Chapitre 21 - Ce qu'il restera de nous

Mai 1941

Londres s'est faite bombardée. Encore.

Tout le monde avait entendu les dernières nouvelles. Tout le monde était resté sous le choc. On devrait pourtant avoir l'habitude maintenant d'entendre ce genre de chose et pourtant à chaque fois, ça nous surprend. À chaque fois, ça nous met une claque. À chaque fois, ça nous fait toujours un petit peu plus peur. Parce qu'il ne suffit que de ça. Il ne suffit que d'entendre ce genre de chose pour avoir peur.

Et Dieu seul sait que nous étions constamment plongés dans la peur. Dans la terreur. Chaque fois on se levait et on se demandait si ce jour n'était pas le dernier ?

Mais non.

Nous sommes encore là. Nous sommes toujours là. Telle de la mauvaise herbe, ils peuvent nous piétiner, nous arracher, mais nous reviendrons. Constamment. Nous sommes ce qu'il reste. Nous sommes ceux qui restent. Nous sommes l'ultime rempart entre la fin du monde et l'espoir naît du cœur des hommes. Nous sommes ceux qui les empêcheront de passer. Nous sommes ceux qui se battront jusqu'au bout.

Nous sommes toutes ces choses qui font la guerre n'est pas finie. Même pas au bout de deux ans.

Nous sommes des visages, des noms. Nous sommes ceux et celles qui seront oubliés dans vingt ou trente ans. Nous sommes ceux qui cesseront d'exister dans quelques générations, mais nous serons ceux qui ont fait l'histoire. Nous serons ceux qui l'ont transformée. Pour sûr nous serons ces gens-là. Parce qu'il faut qu'il existe des gens comme nous. Il n'y aura personne d'autre que nous de toute façon. Personne pour nous sauver. Personne pour se battre à notre place. Personne pour prendre notre place.

Parce que nous sommes tous pareils.

Plus ou moins courageux. Plus ou moins téméraires. Plus ou moins idéalistes ou optimistes. Plus ou moins croyants. Parce que oui, on croit. On croit en notre chance. On croit en nous. En croit en cette fin qui n'arrive pas. On croit qu'un jour, dans la rue, on se dira « C'est fini ! » et qu'on s'embrassera.

Parce que ça arrivera.

Voilà nos convictions. Voilà ce qui fait que chaque matin, chacun d'entre nous se lève.

On se lève parce que l'on croit.

Je crois en nous comme je crois en Thomas. Je ne cesserais jamais, ô grand jamais de croire en lui. Thomas n'est peut-être pas un héros, mais ça reste le mien. Ça reste mon héros, et ce, à jamais. Thomas et de ceux qui sont partis, le courage comme seule arme et qui tous les jours se battent.

Thomas est de ceux qui à jamais seront marqués par ce qu'ils voient.

Thomas est de ceux qui à jamais auront des cicatrices ancrées dans l'âme.

Thomas est de ceux qui ne rentreront probablement pas.

Il est certainement de ceux qui mourront là-bas.

Alors oui, pour nous et pour tous ceux qui se sont battus, il est de ceux que l'on peut appeler « héros ».

Et c'est un bien petit mot.


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