Chapitre 2 - Chère Elise
Mai 1940
« Chère Élise,
Pardonne-moi du retard mais récemment, je n'ai pas eu le temps de m'asseoir pour te répondre. Cette lettre sera brève et ce n'est pas parce que je n'ai rien à te raconter bien au contraire, je ne le veux pas, c'est tout. En lisant ta lettre, j'ai ri et Dieu seul sait qu'on en a besoin en ce moment, si tu savais Élise, ce qui se passe ici... Si tu savais. Mais je ne veux pas t'en parler. Pas maintenant. Je t'ai imaginée sur le tracteur en hurlant parce que ça allait trop vite pour toi et je t'ai imaginé te battre avec les moutons. Oh oui, j'ai ri. D'ailleurs, je suis content que Georges soit avec toi, qu'il soit là-bas pour toi et pas ici avec moi. Il ne devrait pas voir ça.
J'ai caché la brindille de lavande que tu m'as envoyée sous mon oreiller. Par moments, un gars de mon régiment passe et crie « Ça sent la fille ici ! », je n'ose pas dire que c'est moi. Je n'ose pas dire que moi, j'aime cette odeur. Ici, ils aiment sentir la transpiration, la sueur.
Le fait que tu parles de nos jeux dans les champs, me fait me rappeler que moi aussi j'en ai rêvé. Du moins, j'ai rêvé de cet été, tu sais, celui de nos 8 ans ? Te rappelles-tu Élise ? Ce qui s'est passé cet été-là ? Te rappelles-tu de m'avoir sauvé la vie ? Oh Élise, j'aimerais que tu viennes m'arracher à tout ça mais quand cette pensée me traverse, j'en viens à me détester. Fuir, c'est abandonner. Fuir, c'est faire preuve de lâcheté. Alors je resterai. Je resterai et quand je rentrerai, je te raconterai. Tout. Tout ce que tu veux savoir. Promets-moi de m'attendre.
Dis Élise, me le promets-tu ? M'attendras-tu ? Je ne sais pas quand est-ce que je reviendrai mais je le ferai.
On me fait signe de remballer mes affaires, je dois partir. Ne m'envoie plus de lettres. Je pars. Je quitte la France. Je t'en enverrai une quand je serai installé. Je ne te dirai pas où, encore une fois, ne m'en veux pas. Je ne sais pas quand est-ce que je pourrai t'écrire à nouveau mais sache que si mon souvenir te hante, le tien me hante tout autant.
J'espère pouvoir t'écrire de nouveau et avoir de tes nouvelles rapidement.
Je dois y aller...
Élise, j'y vais, je pars à la guerre. »
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