28. Une mélodie familière

Le soldat courait, son fusil se balançant au rythme de sa course. Son pas lourd résonnait sur le sol métallique du bateau, comme étouffé par la brume neigeuse qui flottait, masquant l'horizon. C'était à peine si l'on distinguait la forme monstrueuse d'une plate-forme de forage au dessus du bastingage, à laquelle le navire avait fixé une passerelle précaire.

Une volée de balles vint soudain s'écraser avec vacarme contre la structure rouillée juste à côté du soldat, le ratant de peu et provoquant un feu d'artifice d'étincelles colorées autour de lui. Plutôt que de riposter, Mike effectua une glissade pour se mettre plus vite à couvert à l'intérieur d'une coursive qui s'ouvrait sur sa droite.

Balayé par un vent glacé le couloir était désert, mais on y entendait toujours le vacarme furieux des armes automatiques, témoignage de la bataille acharnée qui faisait rage partout à bord du vieux tanker, que d'ordinaire seule la neige devait disputer à la rouille.


Mike venait de se relever quand un autre soldat ennemi surgit soudain à l'autre bout de la

coursive. L'agent reconnu aussitôt les lueurs bleutées sur l'uniforme de son ennemi et épaula avant de lâcher une courte rafale qui fit mouche en pleine tête, fauchant le malchanceux. Un second adversaire surgit au même endroit avant même que le cadavre ne touche le sol, et l'agent continua à faire feu, vidant son chargeur en s'avançant. L'homme s'effondra en lâchant un cri de douleur, blessé à mort.

Mais alors que Mike rechargeait son arme, un troisième ennemi fit irruption, derrière lui cette fois. Il n'eut même pas le temps de se retourner: une unique cartouche de fusil à pompe tirée presque à bout portant le projeta à terre, agonisant.


Le tireur s'approcha tranquillement et l'acheva d'un coup de crosse, sans la moindre hésitation.


-Outch, lâcha l'agent.

-Je t'ai encore tué, lança joyeusement Thomas à côté de lui. Et le frag de la victoire...


L'écran de la télévision était divisé en deux, si bien que Mike put voir en direct le dernier de ses coéquipier être abattu par l'adolescent.


Aussitôt une cinématique emplit tout l'écran, montrant la déroute totale de l'équipe Helghaste, tandis que la voix de leur leader menaçait rageusement de punir leur échec. Le sigle de l'ISA, la faction du jeu choisie par Thomas pour le match, s'afficha en grand sur les deux écrans. Encore une fois, Mike avait perdu la partie...


-Ok, je vais faire une pause, lâcha-t-il avec un sourire un peu crispé en posant sa manette sur la playstation. Tu gère sur Killzone 3...

-Merci, répondit Thomas, la mine réjouie par sa victoire. Mon frère est un sacré bon prof. Pas trop dégoutté de t'être fait écraser cinq fois de suite?

-Bah un peu, mais j'avais aucune chance, admit Mike. Si j'avais su je me serais mis dans ton équipe!


Son ami s'esclaffa avec bonne humeur, et l'agent l'imita. Même s'il avait déjà souvent eu une manette en main, Thomas lui avait mis raclée sur raclée. Un vrai pro...

Au moins il était détendu maintenant, mais ces défaites à la chaîne restaient quand même un peu humiliantes pour l'ego de Mike. Au moins ça lui permettrait d'oublier un peu qu'il trouvait le jeune hacker vraiment sympathique...


Il jeta un discret coup d'œil vers l'ordinateur posé sur le bureau. C'était son objectif principal, et il avait tout le matériel nécessaire pour en venir à bout: enregistreur de frappe, logiciel espion et même caméra miniature, le tout fournis par le GCHQ et les services techniques de CHERUB. Tout ce qui lui manquait désormais, c'était une occasion.

Malheureusement il ne pouvait pas mettre Thomas à la porte de sa propre chambre, ou l'assommer le temps de travailler tranquillement. Il allait devoir être patient et guetter le bon moment.

Sur le campus on enseignait plusieurs méthodes "toutes faites" pour distraire une cible, mais les instructeurs répétaient sans arrêt qu'un bon agent devait avant tout savoir s'adapter.

Tout en discutant de tout et de rien avec son "ami", Mike avait décidé de ne pas se montrer trop entreprenant, mais au contraire d'observer. L'ouverture finirait bien par se présenter...


Le reste de l'après-midi passa de façon assez agréable, entre discutions, jeux vidéos et anecdotes personnelles, pour la plupart inventées de toutes pièces en ce qui concernait l'agent. Ce dernier essaya d'orienter le sujet vers le hacking, mais n'obtint pas le résultat escompté.


-Mon frère m'a appris pas mal de trucs, lâcha Thomas. Il a joué les hacktivistes à une époque...

-Hacktiviste?

-Un pirate informatique, mais au service d'une cause, expliqua son ami. Du genre révéler des documents, des mails ou pirater des sites du gouvernement pour que les gens sachent ce qui se passe vraiment... Aujourd'hui il bosse pour des banques. C'est triste. Mais bon je sais pas si Anthony apprécierait que je te parle de tout ça...


Ces nouvelles informations laissèrent Mike pensif. Jusque là ils avaient considéré le grand frère comme un simple ingénieur sans histoire, potentiel suspect vu ses compétences, mais ils avaient raté quelque chose dans son passé. Au minimum il était une source d'inspiration pour Thomas, et il était peut-être même impliqué dans le complot de Rouge 17. Il aurait même un mobile tout trouvé pour ça: la haine de son employeur. Mais l'agent avait appris à se méfier des premières hypothèses... Ce qui manquait, c'était des preuves.

Et pour ça il lui fallait une occasion de mettre en place son matériel de surveillance.


Malheureusement les heures passèrent sans que Mike ait eu la moindre ouverture. Installé sur le lit, il avait récupéré les codes wi-fi utilisés par son "ami", avec lequel il évoluait en ce moment même dans l'univers virtuel de The Old Republic. Mais les techniciens du GCHQ avaient depuis longtemps ôté toute utilité à cette info en piratant la connexion, leur spécialité. Ils espionnaient la vie en ligne de l'adolescent depuis de nombreuses semaines, sans succès... Ce qu'il fallait c'était un accès direct au disque dur. Thomas n'avait matériellement pas le temps de travailler ailleurs qu'ici, et pas d'autre PC. Dans le doute, les ingénieurs avaient vérifié toutes les connexions sortantes de l'immeuble. C'était sa tour qu'il fallait faire parler.


L'agent fouilla discrètement dans le double fond de son sac, en tirant sa meilleure arme de siège. Grâce aux relevés bancaires des deux frères, Jason avait identifié le modèle de souris dont se servait Thomas. Il s'était procuré exactement la même, et y avait installé un mouchard capable de "siphonner" toutes les données de l'ordinateur de l'adolescent, tout en restant indétectable. Il ne restait plus qu'à échanger les deux souris, mais malheureusement son propriétaire avait la main posée dessus à ce moment même. L'installation du programme mettrait une à trois minutes; trop long pour profiter d'un simple passage aux toilettes.


Au cas où, Mike avait toujours une caméra miniature et un micro, mais cette solution de secours ne le satisfaisait pas. L'équipe du GCHQ avait besoin de pouvoir prendre les données à la source, d'en analyser chaque octet, ligne de code entrée depuis les derniers mois. Et pour ça il ne fallait que quelques petites minutes...


Soudain, des pas se firent entendre dans le couloir, tirant l'agent de ses réflexions.


-Thomas? lança une voix masculine de l'autre côté de la porte de la chambre. Ça va être l'heure de manger, et c'est ton tour de faire la cuisine.


Anthony, déduisit Mike.


-T'abuse, on en avait parlé... gémit l'intéressé. Je suis pas seul aujourd'hui!

-Et moi j'ai du boulot par dessus la tête. Justement, on en a parlé.

-Allezzzzz... Sois sympa, pour une fois que j'invite un pote!


L'agent suivait l'échange en silence, inquiet. Si Thomas devait aller préparer le repas, ça lui donnerait largement le temps de procéder à sa petite manipulation... Mais si son frère cédait il allait devoir attendre une occasion qui ne viendrait peut-être pas.


-Pas d'accord, finit par lâcher Anthony après quelques secondes, qui semblèrent une éternité à Mike. C'est ton tour et j'ai trop de boulot. Ton pote n'aura qu'à te filer un coup de main.

-T'es pas cool, répondit Thomas, dépité.


Les pas de son frère s'éloignèrent sans que ce dernier daigne faire de commentaire sur cette affirmation, et l'adolescent poussa un gros soupir.


-Désolé, lâcha-t-il en déconnectant son personnage. D'habitude il est plus souple que ça... Le boulot sans doute. Bon, tu viens? À nous deux on devrait faire ça vite.


Mike sourit avec décontraction, même s'il ressentait tout l'inverse.


-Ah les français et la cuisine... Je te rejoint dans cinq minutes, un truc à finir tant que j'ai du net.

-Ok, ça me va. Je vais regarder ce qu'on a au frigo.


Thomas se leva et sortit de la pièce.

Mike attendit que ses pas s'éloigne pour se redresser à son tour et récupérer la souris pirate dans son sac, avant de se diriger d'un pas décidé vers l'ordinateur de sa cible. Il était encore allumé, même pas en veille ou verrouillé. Installer le programme allait être un jeu d'enfant... Mais d'abord, l'agent referma silencieusement la porte de la chambre pour être sûr d'être tranquille. Cinq minutes, c'était largement assez.

Il débrancha ensuite la souris de l'adolescent et brancha le mouchard à la place. Il sélectionna une icône apparue en bas à droite sur l'écran, et une fenêtre noire couverte de lettres et de chiffres apparue aussitôt. Les lignes de codes défilaient trop vite pour être lues, mais Mike reconnu l'invite de commandes de Windows. Le virus allait ajouter ses propres tâches aux routines de l'ordinateur, avant d'effacer ses traces...

Tandis que le programme espion s'installait, l'agent récupéra la souris d'origine et traversa la chambre pour la faire disparaître dans son sac. Soudain, un détail qu'il n'avait pas vu jusque là lui sauta aux yeux.


-Putain de merde, lâcha-t-il.


Collé sur le côté de l'appareil, il y avait un petit autocollant en forme de cible rouge. Légèrement usé par le contact avec la main de Thomas, le pictogramme se trouvait au niveau où reposait son pouce. Même le moins paranoïaque des utilisateurs ne pourrait pas ne pas remarquer sa disparition...

L'agent ferma une seconde les yeux pour évaluer ses options. Il n'avait aucun moyen de reproduire le symbole sur son mouchard, déjà trop neuf pour faire illusion en cas de soupçon. L'équipe n'avait pas anticipé ce détail, et sa seule solution était donc de tout remettre en place tant qu'il était temps.


Retournant au bureau, Mike posa la main sur la prise de la souris qu'il avait apporté, mais s'arrêta avant de la débrancher. Si près du but, c'était trop rageant...


Réfléchis. Pas question de laisser l'installation telle quelle. Impossible de transférer le mouchard dans la souris marquée. Par contre peut-être que...


Il retourna fébrilement la souris de Thomas, et découvrit ce qu'il espérait: trois petites vis qui fixaient le capot noir sur la ''carcasse'' de l'appareil. Mike sentit une décharge familière courir le long de son dos.

En démontant les deux souris, il pouvait intervertir les deux capots sans toucher aux circuits internes, et donc au mouchard... Mais il allait devoir faire vite.


Sans perdre une seconde, l'agent se rua sur les outils, empilés en désordre dans un coin de la chambre, près du robot que construisait Thomas. Pour commencer, il lui fallait un tournevis. Il en trouva un très vite, mais l'outil était inutile sans la tête adaptée aux vis qu'il voulait enlever. Après quelques recherches supplémentaires, il finit par mettre la main sur ce qu'il cherchait et retourna au bureau.


Concentré malgré le sentiment d'urgence qui le pressait, Mike commença à démonter la souris. Il n'aurait pas besoin de remonter les deux appareils au complet; il se contenterait de fourrer les restes de celle qu'il avait subtilisé dans son sac.

Enlever les trois malheureuses vis lui sembla affreusement long, et il tira sans ménagement sur la pièce qui l'intéressait, dévoilant les circuits électroniques. Nerveux, il recommença l'opération sur la souris déjà branchée à l'ordinateur. Le programme espion avait déjà finit de charger, et était maintenant totalement invisible. Plus rien ne témoignait de son installation...


Mike venait de finir de démonter la seconde souris, quand des pas dans le couloir se firent soudain entendre.


Merde, pensa l'agent.


Le flagrant délit était le pire cauchemar de tous les espions, particulièrement des agents de CHERUB. C'était l'unique situation où ils étaient vulnérables, car ceux qu'ils surveillaient pouvaient découvrir ce qu'ils faisaient vraiment... Et ça Mike ne pouvait pas se le permettre.

Il empocha machinalement le tournevis et devança Thomas, ouvrant la porte avant qu'il ne puisse le faire.


-Tu aime les pâtes à la carbonara? demanda ce dernier de but en blanc.


Pressé d'éloigner sa cible de son chantier, l'agent acquiesça d'un air dégagé.


-Ouais, c'est nickel. On va se préparer ça?

-Ça marche, je vais te montrer la recette...


Mike se retint de crier un ''non!'' sonore, gagné par la panique. S'il entrait dans la chambre et allait sur son ordinateur, il lui serait impossible de rater l'appareil à moitié démonté en plein milieu du bureau, ni les restes de sa propre souris... L'agent allait devoir se surpasser pour inventer une sacrée bonne explication.

Mais curieusement, son hôte tourna les talons et se dirigea vers la cuisine, sans faire mine d'entrer. Surpris, l'agent lui emboîta la pas, et ne comprit qu'une fois qu'il vit l'adolescent feuilleter un vieux classeur plastifié.


-La voilà! lança Thomas en désignant une des pages.


Mike sourit, légèrement crispé. Il avait eut très chaud. Heureusement que les Gaudry gardaient leurs recettes sur papier au lieu de fréquenter des sites de cuisine. Un choix étrangement technophobe, mais qui venait de lui sauver la mise... Resterait à remonter la souris et faire disparaître les restes de l'appareil d'origine pour que tout soit réglé.

Presque à contrecœur, l'agent bénit les exercices de gestion du stress éprouvants qu'on lui infligeait sur le campus. Sans eux, il n'aurait sûrement pas réussi à garder son sang froid et à rester naturel.


-Ça à l'air sympa, lâcha-t-il après avoir distraitement parcouru la recette.


Un détail le saisit soudain, qui aurait sans doute échappé à un individu lambda. L'écriture sur les feuilles n'étaient ni celle d'Anthony, ni celle de Thomas. Il en avait étudié des échantillons durant la préparation de la mission... Une autre personne dans la vie des Gaudry aurait donc put échapper à leur enquête?


-C'est pratique ce classeur, fit il remarquer d'un ton dégagé en le feuilletant avant de le rendre à Thomas.


Le garçon sourit tristement en le récupérant.


-C'était celui de ma mère. Un souvenir...


Son ami hocha la tête en silence. Comme la plupart des agents de CHERUB, Thomas était orphelin, bien qu'il vive avec son demi-frère. Un accident de voiture avait tué ses deux parents près de trois ans plus tôt...

Mike avait utilisé cette faille pour se rapprocher de sa cible, ayant lui aussi perdu sa propre famille. Il n'avait pas besoin d'inventer beaucoup.


-C'est con mais j'ai jamais eu le courage d'y ajouter une seule recette, lâcha Thomas, caressant pensivement la couverture tâchée et usée.

-C'est tout sauf con, je trouve. Moi je comprends, lâcha simplement l'agent.


Un silence gêné commença à s'installer.


-Et toi? Tes parents t'ont laissé quelque chose? finit par demander Thomas.


L'agent ne répondit pas immédiatement.


-Non, finit-il par lâcher, laconique. Enfin...


Il hésita. Thomas l'observait avec attention, sans rien dire.


-Rien qu'une berceuse. Je l'entends, parfois...


L'agent se tut. Il en avait assez dit, et n'avait ni besoin de feindre, ni besoin d'inventer, mais c'était un exercice dangereux quand on était sous couverture. À trop se révéler, on devenait vulnérable...

Inconscient de ses pensées, Thomas posa une main amicale sur son épaule.


-Je suis désolé mec.


Mike secoua la tête.


-Non c'est moi. Excuse. Tu dois me prendre pour un taré.

-Arrête tes conneries, on se comprends tous les deux.


Son ami acquiesça, se sentant vaguement coupable de cette constatation. Il lui mentait, même si Thomas travaillait avec des gens peu recommandables. Il n'avait jamais été trop à l'aise avec l'idée de manipuler les sentiments de tous les gens qui l'entouraient en mission, malgré les buts et les contraintes qui justifiait ces méthodes.


-Alors on se le prépare ce repas? Mon frère va gueuler s'il a faim, lâcha finalement Thomas.

-Moi aussi, j'ai les crocs, lança l'agent, avec un entrain un peu artificiel.


Tandis que le maître des lieux sortait tous les ingrédients nécessaires à la recette, son invité mit de l'eau salée à bouillir, avec une touche d'huile d'olive, comme indiqué dans la recette. Une fois cette tâche effectuée, il fit mine de s'éclipser aux toilettes et se glissa dans la chambre. Là, il termina son remontage de la souris avec le fameux autocollant, et fit disparaître les restes dans son sac.

Il y récupéra aussi la caméra miniature camouflée par les services techniques de CHERUB en capuchon de stylo. D'après Jason c'était une ''merveille'', avec une batterie ''bio-électrique auto régénérative'' et ''émettant au delà de la limite de Shannon''. Mike lui s'était borné à retenir deux adjectifs: autonome et indétectable.


-Une bonne chose de faite! Je me sens plus léger, lança l'agent en revenant dans la cuisine.


Une parfaitement vraie, mais dont le sens échappait forcément à Thomas. Ce dernier grimaça, faussement indigné.


-Je crois que je tenais pas à savoir... Eh, lave toi les mains avant de toucher à la bouffe!


Mike s'exécuta de bonne grâce.


-Au fait y aurait moyen de jeter un œil au bureau de ton frère? lança-t-il d'un ton dégagé. J'ai toujours rêvé de voir avec quel genre de matos bosse un vrai pro...

-Ouais, pas de souci, répondit aussitôt Thomas, concentré sur le dosage de la crème fraîche. Demande lui pendant le repas.


L'agent sourit. Il allait pouvoir mettre les deux frères sous surveillance d'un seul coup. Durant la soirée ou la nuit, il copierait aussi la carte SIM du portable de Thomas, pour que l'équipe ait un œil sur tout ce qui pouvait se passer chez les Gaudry.


Après des semaines de préparation, Mike aurait dut se sentir particulièrement enjoué, mais une ombre gâchait cette belle réussite.


À son oreille, la voix d'une femme susurrait doucement une mélodie familière.

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