49 - Jaxen
J'avais les mains qui tremblaient.
L'adrénaline. Le contrecoup d'événements imprévisibles. Un coup de maître orchestré par le Roi lui-même.
À l'intérieur, tout grondait.
Je traversai les couloirs aseptisés, conscient que cette odeur qui collait aux murs ressemblait plus à la mort qu'à celle de la vie. Je m'arrêtai devant une porte qui coulissa lorsque je la repoussai. Bien sûr, il n'y avait personne à son chevet, pas même le petit boursier. Il avait buté les deux tireurs. Lui ou eux. Une règle quasi élémentaire dans notre univers. Si j'avais cru qu'il en serait capable ? Finalement, qu'est-ce que je savais de Thaddeus Cooper ? Rien. Hormis qu'il me cassait les couilles et qu'il ne se prenait définitivement pas pour de la merde.
Mais s'il n'avait pas été là, l'issue de la soirée aurait pu être bien différente. Pas pour moi, pas pour Alby non plus.
Mais pour Greer.
Son petit manège dans les toilettes avait eu raison de moi, d'où le fait que je n'avais pas insisté lorsqu'elle m'avait envoyé bouler une fois de plus. Je l'avais laissé dans la salle. Sachant très bien qu'elle se débrouillerait pour rentrer.
Et voilà qu'elle se retrouvait dans cette chambre d'hôpital, des bandages autour de la cuisse, un puissant sédatif terminant de l'endormir après une crise de panique.
Je m'avançai, mon ombre projetée sur le mur. J'attrapai ses doigts entre les miens, fut presque choqué de les découvrir si froids.
Je n'arrivai pas à faire partir le poids dans ma poitrine. Il terminait de m'achever, de me faire me sentir comme une merde.
À trop porter un masque, ça en devenait éreintant, à la limite du supportable. Je poussais le vice un peu plus loin à chaque fois, après avoir frappé fort une première fois.
Mais parfois, pour protéger ce qui nous tenait le plus à cœur, il fallait s'insensibiliser. Ériger des murs, construire des barricades.
Détruire ce qu'on aimait pour empêcher les autres de le faire à notre place.
Tordu ? J'étais le fils du Roi.
Rien n'excuserait jamais ce que j'avais fait, ce que je continuais à faire. Greer devenait le dommage collatéral d'une guerre que je menais.
En son nom.
Parce que je connaissais le monstre qui régnait sur l'Échiquier mieux que personne. Il était mon géniteur, celui qui me façonnait au gré de ses désirs, de ses dérives.
Je ne pouvais pas chuter seul. Ça ne faisait pas partie des règles du jeu.
Alors pour un instant, quelques minutes, je laissai tomber le masque pour revêtir mon humanité.
Pour redevenir le garçon et non plus l'instrument du Roi.
Je retrouvai un peu du Jaxen que j'étais et non pas celui que je devais être. Une différence de taille.
Je me penchai sur le visage de Greer.
C'était étonnant de voir comment l'être humain pouvait détruire ce qu'il aimait, ce qu'il chérissait. Avec une facilité presque déconcertante. Étonnante même. Je ne cherchais aucune excuse, ni pardon, ni absolution.
Que Greer me haïsse me confortait.
Tant que je serais le bourreau, ça irait.
Il ne fallait pas que ça change. Alors je gardais l'attention du Roi au-delà de Greer, bien au-delà.
— Je suis désolé.
De n'avoir rien pu faire ce soir.
D'être son monstre à elle.
Son enfer, où un parmi tant d'autres.
D'exister.
J'appuyai un instant mon front contre le sien, pour sentir son souffle sur mes lèvres. Sa vie. Pour respirer son odeur.
Avant de filer.
Je me dépouillai de ma faiblesse sur le pas de sa porte.
Pour remettre mon masque.
**
Je sais que Jaxen il est difficile à aimer. Mais avouez qu'après ce chapitre... Vous vous posez des questions 😳
Dernier chapitre dans la journée 😁
La bise 😘
Taki et Ada'
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