Chapitre 2: Chapitre 1
Notes : Voilà. Comme promis, j'ai mis celui-là assez rapidement pour que vous puissiez mieux juger. Excusez-moi s'il vous semble un peu lourd, mais c'est essentiellement de la mise en place de décor. Cependant, je me suis bien amusée à écrire la dernière scène… Vous remarquerez peut-être des noms qui vous semblant familiers parmi les personnages que j'invente. C'est que j'ai très peu d'imagination pour les noms, et il m'arrive parfois de prendre le nom de famille d'un auteur ou d'un personnage de livre que j'aime beaucoup ou qui est assez connu pour compenser. On va voir si vous arrivez à les dépister !
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Chapitre 1 : Où un intrus décide de mettre des bâtons dans les roues du temps.
Harry reprit progressivement conscience au son de chuchotements lointains. Comme il avait pris l'habitude de le faire, il resta parfaitement immobile, gardant la même respiration calme et tâchant de ne pas contracter un seul muscle. Son esprit devint progressivement plus clair, et sa première inquiétude fut de s'assurer qu'il pouvait percevoir chaque partie de son corps normalement. Une vérification mentale lui apprit que seul son dos était légèrement douloureux. A la réflexion, ce n'était pas vraiment illogique, car d'après ce qu'il pouvait sentir, il était couché sur une surface assez dure.
Les chuchotements qui l'avaient réveillé étaient trop bas pour qu'il puisse les comprendre, mais les voix étaient indubitablement humaines. Elles ne possédaient ni cet accent nasillard qu'arboraient celles des gobelins, ni la profondeur détachée de celles des centaures, l'accent servile des elfes de maison, la gravité rocailleuse des nains ou la légèreté musicale des elfes des bois. Quand au grondement d'apocalypse qui sortait de la bouche d'un géant... eh bien, d'abord, qui avait jamais vu un géant chuchoter ?
Donc, il était couché sur une surface dure - probablement le sol - et à proximité d'un groupe d'humains. Ce qui ne voulait pas dire grand-chose.
Sachant qu'il ne pouvait pas rien faire d'autre, Harry entreprit d'ouvrir les yeux. Les personnes semblaient se tenir à quelques mètres, et avec un peu de chance, ils ne regarderaient pas dans sa direction. Ses paupières étaient à peine entrouvertes qu'il savait déjà où il était. La lumière sans cesse changeante, semblable à des éclats de diamant, ne pouvait pas être confondue avec une autre, comme il s'en était fait la réflexion à peine une heure auparavant.
Il était encore dans la Chambre du Temps.
Cette constatation lui fit ouvrir tout à fait les yeux. Incrédule, il scruta ce qui se trouvait dans son champ de vision sans bouger aucun autre muscle. Pas de doute, c'était bien la même salle. Se pouvait-il que la Tablette n'ait pas marché ? Mais pourtant cette vague de puissance... Et puis, pendant qu'on en parlait, où était-elle la Tablette ?
Résolu à découvrir le fin mot de l'histoire, il fit savoir aux personnes alentour par un très léger grognement et un vague mouvement qu'il revenait à lui. Aussitôt, les conversations cessèrent. Harry referma à demi les yeux et tourna lentement la tête de leur côté. Il eut la surprise de se retrouver face à une demi-dizaine de baguettes dressées.
" Qui êtes-vous ? Et comment êtes-vous arrivé ici ? "
Harry se donna le temps de scruter ses interlocuteurs. Ils portaient tous l'uniforme des Langues de Plomb - une robe grise sans aucun ornement - mais pourtant il ne connaissait aucun d'entre eux. Il fronça les sourcils. En tant qu'Auror, il était souvent amené à côtoyer les préposés au Département des Mystères, il connaissait donc un certain nombre d'entre eux personnellement, et la plupart de vue. Pourtant, ceux-là ne lui disaient rien. A part peut-être ce jeune homme aux sourcils proéminents et à la tignasse brune en désordre. Mais non, ce ne pouvait pas être Geoffroy Simons ! L'homme avait la quarantaine bien sonnée.
" Si vous ne répondez pas, nous nous verrons dans l'obligation de vous confier aux Aurors ! "
Brusquement ramené à la réalité, Harry leva les yeux sur le sorcier à l'avant du groupe. Il avait l'air prêt à mettre sa menace à exécution. Or, Harry ne se souciait pas vraiment d'être arrêté par ses propres collègues, cela aurait fait un peu désordre. Et puis, après tout, s'il voulait savoir ce qui s'était vraiment passé, il allait falloir que les Langues de Plomb consentent à éclairer un peu sa lanterne.
Mais c'était tout de même bizarre qu'ils ne l'aient pas reconnu du premier coup, étant donné le nombre de journaux et magazines qui avaient déjà porté sa photo en couverture...
" Je m'appelle Harry Potter. "
Il s'arrêta pour observer leur réaction. Le sorcier qui lui parlait ne fit que froncer les sourcils.
" Vous êtes de la parenté de George Potter ? "
Harry fut déconcerté. Quoi, c'était tout ? Ils ne savaient donc pas qu'il était le Survivant ? De plus, c'était bien la première fois que quelqu'un l'interrogeait sur sa parenté. Harry avait profité de ses études d'Auror pour jeter un coup d'œil sur son arbre généalogique au Ministère, il savait donc que son grand-père paternel s'était appelé Georges.
" Euh... oui " répondit-il donc.
" Je n'ai jamais entendu parler d'un Harry parmi les Potter " fronça encore plus les sourcils l'autre. " Vous devez être d'une branche éloignée... "
Harry le fixa avec incrédulité. Il allait répliquer quand le Langue de Plomb continua :
" Mais ça n'a pas d'importance, cela ne nous dit pas ce que vous faites ici et comment vous êtes entré. "
Harry allait répliquer " Par la porte " dans une tentative de gagner un peu de temps pour organiser ses pensées - ce qui, somme toute, était tout à fait vrai - quand son regard se posa de nouveau sur le jeune sorcier qui ressemblait tant à Simons. Avant d'avoir pu se contrôler, sa confusion lui avait fait posé la question :
" Excusez-moi, mais qui êtes-vous ? "
Le jeune sorcier eut l'air aussi surpris que son supérieur - Harry avait déduit que c'est ce que le type aux sourcils froncés était -. Il chercha d'un regard son accord, que l'autre lui donna, l'arcade sourcilière plus basse que jamais.
" Euh... je m'appelle Geoffroy Simons. "
Les pensées de Harry se figèrent, puis repartirent en un tourbillon de plus en plus confus. Sentant le mal de tête poindre, Harry se passa les mains sur le visage.
'C'est vraiment Simons' tenta-t-il de raisonner calmement. 'Mais plus jeune que là d'où je viens. Ce qui voudrait dire que...'
" Est-ce que vous allez enfin... ? " commença le supérieur de Simons, mais Harry ne le laissa pas continuer.
" S'il vous plaît " dit-il par-dessus lui, relevant la tête. " S'il vous plaît... pourriez-vous me dire quel jour nous sommes ? "
Cette fois-ci, les sourcils étaient baissés dans leur pente maximum, ce qui eut l'air de contrarier encore plus le sorcier.
" Le 14 août, mais je ne vois pas ce que ça... "
" Quelle année ? " le coupa-t-il encore.
" Quoi ? "
" Le 14 août de quelle année ? "
Pensant manifestement qu'on se fichait de lui, le vieux sorcier se redressa de toute sa taille, prêt à beugler quelque chose. Mais Simons-le-jeune avait l'air impressionné par l'air sérieux de l'étranger.
" 1978 " répondit-il.
Le type se retourna vers lui et il se fit tout petit, bégayant des excuses. Mais Harry ne les écoutait déjà plus. Le 14 août 1978. Vingt-neuf ans jour pour jour avant qu'il ne pénètre pour la deuxième fois dans la Chambre du Temps avec l'intention de changer le monde.
Alors c'était ça ? Modifier le passé pour reconstruire l'avenir ?
'Mais comment pourrais-je changer le passé quand je n'ai pas même idée de ce qu'il était réellement ?' s'interrogea-t-il. 'Une minute !'
Une pensée avait soudain traversé son esprit comme un éclair. Il y avait quelque chose qu'il connaissait à environ cette époque ! Et il voulait certainement le changer. Avec un effort de mémoire, il tenta de se rappeler la date de naissance de ses parents qu'il avait trouvé dans le même arbre généalogique traitant du grand-père Georges. 1961 ! Mais alors ses parents avaient actuellement dix-sept ans !
Hagard, il se rendit compte de ce que cela voulait dire. Il pouvait changer les choses. Empêcher le rat de trahir ses parents, ce qui reviendrait à empêcher leur mort, l'emprisonnement de Sirius, la solitude de Remus... C'était déjà assez énorme, mais il avait également la possibilité d'empêcher une guerre ! Sauver la vie de milliers de gens... Cette réalisation était si énorme qu'un vertige le saisit, et il crut qu'il allait s'évanouir. Se pourrait-il qu'il puisse changer le cours de la vie de toutes ces personnes qu'il aimait et qui lui avaient été arraché ?
Finalement, le sens pratique qu'il avait acquis au cours de toutes les épreuves qu'il avait traversées et au contact de tous les sages qu'il avait côtoyés le fit revenir sur terre. Il ne pouvait pas juste partir d'ici en courant pour aller annoncer à tout le monde ce qu'il devait faire pour éviter sa mort ou un destin misérable. D'une part, cela changerait probablement tellement de choses, que de mauvais évènements arriveraient inévitablement quand même dans le lot, et que cette fois il ne pourrait plus les empêcher. Il ne pensait pas vraiment qu'il puisse retrouver la Tablette afin d'avoir une troisième chance... Et puis de toute façon, il était assez douteux de penser que toutes ces personnes croiraient sans problème quelqu'un qu'il voyait pour la première fois et qui leur annonçait qu'il connaissait leur avenir...
Et c'était autre chose, aussi : toutes ces personnes qu'il aimait ne le connaissait même pas ici...
Retournant finalement sur terre, Harry prit conscience que tous les sorciers présents dans la pièce continuaient de le regarder fixement, à part Simons junior et Mr Je-fronce-les-sourcils.
'En fait, ce n'est pas seulement les personnes que j'aime..., songea-t-il pensivement. Personne ne me connaît. Et j'aurais beaucoup de mal à circuler dans le monde sorcier sans au moins une personne, de préférence influente, qui sache à quoi s'en tenir avec moi - à supposer même que je pourrais ne serait-ce que sortir du Ministère. Conclusion, je dois en parler à quelqu'un.'
Comme il en arrivait là, il remarqua que le vieux sorcier commençait à se diriger vers la porte - probablement pour envoyer chercher des Aurors -.
" Je viens du futur. "
Il s'arrêta net à mi-chemin, puis se retourna.
" Je vous demande pardon ? "
" De l'an 2007, pour être exact " continua-t-il imperturbablement. " George Potter, dont vous avez parlé tout à l'heure, est mon grand-père. "
Les Langues de Plomb s'étaient tous immobilisés.
" Vous espérez que je gobe ça ? "
" Non. "
Harry rencontra son regard et l'accrocha.
" J'ai besoin que vous gobiez ça. "
Dix minutes plus tard, Harry était assis dans le bureau de son interlocuteur, qui, d'après la plaque sur la porte d'entrée, avait pour nom Antony Eddings. Les quatre autres Langues de Plomb avaient été dispersés, avec ordre de ne parler de ça à personne. Eddings lui-même paraissait plongé dans des pensées très profondes.
Harry s'était contenté de lui dire comment il était arrivé ici - ou plutôt 'maintenant' -, mais avait refusé de dévoiler les raisons qui avait pu pousser les hommes de son temps à se résoudre à l'utilisation de la Tablette. Il avait simplement ajouté qu'il était là pour changer le futur, et qu'il entendait bien en faire ainsi puisqu'il n'y avait de toute façon pas de retour en arrière possible, la Tablette de la Seconde Chance n'existant probablement même pas, sans parler d'avoir été trouvée. A présent, il attendait patiemment ses conclusions.
Finalement, le Langue de Plomb releva la tête.
" Vous attendez donc de moi que je réponde de vous auprès de toute personne qui serait amenée à vous poser des questions gênantes ? "
" En effet. "
Eddings fronça une nouvelle fois les sourcils.
" Très bien, mais il faudrait que j'ai déjà moi-même confiance en vous. Qui me dit que vous n'êtes pas un Mangemort ? "
Il fit une pause, puis ajouta d'un air circonspect :
" Vous savez ce qu'est un Mangemort, je présume ? "
Harry se rembrunit.
" Oui, malheureusement, je ne le sait que trop bien " marmonna-t-il. " Ecoutez, je ne peux pas vous apporter de preuves absolues que je n'ai rien à voir avec Voldemort et que je ne voudrais jamais rien avoir à faire avec lui... "
Eddings se trémoussa sur sa chaise, mal à l'aise à la prononciation du nom du Seigneur des Ténèbres. A cette époque, la crainte que l'on avait de ce simple mot avait l'air minime, mais les graines de la peur étaient déjà plantées. Charitablement, Harry fit semblant de n'avoir rien remarqué et continua :
" ... Mais je peux au moins vous dire qu'à mon époque, je suis... étais... Auror. "
" Auror ? " s'exclama-t-il. " Vous êtes bien jeune. "
" Je venais de terminer ma formation et de passer les examens depuis quelques mois quand je suis parti. "
" Humm... "
Eddings retomba dans sa réflexion.
" Je ne pense pas que vous vous prêteriez à une interrogation au Véritaserum... "
" Il faudrait que j'ai moi-même confiance en vous pour cela. Les informations en ma possession pourraient causer d'énormes dégâts si elles étaient mal utilisées. "
" Oui, j'imagine cela. "
Il poussa un léger soupir.
" Ne pouvez-vous donc pas penser à un homme en qui vous ayez toute confiance et qui serait déjà adulte à cet époque ? Un homme qui pourrait accomplir cette interrogation si nous le mettions au courant ? "
" Il y aurait bien un " répondit pensivement Harry. " Malheureusement, cet homme ne peut pas être mis au courant, car je compte essayer de changer sa destinée à lui aussi. "
" Pourrais-je connaître le nom de cet homme, par simple curiosité ? "
Harry le fixa, méditatif.
" Albus Dumbledore " lâcha-t-il finalement.
" Le directeur de Poudlard ! "
" En effet. "
Eddings l'observa, tentant de décider s'il disait la vérité.
" C'est un nom très prestigieux que vous citez là. Vous le connaissez donc bien ? "
Harry sourit légèrement.
" Oui, très bien. C'était un peu mon mentor. "
Son sourire s'effaça et il haussa tristement les épaules.
" Mais de toute façon, le Albus de cet époque ne pourrait pas même me reconnaître. "
Le fait que Harry appelle le très prestigieux directeur de Poudlard par son prénom semblait avoir grandement ému le Langue de Plomb.
" Eh bien, je suppose que nous ne pourrons pas nous assurer de votre loyauté en vous gardant enfermé ici, de toute façon " dit-il au bout d'un moment. " Je vous propose ceci : je présente votre candidature au poste d'Auror. Officiellement, vous viendrez d'un pays lointain - l'Australie, par exemple - où vous aurez déjà subi les années de formation nécessaires. Nous pourrions parvenir à vous trouver tous les formulaires dont vous aurez besoin d'une manière ou d'une autre. "
" Et officieusement ? "
" Officieusement, j'avertirais mes supérieurs que l'affaire qui vous concerne est tout simplement de trop d'importance pour quitter notre Département - après tout, c'est à ce genre de choses qu'il sert, n'est-ce pas ? Garder des informations à l'abri de la connaissance publique - parce qu'ils ne seront pas tous dupes de nos manœuvres et que de toute façon nous aurons besoin de leur aide. "
Harry savait qu'il ne lui avait pas tout dit. Eddings ne pouvait pas se permettre de le lâcher dans la nature sans aucune surveillance, simplement parce qu'il prétendait avoir été très proche d'une des grandes figures du monde sorcier et qu'il avait l'air sérieux et honnête. S'il passait les examens d'Auror, il devrait très certainement s'attendre à ce que les missions qu'on lui confierait dans un premier temps ne seraient pas d'une grande importance afin qu'il n'y ait pas de conséquences trop graves s'il décidait de retourner sa veste. Il serait sans doute également surveillé par ses collègues, et il se pouvait qu'on lui tende des pièges pour s'assurer de ce qu'il en était vraiment.
Cela ne lui plaisait pas, et risquait sûrement de l'encombrer dans la tâche qu'il s'était imposé, mais il n'avait pas vraiment le choix. S'il refusait, il courrait le risque que les Langues de Plomb perdent patience et le forcent à prendre du Véritaserum, ou même simplement le fasse enfermer pour ne pas prendre de risques. C'était encore la meilleure alternative.
Harry soupira.
" Très bien " céda-t-il. " J'accepte. "
La discussion se poursuivit encore une bonne demi-heure. Les formalités qui permettraient à Harry de passer légalement l'examen d'Auror prendraient du temps et de plus, Harry ne pouvait évidemment pas se présenter sous sa véritable identité. La famille Potter était trop connue dans le monde magique pour qu'un membre supplémentaire lui pousse d'un seul coup sans être remarqué.
" Réfléchissez-y pendant les prochains jours " conseilla Eddings. " De toute façon, nous ne pourrons pas commencer tout de suite la procédure, donc nous vous ferons savoir quand cela sera possible. "
" Ce qui signifie que vous me laissez sortir du Ministère ? " devina Harry.
" Oui. Nous ne pourrions pas vous garder ici sans éveiller l'attention, de toute façon. Mais bien sûr, nos agents vous surveilleront. "
Harry inclina la tête en signe d'assentiment. Il ne s'était pas attendu à autre chose, et avait même été plutôt étonné qu'on l'en avertisse. Cela pouvait vouloir dire que si Eddings devait par métier se méfier des gens, il était plutôt enclin à croire son histoire et son honnêteté. Bon à savoir.
" Où comptez-vous loger ? " interrogea le supérieur des Langues de Plomb.
" Probablement au Chaudron Baveur, sur le chemin de Traverse " lui répondit-il.
" Vous avez de l'argent ? "
" Oui, sans problème. J'ai amené ce qu'il me fallait. "
Il tapota la sacoche qui était restée à son côté durant son voyage temporel et gisait maintenant près de sa chaise.
'Heureusement que j'ai eu ce réflexe au moment du départ' songea-t-il avec soulagement.
Il n'aurait pas aimé devoir quémander... et laisser toutes ces objets précieux derrière lui en sachant qu'il ne les reverrait jamais lui aurait été douloureux.
" Très bien " conclut finalement Eddings. " Je pense que nous en avons fini pour aujourd'hui. Vous savez comment sortir du Ministère ? "
" A moins qu'il n'ait fondamentalement changé en une trentaine d'années, je pense que je devrais arriver à m'y retrouver. "
" Eh bien, dans ce cas, au revoir. "
Harry se leva et ils se serrèrent la main. Comme l'ex-et-futur-Auror se dirigeait vers la porte, Eddings le rappela :
" Oh ! Et Mr Potter ? "
Harry se retourna.
" Rappelez-vous s'il vous plaît que vous n'avez pas encore le droit de transplaner, ici. "
Harry grimaça.
" C'est juste. Merci du rappel. "
" De rien. C'est moi qui serait enlisé jusqu'au cou pour vous tirer de là si vous êtes attrapé pour ça. "
Harry sourit, puis ouvrit la porte et sortit. Le long couloir qu'ils avaient suivi à l'allée le ramena à la Chambre du Temps. Jetant un dernier regard alentour, Harry gagna la sortie et atteint la large salle circulaire qu'il avait déjà vu trop de fois à son goût. Comme d'habitude, la porte s'était à peine refermée que les murs et toutes les autres issues qu'ils supportaient se mirent à tourner à une vitesse folle autour de lui. Harry préféra fermer les yeux, évitant d'être à moitié hypnotisé par les bougies à la lueur bleue qui dansaient la sarabande autour de lui.
Quand enfin tout mouvement cessa, Harry rouvrit les yeux et regarda autour de lui. Derrière une de ces portes était la Chambre de la Mort. Où est-ce qu'elle n'existait pas encore ? Harry était persuadé que si. Il se força à s'arracher à ses souvenirs.
'Sirius n'est pas encore mort. Je peux le sauver. Mais ça ne me donnera rien de rester ici.'
" La sortie, s'il vous plaît " prononça-t-il tout haut.
Une porte à sa porte s'ouvrit toute seule sur le long couloir bien éclairé qui menait aux ascenseurs du Ministère de la Magie. Harry dépassa un petit escalier dans le mur, se souvenant avec nostalgie de la hâte avec laquelle Mr Weasley et lui l'avaient emprunté le jour de son conseil... Mais ici, ils ne l'avaient pas encore dévalé... Agacé de devoir sans cesse se rappeler à l'ordre, Harry appela énergiquement l'ascenseur et écouta les cliquètements de machinerie se rapprocher de lui. Dès que les grilles s'ouvrirent, il s'engouffra dans la cabine. Deux sorcières discutant dans un coin lui jetèrent un coup d'œil surpris avant de retourner à leur conversation. Trois ou quatre mémos inter-département passaient et repassaient devant la lampe accrochée au plafond.
Harry s'appuya contre le mur et attendit patiemment la remontée.
" Atrium " annonça la voix de femme qui resterait inchangée, même trente ans après.
Les grilles dorées s'écartèrent, et Harry dut se rappeler que c'était là qu'il descendait et non pas au Niveau Deux, où se trouvait auparavant son bureau. Le hall d'arrivée et de départ du Ministère était presque désert. Une horloge apprit à Harry qu'il était onze heures du matin. La grande affluence du début de journée était donc terminée.
Presque automatiquement, Harry se dirigea vers les grandes cheminées du côté gauche de la pièce où un petit groupe de personnes partaient Dieu sait où par la Poudre de Cheminette. Une petite baffe mentale plus tard, il maudit sa négligence et se dirigea vers le fond de l'Atrium et l'entrée des visiteurs. Seuls les employés du Ministère pouvaient employer la Poudre de Cheminette pour arriver ici, et il n'en était plus un.
'Ou est-ce que je dois dire pas encore ?' s'interrogea-t-il.
Sentant la migraine ressurgir en force, Harry jeta à peine un coup d'œil à la fontaine massive plantée au milieu de la salle. Il avait oublié que cette vieille chose idiote n'avait pas encore été détruite par le combat entre Dumbledore et Voldemort à la fin de sa cinquième année.
En fait, il y avait beaucoup de choses qu'il avait oubliées, et c'est bien cela qui l'ennuyait.
'Il va falloir que je sois plus attentif, ou je n'aurais pas besoin de Véritaserum pour me trahir...'
Il atteignit rapidement la sortie des visiteurs, et bientôt il se trouvait dans la vieille cabine de téléphone défoncée habituelle. Un regard autour de lui lui apprit que cette rue n'avait pas beaucoup changé non plus, à part peut-être qu'il y avait moins de graffitis sur le mur près de la cabine et qu'ils étaient moins effacés. En dehors de cela, elle avait toujours l'air aussi déserte.
'Parfait' songea-t-il.
Il leva sa baguette en un geste ample. Dans une pétarade, un énorme bus violet à trois étages se matérialisa juste à côté de lui, et il ne dut qu'à ses réflexes de sauter à temps en-dehors de sa route. Le Magicobus freina d'un coup sec et s'immobilisa tant bien que mal. La porte s'ouvrit aussitôt et un homme d'âge mur en sauta :
" Bienvenue à bord du Magicobus, transport d'urgence pour... "
" Merci, merci, je sais " le coupa Harry. " C'est combien pour aller au Chaudron Baveur ? "
" Cinq mornilles, mais avec deux mornilles de plus, vous avez droit à un sandwich au choix et... "
" Merci, mais il est encore un peu tôt pour le déjeuner " décréta Harry en lui fourrant la somme indiquée dans la main.
" Très bien, comme vous voudrez ! " accorda le sorcier sans se vexer. " Par ici ! "
Il le fit monter au deuxième étage, le premier étant déjà plein. En passant, Harry eut un coup d'œil vers le chauffeur et reconnut Ernie Danlmur, celui qui tenait encore ce poste trente ans après.
'Eh bien' se dit-il, résigné, 'au moins je sais à quoi m'attendre...'
Le contrôleur lui désigna une chaise libre au fond du deuxième étage.
" Voilà ! Au fait, c'est quoi votre nom ? Moi, c'est John Sensunic ! "
Harry se demanda vaguement si tous les contrôleurs du Magicobus étaient taillés sur le même modèle, excessivement enthousiastes et bavards, ou si John avait un lien de parenté avec Stan Rocade, le contrôleur de son époque.
Puis il chercha un nom qu'il pourrait adopter. Il avait pensé y réfléchir plus tard, mais évidemment il n'avait plus vraiment le choix, surtout s'il devait un jour réemprunter le Magicobus. Son esprit tourna dans le vide un moment avant de faire son choix. Un nom assez commun pour que faire des recherches généalogiques deviennent compliquées, et qu'il ne soit pas tenu de connaître tous les membres de sa nouvelle famille...
" Harry Davies " répondit-il.
Harry se cramponna fermement au mur durant tout le trajet, évitant ainsi d'être propulsé pied par-dessus tête à chaque saut impromptu du Magicobus comme beaucoup de sorciers prêts de lui l'étaient. Du reste, le voyage ne fut pas très long, le Ministère et le Chaudron Baveur se trouvant tous deux à Londres.
Harry se trouva donc bientôt déposé devant le vieux pub miteux qui servait d'entrée au Chemin de Traverse.
" Au revoir, Mr Davies ! " cria John avant de refermer la porte. " Nous espérons que vous reviendrez ! "
'Uniquement si je n'ai pas le choix' se promit intérieurement Harry tout en répondant au signe d'adieu du contrôleur.
Dès que le bus violet eut disparu dans un autre " bang " mémorable, Harry se retourna et entra dans le pub. Tom, le vieux gérant, n'avait pas beaucoup changé en trente ans, si ce n'est qu'il avait pris quelques rides de plus. Harry réserva une chambre au nom de Davies, se fit donner la clé et monta déposer ses affaires. Il décida de ne pas vider sa sacoche, qui contenait des objets un peu trop différents de ce que l'on avait l'habitude de voir ici - comme par exemple, son vieil Eclair de Feu, soumis à un sortilège de réduction de taille. A son époque, plusieurs balais de qualité supérieure avaient été mis en vente, mais c'est ce balai que Harry avait tenu à emporter, puisqu'il s'agissait d'un cadeau de son parrain.
Il déposa donc la sacoche au pied de son lit sans y toucher, s'empara de sa bourse et ressortit en fermant derrière lui. Harry avait encore plusieurs jours devant lui à attendre que Eddings lui fasse signe, il avait donc dans l'idée d'aller faire quelques emplettes. N'ayant emporté que le strict minimum, il allait bien falloir qu'il se munisse d'un peu plus.
Dans le couloir vers les escaliers, Harry aperçut son reflet dans le miroir. Une pensée traversa son esprit comme un éclair, faisant valser toutes ses autres préoccupations. Ca n'allait pas ! On lui avait toujours dit qu'il ressemblait beaucoup trop à ses parents. Or, s'il voulait changer leur destin, il allait bien falloir qu'il s'approche d'eux et de leur entourage. On remarquerait tout de suite leur ressemblance !
Harry s'examina critiquement dans le miroir. Ses cheveux avaient poussé depuis l'époque de sa scolarité. Dans une tentative désespérée pour cacher sa cicatrice - et aussi, il fallait bien le dire, pour essayer de les dompter un peu - Harry les avait laissé attendre ses épaules. L'air décoiffé inhérent aux Potter en avait un peu été diminué, et s'il pouvait simplement accentuer l'effet, cela pourrait passer. En revanche, ses yeux étaient toujours aussi verts que ceux de sa mère. Y réfléchissant quelques instants, il décida que des lentilles colorées moldues feraient parfaitement l'affaire. De plus, elles auraient l'avantage de corriger sa vue, et donc de ne plus l'obliger à porter des lunettes, autre caractéristique frappante des Potter.
Il ajouta donc mentalement à sa liste d'effets personnels urgents les lentilles et une bouteille de Pouss'Cheveux. Puis il sortit du pub et s'engagea sur le Chemin de Traverse.
Le centre commercial sorcier de Londres avait très peu changé en trente ans. Quelques boutiques avaient fermées, d'autres les avaient remplacées, mais dans la majorité les choses étaient encore là où il s'attendait à les trouver. Harry s'acheta en tout premier lieu les deux objets nécessaires à sa transformation physique. Il parvint même à trouver des lentilles correctrices qui changeaient également la couleur des yeux à " Bell'allure, boutique d'esthétique magique ". L'avantage des lentilles sorcières étaient qu'elles n'avaient pas besoin d'être changées : une fois posées, il n'y avait plus à s'en préoccuper. De plus, elles étaient bien plus pratiques à mettre que celles que l'on pouvait trouver chez les moldus.
Harry Potter se transforma donc en Harry Davies, yeux bruns et cheveux longs. Cette dernière caractéristique étant d'ailleurs légèrement gênante dans les mouvements, il partit à la recherche de n'importe quoi qui pourrait les tenir éloignés de ses yeux.
Ses achats d'urgence terminés, Harry s'accorda enfin un déjeuner tardif au Chaudron Baveur, puis décida qu'il passerait le reste de la journée, et probablement aussi les jours suivants, à se mettre au courant de la situation actuelle. Il aurait peut-être dû commencer à réviser pour ses examens d'Auror, mais de toute façon, la première fois, il les avait eu avec une relative facilité. Et puis, ils n'étaient pas si loin que ça derrière lui, donc...
Le message d'Eddings était en fait arrivé bien plus tôt qu'il ne l'avait prévu, ce qui l'avait empêché de mettre pleinement ses projets à exécution. Ses nouveaux abonnements à la Gazette du Sorcier et autres quotidiens n'avaient pu lui révéler que peu de choses, et ses discussions avec Tom lui avaient seulement fait comprendre que si Voldemort n'était pas encore au plus haut de sa puissance, ses actions étaient déjà redoutées de tous...
C'est sur cette impression que Harry se rendit à nouveau au Ministère et rejoignit le bureau d'Eddings. Le Langue de Plomb lui remit les papiers nécessaires à sa nouvelle identité ainsi que sa convocation aux prochains examens d'Auror. Par un coup de chance - du moins pour lui -, les examens de juin ayant été perturbés par une nouvelle attaque du Seigneur des Ténèbres, une session de rattrapage avait été prévue deux mois plus tard pour les postulants qui avaient dû se rendre aux funérailles de leurs proches et faire leur deuil.
Harry commença à nouveau à ressentir l'angoisse précédant les examens - dire qu'il s'était cru immunisé ! -, d'autant plus qu'il était parfaitement conscient que s'il ratait celui-ci, toutes les portes lui seraient fermées dans ce temps qu'il connaissait si mal... Il se remit donc à étudier les notions qui avaient commencées à s'effacer de sa mémoire en deux mois. Ce faisant, il commença à remarquer que sa bourse se faisait de plus en plus légère à mesure que sa petite chambre se remplissait de livres sur toutes sortes de sujets. Une rentrée d'argent n'aurait pas été de trop, même s'il avait emmené de quoi tenir environ deux mois. S'il se ramassait, il était vraiment fini...
Heureusement pour lui, il s'en tira une nouvelle fois avec les félicitations du jury, et sur l'impression qu'il s'était fait beaucoup de souci pour pas grand-chose... ce qui ne lui disait toujours pas comment il allait pouvoir changer le futur tel qu'il le connaissait.
Cependant, il avait manifestement beaucoup de chance.
Harry dut s'y prendre à plusieurs fois pour lire le premier ordre de mission qui lui avait été envoyé. Ce n'était pas possible ! Il devait y avoir une erreur quelque part...
Son tout nouveau supérieur lui annonçait qu'il allait, avec deux autres collègues, devoir assurer la protection de la très célèbre école de Sorcellerie et de Magie d'Angleterre : Poudlard.
D'après ce qu'il pouvait lire entre les lignes, Harry comprit que l'inquiétude de la population sorcière quand à la sécurité de sa progéniture face à la montée en puissance de Voldemort avait conduit le Ministère à faire un geste afin de calmer le souci populaire - et accessoirement, lui redonner un peu de confiance en ses dirigeants -. Le Ministre de l'époque, Philip Lewis, avait donc proposé à Albus Dumbledore trois Aurors afin de veiller sur l'école.
D'abord réticent, Dumbledore, qui voyait parfaitement clair dans les manœuvres du Ministre - trois Aurors pour veiller sur environ deux cents élèves, c'était un peu juste -, avait trouvé un compromis : il acceptait les trois gardes à condition qu'il ait droit de repousser un candidat qui ne lui conviendrait pas, et donc d'avoir un entretien avec chacun des Aurors. De plus, l'école ne disposant toujours pas de nouveau professeur de Défense contre les Forces du Mal, il avait souhaité que ces trois Aurors cumulent à leur fonction de gardien la responsabilité de ce poste, le répartissant comme il leur semblait bon.
Lewis avait accepté, bien qu'apparemment de mauvais cœur. D'après Harry, le Ministère avait compté se débarrasser de cette corvée en déléguant trois Aurors inexpérimentés et donc très peu utiles pour garder les plus efficaces sous la main afin de parer les prochaines attaques de Voldemort, ce que Dumbledore n'avait certainement pas laissé arriver. L'affaire était entendue et le directeur avait eu ses trois Aurors, lorsque l'un d'eux était tombé dans une mission particulièrement périlleuse, environ une semaine avant l'arrivée de Harry. Saisissant l'occasion, Lewis avait affirmé à Dumbledore qu'il ne pouvait déléguer personne d'autre, ayant besoin de tout le monde en ces temps difficiles.
Poudlard se serait donc contenté de deux Aurors, ce qui aurait été encore plus ridicule et inefficace que trois, si Harry n'était pas arrivé. Bien entendu et comme il s'y attendait, il avait été présenté aux supérieurs comme une recrue dont on savait peu de choses et donc potentiellement dangereuse. Lewis n'avait été que trop heureux de refiler le paquet mystère, qu'il soupçonnait d'être piégé, à son bon ami Dumbledore, prétextant que la seconde session de l'examen avait amené une recrue très prometteuse. Bien sûr, les résultats de Harry étaient supérieurs à la moyenne, mais il n'en restait pas moins un débutant. Dumbledore aurait sans doute souhaité le rencontrer comme les deux autres à l'avance, mais Lewis avait tout prévu : d'après lui, l'Auror Davies n'avait que très peu de temps pour se préparer à enseigner, et ne devait donc pas en perdre inutilement.
Dumbledore n'avait pas le choix.
Harry serra les dents jusqu'à les faire grincer de rage. C'était de la démence ! Depuis toujours, Poudlard était l'une des places les plus importantes de l'Angleterre sorcière. Nier ce fait dans une période pareille était suicidaire ! Si jamais l'école tombait devant Voldemort, le choc psychologique en serait terrible pour toute la population magique... Et le Ministre introduisait un élément qui pouvait se révéler dangereux à cet endroit précis ! Harry n'aurait jamais cru qu'il puisse exister un Minstre de la Magie plus idiot que Fudge, et pourtant, il se trouvait maintenant devant une preuve irréfutable qu'il s'était trompé. Même Fudge n'aurait pas fait une erreur pareille !
Toujours dans une rage sans pareille, Harry jeta un dernier coup d'œil à l'ordre de mission qu'il tenait froissé dans son poing serré, puis le relâcha. La feuille voleta un instant, puis, alors qu'elle allait toucher le sol, s'enflamma sans un bruit. Les ordres des Aurors étaient conçus pour disparaître sans laisser de trace lorsque leurs destinataires avaient pris connaissance de leur contenu.
Harry se leva brutalement du lit sur lequel il était assis et se dirigea vers son bureau. Le message précisait qu'il devrait assurer les cours des cinquième, sixième et septième années pendant que ses nouveaux collègues se partageaient les autres. Sans doute estimaient-ils qu'il valait mieux que " le bleu " se mêle le moins possible de leur travail de surveillance...
Mais Harry n'était pas d'accord. Il n'avait aucunement l'intention de se laisser faire, et il allait définitivement falloir que ses deux compagnons de devoir comprennent à qui ils avaient affaire... Mais d'abord, il avait des cours à préparer, et ça aussi, il avait bien l'intention de le faire correctement. D'autant plus - Harry frissonna d'excitation à cette pensée -, qu'il y avait de fortes chances pour que ses propres parents soient au nombre de ses élèves...
'Au travail !' se dit-il en s'installant, plein de détermination.
Harry sortit de Fleury & Bott avec un sac chargé de livres pour environ la sixième fois en dix jours. Celui qui aurait dû enseigner à sa place avait déjà choisi les livres qui lui seraient nécessaires, et Harry se voyait donc contraint de se servir de ceux-là puisqu'ils avaient été ajoutés à la liste des élèves, mais cela ne l'empêchait pas de compléter son programme par quelques autres acquisitions. Bien sûr, il savait déjà la plupart des choses que ces livres apprenaient, en tant qu'Auror et surtout en tant que Survivant, mais cela l'aidait beaucoup à structurer ses pensées.
Il remonta donc le Chemin de Traverse, l'esprit toujours à ses préoccupations de plans de leçons, sans prêter attention aux gens qui se retournaient sur son passage. Harry venait de se racheter plusieurs robes d'Auror chez Mme Guipure, et cet uniforme l'ayant toujours rendu très à l'aise, il était décidé à le porter au moins jusqu'à la rentrée de Poudlard. Seulement, le tissu pourpre orné du symbole argenté d'une baguette croisée avec une épée n'était pas particulièrement discret au milieu de la foule...
Depuis plusieurs jours, Harry avait remarqué un nombre croissant d'adolescents venus acheter les fournitures dont ils auraient besoin pour leur année scolaire. Cependant, aucun visage familier ne l'avait encore frappé, et il ne savait pas s'il devait s'en réjouir ou non. L'idée de rencontrer ses parents et leurs amis âgés de dix-sept ans lui faisait éprouver une excitation mêlée de crainte... Mais le hasard ne devait pas lui laisser voix au chapitre.
Alors qu'il dépassait la boutique de Florian Fortarôme, un adolescent passa en coup de vent près de lui. Surpris, Harry suivit des yeux ses longs cheveux bruns et le vit s'enfoncer à la hâte dans une ruelle entre deux boutiques. Déconcerté, il allait passer son chemin quand il lui sembla soudain entendre une voix de femme dans la foule.
" Où est-il encore passé, ce traître ? Cette abomination, cet... Il ne peut pas avoir disparu ! "
Harry se figea en entendant cette voix aiguë dont les accents furieux lui écorchaient les oreilles. Il était sûr de la connaître, mais d'où... ? Il scanna les environs et ses yeux se posèrent sur une femme d'âge moyen accompagnée d'un garçon d'environ quatorze ans.
" Mère, pourquoi perdons-nous notre temps avec lui ? " demanda l'adolescent d'un air ennuyé.
" Pourquoi ? Ne sois pas idiot, Regulus ! Ton frère doit savoir ce qu'il en coûte de trahir la maison des Black ! " rugit la femme.
Black ! Le nom résonna dans l'esprit de Harry comme un coup de cloche. Bien sûr ! Il se rappelait maintenant... Cette voix, il l'avait entendu tempêter dans le hall du 12, Grimmauld Place : c'était celle de la mère de Sirius, son parrain, et ce garçon n'était autre que son frère, Regulus Black. Alors l'adolescent de tout à l'heure...
Harry sortit de ses réflexions en voyant avec angoisse Mme Black, qui marmonnait des suggestions de châtiments plus terribles les uns que les autres, et son second fils avancer vers l'endroit où Sirius s'était caché. Dans quelques instants, ils allaient le voir. Un très léger mouvement dans les ombres de la ruelle lui fit comprendre qu'il n'était pas le seul à avoir remarqué. Il devait faire quelque chose, et vite...
Harry reprit son chemin à grandes enjambées, dépassa les deux Black et vint se poster tout juste entre la ruelle et eux. Là, il s'arrêta brutalement et fit semblant de regarder autour de lui, comme cherchant son chemin. La gorgone qui servait de mère à son futur parrain s'arrêta brutalement à son côté. Inquiet, Harry se tourna vers elle, seulement pour la voir contempler son uniforme. Devenue l'innocence même, Mme Black engagea la conversation :
" Excusez-moi de vous importuner monsieur l'Auror, mais en tant que représentant de notre très juste Ministère, vous aurez sûrement à cœur d'aider une brave citoyenne comme moi " dit-elle, la voix dégoulinante de miel.
Harry réprima une grimace de dégoût et répondit sur le même ton, sans pouvoir toutefois dépouiller sa voix d'une teinte d'ironie :
" Mais j'en serais enchanté, madame. Que pourrais-je donc faire pour vous ? "
" Je me demandais " dit Mme Black sans paraître remarquer le ton employé, " si vous aviez vu passé mon fils ? "
" Ce garçon à côté de vous n'est donc pas votre fils ? " feignit de s'étonner Harry.
" Oh si ! Et Regulus est un très bon fils " ajouta-t-elle avec un sourire de fierté.
Le garçon se redressa, fier comme un paon. Derrière lui, Harry entendit un très léger reniflement de mépris. Il retint de justesse un sourire. Mme Black continua en grimaçant :
" Malheureusement, on ne peut pas en dire autant de l'aîné. Ce bon à rien n'écoute jamais ce qu'on lui dit ! En réalité, il a fugué, voyez-vous, mais nous venons juste de l'apercevoir, et je me demandais si vous n'auriez pas vu quelle direction il avait pris ? Il a environ dix-sept ans, un peu plus grand que Regulus et des cheveux bruns qu'il s'obstine à garder longs... "
La femme leva sur lui un visage plein d'espérance, bien que ses yeux, plissés de malveillance, détonaient complètement. Harry qui avait pris un air faussement compatissant à l'écoute de ses malheurs, répondit d'un ton joyeux :
" Oh oui ! Je l'ai vu il y a peu de temps en effet... "
Un petit bruit lui apprit que Sirius s'était crispé à ces paroles.
" Il allait vers l'Allée des Embrumes " continua-t-il comme si de rien n'était.
" Vraiment ? "
Mme Black essaya de mimer une expression de gratitude infinie, mais la voracité qui se lisait maintenant dans ses yeux faussait définitivement tous ses efforts.
" Merci beaucoup, monsieur. Le pays devrait comprendre plus d'honnêtes hommes comme vous ! "
" Mais je vous en prie, madame " minimisa Harry d'un geste, tous sourires. " Ce fut un plaisir. "
Elle s'éloigna sur un dernier remerciement, traînant son fils dans son sillage. La suivant des yeux, Harry eut le temps de la voir se retourner vers Regulus, lui soufflant quelques mots qu'il parvint à lire sur ses lèvres :
" Quels naïfs, ces types du Ministère ! "
" Autant pour toi, vieille harpie " rétorqua-t-il entre ses dents serrées.
Un rire étouffé lui apprit que sa réplique n'avait pas été perdue pour tout le monde. Tournant sur ses talons, il vit son parrain de dix-sept ans se raidir sous son regard, puis ôter la main qui lui avait servi à retenir ses pouffements de sa bouche.
" Vous saviez que j'étais là " murmura-t-il, circonspect.
Harry le fixa un instant sans répondre, mesurant pleinement l'étrangeté de la scène. Il se tenait face à son parrain, encore mineur, qui était mort pour lui depuis cinq ans, alors que lui, Harry Potter, n'aurait même pas dû être encore né. L'absurdité de tout cela le frappa, et il se contenta de répondre, le sourire aux lèvres :
" Votre mère est quelqu'un de très désagréable, Mr Black. Je vous admire de l'avoir supporté jusqu'à votre fugue. "
L'appellation " Mr Black " et le vouvoiement lui semblèrent étranges sur la langue, mais Sirius se redressa et sourit :
" C'est vrai. Des fois, je me demande moi-même comment j'ai fait. "
Ils se sourirent mutuellement et restèrent un instant sans bouger. Puis quelqu'un appela " Sirius ! " et l'intéressé se retourna.
" Ah ! " dit-il. " Il faut que j'y aille. Encore merci, monsieur. J'espère qu'on se reverra ! "
" Mais je vous en prie, Mr Black. Bon après-midi. "
Harry le regarda s'éloigner vers un adolescent aux cheveux noirs en bataille que l'on apercevait difficilement à cause de la distance. Son cœur fit un saut périlleux arrière et il finit sa phrase pour lui-même :
" Nous nous reverrons plus tôt que tu ne le crois. "
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Le second chapitre est déjà prêt ! Ca ne tient qu'à vous.
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