Chapitre 3

En aidant cette femme, Adrien s'est senti vivant. Théo aussi. Vivants, satisfaits, heureux et pleins d'autres émotions positives qu'ils n'avaient plus éprouvées depuis trop longtemps. L'adrénaline liée au danger n'a fait que rendre le tout plus excitant et palpitant. Des sensations que ces six derniers mois leur avaient fait oublier. Ils se croiraient presque rechargés de bonheur et dotés d'une âme guérie.

C'est avec un contrecœur inimaginable qu'ils rentrent chez eux. Certes, c'est une très belle maison, mais ce n'est pas un foyer. À peine ont-ils franchi la porte que leur malheur se repose sur leurs épaules, tout comme leur peine et leur mal-être.

L'entrée est vide. Qu'espéraient-ils ? Que leur père les attendrait d'un pied ferme sur les marches, les disputerait en leur expliquant que c'est parce qu'il tient à eux qu'il agit ainsi ? Théo pousse un soupir d'ironie contenue. Adrien détourne le regard de cette maudite porte.

A-t-il seulement remarqué leur absence ? Les fils Agreste montent à l'étage en silence, malgré les cris de leur désespoir. Ils s'enferment dans leurs prisons dorées. Le dîner est dans deux heures. D'ici là, ils ne peuvent que faire face aux plus sombres recoins d'eux-mêmes et aux flagellations de leurs pensées moroses. Seuls.

**

– Non mais tu te rends compte de ce qu'on vient de faire ? C'était hyper dangereux !

– Calme-toi Marinette.

– Que je me calme ?! Comment veux-tu...ok calme-toi Marinette.

À quelques rues de l'incendie, Marinette réalise qu'elle vient de risquer sa vie. Elle fait les cent pas sur le trottoir. Elle pose ses mains sur son front, sur ses joues, sur sa bouche, sur ses cheveux et revient à son front. Elle marmonne des phrases dont un seul mot ressort clairement : « folie. »

Norah est adossée à un mur et regarde sa sœur paniquée avec un temps de retard, comme d'habitude. Elle affiche un air serein, un petit sourire esquissé à ses lèvres amusées. Au bout de quelques minutes, elle attrape Marinette par les épaules et la secoue.

– Que voulais-tu qu'on fasse ? Que nous restions les bras croisés ?

– Non enfin oui... enfin non...je...

– Si ça avait été maman dans cet immeuble, reprit-elle d'une voix douce, si elle ou papa était en danger, tu n'aimerais pas que quelqu'un leur vienne en aide comme nous nous venons de le faire ?

Le regard de Marinette s'accorde au ton de sa sœur. Ses épaules s'affaissent. Elle baisse les yeux et avoue :

– Si.

Marinette soupire lorsque le visage de sa sœur exprime la satisfaction et un brin de moquerie bon enfant. Norah passe son bras autour de ses épaules et elles continuent leur chemin vers la boutique.

**

Adrien et Théo sont seuls sur une table ridiculement immense. Elle est assez vaste pour accueillir une vingtaine de personnes, voire plus. Ils s'asseyent face à face dans la largeur de la table. Et ils dînent sans un mot.

Leur détresse atteindra bientôt un point de non-retour.

Dans une autre maison, les rires fusent. Une jeune lycéenne manque de révéler le cadeau acheté à maintes reprises. Heureusement que sa grande sœur lui adresse de parfait coups de pieds et regards noirs. Ils dînent autour d'une table carrée prévue pour quatre personnes uniquement. Cette petite famille unie célèbre un anniversaire dans la joie et l'amour.

Leur bonheur est à son comble.

**

Dans son antre, le Papillon patiente. Des centaines de papillons blancs l'entourent, endormis au sol. Il s'appuie sur sa canne, ferme les yeux et balade son sixième sens dans tout Paris. Tôt ou tard, quelqu'un ressentira une forte émotion négative qu'il pourra exploiter.

Cela fait trop longtemps qu'il peaufine son plan. Sa volonté à toute épreuve nourrit son corps et remplace le sommeil.

La nuit, la lune et les étoiles défilent sous ses yeux remplis de détermination. Il a vu les lumières s'éteindre et s'allumer, les parisiens s'endormir et se réveiller sans savoir qu'un être malveillant s'apprête à semer le chaos dans leur précieuse ville lumière.

Soudain, le Papillon ressent une agréable explosion dans les tempes. Il sourit malicieusement. Les stores de son immense fenêtre donnant sur les toits de la ville s'ouvrent. Au contact de la lumière, ses papillons se réveillent, s'envolent et flottent dans les airs. Il en attrape un qu'il recouvre de ses mains. Une sombre lumière poussiéreuse émane de son geste.

– Tant d'émotions négatives. Parfait. Exactement ce qu'il me faut. Tristesse et colère.

Il jubile.

— Infiltre son cœur mon horrible petit akuma. Et noircis-le pour qu'il exécute mon dessein.

Le papillon blanc se colore d'un noir soyeux avec de fins motifs violet électrique. Il s'échappe par une ouverture au cœur de la fenêtre prévue à cet effet. Il traverse Paris plus rapidement que les autres êtres de son espèce. Il atteint sa proie et s'insinue dans une feuille froissée, roulée en boule. Cet acte fait, le Papillon peut désormais parler avec la personne qu'il a akumatisé.

– « Cœur de pierre » je suis le Papillon. Je t'offre le pouvoir de te venger de ceux qui t'ont blessé. En échange, tu devras me rapporter quelque chose.  

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