CHAPITRE 9

PDV WILL


- Putain !
Je cri dégoûté.

Les autres rient, content d'avoir gagné cette partie de cartes.

- Allez !
S'enjoue Jane en faisant semblant de couper l'air avec deux doigts.

- Tes cheveux sont trop longs de toutes façon.
Tente de me rassurer Mike.
Je vois à son regard qu'il s'inquiète que sa soeur mani une paire de ciseaux. Et ce constat m'inquiète encore plus.

- Essayes de faire ça proprement...
Je grogne.

- Hm hm.

C'est dix minutes plus tard que je vois mon crâne, complètement rasé. Elle a fait tellement de trou qu'on a dû finir au rasoir jetable.

- Il est tout beau !
Se moque Charlie, Barb' dans ses bras.

Je prends mon bonnet et le met pour cacher ma coquille d'œuf. Heureusement que ça repousse, je ne me reconnaît pas.

- Les gars ! J'ai trouvé le saint Graal !
S'écrie Jules en entrant dans le salon, deux packs de bière dans ses mains, brandit comme des trophées.

Jules. Ce gars est adorable. Tellement que je m'étonne toujours qu'il ait survécut. On l'a croisé sur la route pour aller au bunker, du moins là où on pense le trouver, et on l'a pris sous notre aile.
Tout se passe bien, mieux, depuis qu'il est là. C'est dingue comme voir une nouvelle tête est gratifiant pour le groupe.

- Elle ne sont pas fraîche mais comme on est en hiver.

Je prends celle qu'il me tends et trinque avec tout le monde.
L'air a perdu quelques degrés depuis un mois environ. Rien que de nous mettre à l'abris nous réconforte. Le vent est parfois violent, on dirait qu'un dérèglement atmosphérique s'opère. Et ça n'a rien de rassurant.

Je vois Mike du coin de l'œil, changeant les piles de la radio. On l'a trouvé dans un garage mais sans les piles ; ça a été une vraie galère d'en trouver.

- Allô. Aaaallo allô ? Ici Mike, survivant plutôt beau gosse à l'appareil.

On éclate tous de rire face au mimique du beau gosse.

Cette soirée, un moment de répit dans notre nouvelle vie, est une bénédiction. On se change les idées, on approfondie les liens.

- Allô ?

Le silence se fait d'un coup.
Quelqu'un vient de répondre à la radio.

- Merde, je sais plus sur quel bouton appuyer !
Panique le jumeau.

- Vous êtes là ?
Grésille à nouveau la radio.

- Oui, je suis là !
Réponds enfin ce dernier.

- Vous connaissez Alban ? Il est grand, très grand et... Il a un bras en moins. C'est mon copain et on s'est perdu de vue. Vous ne l'auriez pas vu ?

Je crois que le silence de mort est assez éloquent. Nous n'avons pas vu son copain, qui est sûrement mort. Combien sont-ils à chercher leur familles ou amis ?

- Non... Je suis désolé mais je ne l'ai pas vu.
Murmure Mike, une peine flagrante sur le visage.

La radio s'arrête de grésiller, elle a coupé la communication. Était-ce le premier appel désespéré qu'elle passait ? J'en doute.

- Comment a-t-il pu survivre avec un bras coupé ?
Demande Barbara.

- Il y a des équipes médicales un peu partout. C'est juste compliqué de les trouver, c'est plutôt eux qui nous trouvent de ce que j'ai compris.
Nous informe Jules.

- Attends, tu en est sûr ou c'est une rumeur ?
Demande Charlie, impassible.

Je crois qu'il pense à la même chose que moi. Qu'on aurait peut-être pu la sauver.

- Je ne les ai pas vu de mes propres yeux, ont m'a juste raconté. Pourquoi ?

- On a perdu quelqu'un à cause d'un ninja. Une alarme a retentit, on... On a du partir. Elle est morte pendant notre fuite.
Je lâche comme un aveu de culpabilité.
Cette culpabilité me rongeant toujours après quatre mois.

Je finis ma bière d'une traite. Et voilà, on reparle d'elle après un accord tacite qui aura duré moins de deux mois. Depuis que je me suis repris en main...

- L'alarme c'était plus pim-pom pim-pom ou tuuuutu-tuuuutu ?

- En quoi c'est important ?
Pouffe Jane. Je crois qu'elle aussi à finit sa bière. Elle a les yeux vitreux.

- C'était plus tuuuutu.
Réponds quand même le blond.

Jules baisse la tête sombrement. En général, c'est mauvais signe.

- Ça, c'est la sirène des secouristes. Je suis désolé pour votre amie, ça s'est joué à pas grand chose.

Un bruit de verre qui casse nous fais tous sursauter. Après un tour du regard, je réalise que c'est ma bière qui repose en mille morceaux à mes pieds. Je ne pense même pas à ramasser. Tout ce à quoi je pense c'est «Et si ?». Et si on avait compressé sa plaie ? Et si on était restés jusqu'à leur arrivées ? Et si on avait su que c'était eux ? Que ce serait-il passé ?

Je sors sur la terrasse, tirant sur mon bonnet pour protéger mes oreilles du froid.

J'ai fini par accepter ses dernier mots. Je suis important pour le groupe, plus qu'elle ne l'était, c'est une évidence. Ça m'a permis de jeter ce foutu syndrome du survivant. C'est moi qui devait mourir. Voilà ce que j'ai pensé durant des mois. Puis je me suis imaginé mort à sa place. On n'était pas proche elle et moi, pas vraiment amis, mais je sais que ma mort l'aurais affecté. Elle n'aurait pas guidé le groupe comme je le fais maintenant. Et c'est un cadeau que je n'oublierai jamais. Elle s'est sacrifiait pour nous. J'ai compris que me sauver, c'était sauver tout le monde. Et c'est pour ça que j'ai délaissé les autres. Je ne voulais pas de cette responsabilité, ni être responsable de sa mort.

- Hey...

Je me retourne face à Jules. Il me tapote l'épaule comme un père le ferait. Alors qu'il est plus jeune que moi.

- De ce qu'on vient de me dire sur cette Molly, elle était trop faible pour ce monde.

Je lui envoie un regard noir et me dégage de sa poigne.

- Attends. Je veux juste que tu saches, comme je l'ai dit aux autres, qu'elle est mieux là où elle est. La gentillesse est une faiblesse. Les sentiments sont une faiblesse qu'on ne peut pas se permettre. C'est pour ça que ce sont les meilleurs qui sont partis en premiers.

- Peut-être...
Je murmure en regardant les étoiles.

C'est le passé, et dans un monde où on vit au jour le jour, c'est même un passé lointain.


***


Je plaque ma main contre mon œil. Tout sauf ça !

Jane tue le ninja pendant que je cours jusqu'à mon sac pour passer de l'eau sur mon visage.

Plus tard, dans une nouvelle planque, Barbara s'occupe à me soigner.

- C'est pas beau à voir mais ta paupière a sauvé ton œil.

Ce connard m'a presque fendu le visage en deux. Une grosse balafre s'étend de ma mâchoire jusqu'à mon front sur le côté gauche.

- Alors pourquoi t'as mis un putain de pansement sur mon œil ? Je suis pas un pirate, putain.
Je grogne.

- C'est au cas où Will. Je ne suis pas médecin.
Réplique froidement la rouquine.

J'ai eu de la chance, mais je vais être défiguré à vie. Ils font chier avec leur sabres ! Il y en partout maintenant ! Et on ne sait ni qui est leur chef, ni où se trouve leur QG.

Entre eux et mes cauchemars...
Je commence à perdre la tête.
Pendant un instant, je revois les images de cette nuit, d'abord apaisantes, puis horribles.
Dos à moi, je vois ses cheveux humides, propres. Je sens même son odeur, qui ne la quitte jamais...
Puis je la retourne et tout ce qu'il reste d'elle est un squelette.

Au début c'était son visage, taché de sang, puis, à force d'oublier chaque détails et avec le temps qui passait, elle s'est transformé un peu plus chaque nuit en un cadavre putride, avant de finir en un tas d'os.

Je secoue la tête vivement, j'en ai assez la nuit pour ne pas avoir à m'infliger ça éveillé.

Mike pose une conserve devant moi, heureusement que le conservateur existe parce qu'après sept mois où l'industrie alimentaire s'est arrêté, on aurait que des trucs périmés à manger.

Pois chiche, je lis sur l'étiquette.

Putain ! Je déteste ces merdes.
Heureusement qu'on se rapproche du bunker. Parce que le tout-fait me dégoûte de plus en plus. Charlie s'est renseigné sur comment faire pousser un potager. Vivement qu'on y arrive.


***

Je frappe dans tout ce que je trouve, des fleurs, des cailloux. Il n'y a rien !

- Ce n'est pas si grave, on en trouvera un autre. Enfin on en trouvera un.
Lance Jules.

- On a mis deux mois à trouver celui là et venir jusqu'ici ! Et tout ça pour quoi ? Pour rien !
Je hurle.

Il n'y a aucune trace d'un putain de bunker ici ! On a perdu tout ce temps pour rien ! En même temps, on a que ça à perdre, du temps.

- Ok. Fais voir la carte. J'ordonne sèchement à Barbara. Je crois qu'elle me déteste mais c'est le cadet de mes soucis. Si on revient sur nos pas, on peut prendre cet embranchement là jusqu'à celui-là.
Je pointe du doigt une croix rouge sur la carte.

Je me mords les lèvres d'énervement, mais de stresse également. J'enlève mon bonnet, passant une main dans mes cheveux naissants.

- C'est en plein dans un champ, à au moins une demi heure à pied du village le plus proche. Non, c'est pas assez stratégique.
Me contredis Charlie après une minute de réflexion.

Je le regarde intensément, me retenant de lui foutre mon poing dans la gueule.
Je suis vraiment, furieux ! Et j'ai encore ce putain de cache sur l'œil !

- Va faire un tour, tu nous angoisse tous.

Je pousse un soupir et m'éloigne du groupe.

Respire, expire. Je me calme rapidement, plus frustré qu'en colère finalement.

On a trouvé un but, un objectif, alors pourquoi on en ait toujours au point de départ ?

Je cri de désespoir, l'écho chassant les quelques corbeaux perchés sur les câbles électriques.

Que ferait Molly ? Que lui dicterait son instinct de survie ?



•••

Verdict ?


Pas de réunion dans ce chapitre, vous êtes déçues ? 😂

WILLCHR

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