Chapitre 8 - (1-2) J'ai fait un rêve...
Ce soir-là, je ne m'étais jamais sentie aussi excitée et anxieuse de ma vie. Comment la soirée pouvait-elle être plus parfaite qu'hier ? En sachant ce que j'appréhendais sur Mila... D'un autre côté, je n'étais pas censée pouvoir lire ce qu'il écrit, c'était très intrusif, comme si je pouvais voir ses pensées les plus secrètes à son insu.
Je laissai couler l'eau de la douche un long moment. Profite de l'instant présent Sofia... J'avais prévu une tenue de soirée pour le séjour. C'était l'occasion de mettre ma robe bustier, blanc et noir, avec un voile qui descendait aux dessous des genoux. Mes escarpins blancs enfilés, je tournai un peu devant le miroir de la salle de bains. J'avais attaché mes cheveux en une jolie tresse sur le côté avec un fin bandeau en strass pour sublimer le tout. Je me sentais belle, il me rendait belle. Je me sentais femme, il me rendait femme. Je souris à cette pensée. Quand je descendis l'escalier, je restai étonnée de le voir monter, il s'arrêta un instant sur la première marche.
— Sofia..., murmura-t-il.
Il fronça les sourcils et la lueur de ses iris s'embrasa.
— Allez, dépêche-toi, on a rendez-vous, je te rappelle et je veux ma surprise, prononçai-je un peu gênée.
Est-ce que j'en avais trop fait ? J'essayai de le dépasser. Il continuait à me fixer intensément, sans dire un mot, j'en avais le souffle coupé. Il pressa son corps contre le mien, jusqu'au moment où mes épaules se collèrent contre le mur froid du couloir. Il effleura délicatement le coin de mes lèvres avec le bout de son index puis descendit lentement le long de ma tresse avec le dos de sa main.
— Ash...
— Hum...
Toujours aussi loquace. Il continuait son exploration en posant ses doigts dans mon cou, sous mon buste, à la naissance de ma poitrine.
— Que j'aime voir, chère indolente, de ton corps si beau, comme une étoffe vacillante, miroiter la peau...
Je fermai les yeux et un mini rictus se dessina sur mes lèvres.
— Tu cites « Baudelaire » maintenant.
— Je plaide coupable, j'ai « les fleurs du mal » comme livre de chevet depuis le jour où nous trouvions devant le lac sauvage.
— Je te rejoins vite, murmura-t-il en regardant ma bouche s'entrouvrir pour lui répondre.
Il allait partir, mais changea rapidement d'avis. Il revint vers moi et m'embrassa ardemment. Son sourire, son baiser me laissèrent sans voix.
— Ensorcelante...
J'attendais dans la voiture, il l'avait gardée ouverte et les clés demeuraient sur le contact, toujours si prévenant. J'allumai la musique doucement. J'étais troublée, il me troublait. Je tombai sur une chanson que j'aimais beaucoup « Slow Slow » d'Ayo. Je fermai les yeux et fredonnai les paroles que je connaissais par cœur. Quand je me retournai Ash était assis au volant et me regardait, je sursautai la main sur ma poitrine.
— Tu m'as fait peur !
— Tu peux continuer, plaisanta-t-il.
La musique changea, la radio passait du Norah Jones.
Come away with me in the night Viens avec moi dans la nuit
Come away with me, and I will write you a song Viens avec moi, et je t'écrirai une chanson...
Il chanta le début en changea les dernières paroles.
— Je te jouerai une chanson, fredonna-t-il.
Il posa une main sur ma jambe. Mon corps répondit immédiatement et le suppliait de continuer ses caresses.
— C'est une promesse ? Tu m'interpréteras « Slow Slow » et « Come away with me » ?
— Est-ce que c'est une demande de concert privé, me taquina-t-il en souriant.
— Il faut croire que oui.
On arriva rapidement à destination, la maison à la porte rouge ne se trouvait pas bien loin. Il se gara devant chez lui et sortit pour m'ouvrir la portière.
— Ça aurait dû se passer comme cela. Après plusieurs sorties aux restaurants, au cinéma, je t'aurai proposé de venir boire un dernier verre chez moi, plaisanta-t-il.
— Pas de saut en haut d'une falaise ? Pas de descente en canoë ? Pas de bain de minuit à jouer à « je n'ai jamais » ? Ni de camping sauvage ? Et encore moins de première fois au clair de lune ?
Nous sourions aux souvenirs de tous ces moments-là. Comment les remplacer ?
Il me fit avancer vers l'entrée, sa main placée dans le creux de mes reins. Quand nous rentrâmes, je restai stupéfaite, les lumières étaient tamisées. Il avait décoré la cheminée de plusieurs bougies de différentes tailles. J'avais l'impression que le feu crépitait. Les deux canapés rouges en face à face avaient perdu leur table basse, le tapis blanc était au centre, avec un bac à champagne et quelques pétales de roses étaient parsemées dessus.
— C'est magnifique Ash, merci...
J'étais trop émue pour continuer, trop déboussolée aussi, comment pouvait-il réaliser cela et penser à une autre ? Il s'avança vers moi.
— Tout ce que tu as décrit à l'instant. C'était parfait Sofia, mais je voulais un moment avec toi, dans un endroit intime, une occasion moins insolite..., ajouta-t-il en faisant référence à notre première fois sur le ponton.
Il me prit la main et me dirigea vers le tapis. Je m'installai les jambes sur le côté. J'essayai de couvrir mes cuisses avec le voile de ma robe. Il me regarda un instant et s'assit à côté de moi. Je continuai à observer les lieux, troublée.
— Mon père a construit cette maison pour nos vacances à Seeley Lake. Il me l'a donnée depuis quelques années. Le reste du temps, je loue une villa à Missoula, sur le campus, avec deux colocataires. Damon que tu connais déjà et Tyler.
Il avait les yeux qui brillaient davantage lorsqu'il évoquait cette maison si particulière pour lui.
— Je sais que tu ne bois pas, j'ai du jus de fruits si tu préfères, me proposa-t-il.
— Un verre de champagne, c'est très bien.
Il alla dans la cuisine, nous servit et rapporta nos coupes et la bouteille.
— À cet été, susurrai-je en trinquant avec lui.
— À notre été...
J'étais incapable de dire si le champagne était bon ou pas, sa fraîcheur restait très agréable. Il se leva et ajouta :
— Je te dois un concert privé, j'imagine.
— Oui, même les derniers verres chez toi, tu ne sais pas les faire comme les autres, le taquinai-je.
Il s'assit sur une chaise de la cuisine, je me tournai vers lui. Il tapa sur son smartphone pour trouver les paroles et la mélodie. Les notes de Slow Slow résonnaient dans la pièce, je ne pouvais détacher mon regard du sien. Il enchaîna avec les deux chansons qu'ils avaient écrites sur mon carnet, Skatalites et Bill Whiter. Il n'avait pas besoin de les écouter, c'était les musiques qu'ils jouaient en ce moment, pour elle...
Je crois que pour une nuit, pour un instant, pour ce concert qui m'était consacré, je rêvais que ces paroles me soient destinées. Quand il finit les dernières notes de Bill Whiter, il posa son saxo sur le bar et prit mon stylo. J'étais en train de l'applaudir doucement et m'arrêtai net. Il s'avança vers moi.
— J'imagine que je te dois un autographe, dit-il tout en s'approchant.
— Oui, soufflai-je, mais il te manque une feuille non ?
Il sourit en faisant non de la tête.
— Bien trop conventionnel.
Il s'assit près de moi et m'embrassa tendrement, il me fit tomber sur le sol doucement et remonta sa main libre sur ma cuisse droite.
— Je peux ? demanda-t-il, en soulevant le voile de ma robe.
J'acquiesçai. J'appuyai mes coudes sur le tapis moelleux et le regardai, je n'arrivai plus à penser, le stylo, le carnet, peu importe. Il embrassa ma hanche comme la première fois, puis posa mon stylo sur mon flanc gauche. La bille noire parcourait ma peau. Je retenais un soupir, les derniers mots, il les inscrit sur le creux de ma hanche.
— Qu'est-ce que tu écris Ash ?
— Pour la fille aux rêves, sache que certains rêves méritent vraiment d'être réalisés, j'ai fait un rêve cet été, c'était toi... Ash.
— Merci, soufflai-je, pour le concert, pour ce mot, pour cet été avec toi.
— Reste cette nuit avec moi Sofia ? m'interrogea-t-il soudainement.
— C'est ce que l'on est en train de faire non ?
— Non, réellement, je veux dire, une seule, ensemble, même s'il ne se passe rien, reste.
Son regard me suppliait d'accepter.
— Non.
Il arrêta surpris et ne bougea plus.
— Non, il est hors de question qu'il ne se passe rien et oui, je reste avec toi.
Je sentis son corps se détendre et il me fit basculer sur le tapis. Il posa une main près de ma hanche. De l'autre, il vida son verre de champagne.
– À cette nuit. Je te promets qu'elle restera aussi mémorable que toutes les autres.
Je ne pus lui répondre que je n'en doutais pas une seconde lorsqu'il emprisonna sa bouche humide sur la mienne. Je ne pouvais que goûter le champagne fruité sur ses lèvres entrouvertes et me laissai aller dans ses bras experts.
Après, une nouvelle nuit à classer dans les inoubliables, je m'éveillai au son de son smartphone. Il avait mis son réveil vers cinq heures avant l'arrivée de Mario et Lorène au ranch.
Nous avions dormi sur le tapis du salon. Il avait pris un drap qu'il avait posé sur nous et je pouvais indéniablement dire que j'avais déjà dormi nu ! Je souris à cette idée, en repensant à la soirée avec mes amis. J'imaginai la tête de Juan. Mais tant pis pour le jeu, d'ailleurs, je n'aurai pas eu envie d'embrasser Juan. Je n'avais plus envie d'embrasser personne à part lui.
— Bonjour, qu'est-ce qu'il te fait rire ? demanda-t-il.
Il était tourné sur son côté droit et me regarda avec tendresse.
— Heu, bonjour, tu observes toujours les gens, le matin au réveil ?
— Non, je fais une exception pour toi, déclara-t-il le sourire espiègle.
— Tu es vraiment bizarre, il vaudrait mieux que j'y aille, Damon nous attend et toi tu dois partir.
Il souffla et posa son bras sur ses yeux.
— Qu'est-ce que j'ai dit ?
— La journée en Jet-ski. Nous en avons que trois à disposition. Vous allez être en binôme.
Pour une fois, c'est moi qui fronçai les sourcils sans comprendre.
— Tu vas devoir monter avec Damon. Je suis désolé de ne pas être là.
J'éclatai de rire. Ash envieux ? Vraiment ?
— Enfin, le problème est réglé, tu ne semblais pas trop partante de toute façon.
— Je pense que je vais tenter le coup !
— Tu fais ça pour m'énerver, Sofia...
Je levai les bras en l'air plaidant l'innocence, il se rua sur moi et plaqua mes mains au-dessus de ma tête.
— Tu montes avec Damon, c'est toujours moins risqué qu'avec Juan et tu te tiens aux poignets à l'arrière du scooter, ok ?
— Je crois que je me sentirais plus en sécurité si je m'accrochais à lui non ? le taquinai-je.
Il fronça les sourcils.
— Pourquoi je savais que tu allais répondre ça.
Il pressa ses lèvres sur les miennes, de manière possessive. Oui ! Certainement, et j'adorai cela.
Je pense sincèrement que l'on serait retourné au ranch bien plus vite s'il n'avait pas souhaité que l'on prenne notre douche ensemble. Décidément, c'était l'été des premières fois pour moi. Partager cette intimité était troublant, mais je me sentais tellement bien à ses côtés. On avait beaucoup de mal à se séparer ce matin-là quand il me raccompagna au ranch.
Je montai les marches jusqu'à ma chambre, le plus doucement possible. Je ressentais encore les effluves de son gel douche, le parfum délicat de l'huile d'onagre et la sensualité envoûtante de la fleur d'oranger. Je mis mes vêtements sur ma chaise et enfilai un tee-shirt, quand je vis l'inscription sur ma hanche... Je vous passe le détail de l'encre qui a coulé à cause de ma transpiration nocturne... hein !
J'ouvris immédiatement le carnet posé sur ma table de chevet, sa dédicace était notée sur le papier. Je souris, je l'avais mon autographe... Puis les couplets des deux chansons qu'il m'avait chantées, d'abord Norah Jones :
Come away with me and we'll kiss, on a mountaintop
Viens avec moi et nous nous embrasserons sur une montagne.
Come away with me, and I'll never stop loving you
Viens avec moi, et je n'arrêterai jamais de t'aimer...
Puis celle d'Ayo :
What have I become is that really me ?
Qu'est-ce que je suis devenue ? Est-ce vraiment moi ?
Look what I have done this is not who I wanna be
Regardez ce que j'ai fait, ce n'est pas qui je veux être.
Gotta free my mind get back my glow
Je dois libérer mon esprit pour retrouver ma lueur.
I got to go, yes I got to
Je dois y aller, oui je dois.
Run run run run run run, run for my Saoul
Fuir, fuir, fuir, fuir, fuir, fuir, fuir pour mon âme
I better go go go go go go
Je ferais mieux d'y aller...
Je repensai à cette nuit, à cette matinée près de lui, à ces notes contradictoires. J'étais déjà en retard et je n'arrivai vraiment plus à comprendre ses écrits. Ce dont j'étais sûr, c'est que Mila n'avait pas passé la soirée avec lui, cette fois-ci. Lorsque je descendis dans le salon, Damon me sourit et commença à nous expliquer comment la journée allait se dérouler. Nous étions tous attablés pour le petit-déjeuner et Ash devait être sur la route : « fuir, fuir... », mais pourquoi ?
Quelques images trouvées sur le net, qui m'ont inspiré les personnages d'Ash et Mila et bien sûr Sofia...
Brant Daugherty ( ASH)
Mélody Gardot ( Mila)
Kim Hidalgo (Sofia)
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top