Chapitre 7: Brisée


Adrien regardait son téléphone incrédule. Il était pourtant resté avec l'impression que la jeune fille s'intéressait à lui. Nino lui avait même dit qu'elle était folle de lui et Alya avait clairement raconté qu'elle ne pouvait pas sentir l'acteur. Que s'était-il passé depuis? Avait-il été si décevant dans la soirée de vendredi? Non, Marinette n'était pas ce genre de fille. Les messages textes ne valaient rien de bon. Tant pis, il devait savoir.

« Plagg, on va faire un tour. »

Adrien marchait les mains dans les poches en se demandant, encore une fois, ce qu'il allait pouvoir dire à la jeune fille. Plagg restait silencieux, le gamin n'était pas d'humeur et il ne pouvait pas lui donner de réponses; l'adolescente agissait réellement de façon étrange.

Lorsqu'il arriva à la boulangerie, Tom à la caisse le salua brièvement avant de le diriger derrière le comptoir. Quand Sabine vit Adrien faire irruption dans la cuisine, la surprise la laissa sans voix.

« Bonjour Mme Cheng. »

« Adrien... bonjour. S'il y a bien quelqu'un que je ne m'attendais pas à voir. »

« Ah bon? »

La chinoise se reprit. « Mais tu sais que tu es toujours le bienvenu. J'imagine que tu viens voir Marinette? »

« Oui, elle est là? »

« Bien sûr, elle est dans sa chambre. Tu connais le chemin? »

« Oui merci. »

Quand on frappa à la trappe de sa chambre, Marinette s'attendait à n'importe qui d'autre que le modèle. Lorsqu'elle vit apparaître la tignasse blonde, elle figea. 

Bien que mal à l'aise, le garçon se disait qu'il n'avait rien à perdre. Revoir la jeune fille était une obsession pour lui. D'autant plus que la situation semblait plutôt ambigüe entre eux.

« Adrien? Mais... qu'est-ce que tu fais ici? »

« Mari, je sais que tu m'as dit de ne pas venir mais je ne tenais plus en place tout seul. Je ne comprends pas. Je pensais que tu avais peut-être des sentiments pour moi mais là... je suis perdu. Qu'est-ce qui se passe Mari? »

Marinette ne savait plus quoi dire, où regarder, quoi faire de son corps. Elle s'assit sur sa chaise et regarda ses pieds. Adrien vint prendre place à côté d'elle.

« Je sais que je suis difficile à suivre Mari mais tu dois comprendre que j'avais des réflexions à faire et j'en suis venu à la conclusion que je ne supporterais pas de te perdre. »

« Et l'autre fille? »

« Tu n'as pas à t'inquiéter pour ça.  Je te le promets. »

Marinette aurait voulu le croire mais elle avait encore des doutes. De toute façon, c'était impossible. Cédrick allait détruire la relation au moment où il en aurait connaissance.

« Adrien, il est trop tard. Je ne peux pas... J'ai accepté une sortie avec Cédrick. »

« Si ce n'est que ça, je peux m'en charger, il ne te tournera plus autour. »

« NON NON, ne fais pas ça. J'ai dit oui. Je voulais cette sortie. »

« Je ne te crois pas. Tu ne me regardes même pas dans les yeux. »

Ils restèrent en silence un instant puis il lui demanda d'un ton suppliant: « Mari... regarde-moi. »

Très très doucement, elle releva la tête et ses yeux rencontrèrent celle du garçon de ses rêves. Juste par ce regard, il le savait. C'était écrit dans ses yeux, son cœur n'appartenait pas à Cédrick. Il se pencha lentement, l'enlaça et l'embrassa. Elle se sentit fondre dans ses bras. Avant même d'être consciente de ce qui se produisait, elle lui retourna son baiser. Ils passèrent un bon moment ainsi à s'embrasser, se caresser, agir comme le couple qu'ils devraient être. Mais quand il resserra l'étreinte et laissa s'échapper un soupir de soulagement, elle le repoussa.

"Je suis sérieuse Adrien, ce n'est pas possible." Chacune de ses paroles la blessait profondément. Si ce n'était pas de cet acteur à la con, sa vie serait parfaite. Enfin, elle avait celui qu'elle désirait depuis toujours; enfin, il retournait ses sentiments. Mais Cédrick ne les laisserait pas être heureux. Il les tourmenterait jusqu'à ce qu'il ait ce qu'il veuille. Il ferait emprisonner Adrien à nouveau dans sa cage dorée et non seulement, elle ne le reverrait plus, mais il ne reverrait plus aucun de ses amis les plus chers. Il redeviendrait solitaire, dans une vie sans affection, sans plaisir, que lui et les quatre murs de sa chambre, les photographes et les professeurs de chinois.

"Mari, dis-moi ce qu'il y a. Tu ne peux pas me mentir. Ton regard m'a déjà tout dit. S'il te plaît, si c'est parce que tu as des doutes sur moi, je te promets, je ne veux que toi."

Les paroles du jeune homme lui faisaient plus de mal que de bien. Il était encore plus parfait qu'elle n'aurait jamais espéré. Elle aurait voulu se blottir dans ses bras, tout lui avouer et se faire consoler. Mais c'est lui qui écoperait, elle ne pouvait pas être aussi égoïste.

"Adrien, s'il te plaît, n'insiste pas. Va t'en."

"Mari... je..."

"Va t'en Adrien."

Il tourna douloureusement le dos à Marinette. Il ne comprenait pas. Tout aurait dû être parfait. Les baisers de la jeune fille l'avaient convaincu. Mais pourquoi ses paroles disaient-elles le contraire? Son cœur le torturait au moment de franchir la trappe de la chambre. Chaque pas dans les escaliers, alourdissait son esprit. Sabine ne manqua rien de la douleur sur le visage du jeune homme alors qu'il quittait la chambre de sa fille.

"Adrien, mon garçon, qu'est-ce qui se passe?"

Automatiquement, il fit appelle à ses talents d'acteur et lui sortit le sourire qu'il servait à tous les photographes. "Oh rien, madame Cheng, tout va bien. Passez une belle soirée."

Il quitta rapidement car il ne savait pas combien de temps il pourrait jouer la comédie.

Alarmée, Sabine monta immédiatement à la chambre de sa fille et sans surprise, la trouva en larme.

"Marinette ma chérie, s'il te plaît, dis-moi ce qui se passe."

La demoiselle était inconsolable alors qu'elle s'abandonnait dans les bras de sa mère.

"Marinette, je suis là. Je ne te dirai pas de ne pas pleurer. Pleure ma chérie si ça te fais du bien. Maman est là."

Elle embrassait la tête de sa fille, la serrait le plus fort qu'elle le pouvait.

Les sanglots de l'adolescente alertèrent rapidement Tom qui venait de rentrer dans la maison après avoir fermé la boutique. Il se pointa dans la chambre de sa fille avec un air intrigué et fût totalement déstabilisé de la voir aussi démontée.

"Marinette, ma puce, qu'est-ce qui se passe?"

Il alla rejoindre les deux femmes de sa vie et les enferma dans une étreinte puissante. Sabine n'en pouvait plus de se sentir inutile.

"Marinette, c'est Adrien, il t'a fait du mal?"

À travers les larmes et les sanglots, la jeune fille avait toute les misères du monde à s'exprimer. "Non.... maman... Adrien... c'est moi... maman... j'ai pas pu dire oui..."

"Oh Mari, je ne comprends pas ma chérie. Une chose à la fois. Tu aimes Adrien?"

L'adolescente hocha la tête.

"Est-ce qu'il t'aime aussi?"

Une fois de plus, elle hocha la tête.

"Et vous n'êtes pas ensemble."

Elle fit non de la tête.

"Pourquoi?"

"Maman... je... je ne peux pas... maman...s'il te plaît..."

"D'accord ma chérie, je ne poserai plus de question ce soir."

Sabine fit un regard désespéré à son mari. Elle ne savait pas quoi faire Sa fille était visiblement déchirée et Adrien avait l'air tout aussi malheureux mais aucun des deux ne voulaient parler. Elle conseilla à sa fille d'aller se laver. Après la douche, elle voulu la convaincre de manger un morceau mais ses efforts furent vains. Au moment d'aller au lit, Sabine accompagna sa progéniture et resta à ses côtés jusqu'à ce que sa respiration régulière lui indique que le sommeil avait gagné. Lorsqu'elle rejoint son mari, elle était épuisée.

"Sabine, qu'est-ce qui se passe d'après toi?"

"Je ne sais pas Tom, mais Adrien ne semblait pas plus heureux qu'elle lorsqu'il est parti."

"Je n'aime pas ça... tu crois que c'est son père?"

"Peut-être. J'espère que non."

Adrien rentra chez lui très lentement. Il n'avait pas le goût de retrouver sa prison. Il n'avait pas le goût d'être seul.

Dans le repère du Papillon, la fenêtre s'était ouverte mais il hésitait. Son attention était tournée vers ces deux cœurs brisés susceptibles de nourrir ses maléfiques akumas. Mais, il n'en était pas capable. Il y avait des limites à ce qu'il oserait faire dans sa quête de pouvoir et akumatiser son propre fils était totalement hors de question. Il se détransforma et tomba à genou au sol. La fenêtre se referma.

À peine était-il entré dans sa chambre qu'il ne souhaitait qu'en sortir. Il voulait la revoir, il voulait comprendre. Mais elle ne voulait rien entendre et surtout, rien dire. Ce n'était pas Marinette. La jeune fille qu'il connaissait était joyeuse et toujours admirablement gentille avec les autres. Mais là elle lui avait paru triste et elle le repoussait sans explication alors qu'elle n'en avait visiblement pas envie.

"Plagg, transforme-moi!"

Il voulait la voir. Il ne pourrait peut-être pas lui parler, la tenir dans ses bras ou avoir des explications, mais si simplement la voir pouvait lui apporter quelques réponses que ce soit, il n'avait rien à perdre.

Il se percha sur le toit en face de la boulangerie de façon à avoir une vue acceptable sur la fenêtre de la jeune fille. Elle était là, dans toute sa détresse, entourée par l'amour de ses parents. Était-ce lui qui lui avait fait si mal? Il se rappela les paroles de Sabine. "S'il y a bien quelqu'un que je ne m'attendais pas à voir." Qu'est-ce que ça voulait dire? Sabine en savait-elle plus que lui?

Finalement, tout cela ne lui apportait que d'autres questions. Il rentra chez lui et après plusieurs heures d'insomnie, finit par s'oublier dans le sommeil.

Le lendemain matin, Marinette descendit déjeuner en agissant comme si rien ne s'était produit la veille. En se réveillant, elle avait pensé longuement et décidé de ne pas se laisser abattre par la situation. Elle finirait par trouver une solution et pouvoir ultimement tout expliquer à Adrien.

À cause de Cédrick, un autre secret s'ajoutait à la longue liste de Marinette. Elle avait développé un certain talent à gérer ce genre de situations et par réflexe, les solutions semblaient s'articuler autour de la présence de Chat Noir. Elle avait beau retourner les options dans sa tête, l'image de son coéquipier était omniprésente. En parlant de tout cela à Tikki, cette dernière lui avait conseillé de suivre son instinct.

Sabine regarda sa fille avaler son déjeuner d'un air absent en pinçant les lèvres. Les évènements de la veille étaient fraîchement imprimés dans sa mémoire. Elle avait tenté de discuter avec sa fille à tête reposée, mais Marinette refusait obstinément d'en parler.

Après avoir rassuré sa mère pour la nième fois, l'adolescente empoigna son sac à dos et quitta pour l'école. À l'avance pour une deuxième journée d'affilée, elle décida d'aller attendre ses camarades dans sa classe. Pour se vider un peu l'esprit, elle sortit son carnet et se mit à dessiner. Elle oublia rapidement où elle se trouvait et fût sortit abruptement de sa bulle par sa meilleure amie qui déposa lourdement son sac à côté d'elle.

"Hey ma belle, tu vas enfin te décider à me donner des explications?"

"Bonjour à toi aussi Alya."

"Ne change pas le sujet de conversation. Tu n'étais pas l'ombre de toi-même hier et tu n'as répondu à aucun de mes messages. Tu ignores Adrien et tu arrives à l'avance deux jours de suite en plus d'accepter une sortie avec Cédrick. Je crois que j'ai droit à des explications non?"

"C'est pas aussi simple que ça."

"De quoi tu parles, on est des meilleures copines. Les meilleures copines ça se dit absolument tout non?"

"Sauf si c'est le secret de quelqu'un d'autre. "

Alya perdit un peu patience. "Arrête de me mener en bateau, je sais que ça ne dépend que de toi. Adrien et Nino savent quelque chose mais Nino m'a dit que ça devait venir de toi. Alors? J'attend... "

Marinette réfléchit un instant. Évidemment qu'Adrien avait raconté l'histoire à Nino. Mais jusqu'où s'était-il rendu? Est-ce que Nino connaissait les développements de la veille?

"Bon... mais je ne peux pas te raconter cela ici, comme ça. On ira déjeuner chez moi et je te dirai tout d'accord?"

Alya hocha la tête et s'assit en silence aux côtés de sa meilleure amie. Elle était toujours un peu en colère que Marinette lui cache des choses qu'Adrien avait cru bon raconter à Nino. Elle leva la tête pour voir qui arrivait dans la classe et aperçut Cédrick adresser un clin d'œil à Marinette. En passant près d'elle, il se pencha et lui chuchota quelque chose à l'oreille.

Alya le regarda rejoindre sa place avec une mauvaise impression. Puis, reconnaissant la voix de son copain, elle se tourna pour l'accueillir avec un sourire. Alors que Nino et Adrien arrivaient à leur place, ce dernier s'éternisa un instant devant Marinette qui le regardait avec un air un peu angoissé. Le jeune blond vint pour ouvrir la bouche mais il changea d'idée, poussa un soupir et s'installa en silence.

La journaliste n'avait rien manqué et ne pût s'empêcher de réagir. "C'était quoi ça?"

Marinette lui chuchota. "Shhh Alya, on en reparle tantôt."

Nino n'avait rien manqué non plus. "Hey Mec, ça va?"

"Ouais t'inquiète."

"Tu fais une de ces têtes. Tu as reparlé avec Marinette?"

Adrien hocha la tête.

"Et..."

Cette fois-ci le blond secoua la tête.

"Merde mon pote, je sais pas quoi dire. Elle a sauté un plomb Marinette ou quoi?"

Incapable de prononcer un seul mot, le modèle ne fit qu'hausser les épaules avant d'appuyer sa tête dans ses mains en préparation à une longue journée d'école.

Sur la table d'à côté, c'est Lila qui avait tout compris. Adrien lui filait entre les doigts et elle n'aimait pas cela du tout. Marinette ne pouvait-elle pas se contenter d'avoir Cédrick? Elle jeta un œil à sa compagne de table qui sortait ses affaires. Depuis le début de l'année, elle avait développé un semblant de relation avec la fille du maire, mais c'était encore fragile. « Et puis tant pis » se dit-elle. Elle voulait Adrien et elle l'aurait. Même si elle devait sacrifier l'amitié naissante avec Chloé, sa seule option était une alliance avec l'acteur.


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