21 Victoire

- Tu vas bien petite ?

- Oui merci monsieur Riera et vous, comment allez-vous aujourd'hui ?

Je continue de faire son lit tout en l'observant du coin de l'oeil. Assis dans son fauteuil, les deux mains appuyées sur sa canne, il se tient droit tel un monarque sur son trône. Ses cheveux gris savamment coiffé sur le côté, la chemise boutonnée jusqu'au dernier bouton. Il a fière allure et je devine sans mal le jeune homme qu'il était. Je regarde son visage et je constate que son regard bleu, semblable à celui de son petit fils, est braqué sur moi. Il me met mal à l'aise et je finis par rompre le silence qui s'est installé dans la chambre. Je me redresse, après avoir fini de faire le lit au carré et je lui dis :

- Monsieur Riera, vous rêvez ?

- Et toi ?

- Tout de suite non ! Je suis bien dans la réalité. Alors qu'est ce qui ne va pas ? Je vous trouve pensif depuis quelques jours.

- T'as des nouvelles ?

- De qui ?

- Oh ne me prend pas pour un idiot ! Je sais très bien que tu fricotes avec mon petit-fils !

Il me lance ça tout en nous mimant avec ses index, comme le font des enfants dans une cours de récréation, en émettant des petits bruits pour simuler des bisous. Cela me fait rire et je réponds en rougissant :

- Monsieur Riera !

- Ça va ! Je ne suis pas né de la dernière pluie ! Alors, tu as de ses nouvelles ?

- Oui. Il m'appelle dès qu'il peut et sinon, il m'envoi des messages. Pourquoi ? Il ne vous appelle pas ?

- Si, si. Régulièrement. Mais je trouve que tu as une petite mine alors je m'inquiète.

- C'est gentil Monsieur Riera, mais ça va. Je trouve juste le temps un peu long. Ça va faire trois semaines maintenant qu'ils sont partis...

- C'est pour la bonne cause.

- Oh oui, je sais. Je suis contente pour eux. Mais il me manque.

Tout en parlant avec lui, je me suis assise sur son lit et je lui tiens la main. Il me regarde avec tendresse et exécute une petite pression de sa main sur la mienne avant de me dire.

- D'après ce que j'ai compris, ils avancent vite. Il ne devrait plus tarder a revenir.

- Oui, c'est ce qu'il m'a dit. La maison de disque a aimé tout leurs titres. Du coup ils sont passé immédiatement à l'enregistrement. Et d'après Baptiste ils vont vite pour enregistrer les morceaux, très probablement parce qu'ils les connaissent par coeur...

- C'est ce que j'ai cru comprendre.

- Bon c'est pas tout ça mais je dois continuer, sinon je vais me faire rouspeter par vos voisins de chambre.

- Quelle bande de vieux grincheux ! gromelle-t-il alors que je quitte sa chambre.

Un peu plus tard, je me rends au vestiaire. La journée de travail est finie et je dois bien avouer que je n'en suis pas mécontente. Tout en me dirigeant vers ma voiture je consulte mon téléphone pour voir si j'ai des messages. Au moment ou je m'assoie derrière le volant, je vois apparaître le nom de Baptiste ainsi que sa photo sur mon écran.

- Allo.

- Salut belle brune. Ça va ?

Mon coeur palpite en l'entendant. Il a le don de me mettre dans tous mes états même à distance et j'adore çà !

- Mieux depuis que j'entends ta voix !

- Pourquoi ? Y a un problème ? s'alarme-t-il immédiatement.

- Oui ! Tu me manques.

Je l'entends rire de l'autre côté du combiné. Je l'imagine aisément se frotter les cheveux tout en ayant son joli sourire en coin.

- A moi aussi tu me manques. Et d'ailleurs, je croise les doigts depuis ce matin.

- Tu vas les déformer. Ça risque de ne pas être évident de jouer de la guitare avec les doigts tordu, si tu veux mon avis.

- Dis-moi que tu ne travailles pas ce week-end et je les décroise.

- Je ne travaille pas de la semaine si tu veux tout savoir. J'ai eu des repos.

- Alors je ne te laisse pas le choix ! Viens me rejoindre à Paris. Tu me manques trop et puis on va faire notre première scène.

- Quoi ?

- Le producteur croit à fond en nous et il veut qu'on joue dans une émission ce week-end. Je veux que tu sois là !

- Oh mon dieu ! Ça y est ! Tu te rends compte ?

- Franchement... Non. J'ai du mal à réalisé. J'ai besoin de toi pour ça. Tu peux être là quand ?

- Bin je travaille encore demain matin et après je suis disponible.

- Génial alors demain soir tu es dans mes bras !

Je n'arrive plus à parler tellement je suis émue, excitée et heureuse à la fois. Des larmes coulent sur mes joues. Je les essuie d'une main tremblante. Mon coeur tambourine dans ma poitrine et heureusement que je suis assise car j'ai les jambes qui flageollent.

- Vic, je dois te laisser. On se voit demain. Envoi moi l'heure d'arrivée de ton train que je puisse venir te récupérer. J'ai hâte de te voir tu sais, dit-il d'une voix basse presque innodible.

Il coupe la communication avant même que je n'ai le temps de lui répondre, si bien que je me demande même si je n'ai pas tout rêvé.

Une fois à la maison, je guette les horaire des trains et en trouve un qui part à quinze heure de Clermont-Ferrand pour une arrivée à Paris à vingt heure si tout va bien, avec la SNCF rien n'est moins sûr. Je valide le billet tout en faisant ma valise. Je regarde mon armoire un peu dépitée. J'ai l'impression que tout mes vêtements sont nul. Un coup d'oeil à l'heure m'indique que j'ai encore le temps de faire rapidement les boutiques, à la recherche d'une tenue plus sympas que ce que j'ai déjà.

*****

Assise dans le train, je regarde défiler le paysage. Les arbres commencent déjà à se parer de leur couleur d'automne et j'adore cette saison. Celà fait déjà quatre heure que je suis assise dans le train et je trouve le temps long. J'essaie de lire un peu pour passer le temps mais je n'arrive pas à me concentrer. Déjà ce matin, alors que je donnais une douche à une résidente de la maison de retraite je me suis fait disputer.

- Vous comptez me laver les cheveux combien de fois ma petite Victoire ?

- Pardon ? lui ai-je répondu surprise.

- Ça fait déjà deux fois que vous me lavez les cheveux !

Sans m'en rendre compte, j'ai recommencé son shampoing. Après m'être excusée j'ai fini sa toilette en essayant de me concentrer un peu plus.

Mais maintenant que je n'ai plus rien d'autre à penser qu'à Baptiste, j'avoue que je ne tiens plus en place. Un nouveau coup d'oeil à ma montre m'indique qu'il c'est seulement écoulé trois minutes depuis la dernière fois ou j'ai regardé l'heure. Dépitée, je me cale au fond de mon siège et tente de fermer les yeux en me concentrant sur ma respiration.

Une musique retentit dans le compartiments

- Paris gare de Lyon. Pensez à récupérer vos bagages...

Je bondis de mon fauteuil tout en regardant ma montre. Vingt heure cinq ! J'ai sûrement du finir par m'endormir. Je sors de ma place tout en récupérant mon sac de voyage, que j'avais réussi à glisser au dessus de mon siège, puis je me dirige vers la porte du train en pestant intérieurement après les gens qui n'avance pas assez vite mais également après moi. Si je ne m'étais pas endormie, je me serai préparée et j'aurai quitté ma place bien plus tôt afin d'être la première à descendre du train.

Quand enfin je descends sur le quai, je pose mon sac par terre et réajuste ma veste et mon sac à main tout en regardant autour de moi pour commencer à chercher Baptiste. Avec tout ça, je n'ai pas pu le prévenir que mon train était à l'heure. Ne le voyant pas, je commence à avancer parmis le flot des voyageurs en direction du hall de gare.

Et puis soudain, je le vois. Il est au bout du quai et son regard va de la foule des voyageurs aux fenêtres du train. Il est magnifique. Je prends le temps de m'arrêter quelques instant pour savourer ce moment volé. Il porte un pantalon en jeans bleu clair et une veste en cuir noir que je ne lui connais pas mais qui lui va a ravir. Sa coupe de cheveux a changé et des mèches blondes lui passent devant les yeux, lui donnant l'air mystérieux. Il donne un légé coup de tête en arrière par moment pour dégager sa vue, ce qui le rend encore plus canon. N'y tenant plus et ne rêvant que d'une chose, être dans ses bras, je cris son prénom bien plus fort que ce que je voulais. Les gens autour de moi se retournent surpris mais je n'en ai rien à faire. Mes yeux braqués sur Baptiste, je me mets a courir pour le rejoindre alors qu'il tourne la tête dans ma direction. Quand il me voit, un sourire illumine son visage et il se met également à courir vers moi, poussant des gens au passage qui se trouvent sur son chemin.

J'ai l'impression de vivre la scène au ralentit, comme dans les films. Ou peut-être que c'est mon sac qui m'empêche d'aller plus vite ? Ni une, ni deux, je le jette par terre tout en continuant ma route pour rejoindre Baptiste. Quand enfin la distance me semble correcte, je fais un bond en avant pour finir ma course dans ses bras. Il me réceptionne en douceur et me plaque immédiatement contre son coeur. Ses mains serrent mon dos comme pour m'empêcher de m'enfuir, alors que je ferme les yeux tout en écoutant les battements de son coeur qui cogne à tout rompre à l'intérieur. Doucement, il se décale de moi et pose une main sous mon menton pour me faire lever la tête. Son regard sonde le mien alors que j'enroule mes bras autour de son cou et que je me hisse sur la pointe des pieds pour pouvoir l'embrasser.

Ses lèvres sur les miennes sont encore plus douces que dans mes souvenirs. Trois semaines sans se voir, finalement c'est super long. Mes oreilles bourdonnent et mon coeur s'affole encore plus. J'ai l'impression que tout tourne autour de moi. J'ouvre les yeux avant de défaillir et je me rends compte que ce n'est pas une impression ! Tout tourne autour de moi ! Mes pieds ne touchent plus terre et Baptiste tourne sur lui même en me tenant serré contre lui. Son sourire démontre son bonheur de m'avoir retrouver et je rie aux éclats de bonheur. Ma poitrine semble bien plus légère que ces derniers jours, preuve que la mélancolie avait prit le dessus sur moi. Monsieur Riera avait bien vu juste hier matin !

Quand enfin Baptiste me repose au sol, les gens autour de nous applaudissent ! Je suis un peu gênée lorsque je constate que tous les voyageurs qui marchaient autour de nous se sont arrêtés pour admirer nos retrouvailles. Baptiste passe sa main dans ses cheveux en souriant mal à l'aise et m'entraîne vers mon sac pour le récupérer, avant qu'une patrouille de police ne vienne le faire exploser pour bagage suspect dans la gare. Les gens autour de nous reprennent rapidement le cours de leur vie et c'est bras dessus, bras dessous que nous sortons de la gare. Baptiste me fait grimper dans un taxis tout en indiquant l'adresse de son hôtel au chauffeur et nous voilà parti dans les rues de Paris !

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