31 - Alby
Il était déjà tard, mais j'avais un creux. Greer regardait les quelques livres que j'avais encore dans mes tiroirs. Des livres que je ne montrais pas forcément, car mon père préférait me voir conduire ma moto que lire des théories avancées de mathématiques.
Greer, allongée sur le ventre par terre, les pieds battant l'air, m'observa me redresser dans mon lit.
— J'ai faim, annonçai-je.
Elle haussa un sourcil. Elle poussa un petit cri quand mes mains agrippèrent ses hanches pour la redresser. J'ouvris ma porte et agrippai sa main pour la traîner avec moi dans la cuisine. La maison était plus ou moins silencieuse à cette heure-ci. Il était presque deux heures du matin. J'entendais encore un de mes frères qui traînait sur un jeu, mais c'était commun à ce stade.
— Avec tout ce que tu as mangé, tu as encore de la place ? chuchota Greer.
Elle se déplaçait comme si on n'était pas chez moi et qu'on allait voler quelque chose. Ça me fit rire et elle haussa un sourcil dans ma direction. Je plongeai ma tête dans un placard et en ressortis un paquet de nouilles instantanées. Je l'agitai devant moi.
— J'ai toujours de la place pour de la nourriture, grognai-je.
Je récupérai une casserole pour faire bouillir de l'eau dedans. Greer me regarda faire, curieuse. L'odeur des nouilles instantanées envahit rapidement la cuisine, mais je n'allumai pas la hotte, sous peine de réveiller ma mère. Elle avait un radar pour mes fringales nocturnes.
Je compris rapidement que Greer n'avait jamais préparé ce plat simple, mais roboratif. Elle n'avait jamais goûté visiblement, mais elle s'installa quand même à côté de moi pour me regarder manger. Assis sur les tabourets hauts de la cuisine, penchés sur le plan de travail, je m'enfilai mes nouilles sous les yeux rieurs de Greer.
— Tu penses devoir en manger combien avant d'être rassasié ? s'amusa-t-elle.
Je haussai mes épaules.
— Autant que je peux, mais un seul bol suffira ce soir. Faut pas trop abuser des bonnes choses n'est-ce pas ?
— C'est toi qui le dis, répondit-elle avec un petit sourire taquin.
Je gloussai un peu et fronçai les sourcils quand la lumière de la hotte se mit à clignoter.
— Il n'a toujours pas réparé ce truc, maugréai-je.
Je crus entendre des pas à l'étage, mais Greer se pencha pour renifler mon bol ce qui me fit rire. La lumière se remit à clignoter, puis s'éteignit carrément.
J'allais grogner de frustration quand la lumière de la cuisine nous éclaira, nous éblouissant Greer et moi. Ma mère se tenait dans l'entrée de la pièce, avec une petite moue. Elle tenait son peignoir autour d'elle et maugréait contre ma personne.
— Thaddeus Cooper, tu es encore en train de manger ? s'insurgea-t-elle.
Sauf que je n'ai plus de bol devant moi. Et que Greer le tient entre ses mains. La fourchette que j'avais posée dans sa main et mes nouilles dans sa bouche. Elle mâcha sa bouchée avant de déglutir.
— Pardon Madame Cooper, s'excusa-t-elle. J'ai eu un petit creux.
Ma mère haussa un sourcil, pas bête. J'éclatai de rire à m'en tenir les côtes. Ma mère nous ordonna de finir rapidement ici et d'aller nous coucher. Je raccompagnai Greer jusqu'à la chambre d'ami et elle referma doucement la porte avec un geste de la main. Je restai un instant appuyé contre le mur, un sourire idiot sur le visage.
Un peu groggy de ma courte nuit, je laissai ma mère caresser mes cheveux quand elle fit le tour de l'ilot de la cuisine. Elle embrassa ma tempe.
— Il faut la remplumer cette petite, fils, marmonna-t-elle.
Je hochai la tête, un pincement au cœur. Je n'avais jamais vraiment connu la faim, mes parents avaient toujours subvenu aux besoins de leur famille. Je me demandais comment ça se passait chez Greer. N'avait-elle jamais eu un gâteau d'anniversaire ? N'avait-elle jamais apprécié de manger des bonbons pendant une journée entière ? C'était débile, mais putain, ça vous refaisait une enfance non ?
Je me redressai quand Greer apparut à l'entrée de la cuisine. Elle portait un legging et un gros pull qui descendait sur le haut de ses cuisses. Ça ne cachait pas du tout ses jambes fines et elle vint se glisser à côté de moi. Ma mère la salua et lui demanda si un chocolat chaud lui ferait plaisir. Ce à quoi Greer répondit par l'affirmative.
— Bien dormi ? lui demandai-je.
Elle posa sa joue contre mon épaule et acquiesça. Ce simple geste me réchauffa de l'intérieur et me tira un nouveau sourire. Les bruits de pas lourds de mon père le précédèrent quand il entra dans la cuisine. Greer se redressa de mon épaule et croisa son regard. Ils se reconnurent sans aucun doute possibles.
— Bonjour, Monsieur Cooper, le salua-t-elle immédiatement.
Il eut un petit rictus et l'observa quelques secondes en silence.
— Mademoiselle McCray, dit-il, suffisant.
Je fis la moue, mais ma mère déposa son chocolat chaud à Greer et l'invita à se servir parmi les douceurs qu'elle avait déjà préparées. Elle tira mon père avec elle pour lui servir son café. La main de mon paternel me pressa l'épaule quand il passa derrière moi et je ne fis aucun commentaire. Greer vit ma position un peu tendue, mais je lui parlais d'autres choses pour détourner son attention. Nous mangeâmes notre petit déjeuner et je filai à la douche rapidement.
Ma mère nous embaucha pour quelques préparatifs en vue de la soirée et bientôt, nous mangeâmes sur le pouce le midi. Ma mère se rendit compte qu'il manquait plusieurs aliments pour ses préparations et comme mon père n'était pas disponible, elle nous fit signe à Greer et moi.
— Suis ma liste à la lettre, grogna ma mère.
— Maman, je sais lire, grommelai-je.
Elle regarda Greer qui rougit avant de rire.
— Comptez sur moi, Madame Cooper. Je ne le laisserais pas faire de bêtises.
— Brave petite.
Leurs rires me tirèrent une grimace, mais éventuellement, on se dirigea vers le garage. Greer s'approcha de ma moto, visiblement prête à refaire un tour, mais je la poussai à monter dans la voiture de la famille.
— Pourquoi pas la moto ?
— Parce que les sacs de courses sont trop volumineux, répondis-je avec un sourire. Mais si tu veux faire de la moto, ça peut s'arranger.
Elle passa sa ceinture et je démarrai. Le trajet jusqu'au à la supérette ne fut pas longue et bientôt, on se retrouva à longer les longues files de nourritures. Greer avait souhaité faire ça elle-même, mais ça se voyait qu'elle ne faisait pas les courses régulièrement. On dut revenir sur nos pas plusieurs fois, mais je la laissais chercher. Elle m'avait interdit de dire où se trouvait tel aliment ou tel objet. Alors, je la suivais et m'amusais de la voir s'amuser dans une tâche quotidienne qui m'ennuyait la plupart du temps.
Cela faisait quelques minutes qu'elle scannait les étagères de viande. Elle ne semblait pas trouver ce que ma mère avait noté. J'abandonnai le cadi et m'approchai dans son dos.
— Tu sembles dubitative, marmonnai-je.
— Tu as regardé le dictionnaire ce matin, Alby ? se moqua Greer.
Je lui filai un petit coup de coude dans les côtes et lui pointai le paquet de viande en question. Elle redressa sa tête et nos nez se frôlèrent. Mes doigts frôlèrent son menton et elle écarquilla doucement ses yeux, le souffle court. Merde, nous étions bien trop proches pour que j'arrive à retenir le cours de mes pensées.
— Greer, chuchotai-je.
Le bruit autour de nous semblait se réduire jusqu'à ce que mes oreilles n'entendent que sa respiration et la mienne.
— J'ai très envie de t'embrasser, admis-je d'une voix un peu rauque.
Son corps pivota à moitié vers moi et sa main s'accrocha à ma veste. Sa chaleur se communiqua à mon torse.
— Fais-le, murmura Greer.
Sa bouche avait à peine bougé, mais cela me suffit. Elle ferma ses yeux avant que mes lèvres ne frôlent les siennes. Ses bras glissèrent sous ma veste quand elle fit un pas de plus et j'enroulai le mien autour de ses épaules, mon autre main sur sa joue. Nos nez se heurtèrent un peu avant que nos bouches échangent notre air. J'aurais peut-être dû me retenir un peu, après tout nous étions en plein milieu d'un magasin, mais mon attirance pour Greer ne cessait de me surprendre. Ses lèvres douces et chaudes s'ouvrirent quand ma langue vint les caresser et elle gémit quand notre baiser s'approfondit. Ma main glissa de sa joue à ses cheveux et je tirai dessus, habité. Ses seins se pressèrent contre mon torse et ses hanches frôlèrent les miennes. Elle était presque cachée par ma veste à ce stade et un raclement de gorge nous poussa à nous détacher l'un de l'autre, haletant.
Greer se planqua sous mon menton et je la pressai contre moi avec un petit rire. Ma bouche contre son oreille murmura son prénom et cela la poussa à se redresser et à me regarder.
— On ne m'avait jamais embrassé au rayon charcuterie, se moqua-t-elle.
Je ris plus franchement cette fois et la soulevai un peu pour un gros câlin. Elle enroula ses bras autour de ma nuque et pressa son nez contre mes cheveux. La dame qui nous avait arrêtés grommela avant de s'éloigner. Je relâchai Greer et elle se pencha pour récupérer la viande. Elle vint se presser contre mon flanc, son bras autour de mes hanches. On se chamailla pour le choix des bonbons, mais finalement on prit ceux qu'elle voulait goûter. On se dépêcha de rentrer quand ma mère m'envoya un texto pour me demander si nous étions allés faire les courses à New York pour mettre autant de temps.
Avant que Greer ne grimpe dans la voiture, je l'attirai pour déposer un baiser rapide sur ses lèvres. Elle rougit et tira sur ma veste pour un deuxième. Je le lui donnai avant de filer derrière le volant.
Quand nous arrivâmes à la maison, Greer se fit embarquer directement par ma mère et quelques femmes du club présentes pour gérer le repas et l'organisation. Mon père me fit venir avec les membres du club pour une discussion autour d'une vente plutôt risquée. Je n'écoutais qu'à moitié, car j'entendais le rire de Greer et parfois sa voix. Je ne voulais pas la laisser trop longtemps toute seule avec ma mère, sinon j'étais presque sûr qu'elle apprendrait des choses sur mon enfance que je voulais potentiellement garder pour moi. Quand mon père me libéra enfin, les gars m'embêtèrent par rapport à mes cours, mais aussi sur la présence de Greer.
Je ne la trouvais pas dans la cuisine et ma mère m'apprit qu'elle était partie se doucher et que je ferais de faire la même chose pour être prêt. Je m'exécutai et enfilai un jean et un pull avec un col assez épais, mais lâche. Je tentai d'arranger mes cheveux, mais rien ne me convint alors je les laissai en folie. Il faudrait que je les coupe bientôt de toute façon.
Quand je passais à côté de la chambre de Greer, j'entendis le sèche-cheveux. Je souris et m'appuyai contre le mur quelques secondes. L'embrasser n'était peut-être pas la meilleure idée du siècle, mais putain, j'en avais marre de trop réfléchir. Je voulais profiter du peu de temps que je pouvais passer avec elle.
La sensation était trop bonne pour que je l'abandonne volontairement.
Je descendis et ma mère me remit au boulot pour préparer des toasts. J'étais concentré et ne vis donc pas tout de suite Greer arriver. Elle se pencha sur le plan de travail, à l'opposé de là où j'étais et haussa un sourcil. Elle avait enfilé un jean taille haute où elle avait rentré une chemise. Un long collier pendant entre ses seins et j'avais presque l'impression qu'elle ne portait pas de soutien-gorge.
Pourquoi je pensais à ça putain ?
Je clignai des yeux pour croiser son expression mutine. Elle savait à quoi je pensais ?
— Tu es très belle, admis-je avec un sourire franc.
Elle tritura la natte qu'elle avait tressée sur le côté droit de sa tête et haussa ses épaules.
— Merci, répondit-elle, un peu gênée, je crois. Je peux t'aider ?
— Viens là, dis-je avec un petit ton de chef.
Elle rit et fit la tour de l'ilot pour me rejoindre. Son flanc frôla le mien, mais elle s'écarta d'un pas quand mon père entra à son tour dans la cuisine. Il nous observa l'un après l'autre et me tendit une bière. Je n'avais pas l'âge, mais qui regardait hein ? Je la pris et l'entrechoquai avec la sienne.
— Greer, qu'est-ce que tu veux boire ? s'enquit ma mère.
Elle nous rejoignit dans la cuisine et mon père l'attira à lui pour l'embrasser. Je ricanai avant de retourner à mes toasts. Greer plongea le nez dans sa tâche pour éviter mon père. Il pouvait faire son impressionnant autant qu'il voulait, il n'allait pas gâcher la soirée avec ses manières. J'espérais juste qu'il ne prendrait pas contact avec le père de Greer. Cette simple pensée suffit à me donner un léger frisson.
Quand on fut débarrassé de mon père, j'étais à deux de recommencer notre conversation, mais ma mère embarqua Greer. Je fis la moue, mais n'eus pas le choix. Je me retrouvai seul quelques minutes avant que ma sœur ne vienne m'aider.
Un flot de personnes se mit à arriver à la maison et bientôt, ce fut un joyeux bordel. Des rires, des discussions un peu partout. Les gars du club m'embarquèrent pour boire quelques bières, mais je gardai un œil sur mon invité.
Cela me fit rire de voir que mes petits frères n'arrêtaient pas d'aller lui proposer des trucs à boire ou à manger. Pour voir si tout allait bien pour elle.
Elle parlait avec des amies de ma mère et si le début sembla compliqué pour elle, elle prit vite le pas. Quand elle rit avec un naturel désarmant, mon regard retourna sur elle.
Il fallait que je trouve un moyen de la protéger de Jaxen.
Il fallait que je trouve un moyen de la sortir de ce merdier.
Elle dut sentir mon attention sur elle, car elle pivota à demi et croisa mon regard.
Je laissai mon expression et mes yeux parler pour moi.
J'avais aimé l'embrasser.
J'avais aimé la sensation de sa bouche sur la mienne.
C'était débile à dire, mais à mon âge, j'aurais dû être attiré par les filles de façon générale, mais peu d'entre elles me comprenaient.
Me comprenaient vraiment.
Pourquoi j'avais l'impression que Greer me comprenait elle ?
Je levai ma bière vers elle avec un sourire et bus une longue gorgée. Elle se mordit la lèvre avant de faire la même chose.
Il fallait que j'en sache plus sur elle.
Si elle voulait bien me le dire.
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Rapprochement entre nos deux loustics 😍😍 vous aimez ?
Est ce que vous arrivez à vous y retrouver avec cette reprise ? 😁
La bise 😘
Taki et Ada'
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