Chapitre 3- (1-2) Calme et volupté

Le lendemain, la nuit trop courte ne m'avait pas spécialement porté conseil. Je préparai rapidement un petit sac avec une serviette et de la crème solaire même si je possédais la peau dorée, je voulais éviter les premiers coups de soleil. J'enfilai une robe bustier fluide, blanche avec des fleurs rose et taupe et des tongs beige clair simples. Les légères bretelles s'ajustaient à mes épaules fines, le reste du tissu en coton glissait sur mes hanches plus rondes. J'attachai mes longs cheveux lisses et noirs en un chignon déstructuré. D'habitude, ils me tombaient sur le visage à hauteur de poitrine. J'avais opté pour une délicate touche de gloss transparent avant de fixer mon reflet dans le miroir. Mes yeux en amande ébène brillaient, je me sentais pour une fois jolie. Je me trouvais enfin prête pour ma journée farniente.

Dans le salon, tout le monde était déjà d'humeur survoltée. Je croisai le regard de Juan et constatai qu'il avait également choisi la facilité. Il portait un tee-shirt blanc et un short de bain de toutes les couleurs. Je m'assis près de lui.

— Salut, comment s'est passée la soirée ? lui demandai-je.

Il me sourit et répondit aussitôt.

— Pas si mal, Valentina était plutôt sexy dans son petit legging moulant et je viens de la voir arriver en bikini rouge pour aller au lac. C'est pas mal aussi.

— Beurk, qu'est-ce que l'on a fait de mon meilleur ami ?

— C'est l'été Sofia, il faut en profiter, me taquina-t-il.

Ils s'étaient tous donné le mot ou quoi ? Bon, d'un autre côté, la réputation de Juan n'était plus à faire. Je pense qu'il avait décroché autant de conquêtes que ce que j'avais pu lire de livres et croyez-moi ou non, mais je lis énormément. Il avait toujours refusé les avances de Valentina, sachant que je ne l'appréciais pas. Elle avait fréquenté mon frère Alejandro et la supporter à cette période-là avait déjà été un supplice.

Enfin à l'air libre, Juan mettait à profit sa nouvelle philosophie en batifolant avec Valentina dans le lac. De l'eau avait coulé sous les ponts, on dirait. Je préférais rester à l'égard, il faisait un temps magnifique, le soleil me réchauffait l'ensemble du corps. Je rêvassais en songeant à Ash, je ne l'avais pas rencontré ce matin, il préparait son activité bien assez tôt.

J'entendis des rires et une atmosphère survoltée derrière moi. Je me retournai sur le ventre, les mains appuyées sur le visage et je le vis au loin avec un petit groupe d'adolescents. Il s'arrêta un moment, quand il croisa mon regard. Il ne me sourit pas, il semblait déçu et partit rejoindre les plus jeunes.

Si je voulais qu'il écrive avec mon stylo, j'allais devoir accepter son offre et sortir de ma zone de confort. Puis j'avais, je crois, tout simplement envie de faire sa connaissance. Mon corps entier avait besoin de le suivre maintenant qu'il l'avait rencontré, la sensation de sa main sur la mienne me revenait et je fermai les yeux un instant. J'avais également enfin de profiter de moments uniques avec Darkness.

— À quoi penses-tu, Sofia ? me questionna Naomi assise près de moi.

Isaac était parti se baigner avec Juan, je ne l'avais même pas vu se lever.

— Heu, à rien de particulier, mentis-je, comment ça va Isaac et toi ?

Je détenais le truc pour retourner la situation et passer de celle qui s'exprime à celle qui écoute. Naomi me sourit et ne put s'empêcher de me parler de son amour naissant pour Isaac. Nous étions amis d'enfance. Ils sortaient ensemble depuis quelques mois, lorsqu'il l'avait invité pour le bal d'automne. Elle restait complètement dingue de lui. Personnellement, je l'appréciais, il avait l'air de tenir à elle, mais sa réputation n'était pas à son avantage. Naomi m'avait confié qu'il se retrouvait souvent avec ses potes pour fumer de l'herbe et boire. Pourtant, si c'était quelque chose que je tolérais chez Juan, je demeurais moins indulgente avec les autres.

Lors du déjeuner, nous étions tous réunis dans la salle à manger. Je savourais mon burger en silence de mon côté pendant que Juan continuait son numéro de charme avec Valentina. Pathétique ! Il restait insortable, celui-là.

— Ils annoncent un après-midi assez chaud, si certains souhaitent passer ce temps-là au lac, l'initiation à l'équitation reprendra demain, proposa Ash à l'ensemble du groupe.

Les plus jeunes se désistèrent rapidement pour profiter des activités aquatiques.

— Moi, je veux bien, lançai-je.

Poussée par une adrénaline soudaine, je me surpris moi-même.

Juan se retourna l'air hébété. Ash me souriait étonné, lui aussi, waouh ! Juste pour ça, je ne regrettais pas.

— Heu... OK Sofia, mais si tu es toute seule, Ash va peut-être annuler la sortie, non ?

Merci, Emily, pour cette idée fantastique, Ash se trouvait forcément super-embarrassé, mais heureusement Naomi me sauva la mise.

— Je veux bien y aller aussi, et toi Isaac ? lui demanda-t-elle.

Isaac ne sembla pas emballer, mais être auprès de Naomi était sa priorité.

— heu... ouais, OK pour moi, marmonna Isaac, tout en continuant de manger son burger.

— D'accord, nous tâcherons de longer la rivière pour nous rafraîchir un peu, nous expliqua Ash. Je vous attends d'ici une heure dans les écuries.

Je ne m'en rendais pas compte, mais je revêtais un sourire béat sur les lèvres depuis plusieurs secondes. Juan me fusillait toujours du regard en télépathie comme Lily et Marshall dans leur scène culte. Je pense qu'il essayait de me dire : « mais tu es devenue folle, qu'est-ce qu'il te prend ? Où est passée ma froussarde de meilleure amie ? ».

Je décidai de monter à toute vitesse dans ma chambre pour éviter d'affronter les remarques de Juan. Je me changeai rapidement et descendis à l'écurie et me rendis compte par moi-même de ma folie. Darkness présentait déjà son encolure hors de son box, il me fixa immédiatement, avait-il reconnu mes pas ? Je m'approchai de lui doucement, il commença à hennir.

— Eh ! Salut ! Mon beau, j'ai confiance en toi, hein ! Surtout pas de galop improvisé.

J'en profitai pour l'embrasser sur le bout du nez.

J'entendis un bruit derrière moi, je vis Ash, les mains chargées d'une selle.

— Mon beau ? Déjà, tu y vas fort, ne t'inquiète pas, je m'occuperai bien de toi, tu peux avoir confiance, plaisanta-t-il.

Je restai surprise de son aplomb. Je pense qu'il le remarqua tout de suite.

— Très drôle, monsieur le maître chanteur.

— Je chante très mal Sofia, je joue du saxo, lâcha-t-il avec son petit sourire en coin.

Il s'avança doucement vers moi et me murmura à l'oreille, je pouvais sentir son souffle chaud sur ma peau. Je fermai les yeux quelques instants. Bon, OK, c'est sûr même.

— Je n'aurais rien dit, tu sais, mais je suis content que tu sois là.

Il faisait référence à ma balade nocturne. Il se dirigeait vers Darkness toujours en train de rire, c'est lorsqu'il souriait véritablement que l'on pouvait voir apparaître ses deux fossettes. Je restais complètement hypnotisée par sa gaieté et franchement être attiré par mon accompagnateur certes, plutôt charmant, ce n'était vraiment pas une bonne idée. Surtout qu'il devait avoir autour de vingt-cinq ans, c'était plus que sûr. Un homme n'avait pas cette barbe à dix-sept ans bien évidemment.

— Sofia ? C'est moi que tu regardes comme ça ?

Je sortis immédiatement de mes rêveries d'adolescentes.

— Non, c'est Darkness bien sûr, tu penses réellement pouvoir rivaliser ?

Il ricana encore, j'avais l'impression que c'était devenu une habitude quand je me trouvais là. La plupart du temps, il demeurait très poli, posé, propre sur lui quoi, surtout en présence d'Emily et du reste du groupe. J'avais remarqué qu'il semblait plus familier avec Loréne et Mario, l'adorable duo qui gérait le ranch. Le couple parfait : elle souriante et accueillante, toujours à vouloir nous faire plaisir pour les repas qu'elle nous préparait et lui plus discret, souvent là pour aider et pour entretenir avec soin ce petit bout de paradis.

— Pourquoi n'es-tu pas comme cela avec les autres ? lançai-je sans réfléchir.

Il resta surpris de ma question, retrouva rapidement son air sérieux.

— Voilà, c'est fini, tu reprends ton air sérieux, mystérieux et sauvage.

Sauvage ? J'avais vraiment dit ça ? Si ma conscience pensait sauvage au sens d'une personne non civilisée. Mon inconscient d'adolescente aux hormones débordantes criait : « oui sauvage ! » Un physique animal, voire bestial. L'adolescence et les hormones, ça doit être cela.

— Non, je me demande juste comment je suis avec toi. Si je te semble différent avec les autres ? murmura-t-il interloqué.

Je cherchais ma réponse, un seul mot me vient à l'esprit.

— Tu es toi, enfin, on dirait.

Il sourit sans rien rajouter, mais son regard le trahissait.

— Voilà, tu es comme cela en tout cas, tu es plein de vie, d'émotion, drôle, agréable.

Arrête-toi Sofia avant de dire quelque chose que tu vas forcément regretter.

— Ne va pas t'imaginer que je suis quelqu'un d'avenant Sofia. Tu risques d'être déçue, déclara-t-il plus sérieusement.

J'avais obtenu ce que je voulais éviter, j'allais trop loin et il me le faisait savoir. Isaac et Naomi approchèrent au même moment, main dans la main. Ash nous montra consciencieusement les règles de base. Il était très prévenant, nous expliquant que l'équitation restait une activité qui nécessitait de la pratique, de la dextérité et de l'équilibre : merci aux séances de yoga ! Afin de nous familiariser avec nos magnifiques montures, notre adorable moniteur nous proposa de commencer par une courte balade à pied. Promener auprès de Darkness me sembla si naturel, sa douceur, sa prestance me rassura peu à peu. Nous partageâmes également un merveilleux moment à panser nos petits protégés. Ash s'était chargé de seller nos acolytes pour cette première fois, mais j'avais maintenant hâte de pouvoir le réaliser après l'excursion. Il faisait preuve de sérieux et de beaucoup de patience, grâce à lui, mon appréhension s'estompait à chaque instant.

Isaac aida Naomi à monter sur son cheval et Ash s'avança vers Darkness et moi.

— Allez Migina, c'est le grand jour, mets ton pied sur l'étrier. Je vais juste te guider, tu devrais y arriver facilement. Maintiens bien tes rênes comme je vous ai montré tout à l'heure.

Je me tournai vers Darkness, lui caressa délicatement la crinière. À peine installai-je le talon sur l'étrier que je ressentis la main d'Ash posé sur ma hanche. Une bouffée de chaleur m'envahit. Je savourais cet instant quelques secondes et je m'élançais sur mon nouveau meilleur ami. C'était une sensation unique, malgré l'appréhension, je me sentais étrangement dans mon élément. J'avais l'impression que ce moment se gravait dans ma mémoire, d'une encre indélébile. Ash le comprit en un regard. Il aurait souri, si l'on avait été seul, j'en suis sûr.

— Darkness est un mustang, murmura-t-il à mon intention. Ma mère l'a adopté, il y a plusieurs années. C'est une espèce en danger, il a fallu beaucoup de temps pour qu'il nous choisisse aussi. Et au bout de long mois, j'ai pu le monter. Elle m'aurait peut-être déconseillé ce que je suis en train de faire, nous sommes les seuls avec Mario à balader avec lui... C'est dur de se débarrasser de son passé, de sa réputation, même quand tu es un animal. Mais je crois que vous vous êtes apprivoisés, j'ai confiance en vous. Puis, c'est un vieil étalon maintenant, une vieille âme.

Il tapota sur l'encolure de Darkness avec affection.

— Allez, c'est parti, nous allons longer le lac, la vue sur les montagnes vaut le détour, poursuivit-il pour mes amis.

Je restai sans voix par sa confidence, je me sentais privilégiée, mais surtout, je ne percevais aucune crainte. J'avais aussi confiance en eux, je le ressentais au plus profond de mon être, il ne me ferait rien.

Nos chevaux suivaient Ash aux pas, nous empruntions un petit sentier qui débutait derrière le ranch. La journée restait idéale. Je serrais toutefois bien les rênes, et me tenais droite. Ash se trouvait juste devant moi, il se retournait souvent et me jetait quelques regards.

— Détends-toi Sofia ! plaisanta-t-il.

Bon, OK, j'avais confiance en Darkness, mais c'était quand même ma première promenade à cheval. Je n'avais pas forcément envie de me retrouver les quatre fers en l'air parce que j'étais encore distraite. Nous arrivâmes au bout d'une bonne heure de balade à l'abord d'un petit lac splendide, beaucoup plus sauvage et bien moins touristique que le coin d'eau autour du ranch.

— On peut s'arrêter un court moment ici, puis continuer près de la rivière, proposa-t-il.

Nous descendîmes tous de nos montures, Naomi s'approcha de moi.

— Il semble tout autant charmant qu'impressionnant, je ne parviens pas à le cerner, chuchota-t-elle.

Je compris qu'elle parlait d'Ash et non de Darkness, mais je ne pus m'empêcher de jouer avec les mots.

— C'est un cheval sauvage, il a besoin d'être apprivoisé.

— Ce n'est pas faux, elle me sourit. Il te regarde bizarrement parfois et toi aussi Sofia, ajouta-t-elle.

C'était ma meilleure amie. Aucun doute. J'éclatai de rire.

— Mouai, tu ne remarquerais même pas les avances de Brant daugherty Sofia !

Elle sentit que je n'en dirais pas plus. En réfléchissant bien, elle n'avait pas choisi ce comédien par hasard, Ash lui ressemblait, sans le côté star d'Hollywood, bien sûr. Ash restait tellement plus naturel. Je le trouvais moins beau que l'acteur, mais il possédait son charme à lui.

Naomi et Isaac souhaitaient se baigner pendant cette petite pause. C'était vrai qu'il faisait réellement chaud. Ash n'y voyait pas d'inconvénient. Il se dirigea vers son cheval pour prendre de l'eau. Je refusai évidemment la proposition de mes amis, leur laissant une certaine intimité et dénichai rapidement un arbre pour me mettre à l'ombre.

Ash vint me rejoindre et s'assit à bonne distance. Le plus important était qu'il soit simplement là... 

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