre la jeune fille digérait mal que son coéquipier ai hésité à lui tirer dessus... Lequel répondait qu'il regrettait de n'avoir eu qu'une seule balle. Mais leur pas à tous les deux était hésitant, et ils n'en menaient pas large. Ces bravades n'étaient qu'une façon de se rassurer.
Samuel commençaient à connaître ses deux camarades, et ils formaient un duo incroyablement soudé même aux standards de CHERUB, encore qu'il soit incapable de comprendre la nature de leur lien.
Depuis ce qui s'était passé dans la grotte, ils n'avaient plus de problème avec Linda. Le sentiment de pouvoir compter les uns sur les autres avait été déterminant quand les instructeurs avaient durcit le programme, cherchant à exploiter la moindre faille dans le groupe.
La ''tombe'' de Samuel mesurait presque deux mètres de profondeur pour autant de long quand Pike apparut au dessus de sa tête pour mettre fin au supplice.
-Allez minus, sort de là, lança-t-il en lui tendant la main. On pourrait en enterrer quatre comme toi là-dessous.
La paume et les doigts du garçon étaient blessés par le maniement de la pelle et les multiples écorchures récoltées en Écosse, mais il saisit l'énorme poigne de l'instructeur avec reconnaissance. Un instant il eut peur que ce dernier en profite pour le laisser retomber, mais Pike le hissa hors du trou sans le moindre effort. Les autres recrues étaient déjà sorties de leurs tombes, pelles à la main.
-Allez ranger ça et préparez vous, ordonna l'instructeur. Demain vous partez pour votre dernier stage, le plus dur. Avec de la chance, peut-être qu'au moins l'un d'entre vous décrochera son T-Shirt gris dans dix jours... Même si j'en doute.
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