20 - Alby


J'avais décidé de replonger tête la première lors de ma reprise à Riverview. Hors de question de chercher à se faire des amis, ou à alléger le quotidien de l'une des élèves. Je ne pouvais pas dépenser de l'énergie aux endroits qui me feraient le plus mal. Il suffisait d'une connerie pour que tout s'arrête. Je ne pouvais pas changer la vie de Greer. Je n'en avais pas la force.

Je restai une minute de plus devant le classement, parce que ça me rappelait à quel point ma place ici tenait à mes notes. Je ne connaissais pas Greer au-delà de ce que j'avais vu d'elle durant ces quelques jours. Dans une autre vie, peut-être qu'on aurait pu être amis. J'en étais presque sûr, mais parfois le destin en décidait autrement.

Quand je voulus reprendre mon chemin, une épaule heurta la mienne et je relevai mon visage pour croiser le regard d'un des chiens de Jaxen.

Il ricana et marmonna :

— Alors, paraît que les paquets de bonbons ça attire les filles.

Je tentai de garder une expression neutre et calme. Je ne relevai pas et continuai mon chemin. Visiblement, Jaxen était au courant de ce qu'il s'était passé avec Greer. Il allait forcément nous le faire payer, si ce n'était pas déjà fait pour Greer. Je soupirai et longeai le couloir pour arriver à mon cours. Le prof insista sur les devoirs groupés et mon voisin me fit comprendre qu'il ne souhaitait pas bosser avec moi, mais qu'il le ferait. Je lui tendis ma partie du travail et il parut étonné du contenu quand il le lut en diagonale. Il ajouta sa partie et je ne pris pas le temps de le relire, je savais qu'il était dans les dix premiers du classement. Nous aurions la note que nous aurions.

Le cours me permit d'apercevoir Greer vu que nous étions dans le même niveau pour cette matière. Elle paraissait bien plus épuisée que quand je l'avais quittée avant Noël. Je dus lutter contre mes premiers instincts qui me poussaient à savoir pourquoi. Pourquoi ne revenait-elle pas en forme ? Son père avait-il été dur à cause de son classement ? Je déglutis et bondis de ma chaise dès que la sonnerie retentit. Encore une fois, je longeai les couloirs pour éviter toute interaction avec qui que ce soit. Pour cette deuxième partie de l'année, j'avais dû trouver une autre matière qui m'apporterait un peu de crédit pour ma moyenne. J'avais donc choisi le tutorat qui me permettait de bosser tout en essayant d'aider quelqu'un. Ce serait deux heures par semaine avec une personne qui en avait besoin. J'avais aussi la courte, mais j'étais forcément inscrit dans l'équipe d'athlétisme. Ça ne me plaisait pas, mais au moins, ça pousserait ma moyenne au maximum. Je me rendis donc à ma première heure de tutorat.

Je fus très étonné de voir Greer assise à notre table habituelle. Je restai immobile à l'entrée de la bibliothèque, persuadé que c'était une blague. Elle n'avait pas besoin de tutorat cette année. Elle était déjà très bonne dans ce qu'elle faisait. Je me frottai la nuque. Le destin était contre moi. Je me laissai choir sur ma chaise et observai Greer. Elle écarquilla ses yeux un quart de seconde avant de fermer ses paupières.

— Il fallait que ce soit toi, soupira-t-elle.

— Tu peux me dire pourquoi tu as besoin de tutorat ? grognai-je.

— Je vais demander un autre tuteur. Je ne savais pas que tu avais pris cette matière.

Elle voulut se lever, mais mon bras se tendit et ma main se referma sur son poignet. Je pouvais largement en faire le tour d'une poigne ferme. Elle se figea et me lança un regard inquiet.

— Reste, soufflai-je. Tu peux rester. Bordel, c'est n'importe quoi.

Je la relâchai et me réinstallai.

— Si tu as besoin d'aide, reste. Sinon, tu peux partir. Je ne te force à rien.

Elle se réinstalla à son tour.

— Sur quel sujet tu veux qu'on bosse ? demandai-je.

Elle rouvrit ses deux cahiers devant elle, ainsi que son livre de mathématiques appliquées.

— Le programme de maths, souffla-t-elle.

— Ok. Voilà ce que je peux te proposer.

Je lui expliquai rapidement ma manière de faire. J'avais déjà fait du tutorat dans mon lycée et la technique fonctionnait plutôt bien. Je lui préparai un exercice, ou on refaisait ceux déjà demandés pour qu'ils soient bons, elle le préparait pour l'heure suivante et on corrigeait ensemble. L'idée était d'avoir un truc sur lequel bosser au moment de notre heure. Elle hocha la tête et me montra les trois exercices sur lesquels elle avait eu du mal. Nous avions déjà bossé ensemble sur le reste avant les vacances de Noël. Elle resta concentrée et surtout on ne parla pas de notre interlude, et encore moins de Noël. Quand l'heure se termina, Greer resta sur son boulot et je filai dans ma chambre pour me changer.

Il fallait que je me motive pour l'équipe d'athlé et je n'étais pas du genre à bosser avec des petits riches. Je me rendis compte néanmoins pendant l'entraînement deux choses. Que le coach n'en avait rien à foutre de l'argent dans le porte-monnaie des parents. Si tu voulais courir, tu courrais. Sinon, tu dégageais. Et l'autre, c'était que les personnes présentes étaient des dingues de sport. L'une des filles calculait même l'apport calorique de sa barre de protéines. Je l'avais vue noter les détails dans son petit carnet.

Une semaine passa et une autre. J'enchaînai mes cours avec les heures de tutorat pour Greer et un autre mec. J'avais pris en masse musculaire à cause de la course et le régime que le coach nous faisait manger. Ce qui n'était pas dérangeant en soit, mais je n'étais pas habitué à être aussi... lourd. Je devais aussi continuer à me muscler pour tenir la route. J'évitai Jaxen le plus possible et visiblement, il faisait la même chose puisqu'on ne se croisait que pendant nos cours et je faisais en sorte d'arriver le plus tard possible et de partir en premier.

Greer ne m'avait pas reparlé de Noël et elle semblait sur la même longueur d'onde que moi : faire son petit bout de chemin pour avancer sans trop de problèmes.

On aurait dû se douter que Jaxen n'allait pas en rester là, mais que vouliez-vous ? L'espoir était humain n'est-ce pas ?

Je me traînai sur la piste de course pour un entraînement un peu tardif. Les conditions physiques que réclamait le coach étaient bien plus impressionnantes que l'idée que je m'en étais faites. Je courus deux bonnes heures supplémentaires ce qui réussit éventuellement à m'épuiser assez pour que je pousse mon corps épuisé sous la douche sans trop faire attention à mon environnement. Je pris seulement ma serviette avec moi comme il n'y avait personne dans les vestiaires. L'eau chaude détendit mes muscles assez pour que je grogne. Je les massai pour éviter les crampes plus tard et éteignis l'eau. J'enroulai la serviette autour de mes hanches et ouvris la porte de la douche.

Seuls mes réflexes me permirent d'éviter le premier coup. Le poing de Spencer heurta la porte si fort qu'il la déforma. Je voulus reculer, mais une autre main agrippa mon poignet. Mon coude heurta une tempe et mon genou frôla les couilles de Spencer qui s'écarta au dernier moment.

— Il se bat bien.

Des commentaires en fond, mais je me concentrai sur le prochain coup qui allait arriver. Je réussis à cogner Spencer assez fort pour qu'il rebondisse contre le mur quand un pied heurta mon genou par-derrière. Un autre en profita pour me plaquer au sol quand je tombai et ma joue heurta le carrelage des douches communes. Le choc résonna dans tout mon crâne. La seconde de flou permis aux autres connards de m'immobiliser complètement.

C'est là que je vis Jaxen à l'entrée, les bras croisés sur son torse, le regard vide.

— C'est qu'il a du répondant cet enfoiré, grogna Luis.

Je tentai de me débattre, mais je reçus le coup de chaussure de Spencer en plein dans les côtes. Le cri passa le barrage de mes lèvres avant que je ne puisse me retenir. Je serrai les dents quand la douleur irradia dans toute ma cage thoracique.

— Pas pour longtemps, cracha Spencer.

— Six contre un ? Vraiment Jaxen ? Pas assez de couilles pour venir en un contre un ? marmonnai-je.

— Mauvaise idée, gronda Doug non loin de moi.

Puis la botte de Spencer rencontra mon visage et m'envoya dans le noir.

Je ne sus si c'était le froid ou la douleur qui me réveilla. En tout cas, la première chose que je sentis fut le scotch sur mon corps entier. Je tentai de bouger avant de couiner quand le scotch tira sur des endroits délicats de mon corps. Je clignai des yeux et le froid serra ma gorge un peu plus. Je secouai la tête et la douleur me vrilla le crâne.

Ce connard m'avait filé un traumatisme crânien.

Je pris plusieurs minutes entières avant de comprendre où j'étais. Je me trouvai actuellement scotché au mât du drapeau américain à l'entrée de l'académie.

Bordel de merde.

Et j'étais là depuis assez longtemps pour que je sente à peine mes doigts et mes pieds. J'allais vraiment devoir réfléchir à la suite de mes actions pour ne pas récolter ce genre de surprise. J'agitai mes doigts pour récupérer un peu de sensation. Il faisait froid bordel. Je tentai de bouger mon corps, mais le scotch me rappela à l'ordre. Ils avaient dû en mettre du temps pour coller tout ça.

Je tentai de voir autour de moi ce qui aurait pu m'aider, mais dans la situation actuelle, seulement une autre personne aurait pu le faire. Et je n'avais personne sous la main. Génial. Super.

C'était ça le but n'est-ce pas ? Attendre que tout le monde se lève pour me voir ici, attaché ici, nu et scotché à un putain de poteau.

Je ne sus combien de temps passa avant que la porte des dortoirs s'ouvre à quelques mètres de là.

Une personne sur le total des élèves, il fallait que ce soit elle.

Bordel de merde, de merde.

— Fais chier, crachai-je entre mes dents serrées.

Greer dut faire quelques pas supplémentaires avant de lever les yeux vers moi. Elle se figea et pendant un instant, je la vis lutter contre ses instincts. Venir m'aider ou me laisser là ?

— Va-t'en de là ! criai-je quand elle fit un pas dans ma direction.

Elle s'arrêta une seule fois avant de finir de s'approcher. Elle posa son sac de natation à côté d'elle et jeta un coup d'œil autour d'elle.

— Fais demi-tour, Greer, grognai-je.

— S'il te plaît, dis-moi que tu as un boxer là-dessus, grimaça-t-elle.

Je grognai de frustration et elle se mordit la lèvre. Il fallait que ce soit elle ma sauveuse n'est-ce pas ? Elle grimpa sur le petit mur en pierre et s'aventura dans les quelques plantes devant elle.

— Jaxen ? murmura-t-elle.

— Greer, barre-toi de là avant qu'il te voie. Ça ne vaut pas le coup que ce soit toi qui y passe la prochaine fois ok ?

Ses doigts trouvèrent un bout de scotch et elle commença à tirer dessus. Je grinçai des dents quand elle tira une seconde couche en contact direct avec les poils de mes cuisses.

— Je vais pas te laisser là, d'accord ? lâcha-t-elle en se redressant.

Son visage près du mien était rouge à cause du froid et elle pinça ses lèvres le temps que j'acquiesce.

— Li... libère mes mains avant, que je puisse t'aider, grognai-je.

Ce qu'elle tenta de faire, mais vu l'épaisseur du scotch, elle continua de tirer dessus encore et encore. Au moment où mon torse et mes bras étaient enfin libres et qu'elle arrivait à mes hanches, deux personnes sortirent de la porte d'entrée. Le premier aperçu qu'ils ont ? Greer à genoux devant moi, complètement à poil, avec seulement du scotch sur mon cul et ma bite.

— Y a du monde qui arrive ?

— Et alors ? gronda Greer. Ce n'est pas comme si je devais terminer d'enlever tout ça non ?

Je jurai entre mes lèvres serrées et Greer s'arrêta juste avant mon pubis. Elle me jeta un coup d'œil.

— Je vais le faire, grognai-je.

— Ça risque de faire mal si tu n'y arrives pas du premier coup, remarqua Greer.

On parlait vraiment de ma bite là ? Je jurai encore une fois.

— Est-ce que tu t'es déjà épilé à cet endroit... là ?

Je la regardai avec de grands yeux avant de rougir. Elle détourna son regard et haussa ses épaules.

— C'est juste pour savoir. Ce n'est pas agréable.

— Tire dessus, Greer. Vite, s'il te plaît.

Elle le fit sans m'en dire plus. Ma bite alla regretter ce geste pour quelques jours, j'en étais sûr. Je planquai mon paquet derrière ma main jusqu'à ce Greer arrive à enlever le reste de mes couilles et de mes cuisses.

— Je vois franchement pas comment vous survivez à ça tous les mois, sifflai-je, la bite en feu.

Greer me jeta un coup d'œil et haussa un sourcil.

— Je ne vais pas parler de l'épilation de mon sexe avec toi, jugea bon de me rembarrer Greer.

J'ouvris la bouche pour répliquer quelque chose, mais mon regard se posa sur toutes les personnes présentes qui nous observaient.

Jaxen ouvrit la porte au moment où Greer me tendait sa serviette de piscine. Je grimaçai et Greer le vit. Elle pivota et je vis ses épaules s'affaisser.

— Tu aurais vraiment dû me laisser là à me geler les couilles, grinçai-je.

— Tais-toi, tant que le direct...

On pivota tous les deux quand le directeur sortit de l'académie avec un regard qui en disait long sur mon devenir.

— McCray, Cooper, dans mon bureau, annonça-t-il.

Greer m'aida à descendre du muret.

— Monsieur, elle est pas responsable, dis-je pour tenter le tout pour le tout.

Il ne dit rien de plus, son regard suffit. Greer me tira par le bras pour que j'avance et je me laissai faire.

On se retrouva devant le bureau du directeur, moi à poil avec seulement une serviette autour des hanches.

— Ce genre d'incidents doit être isolé, monsieur Cooper. Sinon, je dois le notifier.

— Pas besoin.

— Donc je ne vais pas avoir droit à des noms ?

Je secouai la tête. Greer grimaça et me jeta un coup d'œil.

— Mademoiselle McCray, un commentaire ?

— J'ai trouvé Alby coincé et je l'ai aidé. Je n'ai vu personne autour de lui.

— Vous avez des marques de blessures, Monsieur Cooper. Souhaitez-vous faire un commentaire sur ça ?

— Non, monsieur, répondis-je, stoique. Je veux juste m'habiller et aller en cours.

— Passez par l'infirmerie avant d'aller en classe, Monsieur Cooper.

Je hochai la tête et me levai. Greer me suivit et nous sortîmes du service administratif le plus vite possible.

— Alby, je suis...

— Laisse tomber, Greer. On savait que ça allait dégénérer, soupirai-je. Alors... on ferait juste mieux de se tenir loin l'un de l'autre. Merci... de m'avoir détaché.

Je ne pouvais pas faire grand-chose pour le tutorat, mais j'espérais qu'elle trouve un autre tuteur. Sinon, on allait encore avoir des ennuis. Et après avoir passé la nuit dehors, les couilles à l'air, et la gueule défoncée, j'avais juste envie de dormir trois jours d'affilé. 

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