1 | 'MÉTRO PARISIEN'

Quand il était en troisième, Yamaguchi était parti en voyage aux États-Unis avec sa famille. Il avait toujours rêvé de rencontrer un bel étranger, pour qui il aurait eu comme un coup de foudre. À l'époque, il avait vraiment le besoin de se sentir aimé. Il avait envie d'amour.

Bien sûr, ça ne lui était jamais arrivé. Ça ne lui était jamais arrivé, jusqu'à ce qu'il rentre justement de son voyage en Amérique.

Dans le bus qui les emmenait au bateau, son regard était tombé sur un garçon de son âge, peut être légèrement plus âgé. En tout cas, il l'avait trouvé splendide. Il n'avait pas réussi à décrocher son regard de son corps. Quelques fois, leurs regards s'étaient croisés, faisant palpiter son cœur. C'était seulement l'excitation d'une rencontre qui le mettait dans cet état là, l'extase d'un potentiel coup de foudre.

Durant tout le temps où ils avaient attendu leur bateau, il était resté proche de lui, toujours lui jetant des regards assez furtifs. Il ne pouvait s'empêcher d'imaginer des scénarios où ils se croiseraient par hasard dans les toilettes. Bien évidemment, ce n'est jamais arrivé. Ils se perdirent de vue juste avant d'arriver dans le bateau.

Cette nuit-là, il n'avait pensé qu'à lui. Son visage était ancré dans sa mémoire et refusait de la quitter.

Ce n'est que le lendemain matin, à sa grande surprise, qu'il le revit. Du débarquement, passant par la queue pour vérifier les passeports, jusqu'aux voitures de leur famille garées l'une en face de l'autre.

Pendant deux jours entiers, il avait été complètement chamboulé, ne pouvant s'empêcher de penser non-stop à cet adolescent. Seulement, ils ne s'étaient jamais revus. Forcément. Il ne s'attendait pas à grand chose de toute façon, après tout, il ne connaissait même pas son nom.

Mais il était la seule personne pour qui il avait vraiment ressenti quelque chose, aussi ridicule que ça puisse paraître.

Alors pourquoi se souvenait-il de ce garçon, quatre ans plus tard, dans un métro parisien ?

Ce visage qui pendant deux nuits entières était resté fixe dans son esprit était maintenant complètement flou. Il arrivait à peine à se souvenir de ses cheveux châtains et de ses yeux bruns. Il ne pouvait même plus dire si sa peau était mat ou seulement moins pâle que la normale.

Pourquoi repensait-il à ce moment exact de sa vie, dans un métro parisien ?

Une vieille dame zieutait avec affreusement de force la place sur laquelle il était assise. Un SDF dormait sur la rangée de sièges derrière lui, grognant dès que le wagon tanguait légèrement, se raclant la gorge avant de cracher des glaires sur le sol. Une odeur abondante de vomi et de pisse emplissait le métro. Un homme chantait d'une voix rauque et gutturale (lui déchirant vraiment les tympans) du ACDC, mal accompagné d'un air d'accordéon, et demandait l'attention des passagers.

On avait beau dire, Paris, la ville de la mode, la ville lumière, la ville de l'amour, après trois semaines passées ici, tout ce que Yamaguchi avait observé, c'était un boulevard rempli de magasins de sextoys et de bars à pute, des rats qui couraient dans un rayon de moins de cent mètres autour de la Tour Eiffel, des gens odieux, jurant pour un rien, des embouteillages à tout bout de champ et des merdes de chiens à chaque coin de rue. Sans parler, effectivement, du métro parisien – c'était une catastrophe.

Il n'était pas particulièrement déçu de la véritable vie parisienne. Il avait certes entendu parler de cet air raffiné, mais il avait aussi entendu les clichés comme quoi les français étaient sales, ne se lavaient pas, jugeaient n'importe qui et n'importe quoi, se comportaient en parfait connards.

Et parmis toute cette crasse, il avait repensé à ce moment de sa vie.

Pourquoi ?

Tout simplement parcequ'il avait l'impression de le vivre à nouveau.

En face de lui, un grand jeune homme venait d'entrer dans le métro, casque sans fils sur les oreilles, ses yeux dorés cachés derrière une paire de lunettes, un air bien ennuyé et exaspéré sur le visage. Il n'avait pas l'air commode.

Pourtant, il se retrouvait obnubilé à nouveau, incapable de regarder ailleurs. Toutes les choses autour de lui parurent comme inutiles. Il était splendide.

Peut être qu'il y avait encore une face de Paris qu'il n'avait pas exploré, après tout.

Il se fit couper dans ses pensées quand le sans-abri derrière lui cracha un autre glaire et commença à jurer en français – il ne voulait même pas essayer de deviner ce que ça voulait dire –, le faisant sursauter. L'homme en face de lui esquissa un sourire assez amusé en le voyant aussi effrayé, le faisant baisser la tête.

Puis, le chanteur à deux balles vint demander aux gens de lui donner une petite pièce. Il s'arrêta devant Yamaguchi et lui tendit son chapeau. Le jeune homme ne voulait pas paraître impoli, mais il n'avait vraiment pas envie de payer pour quelqu'un qui venait de lui crever les tympans. Il n'avait déjà pas énormément d'argent, il ne pouvait pas se permettre de donner de la monnaie à un type comme ça.

Excusez-moi jeune homme, pourriez-vous me laisser votre place ? J'ai de l'arthrose et j'ai besoin de me reposer, bredouilla la vieille femme en s'approchant à son tour.

Il ne comprit pas tous ses mots, mais il réalisa assez vite qu'elle en avait après sa place. Seulement, lui, il avait marché toute la journée, ses mains étaient pleines de ses travaux et son sac pesait trois tonnes. Il avait lui aussi vraiment besoin de rester assis.

Il se retrouvait donc acculé sur son siège. Derrière lui, le SDF recommença à jurer.

Il était complètement coincé, et bien angoissé.

Le métro s'arrêta, et du coin de l'œil, Tadashi vit le bel inconnu se lever pour sortir.

Encore une fois, il laissait cet étranger lui filer entre les doigts. Il regrettait déjà de ne pas lui avoir parlé. Il allait d'ailleurs sûrement avoir beaucoup de remords dans les deux jours qui suivirent, mais il finirait par l'oublier. Après tout, il n'était qu'un inconnu.

Il le regarda quand même, espérant qu'il vienne à sa rescousse, vu la situation délicate dans laquelle il était. Après tout, un beau garçon devait forcément être un gentleman.

Et bien non.

Il se contenta de le regarder avec un air affreusement narquois, et un léger sourire s'esquissa sur son visage. Son regard se plongea dans le sien, disant clairement :

"Bonne chance pour sortir de là."

Yamaguchi resta sidéré alors que le blond quittait le métro sans rien dire.

Il était odieux.

Et il n'avait aucune idée que c'était ça qui l'empêcherait de l'oublier. Ce caractère affreux.

Enfin, en attendant, il avait encore une station à attendre avant de sortir enfin du métro.

Globalement, une minute trente de supplice avant sa libération.

~Le nom de Tsukishima, vous ne l'aurez pas bientôt (๑•̀ㅂ•́)و✧
Il va beaucoup vagabonder avant de finalement avoir son nom >:)

J'ai l'impression que ça fait deux mois que je n'ai pas posté, alors que non, ça date juste de la semaine dernière c'est fou.

Enfin j'espère que vous avez aimé ce chapitre, au prochain chapitre j'introduis un autre perso dont vous allez quand même entendre pas mal parler ٩(๑'^´๑)۶

À la semaine prochaine~

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