Chapitre 26
Émilie avait programmé son vol pour le lendemain au soir. Quand elle se leva au petit matin, après avoir passé une nuit à cogiter sans fermer l'œil, elle se sentit comme une étrangère. Une étrangère qui n'était plus la bienvenue. Nathalie se fendit d'un bonjour qui se voulait amical, mais qui sonnait comme un reproche. Émilie s'était sentie mal à l'aise dès le début, mais ce dernier jour allait être le pire de tous.
Victor était rentré quelques dizaines de minutes plus tard. Il partait toujours se balader le matin, personne ne savait où. Dès qu'il la salua, il lui demanda l'heure de son départ et se proposa pour l'emmener.
En entendant 22 h 45, Nathalie vit renaître un espoir.
— Tu veux m'accompagner aujourd'hui, dire au revoir à Damien ?
Émilie hésita. Se tritura les mains. Se prit d'une passion soudaine pour le parquet.
— Je ne... Je...
Victor, devant la manigance évidente de sa femme, vola au secours de l'adolescente.
— Ce n'est pas une très bonne idée, ils s'appelleront ou s'enverront des mails quand cette histoire se sera tassée.
Émilie hocha la tête, but une gorgée de son chocolat chaud sans autre cérémonie.
— Pas de problème.
Nathalie se détourna, les larmes aux yeux. Il y avait un problème, un gros même. Mais, bien qu'elle le souhaitât ardemment, ce n'était visiblement pas à elle de le résoudre.
* * *
Damien ne dormit pas non plus. Il semblait avoir vidé son corps de toutes ses larmes. Il était vide. Il repensait, encore et encore, aux paroles qu'il avait prononcées. Son ventre se serrait, il avait envie de vomir en repensant à tout ça. Mais aucune goutte salée ne se déversait. Il avait épuisé son quota pour la semaine, le mois, peut-être même l'année.
Bien sûr, Émilie ne repartait que dans quelques jours, il y avait toujours moyen d'arranger les choses. Mais il avait du mal à croire qu'elle le pardonne facilement. Ce n'était pas dans sa nature, surtout quand elle était blessée.
Il avait pensé à lui envoyer un mail, comme avant. Mais il se dit qu'une lettre ferait plus chevaleresque, plus romantique. C'était ce qu'elle méritait. Au minimum.
Il griffonna, relut, roula en boule la feuille. Recommença. Jusqu'à ce qu'il soit satisfait de lui... Le petit-déjeuner, le déjeuner avaient été servis avant qu'il n'appose le dernier mot.
Si elle venait le voir, il n'aurait qu'à lui donner la lettre. Elle la lirait, pleurerait peut-être, et l'embrasserait. Voilà. Il avait réussi. Il le sentait.
Sa mère débarqua plus tôt, à l'heure où Émilie arrivait d'habitude. Il comprit. Elle n'eut pas besoin d'ouvrir la bouche, il savait.
Émilie allait partir. Il prit sa lettre et lui fit subir le même sort que toutes les autres. Après quelques secondes où il sentit que le ciel lui tombait dessus, il reprit une feuille et recommença à écrire.
Il en fallait une nouvelle.
* * *
Émilie : Coucou maman, j'arrive demain à 12 h 25 à Orly, je t'expliquerai quand je rentre. Tu peux venir me chercher ? Si tu as des rendez-vous, je prendrai le bus et le métro, pas de souci. Bisous.
Le message, reçu à 5 h du matin, avait fait sursauter Élizabeth. Elle s'était endormie sur le canapé, attendant le retour de sa fille. Elle avait eu un texto de Juliette, plus tard dans la soirée, lui expliquant qu'elle était toujours avec Paul.
Cela l'avait plus que surprise, connaissant le caractère de sa cadette. Mais après tout, c'était son père. S'ils avaient envie de reconstruire une relation père-fille, c'était totalement leur droit. Elle s'inquiétait sans réelle raison, Paul était un excellent père. Ça, elle ne pouvait pas lui retirer.
Avant de répondre à son aînée, elle alla jeter un coup d'œil dans la chambre de Juliette. Elle était bien là, endormie. Elle n'avait pas fait de bruit en rentrant, voilà tout.
Maman : Je serai là chérie. Fais bon vol, je t'aime.
* * *
Quand Nathalie rentra de sa visite à l'hôpital, Émilie venait de descendre sa valise. La mère de Damien était partie plus tôt, pour pouvoir donner la précieuse lettre à sa destinataire. Ce rôle était malsain, elle ne devait pas s'en mêler. Pourtant, le fait que son fils lui confie à elle, ses tracas, ses disputes avec Émilie, lui plaisait. Elle n'avait plus la maladie de Damien de laquelle se soucier, les cellules cancéreuses ayant déserté, mais elle avait les peines de cœur de son fils. Cela lui évitait de ressasser ses propres problèmes, à sa propre solitude.
Les autres d'abord, pour s'oublier soi-même.
Émilie fut surprise. Elle ne pensait pas que Damien veuille en rajouter une couche. Nathalie partit dans sa chambre après lui avoir souhaité « bonne lecture » pour lui laisser de l'intimité.
Quand l'adolescente lut la lettre, quelques larmes dévalèrent ses joues. Au début, elle crut que Nathalie avait écrit à la place de son fils, pour la faire rester. Mais... C'était Damien. Elle en était sûre.
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Suspeeeeens ! En ce moment je suis assez efficace en écriture, j'essaie donc de publier un peu plus vite :) On arrive à la moitié du roman, je commence déjà à me dire qu'il va falloir dire au revoir à Damien et Émilie bientôt... Ô désespoir...
Que pensez-vous que Damien a écrit ? Émilie va-t-elle réellement partir ?
Votre personnage préféré ? (J'ai vu pas mal de TeamJuliette dans les commentaires précédents :p).
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