Il se console chez les monstres des autres. Leurs bras noirs et gigantesques longeviles l'accueillent pour l'apaiser. Il s'y faufile, se réfugie dans le noir de leurs ombres comme dans une bulle protectrice.
Il ne regarde jamais dans les yeux. Il n'entend pas le son des autres, il ne comprend pas ce qu'ils disent. Il ne comprend pas leurs sentiments, ce qu'ils ressentent. La seule chose qu'il voit, c'est leurs peurs. Et ça aussi d'ailleurs, il ne les comprend pas. Ces monstres là sont pourtant pour lui ses seuls amis. Ce sont les seuls qui s'intéressent à lui. Les seuls qui acceptent de jouer avec lui, même s'il est différent.

D'ailleurs c'est quoi être différent ? Juste ne pas penser comme les autres ? Ne pas souffrir de la même manière que les autres ? Lui aussi il aimerait ressentir quelque chose, juste une fois. Les larmes discrètes sur le visage de sa mère, il ne les comprend pas. Une larme, ça exprime quoi ? Sa question le tourmente, l'enfant différent ne ressent pas. Le voilà qui se balance d'avant en arrière, frustré, il ne trouve pas sa réponse. Les bras des monstres se resserrent, ils tentent de l'apaiser. Sa mère comprend l'inverse, elle le croit en crise. Il aimerait lui dire, rien ne sort de sa bouche, sinon un cri parti du fond de ses tripes. Au moins il n'a pas le syndrome de ceux qui balancent des mots à tort et à travers. Même le diable recule et fait sa révérence face à cet enfant de nuit.
Une ombre, il n'en a pas vraiment. Il EST ombre. Ce que les autres appellent autisme, lui ne le vit pas. Lui il vit dans les ombres, il se réfugie avec ceux qui effraient les autres. Il se console chez les monstres des autres.

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