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Rien n'allait plus : il pleuvait,encore, encore, encore. Où va toute cette eau ? se demanda Marchetti en observant le paysage morose que l'on voyait à travers la fenêtre. Les pavés de la rue, boueux et crasseux, ne donnait pas envie de sortir ; un véritable torrent les dévalait, et éclaboussait les portes en bois des habitations.

Marchetti n'était pas magicien, la pluie, il s'en fichait, mais Cess, mon dieu, Cess.... Elle devait être au plus mal, enfermée dans sa petite chambre, dans le noir le plus total, se bouchant les oreilles pour ne pas entendre le déluge.Peut-être pleurait-elle, même ? Aussi étrange et inexplicable que cela puisse paraître, les magiciens subissaient les jours de pluie.Ils pétaient les plombs, devenaient irritables, déprimés,impossible à vivre.

Lassé, Marchetti détourna son regard de la fenêtre, et observa la pièce dans laquelle il était. Dans sa petite maison, on ne pouvait pas faire grand-chose : il y avait quelques livres, des manuels de cuisine, des romans historiques, des classiques intemporels, des magazines vieux de l'année précédente,mais tous, il les connaissait par cœur ; il y avait des feuilles de papiers et un crayon mal taillé, sur une étagère, près du buffet,mais dessiner ne le tentait guère, et écrire encore moins ; il y avait aussi toutes ces factures qu'il devait régler depuis des mois,au moins, mais rien qu'en y pensant, il sentit son estomac se tordre d'anxiété, et préféra fermer les yeux sur ses problèmes financiers.

Marchetti poussa un soupir. Que faire ?Regarder par la fenêtre, encore ? Non, cela ne l'avancerait à rien.Il décida soudainement d'aller voir Cess. C'était dangereux,surtout si elle traversait en ce moment une crise de colère.Qu'importe ! Sa petite sœur méritait bien qu'on brave tous les dangers pour la tirer des griffes du mauvais temps. Marchetti s'engagea dans le couloir, monta quelques marches grinçantes du ridicule escalier, frappa à la porte de la chambre du haut, et comme il n'entendit aucune réponse, il entra.

La pièce n'avait plus rien d'une chambre : les draps du lit défaits, les meubles retournés et vidés sur le sol, la tapisserie arrachée, les lampes à huiles brisées,le parquet défoncé et à moitié calciné.

En temps normal, il ne se serait pas inquiété. Après tout, Cess avait déjà traversé des épisodes violents à ce point-là lors des jours de pluie. Pourtant, un vague sentiment de panique l'envahit.

— Cess ?

Il avança dans la pièce, d'abord lentement et hésitant, puis avec plus d'assurance.

— Cess ?

Il retourna les draps, chercha derrière les meubles, ouvrit la fenêtre, l'appela une nouvelle fois.

Pourquoi n'était-elle pas là ? Il se dirigea vers la salle de bain, l'inspecta, mais là encore, elle était introuvable. Alors, il recommença ses investigations dans les toilettes, dans sa chambre, dans la cuisine. Il brava la tempête et sortit la chercher dehors.

Disparaître un jour de pluie, c'était un mauvais présage. Un si mauvais présage, que Marchetti, alors qu'il n'était pas superstitieux, frissonna.


 — Cess ! Pourquoi ne peux-tu pas t'empêcher de perturber le quotidien des gens qui ne t'ont rien demandé ? 

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