7. L'Allée de tous les Aléas
L'Allée des Embrumes. Cet endroit sombre et peu recommandable, connu pour ses magasins de magie noire. J'ai toujours été curieuse de ce lieu. Ma tante avait refusé que je l'étudie, alors j'avais chipé un bouquin dans la bibliothèque qui en racontait l'histoire. Elle m'avait surprise avec et avait finalement cédé, acceptant de me faire travailler dessus. Me retrouver ici, après en avoir tant entendu parler, c'est tellement bizarre. L'ambiance du lieu n'est pas du tout comme on me l'avait décrite. Alors que je pensais trouver un endroit effroyable, horrible et repoussant, je découvre un lieu certes effrayant mais mystérieux en même temps et l'ambiance tendue lui donne un côté dangereux qui met tous mes sens en éveil. C'est assez excitant et ma curiosité est à l'affût de nouvelles découvertes.
D'étroites ruelles se jettent dans l'Allée comme des ruisseaux dans un fleuve. L'endroit a l'air d'un désert surpeuplé avec son peu de monde dans les rues malgré le fait que des gens soient dissimulés dans l'ombre et il y règne un silence bruyant où le calme plane bien que derrière lui se cachent des chuchotements assourdissants. Les abords de la rue pullulent de magasins aux façades obscures et mystérieuses. De vieilles affiches plus ou moins intactes, promettant des récompenses pour quiconque parviendrait à capturer Sirius Black serait récompensé grassement, se fondent presque avec certains murs grisâtres. Une eau sale s'insinue entre les pavés de la rue, pour rejoindre les bouches d'égout crasseuses que l'on aperçoit de temps en temps.
Je m'enfonce de plus en plus profondément dans l'Allée. Tout autour de moi est sombre et effrayant. L'insécurité omniprésente du lieu fait s'hérisser les poils de mes bras. J'aimerais croire que ce n'est que le froid, car en effet, le soleil ne semble pas décidé à pointer le bout de son nez, mais je sais pertinemment que c'est faux. Je ne m'arrête pas pour autant, il y a forcément plus de monde que ça ici et encore beaucoup de choses à découvrir.
J'arrive à l'entrée d'un petit tunnel. Il y fait sombre alors que pourtant il ne doit pas mesurer plus d'un ou deux mètres de longueur. J'hésite un instant avant de m'y aventurer. Tandis que je commence à accélérer le pas pour en sortir rapidement, quelque chose s'accroche à ma cheville et je manque de trébucher. Je me retourne lentement et vois une main ridée, recouverte de crasse et de poils, agrippée à mon pied. Mon regard remonte le bras vêtu d'un tissu gris en lambeaux jusqu'à un visage d'homme barbu, boueux, où deux yeux noirs fous, vides d'émotions, me scrutent. Accroupi par terre, son buste est penché en avant et il fait preuve de beaucoup de force malgré sa position. Sous le poids de l'effort ou de la colère, le vagabond pousse un grognement et tire plus fort sur ma cheville, me faisant vaciller. Mon cœur se met à cogner de plus en plus contre ma poitrine, au fur et à mesure que la panique monte en moi. Je suis paralysée et ne parviens même pas à sortir un son. Un sourire diabolique apparaît son visage et je me rends soudain compte de la présence d'un petit éclat dans sa main qui ne me tient pas. C'est l'éclat de la lame d'un couteau.
À partir de ce moment-là, mon instinct de survit a dû se déclencher et déconnecter mon cerveau car lorsque je reprends conscience, je tiens ma baguette dans ma main et l'homme est recroquevillé contre le mur. Je reste stupéfaite un instant avant de me demander ce que j'ai bien pu lui faire. Rien ne me vient à l'esprit, mais je sais une chose : je ne veux pas rester ici un instant de plus. Je me rue hors du tunnel sans un regard en arrière.
Heureusement quand même que j'avais eu l'idée de ne pas ranger ma baguette dans sa boîte après l'avoir achetée. Cependant, je ne peux m'empêcher de m'en vouloir. Cela me rappelle l'épisode avec la maison des Potter où j'ai eu cette même impression d'impuissance et de vulnérabilité. Cet incident me démontre une fois de plus que je n'ai absolument aucune expérience et qu'il pourrait m'arriver n'importe quoi. Il ne faut pas non plus que j'oublie que Voldemort se balade tranquillement dans la nature et que de plus en plus de partisans le rejoignent. Non mais qu'est-ce qui m'a pris de m'aventurer dans un endroit aussi dangereux ! C'est le repaire de la magie noire ! Même si je tente de ne pas céder aux stéréotypes en général, cet événement ne peut que me faire aller au contraire de ma moralité.
J'avance à grands pas, en colère contre moi-même. Mais je sens peu à peu que celle-ci laisse place à la peur et au stress, qui s'insinuent dans mes veines. Je suis seule dans un endroit peu recommandable, livrée à l'Allée. Alors pourquoi est-ce que je ne fais pas demi-tour ? Je prends une grande inspiration et me concentre. C'est vrai, pourquoi est-ce que je suis là exactement ? Sous le coup d'une impulsion ? De la curiosité ? C'est une chance unique de découvrir un autre univers que le mien ! Si j'en ai peur, en réalité, c'est parce qu'il m'est inconnu. Tout le monde a peur de l'inconnu. Même les têtes brûlées. C'est normal, c'est l'incertitude qui déclenche l'instinct de survie. Je prends donc mon courage à deux mains et poursuis ma route. J'espère seulement que je ne vais le regretter.
Je finis par atteindre une zone plus peuplée où les rues à moitié vides forment désormais le début d'une foule. Plus je m'avance, plus elle prend de l'ampleur et s'épaissit. Je me demande quelle en est la cause. Je tente de m'approcher le plus possible, mais la foule me semble se densifier au fur et à mesure, malgré le fait que la rue soit presque déserte un peu plus bas. Bien que cela expliquerait cette désertification...
Perdue dans la cohue, mes doigts rencontrent soudain ceux de quelqu'un d'autre et je sens comme un courant électrique me traverser. Non, c'est bien plus fort, il y a autre chose. Autre chose d'indescriptible. Je me tourne tant bien que mal vers l'inconnu dont j'ai bousculé la main et croise ses yeux durant un instant fugace. Lorsque nos regards se rencontrent, je distingue des yeux d'un marron tendre avec une pointe de rouge au centre. Je me sens happée par eux, plus rien d'autre ne compte autour. Le temps semble comme suspendu...
Mais brusquement, la légère nuance rougeâtre commence à s'étendre peu à peu et je reconnais ces yeux. Charring Cross road... Ma gorge se serre à ce souvenir. Je suis prise entre deux sentiments. D'un côté mon instinct me crie de fuir, de l'autre, mon cœur se serre de tristesse à cette idée. Cette situation est horrible.
Alors que je suis partagée entre ces émotions, comme scindée en deux, j'entends un cri. J'ignore d'où il provient et qui l'a poussé, mais il déclenche quelque chose en moi et la peur prend le dessus. Mes jambes se mettent encore à courir toutes seules. J'ai juste le temps de croiser une dernière fois ses yeux rouges luisants avant de me retourner et de m'enfuir à travers la foule. Je cours sans but précis jusqu'à la frontière entre l'Allée des Embrumes et le Chemin de Traverse. Une fois arrivée devant SortScier Édition, je m'arrête, à la fois soulagée et triste.
Je me demande si je n'ai pas eu raison de douter lorsque j'ai pénétré dans l'Allée. Cet individu est sûrement très dangereux bien que j'ignore son identité. Sinon pour quelle raison mon instinct réagirait-il comme ça ? Et pourquoi me suivrait-il ? Il faut vraiment que j'éclaircisse tous ces mystères qui commencent à s'accumuler ! J'ai l'impression qu'ils sont tous liés. Surtout qu'ils n'émergent que maintenant. C'est forcément dû à un événement récent qui a fait resurgir un secret du passé. Les seuls qui me viennent à l'esprit sont le retour de Voldemort et mon entrée à Poudlard. Je sais que cela a des allures de livre fantastique, mais bon, ce sont les Moldus qui racontent ces histoires alors qu'ils ne connaissent pas notre monde. Ils sont donc un peu en décalage... Quoi qu'il en soit, Rogue ne doit jamais découvrir ce que j'ai fait, et ma tante encore moins.
Il n'empêche que cet épisode me rappelle Godric's Hollow et la Maison des Potter. Sauf que cette fois c'était un peu différent, ce léger contact avec l'homme sombre et mystérieux semble avoir déclenché quelque chose. Je sais ce que j'ai ressenti lorsque nos doigts se sont frôlés. Je n'ai jamais cru à l'alchimie et tout le tralala... Mais maintenant je doute. Et si ça existait ? Serait-ce possible que chaque personne ait un alter-ego et un anti-ego avec qui il aurait un lien ? Et lui, ce serait mon alter-ego ou mon anti-ego ? Je ne sais pas... En tout cas, nous avons un lien. J'en ignore sa nature, bien que ce soit la seule explication que je vois pour l'instant à cet étrange événement.
Cependant, je me pose des questions sur cet homme. Pourquoi me suivait-il ? Qui est-il vraiment ? Quelles sont ses intentions ? Pense-t-il comme moi que nous sommes liés ? Et si oui, pourquoi et par quoi ? Et surtout, pourquoi est-ce que j'ai envie de le fuir mais aussi de rester avec lui ? Oh là là, que de questions ! C'en est trop pour moi ! Perdue dans ces réflexions, je laisse mes pas me porter où ils le souhaitent.
Et alors que je suis en train de me dire que tout ceci est absurde, je percute quelqu'un et manque de laisser tomber la cage d'Athéna. Lorsque je relève la tête, face à moi se tient une jeune fille aux cheveux noirs, noués en queue de cheval, qui semble avoir mon âge. Je n'ai même pas le temps de m'excuser que celle-ci m'enguirlande déjà.
« Faites attention où vous allez, bon sang !
— Pardon, excusez-moi, réponds-je, penaude.
— Oui, bah, je m'en fiche, vous m'avez quand même bousculée !
— Hey ! Je pourrais vous retourner la remarque aussi, je vous signale ! Après tout, on ne se serait pas percutées si vous m'aviez évitée ! Vous êtes autant responsable que moi ! »
La fille écarquille les yeux d'étonnement et les commissures de ses lèvres frémissent un instant. Je lis dans ses yeux bruns de la colère, qui semble pourtant s'estomper au profit de la joie et aussi, j'en ai bien l'impression, d'un soupçon de malice. Nous continuons de nous regarder pendant un moment, puis elle resserre son manteau gris avant de reprendre la parole.
« Enchantée, je m'appelle Victoria, mais appelle-moi Vicky, dit-elle en me tendant la main.
— De même, annoncé-je en la lui serrant. Je m'appelle Céleste.
— D'où viens-tu ? Je ne t'ai jamais vue à Poudlard. Après, c'est tellement grand tu me diras, qu'on ne croise pas tout le monde, mais quand même, déclare-t-elle avec un petit rire nerveux.
— Effectivement, confirmé-je en riant, mais c'est juste que je ne suis pas encore allée à Poudlard. En fait, j'y entre cette année ! »
Vicky écarquille les yeux et la machoire de surprise à ces mots. Elle reste ébahie devant moi comme si sa pensée ne parvenait pas à franchir ses lèvres, malgré sa bouche grande ouverte, et qu'elle était restée bloquée dans sa gorge. Pour éviter qu'un malaise ne s'installe, je décide de prendre les chose en main, non sans avoir pris une grande inspiration d'abord.
« Oui, c'est une histoire compliquée, commencé-je en haussant les épaules. Ma tante a toujours refusé que j'aille dans une école de magie et m'enseignait tout à la maison. Jusqu'à il y a peu, où elle a accepté que je puisse enfin entrer dans une école de magie. C'est Beauxbâtons qui était envisagé grâce à ses contacts. Et puis un professeur est venu chez nous pour nous proposer une place à Poudlard. J'ai accepté et me voilà !
— Ah c'est... Ouah ! Tu as eu de la chance on peut dire ! Mais pourquoi ta tante refusait que tu ailles dans une école de magie ?
— Ça aussi c'est assez compliqué, mais disons qu'elle avait peur de ce qui pourrait m'arriver seule, lâchée dans l'inconnu et en plus, loin d'elle. Elle m'a toujours surprotégée. Je suppose que c'est l'instinct maternel. »
Vicky sursaute à cette dernière phrase. Effectivement, en disant cela, ce qui est pourtant naturel pour moi, j'annonce clairement que ma tante est comme ma mère. Ce qui, je le reconnais, peut être assez perturbant pour les autres. Bien que mes parents m'aillant toujours détestée à cause de ma nature de sorcière, soient mes vrais parents, je ne peux les considérer comme tels puisqu'ils ne m'ont jamais apporté l'amour dont j'avais besoin. Amour que tante Bathy m'a apporté. C'est pour cela que je n'ai pas évoqué un seul instant mes parents. Et je sais bien que depuis le début, Vicky essaye de ne pas me poser de questions sur eux même si ça lui brûle les lèvres. Je n'aime pas utiliser la legilimencie sur les gens sans réelle raison, mais parfois, il arrive que je ne parvienne pas à brider mon don quand il cède à la curiosité. Et Vicky avait l'air de se retenir de me demander certaines choses. Je n'ai pu m'empêcher de savoir ce que c'était et voilà. Ma nouvelle amie semble d'ailleurs avoir pris conscience de sa réaction suite au silence qui s'est installé et alors qu'elle tente de reprendre la parole, je la coupe dans son élan.
« Je suis une née-Moldue, je n'ai jamais connu mes parents et c'est ma tante qui m'a élevée.
— Je... Je suis désolée, murmure Vicky avec une once de pitié qui transparaît dans sa voix.
— Tu n'as pas à être désolée, ce n'est pas de ta faute.
— Peut-être pas pour ce qui t'est arrivé, mais je crois bien que tu as remarqué que je mourrais d'envie de savoir...
— Peu importe, tu aurais fini par l'apprendre de toute manière.
— Tu as sans doute raison, conçoit-elle en haussant légèrement les épaules. Mais pour en revenir à ta tante, ce n'est un peu exagéré de n'avoir jamais voulu que tu entres à Poudlard comme tout le monde ? Je ne sais pas mais quand même, aller à Poudlard c'est un peu une étape obligatoire, non ? me demande-t-elle.
— Apparemment pas forcément pour ma tante, reprends-je. Elle devait juger que l'enseignement à domicile suffirait.
— Mais tu ne lui en as jamais voulu ?
— Non, je ne crois pas. Je ne pense pas que je puisse lui en vouloir un jour pour quoi que ce soit de toute façon, je suis trop soucieuse pour elle. Elle se fait vieille et devient de plus en plus fragile. Difficile donc d'en vouloir à une telle personne. Bien que je reconnaisse que même si je l'aime beaucoup et qu'elle est adorable, c'est vrai que j'ai toujours voulu entrer, normalement, dans une école de magie. Ce qui ne sera malheureusement pas le cas à cause d'elle. Entrer en plein milieu de la cinquième année n'est pas très discret...
— La cinquième année ? Mais je suis en cinquième année ! Ça veut dire qu'on va être dans la même classe ! s'écrie-t-elle en faisant un tour complet sur elle-même de joie. Enfin si tu es dans la même maison que moi, bien sûr, reprend-elle plus sérieusement.
— Oui, certainement, mais on se croisera régulièrement de toute façon ! Ah et au fait, tu es dans quelle maison ? ne peux-je m'empêcher de demander, curieuse.
— Oh ! À Serdaigle... Oui, je sais, je n'ai pas l'air d'une intello mais...
— Hé ! Calme-toi, tu n'as pas besoin de me donner d'explications. Tu es à Serdaigle, un point, c'est tout, lui dis-je en souriant pour la rassurer.
— Oui, je sais. Je suis désolée, c'est juste que j'ai l'impression que je dois toujours justifier ma place dans cette maison.
— À partir du moment où le Choixpeau t'y a envoyée, tu es légitime !
— Si tu le dis, déclare-t-elle en souriant timidement. Bon, tu viens, je connais un endroit génial où nous pourrons nous amuser ! » reprend-elle sur un ton plus léger et joyeux.
Vicky m'attrappe la main et se dirige en sautillant à moitié vers l'entrée du Chemin de Traverse. Je repasse devant les mêmes magasins que précédemment, refais le même chemin en sens inverse. Pourtant, j'ai l'impression que ce n'est pas le cas, comme si je n'étais pas au même endroit. À moins que je ne vois le Chemin de Traverse différemment après mon escapade dans l'Allée des Embrumes. Je ne saurais l'expliquer mais maintenant, tout me semble lointain, fade et superficiel. Cette rue, ce monde, que je trouvais pourtant fabuleux il y a quelques instants, me semble désormais étrange, comme si ce n'était pas la réalité ou comme si... Comme si ce n'était pas, plus, mon monde, mon univers. Je ne parviens pas à me l'expliquer. Cela ne dure pas longtemps car au moment où Vicky s'arrête brusquement, cette impression disparaît et la rue ne m'apparaît plus comme étrangère.
« Et voilà ! Bienvenue chez le meilleur glacier du coin ! » m'annonce cette dernière en ouvrant grand les bras dans un geste de présentation.
Je lève les yeux vers une enseigne grinçante en forme de cornet où il est inscrit Glaces Florian Fortarôme. La façade jaune vieilli et les carreaux en losange témoignent d'un autre âge, mais l'établissement n'en a pas l'air moins accueillant pour autant.
« Viens, allons prendre une glace, puis nous irons chez Pirouette et Badin, un excellent magasin de farces et attrapes ! me propose Vicky avec enthousiasme.
— Oh ça, je ne crois pas ! rugit derrière moi une voix furieuse au son de laquelle je me fige immédiatement.
— Bonjour professeur. Que faites-vous ici ? entends-je demander poliment Vicky.
— Bonjour Mlle Taylor, lui répond respectueusement, mais non moins en colère, le professeur Rogue. »
À ces mots, je sursaute de surprise et me retourne brusquement. Je croise le regard d'un professeur Rogue on ne peut plus furieux et exaspéré. Ses cheveux gras habituellement plaqués sur sa tête sont légèrement hérissés en certains endroits, ses sourcils sont froncés, ce qui plisse son front et quelques plaques rouges dépassent du col de sa robe de sorcier, aussi noire que d'habitude quant à elle. Sa colère me coupe le souffle un instant et combiné à mon étonnement précédent, je laisse échapper une réflexion stupide.
« Vous vous connaissez ?
— Bien sûr, c'est mon professeur, déclare Vicky.
— Quelle question bête, murmuré-je.
— Eh mais non ! C'est normal que tu sois surprise, c'est nouveau pour toi, me rassure ma nouvelle amie. Bon, on y va ? enchaîne-t-elle.
— Non ! s'exclame Rogue avant que je ne puisse répondre. »
Je lui adresse un petit sourire en coin et me tourne vers Vicky, lui attrape la main et commence à me diriger vers le glacier, mais Rogue semble avoir compris mon manège car il se place immédiatement devant nous pour nous barrer la route.
« Professeur, commencé-je, cela fait un moment que nous sommes sur le Chemin de Traverse et nous avons faim. Il est... quatorze heure seize, conclus-je en regardant ma montre comme si c'était une preuve irréfutable.
— Oui, professeur, vous pouvez nous laisser, vous savez, nous avons quinze ans, pas onze, ajoute Vicky. Tu ne m'avais pas dit que c'était Rogue le professeur qui était venu te chercher, chuchote-t-elle ensuite à mon intention.
— Je suis désolée, je n'ai pas pensé que c'était important, lui réponds-je tout aussi bas.
— Bien sûr que si, ça l'était. Tu es vraiment tombé sur le prof le plus...
— Vous n'avez pas respecté mes consignes, vous êtes enfuie et après vous souhaiter plus de liberté ? s'exclame le concerné, coupant ainsi court nos messes-basses.
— Je ne me suis pas enfuie, je suis juste allée me promener, me défends-je. Et vous devriez songer à manger car cela fait plus longtemps que moi que vous n'avez pas mangé.
— Eh bien, détrompez-vous, j'ai mangé à l'instant, déclare-t-il. Et cela n'empêche que vous m'avez désobéi, heureusement que j'ai fini par vous retrouver. Il aurait pu vous arriver n'importe quoi ! N'oubliez pas ce qui se passe en ce moment ! réplique-t-il en me lançant un regard qui sous-entend qu'il n'évoque pas clairement le retour de Voldemort car il ignore l'opinion de Vicky à ce sujet.
— Très bien ! Je vous ai désobéi, et alors ? Vous ne comptiez quand même pas que je vous attende une heure ?
— Il y a eu un petit imprévu, reconnaît le professeur.
— Eh ! J'ai une idée ! s'exclame soudain Vicky. Nous n'avons qu'à manger tous ensemble au Chaudron baveur avant de se quitter !
— Hors de question ! explose Rogue, nous lançant un regard furieux. »
Vicky et moi éclatons de rire. Depuis tout à l'heure, nous torturons ce pauvre Rogue et je dois dire que cela semble ravir ma nouvelle amie. Il doit vraiment être un professeur odieux pour que Vicky soit autant satisfaite. Bien qu'elle n'ait pas eu le temps de terminer sa phrase, je suppose que c'était ce qu'elle voulait me dire et puis vu le caractère de Rogue, cela ne m'étonnerait pas.
« Tom, le barman du Chaudron baveur, m'a donné un petit quelque chose pour vous, dit ce dernier en soulevant légèrement un sachet qu'il glisse ensuite dans un sac noir en cuir. »
Je n'en reviens pas ! Tom a pensé à moi et m'a fait à manger. Il ne faut pas que j'oublie de le remercier. Et Rogue a emporté un sac alors que moi non ! Dire que je me suis ridiculisée pour rien avec ma cage à oiseaux en guise de sac. Tiens, Athéna, je l'avais complètement oubliée !
« Venez, nous rentrons. Vous reverrez Mlle Taylor à la rentrée.
— Quoi ? Déjà ? demandé-je, mes pensées toujours centrées sur Athéna.
— Ne discutez pas, nous n'avons pas de temps à perdre ! perd-il patience.
— De toute façon, je ne partirai pas sans Athéna.
— Athéna ? Qui est-ce ?
— Ma chouette !
— Elle vous retrouvera, les chouettes sont très intelligentes, ne vous en faites pas.
— Vraiment ?
— Croyez-en mon expérience, achève-t-il de me convaincre. »
Je hoche la tête en signe de rédition et grimace lorsque Rogue m'attrape le bras, me détachant de ce fait de Vicky. J'ai à peine le temps de comprendre ce qu'il se passe et d'entendre Vicky me crier « À la rentrée ! », que ma vision se brouille et que je réalise que je transplane.
•𖣔•
Nous atterrissons dans le salon à Carbone-les-Mines et bien que je sois désormais habituée à ce moyen de transport, je titube encore un instant avant de me rattraper de justesse au seul fauteuil de la pièce. S'il n'y a bien une chose qui ne change pas en ce moment, c'est ma maladresse. Mais Rogue exagère vraiment de ne pas m'avoir prévenue ! Moi qui était d'humeur joyeuse, je suis maintenant en colère !
Tandis que je me redresse, j'aperçois le regard furieux de Rogue qui me fait relativiser ma propre colère même s'il me semble percevoir une lueur de soulagement dans ses yeux. Rogue serait soulagé de m'avoir retrouvée ? Enfin, il pourrait être soulagé pour autre chose, mais vu sa fureur, ma petite escapade doit occuper ses pensées. Je décide de ne pas rester un instant de plus en sa compagnie, sinon je vais me prendre un sermon en pleine tête. Je m'écarte précipitamment du vieux fauteuil marron, attrape le sac contenant les fournitures qu'il m'a ramené et court aussi rapidement possible malgré mon encombrement, vers l'étagère qui mène à ma chambre d'emprunt.
« Eh ! Où comptez-vous aller comme ça ? s'exclame Rogue sans pour autant faire un geste pour m'empêcher de m'esquiver.
— Je dois faire mes bagages pour demain, réponds-je d'un ton sec. »
Je tire sur Nécrologies de l'Amour du bout des doigts et l'étagère pivote telle une porte. Je m'engouffre dans l'interstice tout en poussant l'étagère pour avoir la place de passer. Mes fournitures m'échappent des mains pour venir s'écraser sur le sol dans un bruit assourdissant, mais cela ne m'empêche pas de claquer l'arrière de l'étagère avec un de mes pieds même si elle commence déjà à se refermer automatiquement. Je ramasse le sac noir de Rogue et attrape la cage d'Athéna qui a provoqué tout ce vacarme. Cela me fait penser que ce dernier a dû comprendre mon envie d'être seule et que je m'inquiète pour cette dernière. J'espère qu'elle m'aura retrouvée. Je n'aurais pas du écouter Rogue et attendre Athéna !
Lassée et épuisée par toutes les émotions de ma matinée, je monte péniblement les escaliers et entre dans ma chambre. Le lieu est toujours aussi sombre et sinistre que lorsque je l'ai laissé ce matin. Et dire que j'ai passé presque toute ma matinée sur le Chemin de Traverse. Alors que je dépose la cage et le sac sur mon lit, j'entends un bruit étrange. En tendant l'oreille, je me rends compte qu'il provient de la fenêtre et provoque un son comme si quelqu'un frappait aux carreaux. Mon cœur bondit de joie dans ma poitrine en pensant à qui cela peut être. Je m'approche doucement, j'écarte les rideaux verts en velour et tourne la poignée ouvragée de la fenêtre.
Un ululement furieux m'accueille et Athéna me donne un petit coup de bec sur la main avant de se poser sur mon bras droit que je lui tends, et de me tourner ostensiblement le dos. Je retourne doucement sa tête vers la mienne et plonge mon regard dans le sien. Comme si nous étions connectées, nous nous comprenons instantanément. Je suis moi-même incapable de décrire ce que nous nous disons, ce sont nos sentiments qui parlent. Toujours est-il qu'après un moment intemporel plongées chacune dans le regard de l'autre, Athéna se blottie contre moi. Nous restons ainsi un petit instant avant que nous nous détachion l'une de l'autre et que tandis qu'elle va se percher sur l'armoire, je me dirige vers le lit pour déballer mes fournitures. Je commence par le sac de Rogue et la première chose que j'en extirpe est le sachet offert par Tom. Je l'ouvre et y découvre mon repas de ce midi, mais aussi de ce soir ! Il y en a suffisamment pour deux fois et cela m'évitera de revoir Rogue avant demain. Je déballe un fish and chips encore tout chaud et un pudding au chocolat et au caramel. J'en salive déjà d'envie ! L'odeur salée du poisson et de la pomme de terre se mêle à celle sucrée du chocolat et du caramel, pourtant cela ne me dérange pas le moins du monde et je me jette sur le plat.
Après, il ne me restera plus qu'à faire ma valise et à me coucher. Demain est le grand jour. J'entre enfin à Poudlard !
•𖣔•
Bonjour ou bonsoir !
Voici un nouveau chapitre qui marque un tournant pour Céleste. J'espère que vous l'avez apprécié et merci beaucoup pour toutes vos vues, vos votes et vos commentaires.
Passez une bonne nuit, soirée ou journée et...
Bonne année !
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top