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𝗖𝗛𝗘𝗥𝗘 𝗠𝗨𝗦𝗜𝗤𝗨𝗘, 𝗠𝗘𝗥𝗖𝗜

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Tout le visage de Red était tiré par l'aigreur, ça me demandait beaucoup d'efforts pour ne pas exploser de rire. Elle avait décidé de n'adresser la parole qu'à Yasu et aux deux Nana. Parfois, elle daignait répondre à Nobuo ou Shin.

Je savais très bien à quel discours j'allais avoir droit en rentrant. Red avait beau être la personne que j'aimais le plus au monde, elle devenait insupportable dans ces moments d'ego et d'animosité.

Je détournai les yeux de ses sourcils parfaitement dessinés pour les poser sur Nobuo. Cette abrutie n'allait pas gâcher ma soirée.

— Oui, c'est ça ! On vient de sortir notre deuxième album. Comme pour le premier, on fait le tour des petits bars et salles.

— Ça ne fait pas étrange après avoir fait le tour du Japon ?

— Non. C'est intéressant de retourner aux bases. Ça permet de découvrir de nouveaux sons et de ne pas oublier d'où l'on vient. Ça évite de prendre la grosse tête, j'émis un petit rire.

Shin se rajouta à Nobuo pour poser des questions. J'étais heureuse de partager mes histoires avec des personnes qui connaissaient le sujet. Je n'avais pas réellement d'amis dans cette ville. Mes fréquentations se résumaient à l'équipe du groupe et Red, parfois, mes interactions sociales passaient par les fans et les journalistes.

Trop de gens étaient rentrés dans ma vie, pour profiter de mon statut. Alors, j'avais arrêté de chercher à me faire des amis.

Ici, la soirée était tellement agréable, le groupe était si avenant et sympathique avec nous. Mon corps se tourna vers Ren ; après tout, c'était le moment idéal pour en apprendre plus sur Trapnest et cette fameuse collaboration. Il écoutait Yasu parler d'une oreille, occupé à allumer sa cigarette.

— Ren, c'est bien ça ?

Il hocha simplement la tête, signe qu'il m'écoutait.

— Votre directeur nous a appelé tout à l'heure. Par curiosité, qui a eu cette idée de collaboration ?

— Naoki vous écoutait pendant les répet'. Il ne veut pas le dire, mais je suis persuadé que c'est un grand fan. De plus, Leila a trouvé l'idée sympa et face à l'engouement de ces deux-là, Takumi ne s'y est pas opposé.

— Tu n'as pas d'opinion, toi ?

— Je ne sais pas. Je dois avouer que cette collaboration va être compliquée. Les voix ne posent pas de problème, mais pour la compo et l'écriture, ça va demander du travail. Et je ne parle pas de l'association entre guitariste et batteur.

D'un geste de la main, je dégageai les mèches blanches qui tombaient sur mes yeux. Ren venait de soulever un point auquel je n'avais pas pensé. Trapnest avait déjà un guitariste et un batteur. Le brun pouvait bien dire ce qu'il voulait, mais deux guitaristes, c'était envisageable, en revanche, deux batteurs, c'était beaucoup plus compliqué. Mon visage dû traduire mon questionnement intérieur. Tout le monde, c'était tourné vers moi, Ren ricanait silencieusement, apparemment hilare de ma réflexion intérieure.

— Tout va bien, Fujiko ? souffla la voix compatissante de Nobuo.

— Oui, je viens de songer à la complexité d'une collaboration.

Le regard de Red s'agrandit d'enthousiasme, je compris l'utilité qu'elle voyait à mes propos. Elle y trouva une raison de décliner le contrat. Cependant, c'était hors de question, nous en refusions déjà beaucoup. Je restais persuadée que celui-ci ne nous apporterait que du positif alors, je me battrais contre vent et marée s'il le fallait.

Elle me devait bien ça.

— J'en discuterai avec Red à la maison de toute façon.

Cette dernière haussa de nouveau les sourcils, ce qui décrocha un rire sonore à Ren. L'attention se posa désormais sur lui, et une veine d'énervement commençait à sortir du front de ma meilleure amie. Il expliqua alors à Yasu que nos visages constituaient apparemment les meilleures raisons pour « mourir de rire ». L'hilarité fut bientôt généralisée à la grande tablée que nous formions.

Red fit comme si elle n'avait rien entendu et demanda un briquet pour pouvoir fumer. Son visage transpirait l'agacement, je n'en doutais pas une seule seconde. Sans un regard pour moi, elle se mit à discuter avec les deux femmes. Un petit soupir passa mes lèvres en voyant cela.

— Elle est toujours comme ça ?

Mon regard se posa à présent sur le garçon à mes côtés, Shin. Il avait dû suivre la scène.

— Les interactions sociales, ce n'est pas trop son truc. Et là ça fait beaucoup d'un coup en plus avec cette histoire de collab'.

— C'est drôle comme les stars ne sont pas comme sur scène.

Mon regard interloqué dû interpeller Shin puisqu'il s'empressa d'ajouter :

— Red a l'air de quelqu'un de bien, ne te méprends pas. C'est juste que... je l'imaginais plus ouverte et moins agacée, disons. Mais je suis le premier à ne pas avoir la même image sur scène et dans la vie.

Un rire franc sortit de ma bouche, ce n'était pas la première fois que quelqu'un se faisait ce genre de réflexion.

— Je comprends bien ! Il faut juste apprendre à la connaître. Je suis curieuse maintenant. Quelle image tu te faisais de moi ?

Shin posa sa tête dans sa main et pris un temps pour réfléchir.

— Plus agressive, mais ça doit être dû à ta façon de jouer. Ou la rigueur, je t'imaginais comme l'homonyme de Yasu. J'ai l'impression d'avoir un peu échangé vos personnalités en réalité.

Il se mit à ricaner tout seul, mais très vite, je le rejoignis. Il n'avait pas totalement tort, ni tout à fait raison. La seule certitude résidait dans notre image de scène qui dissociaient de notre personnalité quotidienne.

Je ne possédais pas la dureté avec laquelle je tenais mes baguettes sur scène. Cela m'apportait d'ailleurs un certain équilibre ; je donnais à mes gestes, durant les répétitions, toutes mes énergies négatives. En dehors de la batterie, la douceur prenait la place manquante dans ma vie.

La soirée continua tranquillement au milieu des discussions sérieuses et des fous rires souvent causés par Nobuo — bien que contre son gré. Je passais vraiment un agréable moment. Mon air rayonnant appuyait le pressentiment auquel j'aspirais depuis le début de la soirée : ces nouvelles rencontres allaient faire grandement partie de ma vie.

Red finit par suggérer de rentrer en regardant l'heure, j'acquiesçai. Heureusement, aucune obligation ne risquait d'être manquée le lendemain. Hachi – comme la surnommait Nana – pris nos numéros de téléphone afin de pouvoir nous revoir au plus vite. Je lui adressais mon plus beau sourire, ravie de voir que mon sentiment fut partagé.

Sur le chemin, la brise légère d'avril frappa délicatement mon visage, seule la lumière des lampadaires venait nous éclairer. Aucune de nous ne prononça un mot durant un long moment. Nous nous contentions de marcher dans la nuit, cigarette à la bouche, en respirant les vapeurs de nicotine.

— Fuji', je n'ai pas envie.

Mes yeux se dirigèrent vers Red, avant de se poser sur la route. Elle regardait le ciel pour éviter mon regard. Nous savions, toutes les deux, la suite des évènements.

— Pourquoi ? Ren n'a pas l'air bien méchant et tu n'as écouté qu'un morceau de leur album.

— Mauvais pressentiment.

— Comme par hasard, ricanais-je. Tu te rends bien compte qu'on risque de stagner professionnellement si nous n'acceptons rien ? Ce sont de très bons artistes et c'est le groupe le plus en vogue en ce moment. Ça ne nous apportera que de la visibilité. En plus, je trouve ça bien de travailler avec d'autres artistes, ça nous évitera de tourner en rond.

Le soupir de la rouge fut si fort que les feuilles auraient pu s'envoler. Son attitude commençait à fortement m'agacer et sans le vouloir, mon rythme de marche s'accéléra. Ce qui me donna envie d'allumer une nouvelle cigarette, augmentant alors mon irritation, puisque j'essayais de réduire ma consommation.

— Fuji' !

Sa voix claire résonna dans la nuit, l'appel de mon surnom sonnait en revanche comme un ordre d'arrêt. Mon corps fit volte face et je me retrouvai face à son air assuré comme si le monde de la musique lui était dû.

— Je te promets d'accepter le prochain contrat. Tu as bien vu comment ce débile se marre !

S'échappant de sa gorge, le ton frustré indiqua son impatience grandissante.

— C'est toujours la même chose, Red. Ça me fatigue. Je ne veux pas me battre avec toi pour un contrat. Réalise seulement que tu n'as aucune réelle raison de refuser.

Je marquais une pause.

— Tu flippes, c'est tout.

Ma cigarette touchait désormais à sa fin, je m'approchai d'une poubelle pour venir y jeter le mégot, laissant alors mes derniers mots en suspens dans la petite tête rouge de l'énergumène derrière moi. Un laps de temps incertain passa avant que sa voix ne retentisse

— D'accord. D'accord, mais tu ne dis plus jamais que je flippe !

Mon éclat de rire brisa l'atmosphère tendue qui semblait avoir pris place. Voir la moue dépitée de ma meilleure amie devenir faussement menaçante avait eu raison de moi. Red tenta de me faire taire du mieux qu'elle le put, ce qui ne fit qu'accentuer mon fou rire.

Son bras sous le mien, nous continuâmes notre marche jusqu'à l'appartement. Elle me proposa une nouvelle cigarette et je puisai au fond de moi la volonté de refuser. La rouge décida de ne pas en prendre non plus, pour me soutenir dans mon projet. Elle eut le droit à la fameuse réflexion :

— C'est toi qui devrais arrêter la cigarette. On va faire comment si ta voix s'encrasse par cette merde ?

Évidemment, elle se contenta de hausser les épaules en ricanant. La conversation prit une tournure plus légère en retraçant rapidement le concert et en s'attardant sur la rencontre avec Blast'. Red fût incapable de l'avouer, mais elle développait un attachement pour le groupe. Ma certitude résidait dans le temps passé dans cet appartement.

— Fuji', je suis presque sûre que tu as tapé dans l'œil de Shin.

— N'importe quoi. Et puis, même si c'était le cas, c'est hors de question ! Il est beaucoup trop jeune. Et puis, je préfère Nobuo, marmonnai-je.

— Tu n'étais pas obligée de te justifier autant. Nobuo alors ? força-t-elle de sa voix mielleuse.

— Physiquement. Je ne le connais pas alors je ne m'avancerais pas. De toute façon, je ne cherche pas de petit copain, je te signale. Parce que tu fais la maligne, mais je te connais Fujiko Takeda. Je sais très bien que Ren t'a tapé dans l'œil.

Elle pouffa sur un petit « n'importe quoi » avant de détourner une nouvelle fois le sujet d'elle, passant alors sur le sérieux Yasu, qui nous avait à toutes les deux fait une très bonne impression. Red riait sur le fait que si elle devait se marier immédiatement, elle demanderait sa main au batteur.

Naturellement, nous avons dérivé sur les filles, qui bien que très différentes, avaient l'air de beaucoup tenir à l'une, à l'autre. Hachi nous avait d'ailleurs parlé d'une histoire de verre similaire, avant que Nana ne la coupe pour venir nous raconter l'origine du surnom de sa colocataire.

Je voyais dans le ton de ma meilleure amie et dans l'éclat brillant de ses yeux à quel point cette rencontre l'animait.

Elle qui avait perdu foi en la gent masculine.

Elle qui avait perdu foi en l'être humain.

Notre avenir aussi bien professionnel que personnel allait prendre une nouvelle direction. Je n'avais aucune indication pour l'instant, peut-être que cela nous détruirait, cependant, quelque chose allait changer, j'en étais intimement convaincue. Le vent balaya l'ensemble de feuilles devant nos pieds et sembla nous guider vers l'avant, tel un appui de mes mots.

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⸻NDA🌹J'espère que cette découverte de Fujiko vous plaît ! On se retrouve le 1er janvier pour le chapitre 3 ! Je remercie mes bêta-lectrices encore une fois parce que j'ai réalisé hier que mon chapitre devait sortir...

Kiss kiss & prenez soin de vous !

Votre Bokuto kinnie préférée <33