3 Victoire

Après mes deux jours de repos, j'ai regagné le travail, je suis à nouveau d'après-midi et j'enchaîne les changes de protections. Tous les résidents ont dû se donner le mot et souffrent de diarrhée. Je ne vois pas l'après-midi passer et c'est avec les cheveux ébourifés que je sors de la maison de retraite. Je m'avance dans le parking en prenant le temps d'inspirer profondément. L'air de ce mois de juin est agréable et c'est avec plaisir que je sens le parfum des fleurs venir me chatouiller les narines. Je salue mes collègues qui regagnent leur voiture dans un joyeux brouhaha. Les premières voiture quittent déjà le parking, alors que je m'approche de ma voiture tranquillement. Je glisse ma clef dans la serrure quand une voix me fait sursauter.

- J'ai cru que tu étais malade !

Je me retourne et voit Baptiste appuyé contre la portière d'une vieille 205. Il fume une cigarette d'un air décontracté.

- Heu, salut. Pourquoi malade ?

- Bah ça fait deux jours que tu n'es pas venue...

- Ah. Oui, en fait c'est mon planning qui veut çà. Tu sais quand je travaille le week-end, je me repose en semaine...

- Ah, ok ! Oui, en même temps ça semble logique. Et bien, je suis content de voir que tu vas bien.

- Heu, merci.

- Tu fais quoi tout de suite ? demande-t-il en écrasant sa cigarette sous son pied.

- Je rentre chez moi.

- Tu es attendue ?

- Non, pourquoi ?

- J'aimerai bien t'inviter à boire un verre, histoire de faire connaissance, me dit il dans un sourire éblouissant.

Prise au dépourvu, je sens mes joues s'empourprer. Je dois bien avouer que durant ces deux derniers jours j'ai souvent repensé à lui et à ce contact bref mais plutôt agréable sur ma peau. Voyant que je ne réponds pas, il reprend.

- En tout bien tout honneur. On dira que c'est pour me faire pardonner de t'avoir bousculé.

- Et bien d'accord, on fait ça quand ? dis-je d'une voix un peu cassée.

- Maintenant. Suis moi, je t'emmène dans un petit bar sympas en centre ville.

Il fait le tour de sa voiture et monte dedans sans attendre ma réponse et démarre sa voiture en me faisant signe de faire de même. Je monte dans la mienne et démarre. Il roule assez vite et j'ai un peu de mal à le suivre. Il s'engage dans une petite rue et trouve rapidement une place. Heureusement, il y en a une pas loin pour moi. Je me gare et prends quelques instant pour remettre de l'ordre dans mes cheveux. Je prends également le temps d'envoyer un message à Marie pour qu'elle ne s'inquiète pas puis je sors rejoindre le beau blond qui attend en me regardant d'un air intrigué.

- Ça va ?

- Oui, oui, pardon. Je me recoiffais un peu histoire de ne pas te faire honte !

- Honte de quoi ? Tu es superbe.

Je rougis sous le compliment.

- Je croyais que tu n'étais pas attendu ?

- Oh ça ! dis-je en montrant mon téléphone. Je préviens juste ma colocataire pour ne pas qu'elle s'inquiète.

Il sourit et me fait signe de le suivre. On marche côte à côte en silence, je suis un peu gênée car j'avoue qu'il m'intimide un peu. Il me sourit et je me sens tout de suite plus légère. Il m'indique un bar qui se situe pas loin et une fois arrivé à la terrasse il tire une chaise et me fait signe de m'asseoir. Je prends place en posant mon sac à main par terre pendant qu'il s'installe en face de moi. Rapidement une serveuse vient prendre notre commande.

- Tu veux quoi ? s'informe Baptiste.

- Un coca grenadine s'il vous plaît.

- Et un Whisky coca merci, conclut Baptiste sans même un regard pour la fille.

Il me regarde avec un sourire de plus en plus énigmatique.

- Quoi ? dis-je en souriant à mon tour.

- Rien. Je cherche à mieux te connaître...

- Sans me poser de question ça va être dur !

- Pas forcément. Il suffit juste d'être attentif ! Je sais déjà que tu es jeune et très jolie, que tu es timide car tes joues deviennent rose très facilement, comme maintenant. Je sais que tu travailles dans une maison de retraite et que même dans ton pyjamas d'aide soignante tu es très jolie et c'est pas mon grand-père qui dira le contraire. Et je sais également que tu as une petite super cinq bleu nuit et que tu as une colocataire. Ah et j'oubliais, tu dois être gourmande ou avoir un sérieux problème avec le sucre pour boire du coca avec de la grenadine !

Je souris en l'entendant me dire tout ce qu'il a remarqué sur moi.

- Tu es très observateur ! Mais je n'ai pas de problème avec le sucre. Mais j'avoue avoir un penchant pour le Coca grenadine. Et j'ai choisi ça ce soir car je n'ai pas encore mangé et j'ai peur de te faire une hypoglycémie sévère.

En entendant ça il blémit un peu.

- Tu n'as pas mangé ? Pourquoi tu ne me l'as pas dit ?

- Je n'ai pas eu le temps. L'après-midi a été un peu hard. Mais ce n'est pas grave.

- Un peu quand même.

Alors que la serveuse dépose nos verres sur la table, il lui demande :

- Vous avez de quoi manger ? Style tapas.

- Oui.

- Vous pouvez me donner la carte s'il vous plaît ?

- Bien sûr.

Elle repart ravie que ce beau blond lui ai enfin jeté un regard.

- C'est pas grave tu sais. Je peux rester sans manger, ça ne me dérange pas.

- Hors de question. Je transforme mon invitation à boire un verre en repas en tête à tête. On sautera juste une étape dans l'ordre des choses ! dit-il un sourire en coin.

On commande notre assiette de tapas puis nous sirotons notre boisson en nous regardant dans les yeux. Le silence qui nous entoure est plutôt agréable et j'attends que notre repas arrive avant de prendre la parole.

- Bon je ne suis pas sur d'être très bonne observatrice.

- Il paraîtrait que non. répond-il en riant et en me faisant signe de manger.

Je pique une petite pomme de terre avec ma fourchette et je reprends.

- Te moque pas de moi. J'ai fermé les yeux le jour de ton concert, c'est pour ça que je ne t'ai pas reconnu au bar. Et pour ma défense, j'ai trouvé les paroles et la musique tellement belle que j'ai voulu m'en imprégner un peu plus en me mettant dans mon monde.

- J'avoue que j'ai trouvé ça bizarre. D'habitude les filles se pressent devant la scène mais toi, tu étais là, les yeux fermés, en train de danser.

- Tu m'as vue ?

- Je n'ai vu que toi ! D'ailleurs c'est pas anodin si je suis venu moi même au comptoir récupérer l'eau. Malheureusement, je n'ai pas pu rester trop longtemps car les gens commençaient à me reconnaître et je ne voulais pas être trop dans la foule. Je m'étais fait une raison de ne pas te revoir et puis lorsque je t'ai revu le lendemain, je me suis dit que c'était un signe ! Tu crois aux signes ? demande-t-il subitement.

- Je ne sais pas trop.

Il me sourit tout en se servant une tranche de pâté.

- Et donc, tu n'as rien remarqué d'autre chez moi ?

- Oh si. Ton grand-père est dans la maison de retraite ou je travaille et c'est mon patient préféré mais ne lui le dit pas ! dis-je en lui faisant un clin d'oeil.

- Je resterai mué. Il m'a demandé d'en faire de même pour lui ! dit-il l'air espiègle.

Je me redresse sur ma chaise, me rapprochant un peu de Baptiste et lui demande :

- Tu en as trop dit !

- Et donc je peux rajouter à ta liste curieuse !

- je voulais juste vérifier qu'il ne t'ait pas dit de bêtise...

Sa main glisse sur la table et se saisit de la mienne. Immédiatement une sensation de chaleur parcours mon bras et paradoxalement me provoque un frisson.

- Tu as froid ?

- Non. J'ai juste été surprise.

- Tu ne souhaites peut-être pas que je te prenne la main. Désolé j'ai tendance à être un peu direct.

- Ça ne me dérange pas.

Il me regarde amusé et satisfait de ma réponse. Son pouce effectue de petit cercle dans la paume de ma main. Soudain nous sommes interrompue par la voix aiguë d'une fille qui s'invite à notre table brusquement.

- Tu ne serais pas Baptiste le chanteur des "BOP" ?

Baptiste lâche instantanément ma main et sourit à la jeune femme un peu gêné.

- Oui.

- Oh ! J'adore ce que vous faites. Je peux avoir un autographe ? Et faire un selfie ? Oh mon dieu quand mes amies vont savoir ça !

- Heu oui.

Il tend la main pour se saisir du stylo que la fille lui donne en gloussant et signe un autographe sur la serviette en papier devant lui. Puis la fille se penche sur lui et le prend par le cou afin d'être le plus proche de lui pour faire son selfie. Elle appuis à plusieurs reprise sur le bouton pour être sur d'avoir une photo correct puis elle se redresse en le remerciant. Quand elle s'éloigne de notre table, il la regarde partir un peu perplexe. Il se passe la main dans les cheveux un peu gêné et un lourd silence retombe entre nous deux.

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