Tout était flou, sans couleurs distinctes. Le brouhaha qui me parvenait était lent, mais incroyablement bruyant, c'était une sensation très étrange.

Soudain, une intense lueur jaillit des ténèbres et me brûla les yeux. D'un grognement - car c'était tout ce que j'étais capable de faire-, je me détournai lentement jusqu'à rencontrer le vide.

Plusieurs paires de mains me rattrapèrent et me remirent délicatement devant l'insupportable lumière. Pourquoi ne l'éteignaient-ils pas ?

Les voix se firent alors plus pressantes, mais également plus incompréhensibles à mes oreilles. Je ne me rappelais plus de ces moments totalement silencieux qui devaient sûrement exister.

Une douleur lancinante se fit alors sentir au niveau de mon ventre. Je gémis piteusement et me tortillai pour échapper à l'emprise de ces tortures.

Je compris alors ce qui n'allait pas : j'avais faim, tellement faim. Haletante, j'ouvris la bouche et produit des sons insistants pour être rassasiée.

Mon nez comprit plus vite que mes yeux : un énorme steak apparu alors et j'ouvris grand la bouche pour n'en faire qu'une bouchée.

Mais il disparut avant que je ne puisse goûter à sa saveur. Je poussai un énorme cri de protestation et m'agitai furieusement. Je me sentais complètement vidée de l'intérieur, totalement en manque de protéines, de lipides, de glucides.

J'avais mal, dieu que j'avais mal, et je ne savais pas comment y remédier.

-MANGER !

-On essaie !

Je ne compris pas ce que Carole me disait. Pourquoi me torturait-elle à ce point ?! À présent en colère, je laissai libre cours à ma fureur.

Ma force semblait vouloir se réveiller, mais je n'en avais plus l'énergie.  Pourtant, les mains qui me retenaient semblaient avoir plus de difficultés à me garder en place.

-Thina ! On essaie de te nourrir ! Mais la bouffe disparaît !

-Hein ?

Une deuxième odeur alléchante me parvint et je me cambrai pour l'atteindre. Nouvelle frustration : l'arôme du steak disparut.

Désespérée, je sentis des larmes couler le long de mes joues. On aurait dit que mon ventre me dévorait de l'intérieur, puisqu'il ne pouvait atteindre aucune autre viande.

Une fois de plus, je ne supportai plus la douleur et sombrai dans les ténèbres.