Samedi 26 avril 1812, Netherfiel - partie 1

Ma chère Lizzy,

Par tous les Saints, je suis encore sous le choc après avoir lu ta dernière lettre! Imagine ma stupeur en recevant tes nouvelles peu après avoir posté la mienne. Je ne peux contenir l''indignation qui m'étreint face à ce que tu m'annonces. Menacer ainsi notre douce Georgiana de révéler ses mésaventures passées avec cet infâme Wickham au marquis... Quelle perfidie ! Je peine à croire que Lady Catherine de Bourgh, avec toute sa hauteur et sa soi-disant noblesse d''esprit, puisse se rabaisser à une telle vilenie, et avec sa propre famille qui plus est !

Comment un esprit aussi acide et calculateur peut-il trouver plaisir à tourmenter une jeune femme aussi fragile que Georgiana ? Ce comportement est indigne d''une dame de son rang. Quelles basses manœuvres ! N'est-ce pas là une tentative, des plus lâches, de raviver des blessures qui, Dieu merci, commencent à se refermer ? Cette menace, ce chantage cruel, est une trahison contre tout ce qui est juste et honorable. Comment ose-t-elle utiliser contre Georgiana ces souvenirs pénibles, ces moments de faiblesse qui auraient dû rester dans l''oubli, à jamais ? Cela me révolte au plus haut point. Une femme de son rang, une tante de surcroît, devrait protéger et soutenir la jeunesse de sa famille, non la manipuler ainsi pour des fins aussi sordides.

Ne vois-tu pas, Lizzy, à quel point cela ressemble à une vengeance, pure et simple, contre le choix de ton époux ? Lady Catherine n'a jamais digéré ce qu'elle considère comme une offense personnelle : le mariage entre toi et Darcy, un mariage qui n'entrait pas dans les calculs rigides qu'elle avait élaborés pour sa neveu. Et maintenant, elle semble prête à tout pour faire payer à votre famille cette union qu'elle juge encore comme une trahison. Je suis persuadée que son intention n'est pas seulement de nuire à Georgiana, mais de frapper là où elle sait que cela fera le plus mal : au cœur même de Darcy. Rien ne la réjouirait davantage, j'en suis certaine, que de voir son neveu tourmenté par les conséquences des erreurs de sa sœur.

Mais n'est-il pas justement temps pour nous de prendre la mesure de cette situation ? Georgiana ne doit plus être tenue en otage par les ombres de son passé, par les fantômes de Wickham qui n'ont que trop pesé sur elle. Elle a tant souffert, tant appris aussi. La briser à nouveau sous le poids de cette vieille histoire serait une injustice insupportable. Il est certain que si Lady Catherine espère que cette menace suffira à éloigner le marquis ou à jeter Georgiana dans un tourbillon de honte, nous ne pouvons rester passives face à une telle tentative. Georgiana mérite de construire son avenir, libre des chaînes de ce passé trouble. Et le marquis, s'il est un homme véritablement digne, devrait savoir que son affection pour elle ne doit pas être ternie par de vieilles histoires qui n'ont plus lieu d'être.

Darcy ne peut ignorer les manigances de sa tante, pas cette fois-ci. Je sais combien cela lui sera difficile, car le souvenir de ce que Georgiana a vécu est encore une plaie à peine cicatrisée dans son esprit.

Pauvre, pauvre Georgiana ! Mon cœur se serre en pensant à l''angoisse qui doit l''habiter après une telle intimidation. Elle, qui est déjà si fragile, si timide dans l''expression de ses sentiments, se voit aujourd'hui contrainte à dévoiler un passé qu'elle aurait voulu laisser à jamais derrière elle. Quelle terrible situation pour une jeune fille qui peine déjà à ouvrir son cœur aux autres, et encore plus à l''homme qui semble désormais faire vibrer ce même cœur. Il est si injuste qu'elle soit placée face à un dilemme aussi cruel ! Comment pourrait-elle confier une réalité si douloureuse et humiliante au marquis, alors qu'elle commence à peine à entrevoir la lumière de l''amour après tant de tourments ?

Je ne peux qu'imaginer le chagrin de son âme en ce moment, déchirée entre la peur de perdre cet homme qu'elle commence à chérir et l''obligation de se soumettre à une vérité qui pourrait tout changer. Oh, Lizzy, quel supplice pour elle de se trouver ainsi dans une position aussi vulnérable. Et, comme si cela ne suffisait pas, il faut ajouter à cela le sort malheureux d''Anne. Cette pauvre enfant, déjà si souvent négligée et laissée sans réels divertissements, voit aujourd'hui le seul lien qui la connectait à un peu de douceur dans sa vie coupé net par la volonté tyrannique de sa mère. La priver des missives de sa cousine, qui étaient sans doute une des rares sources de joie et d''évasion pour elle, est d''une cruauté sans nom. Anne, qui n'a déjà que si peu de distraction, se retrouve enfermée encore plus profondément dans sa solitude et ses pensées moroses. Son sort me peine autant que celui de Georgiana, car elle aussi est victime des caprices de Lady Catherine, condamnée à une existence où l''ennui et la mélancolie semblent être ses seuls compagnons. Ces deux jeunes filles sont vraiment à plaindre. Que de tristesse pour ces âmes si jeunes, si pleines de potentiel, mais freinées par des circonstances qui les accablent sans qu'elles n'aient commis de faute. Je ne peux m'empêcher de ressentir une immense injustice en pensant à leur sort, et de nourrir un profond désir que, d'une manière ou d'une autre, elles puissent trouver le chemin vers la liberté de vivre selon leur cœur, sans être écrasées par les attentes ou les machinations des autres.

Je comprends pleinement la rage de Fitzwilliam envers sa tante, et je dois dire que je partage son indignation. Que Lady Catherine use et abuse ainsi de son rang, avec une telle arrogance, est tout simplement révoltant. Elle se croit au-dessus de tout, comme si son statut lui donnait le droit de manipuler et de tourmenter ceux qui l''entourent, même sa propre famille. Quelle honte ! Quelle audace ! Je n'ose imaginer la frustration et la colère que ton époux a dû ressentir en apprenant l''étendue de sa perfidie. Je l''admire, en vérité, pour la maîtrise qu'il a su conserver malgré tout. Personnellement, je crois que mes nerfs auraient cédé bien plus tôt face à un tel événement, tant l''injustice de la situation me semble insupportable. Aussi, je ne puis, en aucune manière, critiquer Fitzwilliam pour sa colère. Elle est tout à fait légitime, et quiconque aurait été à sa place aurait ressenti la même chose, sinon davantage.

C'est une excellente chose qu'il ait pris la décision de se rendre auprès du marquis sans tarder. J'espère de tout cœur qu'il a pu agir à temps, avant que Lady Catherine n'ait eu l'occasion de déverser son venin à propos de Georgiana. Si elle devait planter les graines de la suspicion dans l''esprit du marquis, cela pourrait être catastrophique pour l''avenir de ta pauvre belle-sœur. Ah, que cette situation est délicate, Lizzy ! Je ne peux m'empêcher de m'inquiéter à l''idée que l''influence de Lady Catherine ait pu déjà semer le doute dans l''esprit du marquis, et que ses paroles vénéneuses aient contaminé ce qui aurait pu être une relation sincère et précieuse. Cependant, je dois avouer que je suis quelque peu surprise par la réaction de ce marquis. Il a montré une réserve, voire une distance, qui m'interpelle. Est-ce simplement son statut de gentleman qui le pousse à une telle retenue, ou y a-t-il quelque chose de plus profond derrière son comportement ? Il est de coutume, bien sûr, pour un homme de son rang de demeurer calme et impassible face aux événements troublants, mais dans ce cas précis, son silence me semble presque suspect. Je ne peux m'empêcher de me demander : cache-t-il quelque chose ? Ou, pire encore, pourrait-il être possible qu'il ait déjà eu vent des mésaventures de Miss Darcy ? Aurait-il su, d''une manière ou d'une autre, ce que Georgiana a traversé avec Wickham, et aurait-il attendu de voir si cette information pourrait lui être utile d''une quelconque manière ? Cette idée me terrifie, car elle soulève une question terrible : si cela était vrai, cet homme ne serait-il pas aussi calculateur que certains des membres de sa propre classe, prêt à tirer avantage d''un passé malheureux pour atteindre ses propres objectifs ? Je tremble à l''idée qu'il ait pu envisager une telle manœuvre. Quelle déception ce serait, Lizzy, si cet homme, qui semblait jusque-là si noble et digne, s'avérait être, en réalité, un opportuniste sans scrupule !

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