6. Ollivander

Je suis agacée, Rogue m'a une nouvelle fois abandonnée à mon sort ! J'en ai plus qu'assez ! Comme je me trouve aux confins du Chemin de Traverse, je n'ai d'autre choix que de prendre la même direction que ce très cher professeur. Il aurait tout de même pu m'attendre un peu ou au moins me donner plus d'explications ! Après, d'un certain côté, je suis maintenant libre de faire ce que je veux sans aucune surveillance et je n'ai pas à supporter les remarques acerbes d'un professeur. Heureusement pour moi, je sais dans quels magasins je dois aller. J'ai juste à jeter un coup d'œil en quête des devantures des boutiques dont j'ai besoin.

Alors que je scrute la rue, je m'arrête nettement devant un bâtiment qui m'intrigue par son nom : La Gazette du Sorcier Bureaux. J'ignorais que la Gazette du Sorcier, ce quotidien si célèbre à la botte du Ministère de la Magie, avait un magasin ou plutôt des bureaux si je puis dire, sur le Chemin de Traverse. Puis, je me souviens de l'en-tête à mettre pour écrire au journal, indiquée à la fin de chaque numéro : La Gazette du Sorcier, Chemin de Traverse, Londres. Les gens travaillant ici doivent sans doute répondre à des tonnes de lettres, surtout ces derniers temps avec les doutes sur le retour de Voldemort. Je ne vais pas dire ce que j'en pense, je crois m'être assez exprimée à ce sujet qui me met toujours en rogne contre le Ministère. Et en plus, ce ne serait pas très élégant de me mettre en colère en pleine rue. En tout cas, c'est assez bien placé comme endroit et juste à côté d'un petit café qui a l'air tout à fait charmant.

Je continue ma route et arrive à la hauteur d'une vitrine remplie de cages comportant des hiboux ou chouettes noirs, bruns, gris voire blancs. La pancarte de la façade m'indique que je me trouve devant Eeylops, Au royaume du Hibou. C'est le bon endroit pour acheter un de ces rapaces qui me permettra de rester en liaison avec ma tante. Nous n'en avons jamais eu parce que nous n'en avions pas la nécessité. Mais maintenant, nous ne pouvons plus y échapper. J'entre à l'intérieur du magasin. Des centaines de cages s'entassent un peu partout. Comment vais-je parvenir à trouver le bon hibou ? Alors que je me balade dans les nombreux rayons, j'entends des éclats de voix et aperçois vaguement le dos d'un petit garçon aux cheveux bruns bouclés.

« Cesse de raconter des sottises, Paul ! Tu vas entrer à Poudlard ! Et tu n'as pas intérêt à nous faire honte !

— Mais maman, Harry Potter a vaincu Tu-sais-qui, bébé, tu ne crois pas que quand il dit...

— Stop ! Ça suffit ! J'en ai assez entendu ! Tu-sais-qui n'est pas revenu ! Il est mort et personne ne peut revenir d'entre les morts ! »

Décidément, on dirait que j'ai le chic pour tomber sur toutes les querelles à ce sujet en ce moment. C'est fou le doute que cet événement a insinué dans les esprits. N'empêche, pauvre petit Paul. À mon avis, vu l'exigence de ses parents, il a intérêt à se tenir à carreaux et à ne surtout pas exprimer sa pensée.

Soudain, mon regard se pose sur la cage devant moi, une petite chouette hulotte au plumage rayé d'un marron clair tendre et d'un blanc neige. Elle pointe sur moi ses yeux vairons, un roux orangé, l'autre jaune or. Nos prunelles se connectent et nous sommes comme reliées l'une à l'autre, nous nous comprenons parfaitement. Elle me supplie de la libérer, elle n'en peut plus. Elle a perdu sa famille et je suis son seul espoir. Alors, je détourne le regard pour jeter un coup d'œil à l'étiquette indiquant les informations sur l'oiseau et attraper le haut de la cage. Je la traîne péniblement jusqu'à la caisse et y paye un vieil homme louche et mutique qui m'observe bizarrement. En voyant la chouette, j'ai subitement une idée de prénom, Athéna. Elle me fait tellement penser à cette déesse grecque dont la chouette est d'ailleurs le symbole.

Je ressors et c'est là que je remarque le numéro d'en face, le cinquante-neuf. Ce magasin ou plutôt agence de voyages, TerrorTours, est célèbre pour ses excursions complètement déjantées. Du genre, une visite "sur les traces des zombies" où on peut "tomber face à face avec les morts-vivants" selon leur publicité. Il y a même une sortie sur une épave magique dérivante où sont agglutinés des requins. C'est totalement fou et dangereux ! Et bien sûr, ils précisent qu'ils nient toute responsabilité en cas de problème. Autrement dit, s'il arrive quoi que ce soit, si quelqu'un est blessé voire meurt, il est impossible de les poursuivre en justice. Et le pire, c'est que des gens sont prêts à payer pour faire ce genre de voyages inconscients et même mortels dans certains cas ! Je me détourne de ce magasin détraqué pour poursuivre mon chemin.

Emportée par la foule, je finis par arriver à une des boutiques que je cherche, Mme Guipure, prêt-à-porter pour mages et sorciers. C'est là que je vais acheter mon uniforme. Je pénètre dedans et alors que je m'apprête à sortir ma liste de fournitures pour voir en détail ce que je dois acheter, une femme assez jeune, dans la quarantaine, sans doute Mme Guipure, se précipite vers moi, ses talons faisant un bruit infernal. Ce qui ne semble d'ailleurs pas plaire à Athéna qui pousse un petit cri. La dame lui lance un regard noir avant de reporter son attention sur moi.

« Bonjour mon chou, vous êtes nouvelle ?

— Euh... Oui.

— Très bien, quelle est votre taille ?

— Ça dépend des vêtements, mais généralement, je fais du S.

— Pas de problème, vu votre gabarit, je sais ce qu'il vous faut et vous n'aurez même pas à essayer, les quelques réglages peu importants, s'il y en a, se feront tous seuls. Attendez-moi ici, je vais tout vous chercher. »

Et elle repart aussi vite qu'elle est venue. En attendant, je regarde les gens passer dans la rue. Le mélange culturel et ethnique de la foule est très beau à observer. Femmes et hommes se fondent dans ce brassage où se mêlent différentes teintes de peaux. C'est quand même incroyable l'évolution de mentalité qu'il y a eu. Il y a encore un siècle, on aurait vu que des "hommes blancs" parfois accompagnés de leur femme mais c'est tout. J'aperçois même un ou deux couples du même sexe se tenir la main en se contemplant d'un regard qu'on ne voit que chez les amoureux, avec cette expression de béatitude, ce qui à la fois beau, émouvant et tellement mignon. Cela n'est possible pour eux de se marier que depuis peu et encore, ils n'osent pas souvent se montrer car il existe une haine homophobe très présente. C'est triste mais heureusement, les gens sont trop pressés sur le Chemin de Traverse pour y prêter attention alors ces couples osent plus sortir. C'est magnifique de voir à quel point l'acceptance et la solidarité de notre société ont commencé à devenir d'importantes valeurs et j'espère que ce sera encore plus le cas dans les années à venir. Alors que je suis perdue dans ma contemplation, un bruit de talon me sort de ma rêverie, accompagné du ululement d'Athéna. Mme Guipure est de retour et tient tous les vêtements nécessaires dans ses bras. Elle me les tend avant de m'annoncer le prix que je paye dans la foulée. Je ressors de la boutique tout en songeant à quel point ça a été rapide.

J'ai de la chance, la librairie Fleury & Bott se trouve juste à côté. J'entre à l'intérieur. L'endroit est plutôt sombre avec des centaines d'étagères s'alignent devant mes yeux, seul un petit espace menant jusqu'à un comptoir est assez dégagé. Le reste est caché par les bibliothèques qui continuent de courir le long des murs et même en haut, sur une mezzanine. Je sors tant bien que mal la liste des livres que je dois acheter et commence à me balader dans les rayons quand un monsieur assez âgé aux cheveux noirs parsemés de gris m'adresse la parole.

« Bonjour, je suis M. Bott, que puis-je faire pour vous ?

— Oh, euh, pourriez-vous m'indiquer où trouver Le livre des sorts et enchantements niveau 5, de Miranda Fauconette, l'Histoire de la magie, de Bathilda Tourdesac, la Magie théorique, de Aldabert Lasornette, le Manuel du cours moyen de Métamorphose, de Emeric G. Changé... énuméré-je en lisant ma liste.

— Ce n'est pas la peine de tous me les citer, m'informe M. Bott d'un air amusé.

— Pardon ?

— Vous n'avez pas besoin de me dire chaque livre dont vous avez besoin, dites-moi simplement votre année ainsi que vos options et je vais vous chercher le tout.

— Oh, euh... très bien alors, euh... Je suis en 5ème année et j'ai pris toutes les options.

— Parfait, alors. »

Et à ces mots, il disparaît derrière les étagères, non étonné que je prenne autant d'options ni se soucier de mon identité. Poussée par ma curiosité, je décide d'explorer la bibliothèque en attendant. J'ignore dans quel rayon je me trouve, je me balade simplement à travers le magasin et aperçois juste vite fait les titres bizarres de certains livres sans intérêt particulier : Sciences de la Magie, Les lois de la Nature, L'osbcur livre des Ombres, Créatures en folie, Comment échapper à vos Cauchemars ?, Histoire de l'Enchantement... Tiens, qu'est-ce que c'est que ce livre ? Il ressemble étrangement à celui que ma tante a écrit, Histoire de la Magie.

Sans vraiment m'en rendre compte, ma petite balade à travers la librairie m'a menée à la mezzanine. Alors que je tends la main pour attraper l'étrange livre, ralentie par les vêtements que je tiens dans les bras, quelqu'un me devance. Nous nous battons un instant pour l'Histoire de l'Enchantement jusqu'à ce que nos regards se croisent. La personne en face de moi, qui s'avère être un garçon d'à peu près mon âge aux cheveux blonds et aux yeux bleus, lâche l'ouvrage, me l'abandonnant ainsi. Non contente de l'avoir récupéré, je me retourne aussitôt pour lire le résumé sans me préoccuper du gars avec qui je me le suis disputé. Dépitée de ne rien trouver au dos du livre pour lequel je me suis battue, alors que je m'apprête à l'ouvrir pour le feuilleter, je lève légèrement les yeux pendant quelques secondes. J'y croise de nouveau les prunelles bleues de l'adolescent. Celui me fixe d'un regard si pénétrant que j'en suis estomaquée. Et il me questionne d'une voix où domine la surprise.

« Qui êtes-vous ? D'où venez-vous ? Où étudiez-vous ? À Poudlard ? Je ne vous ai jamais vue ici ni là-bas. Que faites-vous ici ? Et pour...

— Bonjour, le coupé-je.

— Oh... euh... Pardon, bonjour.

— Je suis désolée, continué-je en lui tendant Histoire de l'Enchantement.

— Oh non, finalement je n'en ai pas besoin, je voulais juste y jeter un coup d'œil. Je connais l'Histoire de la Magie et ce titre me semblait étrangement proche.

— Oh moi aussi ! C'est la raison pour laquelle j'ai voulu prendre ce livre ! m'exclamé-je.

— Vraiment ?

— Oui !

— Ça alors !

— Drago, il est l'heure d'y aller », nous interrompt soudain une voix traînante et autoritaire.

Derrière l'adolescent, s'appelant donc Drago, se tient désormais un homme lui ressemblant beaucoup, sans doute son père. Ses longs cheveux blonds lisses et plaqués sur sa tête encadrent un visage anguleux où deux yeux d'un bleu glacial me jettent un regard méprisant. Il pose la main sur l'épaule de son fils pour lui signifier qu'il est temps de partir tandis que celui-ci me fait signe qu'il est navré de me quitter dans ces circonstances. Puis, ils s'en vont en me tournant le dos.

Je me retrouve donc seule, là-haut, sur la mezzanine d'où je vois tout le magasin, les yeux dans le vague. Un toussotement me fait reprendre mes esprits. M. Bott se tient face à moi, tous les ouvrages qu'il me faut dans les bras. Je tente de les attraper, mais je suis déjà encombrée par les nombreux vêtements qui constituent mon uniforme et la cage d'Athéna. Dommage que Rogue ne m'ait pas laissé le temps d'emporter un sac, cela aurait été plus pratique ! Devant ma difficulté, M. Bott me propose son aide en déposant lui-même les livres sur les vêtements qui forment désormais une sorte de hamac entre mes deux bras. Et je repars comme ça, dans cette position, non sans m'être contorsionnée pour attraper ma bourse et payer ces livres. À vrai dire, c'est plutôt M. Bott qui a pris ma bourse là où je le lui indiquais et s'est servi dedans en prenant ce que je lui devais tandis que je le surveillais du coin de l'œil.

Je fais demi-tour, reprenant ainsi le chemin de Gringotts. Il ne me reste plus qu'une chose à acheter désormais. Malgré le brouhaha de la rue, Athéna est étrangement calme et silencieuse pour une chouette. Je ne l'ai pas entendue depuis l'horrible grincement des chaussures de Mme Guipure. Ce qui me semble assez étrange. Mais cette inquiétude est mise de côté à l'instant où j'aperçois une boutique juste en face : Ollivander, fabricant de baguettes magiques depuis 382 AEC.

Je traverse immédiatement la rue et me précipite à l'intérieur de la boutique. Une sonnette retentit à mon entrée et je me cogne le genou contre une table près de la porte, faisant de ce fait tomber toutes mes fournitures par terre. Athéna exprime son mécontentement par un cri perçant. Je rassemble mes affaires et décide de les entasser sur cette fichue table pour éviter qu'elles ne m'encombrent. Puis, je relève la tête.

L'endroit est sombre et exiguë. Dans le fond, je distingue à peine une bibliothèque de boîtes, sans doute remplies par des baguettes. L'atmosphère qui ce dégage de ce lieu est étrange et j'ai beau connaître l'anecdote sur l'origine de ce magasin, je suis incapable de m'en souvenir sur le moment. Mon cerveau est comme bloqué, désemparé.

Malgré l'avertissement de ma présence provoqué par la cacophonie de mon arrivée, personne ne vient à ma rencontre. Pour me donner un peu de contenance, j'avance timidement vers le bureau face à moi.

« Bonjour ? Il y a quelqu'un ? Wouhou ? » apostrophé-je.

Personne ne me répond et je continue ma progression dans le magasin. En m'approchant petit à petit, je me rends compte que la boutique est plus grande que je ne le pensais. Effectivement, le mur à ma droite ne ferme pas complètement la pièce, il s'arrête à un ou deux mètres de la bibliothèque du fond. Celle-ci se prolonge en longueur et même qu'en face d'elle apparaît une étagère semblable, au coin de ce fameux mur.

Je poursuis mon exploration en m'enfonçant dans le couloir créé par les deux rayonnages. Les boîtes s'alignent tout autour de moi et je me dirige, guidée par mon instinct, je ne sais où. Alors que je me balade dans cette sorte d'allée, une boîte, deux étagères au-dessus de moi, attire mon regard. Mais au moment où je me mets sur la pointe des pieds et tends ma main pour l'attraper, un grincement de porte me fait retomber sur mes talons précipitamment et je me tourne brusquement en direction du bruit.

Un peu plus loin vers le fond de ce couloir, une bibliothèque vient de pivoter, laissant entrevoir un passage et un vieux monsieur au front dégarni qui en émerge, M. Ollivander.

« Bonjour. Que faites-vous ici ? s'enquiert-il d'une voix ténue mais non moins hostile.

— Euh... Je... Bonjour, réponds-je, quelque peu déstabilisée par son ton agressif. Je suis juste venue pour ma baguette magique. »

Il ne dit rien, mais même à cette distance, je vois ses sourcils se froncer et sens que je ne l'ai qu'à moitié convaincu. Je prends donc mon courage à deux mains et parle avec le plus d'honnêteté que je peux.

« Je suis ici car je sais que quelque part m'attend une baguette magique. Effectivement, à chaque sorcier correspond une baguette, qui ne lui est pas forcément destinée, mais lorsqu'ils se rencontreront, ils sauront qu'ils sont faits l'un pour l'autre. C'est d'ailleurs pour cela que pour qu'une baguette vous appartienne complètement, il faut la saisir par vous même. Quel que soit son passé, qu'elle vienne d'être créée ou ait déjà eu de multiples propriétaires : c'est la possession de baguette. Une baguette attend chaque sorcier bien qu'aucune baguette ne soit vraiment destinée à qui que ce soit. Je suis donc ici non pour acheter ma baguette magique mais pour la trouver. »

Un lourd silence s'abat suite à ces paroles. J'ai non seulement ressorti ce que je sais à propos de l'art des baguettes magiques, mais j'y ai aussi dit ce que je pense réellement. J'ignore si j'ai convaincu Ollivander ou pas et je commence à avoir peur qu'il ne m'éjecte de son magasin, quand il prend soudain la parole.

« Je vous crois, on dirait que vous récitez une définition du dictionnaire apprise par cœur, mais d'un autre côté je peux entendre la sincérité dans votre voix, déclare-t-il lentement, non sans m'avoir jeté un regard suspicieux (enfin j'ai l'impression, on est jamais sûr à cette distance et avec la pénombre). Veuillez m'excuser, enchaîne-t-il d'un ton plus doux, j'étais dans la remise et je ne m'attendais pas à trouver qui que ce soit à mon retour ni que cette personne se soit baladée dans ma boutique. J'espère que vous n'y voyez aucun inconvénient, mais il serait préférable de retourner ans la pièce principale. »

Il se dirige vers moi et m'indique de sa main le bout de l'allée par lequel je suis entrée. Je ne tarde donc pas à refaire le même chemin en sens inverse et beaucoup plus rapidement. Je longe les étagères avant de contourner le bureau. Je pivote sur mes talons pendant ce qui me paraît être une éternité. Je peux presque entendre le crissement de mes bottines sur le parquet et le souffle de l'air sur mon visage lors de ma rotation. Quand je me tiens enfin face à Ollivander, son visage passe brusquement du sourire penaud d'excuse à l'étonnement complet, ce qui me perturbe énormément.

« Lily ? murmure-t-il, éberlué.

— Pardon ? m'entends-je répondre, presque aussi surprise que lui.

— Oh... désolé... excusez-moi... Cet épisode me rappelait juste une de mes rencontres avec une cliente qui a fini par devenir mon amie, dit-il en semblant reprendre ses esprits.

— Ah... oh... euh... lâché-je, ne sachant que répondre.

— Bien, veuillez juste attendre un petit instant que j'aille chercher ce qu'il vous faut, continue-t-il maladroitement.

— Oh euh... bien sûr mais... »

Il disparaît sans que je n'ai le temps de terminer, dans le recoin sombre qui marque l'entrée du couloir où sont rangées de multiples boîtes de baguettes. Puis, il ne tarde pas à revenir, en fonçant les sourcils.

« Comment avez-vous dit que vous vous appelez déjà ?

— Euh... Je ne l'ai pas dit... donc... je m'appelle... Céleste Tourdesac, réponds-je, hésitante et troublée par la question.

— Pardon ? Vous avez bien dit... Tourdesac ?

— Euh... Oui, pourquoi ?

— Oh... ah d'accord. Eh bien, je vais voir ce qui pourrait vous convenir Mlle... Tourdesac. »

Et il se volatilise tout aussi rapidement que la première fois. N'empêche que je commence à en avoir assez que tout le monde conteste le fait que je sois une Tourdesac ! Non mais c'est quoi cette histoire ! Même si Ollivander ne l'a pas dit clairement, ça se voit bien qu'il a de sérieux doutes. Je pense chercher des informations du côté de Dumbledore. Rogue, c'est mort, il ne me dévoilera rien. Quant à ma tante, j'ai le pressentiment qu'elle ne sait pas grand-chose et qu'elle est sincère dans tout ce qu'elle m'a dit. Mon jugement est peut-être aveuglé par l'amour et la tendresse que je lui porte, je devrais peut-être quand même lui sonder l'esprit...

Il est vrai que jusqu'à présent, je n'ai pas voulu croire l'évantualité que je puisse être adoptée. Mais je commence sérieusement à douter même si je ne comprends toujours pas pourquoi tout le monde en fait un mystère. Je sens que quelque chose cloche et je suis prête à tout pour le découvrir !

Alors que je viens à peine de terminer de me faire cette promesse, Ollivander revient les bras chargés de différentes boîtes, estimant apparemment que je vais avoir besoin de tester plusieurs baguettes avant de trouver la bonne. Sans perdre de temps, il sort la première baguette d'une longue série, je le sens, et me la tend. Elle est en bois, d'une couleur marron-rouge foncé, avec un manche délimité par une entaille à dix centimètres de la base où se démarque une sphère. Alors que le fabricant de baguettes s'apprête à m'annoncer sa composition, je le devance inconsciemment.

« Bois de cerisier, crin de licorne, je dirais 25 centimètres, souple, chuchoté-je.

— Vous avez dit ? m'interroge Ollivander en fonçant les sourcils, peu sûr d'avoir bien entendu tandis que je fais de même, me rendant compte de ce que je viens de dire.

— Euh... Non... rien, réponds-je en rougissant légèrement de gêne d'avoir parlé à haute voix de quelque chose que je pensais ignorer. »

Je suis surprise par cette initiative inattendue qui m'apprend que je suis capable de reconnaître les caractéristiques d'une baguette en l'observant. Cela m'intrigue et je n'avais vraiment pas besoin d'un mystère en plus sur les épaules. À moins que tout ne soit lié... Peu importe, j'aurais bien le temps de penser à tout cela plus tard, pour le moment, la priorité est trouver ma baguette. Je saisis donc celle que me présente Ollivander en échange de la précédente et me concentre sur les sensations que je ressens. Mais rien. Ce n'est pas la bonne, nous n'avons aucune connexion. Je la secoue quand même pour être sûre, il ne se passe rien.

« Ce n'est celle-ci, annoncé-je tandis qu'Ollivander déballe une nouvelle baguette, torsadée et marron-miel.

— Essayez celle-ci, me dit-il tandis que je repose celle que je tiens avant de récupérer la suivante.

— Bois d'if, ailes de Billywig... Tiens, c'est inhabituel, un insecte dans une baguette... Et je dirais 18 centimètres, flexible, déclaré-je lentement dans un chuchotement. »

Un raclement de gorge d'Ollivander me sort de ma semi-transe. Je me ressaisis et agite la baguette dans l'espoir de voir apparaître une étincelle. Mais rien. Elle ne me convient pas. Je secoue négativement la tête et la place sur le bureau pour attraper la prochaine. Celle-ci d'un beige presque blanc est gravée de runes.

« Bois de bouleau, cœur de dragon, environ 31 centimètres, raide, murmuré-je une énième fois en me disant que ça finit par devenir agaçant.

— Bon, ça suffit ! s'exclame Ollivander.

— De quoi ?

— C'est la troisième fois que vous annoncez la composition de la baguette que je vous présente avant même que je n'en ai le temps !

— Oh ça ?! réponds-je, gênée et surprise.

— Comment avez-vous appris ?

— Je... Appris quoi ?

— À analyser les baguettes, pardi !

— Oh... Je... Ça ? Eh bien... C'est-à-dire que..., commencé-je, embarrassée. Je n'ai jamais vraiment appris. J'ai juste étudié l'art des baguettes...

— Ça alors ! C'est incroyable ! Exactement comme elle...

— Pardon, comme qui ? »

Le vieux vendeur de baguette devient subitement livide et semble vouloir balbutier quelque chose sans y parvenir. Je ne comprends absolument pas son comportement bizarre. De toute évidence, il me cache quelque chose. Je suis à bout, tout le monde me ment et j'en ai plus qu'assez. J'explose.

« STOP ! Vous n'en avez pas tous marre de me mentir ?! Ou vous vous en fichez ? Est-ce que vous avez la moindre idée de ce que je peux ressentir ? Abandonnée, perdue dans tous ces mystères. Voir tous ces gens questionner mes origines. Me dire que ma tante, avec qui j'ai partagé tout ma vie, qui m'a élevée, transmit tout son savoir, N'EST PAS MA TANTE ! Vous vous rendez compte quand même ?! Est-ce que vous vous en rendez compte au moins ? crié-je à travers toute la boutique, si fort que ma voix résonne encore sur les murs, avant de fondre en larmes. »

Secouée de sanglots incontrôlables, je déverse toute ma fureur et ma peine sur le sol du magasin. Je sens toute la rancœur que j'ai accumulée ces derniers temps s'en aller au fur et à mesure que mes larmes coulent. Cela me fait du bien.

Je finis par relever la tête, les yeux probablement rouges et gonflée, mais libérée. Je me sens mieux et renifle un instant avant de respirer un grand coup pour passer à autre chose. Je prend soudainement conscience de l'expression d'Ollivander. Il est estomaqué. Je sens alors la culpabilité m'envahir.

« Je suis désolée, je me suis emportée. J'ai enfin la possibilité d'intégrer une école de magie et de posséder ma propre baguette, mais cette opportunité est gâchée par les cachotteries qu'on me fait. Je ne pouvais plus le supporter et j'avais besoin de tout évacuer. Je m'excuse encore, je n'ai pas pour habitude de déverser ma colère sur les autres. Je sais que c'est injuste et... dis-je d'une voix pleine de remords avant que celle-ci ne se brise.

— Ne vous en faites pas, j'ignorais que vous ressentiez tout cela. C'est à moi de m'excuser aussi. Je ne vous ai pas très bien accueillie. Cependant, je crois que trouver votre baguette est notre priorité et nous avons encore beaucoup à faire pour y arriver.

— Vous avez raison, reprenons », réponds-je tout en gardant à l'esprit ma question sur la personne dont il parlait bien que j'ai déjà ma petite idée sur son identité.

Je teste encore une dizaine de baguettes dans une ambiance plus détendue sans pour autant arrêter d'annoncer leur composition. Le stock d'Ollivander finit par s'épuiser, il s'enfonce donc à nouveau dans les méandres de sa boutique pour aller me dénicher, je l'espère, ma baguette. Contrairement aux autres fois, il ne prend que peu de temps à revenir. Il ne tient qu'une seule boîte entre ses mains. Je remarque d'ailleurs un léger tressaillement dans ses doigts. Est-ce de la nervosité ou de l'excitation ? Je penche plutôt pour la première option au vu de l'expression de son visage. L'inquiétude s'y lit.

Je me détourne de sa tête pour glisser mon regard plus bas, sur ce que ses mains ridées portent. Je reconnais la boîte que j'ai failli attraper plus tôt avant qu'il ne surgisse de sa remise. Je ne la reconnais pas grâce à son apparence, mais parce que je ressens ce même sentiment d'attirance que précédemment. La boîte que je n'ai pu voir car cachée dans la pénombre, se dévoile enfin. Elle est bleu encre avec seulement un étrange symbole doré de spirales entremêlées que je ne pense pas être une rune, sur le dessus.

« Cette baguette n'a rien de spécial, mais elle est assez particulière pour moi. Je l'ai fabriqué en tandem avec un vieil ami. Gregorovitch si vous connaissez, m'apprend Ollivander.

— Vraiment ? Oui, je le connais ! C'est un excellent fabricant de baguettes bulgare ! Mais êtes-vous sûr que vous souhaitez vous débarrasser d'une telle baguette ? Après tout, c'est un peu une sorte de lien d'amitié avec lui, non ?

— Oui, j'en suis sûr. Et puis, je ne la confie pas à n'importe qui. Je sais qu'avec vous elle est entre de bonnes mains. Il ne reste plus qu'à vérifier que vous êtes faites l'une pour l'autre », conclue-t-il avec un air malicieux.

Tandis qu'Ollivander sort la fameuse baguette de sa boîte, je ne peux m'empêcher de remarquer qu'il doit me faire énormément confiance pour me révéler une telle chose, car Gregorovitch et lui se sont toujours prétendus comme de farouches rivaux alors qu'en réalité, ils ont plutôt l'air d'être de bons vieux amis. Et justement, mon vendeur de baguettes en a terminé avec l'emballage de son chef-d'œuvre cocréé et me le dévoile enfin.

Elle est d'un marron cannelle tendre. Son extrémité inférieure est composée d'un minuscule médaillon avec un motif de tourbillon qui se prolonge par un manche dont les deux torsades s'enroulent autour de la baguette jusqu'à devenir de plus en plus fines au fur et à mesure qu'elles se rapprochent de la pointe. Là, chacune finit son périple en s'entortillant comme elle le peut en une spirale. L'ensemble est magnifique. Une larme en viendrait presque à me taquiner l'œil. Après, je pense que c'est surtout un jugement subjectif, je n'arrive pas à croire que je puisse être autant émerveillée pour cette baguette et pas pour les autres. Je la saisis délicatement et immédiatement l'impensable ou plutôt l'évident, se produit. Une étrange lumière bleue claire fait luire la baguette en éclairant toute la pièce. Je sens une joie immense me parcourir. Une fierté sans nom remonte mon corps. J'ai l'impression que mon cœur bat à l'unisson avec ma baguette.

« Cela ne fait aucun doute, cette baguette est faite pour vous, déclare Ollivander.

— Pourquoi dites-vous ça ?

— C'est logique, non ? En plus de la lumière, du fait que vous semblez si heureuse, que vous ayez trouvé votre baguette en bref, vous n'avez pas donné sa constitution, instinctivement. C'est la seule à être parvenue à vous en empêcher jusqu'à présent, si je puis dire.

— Oh ! Vous avez raison. Effectivement, je n'avais même pas remarqué. Mais maintenant que vous le dites, je me rends compte que je la sais. C'est comme si c'était évident pour moi, comme si c'était ancré en moi. Noisetier, larmes crystalisées de phœnix, 26 centimètres, souple, déclaré-je avant de froncer les sourcils, surprise. Des larmes de phœnix ?

— Nous voulions tenter une nouvelle expérience.

— Oh, je vois... Et c'est sans danger au moins ?

— Oui, ne vous en faites pas, j'ai déjà vendu d'autres baguettes de ce type, tout comme mon confrère. »

Ollivander me sourit et je fais de même. Je paye ma baguette en silence et me dirige vers la table qui a causé mon petit incident lors de mon arrivée. J'attrape la cage de ma chouette tandis qu'Ollivander dépose sur mes bras les vêtements de mon uniforme, mes livres et pour finir, ma baguette.

« Êtes-vous sûre que vous ne voulez pas d'aide ?

— Mais oui, ne vous inquiétez pas. Je vais me débrouiller. Par contre, j'avais juste une dernière question, qui est cette Lily à qui je ressemble tant ?

— Oh... euh... dit-il, hésitant et gêné.

— S'il vous plaît, dites-moi simplement qui c'est.

— Très bien, comme vous voulez. C'est une ancienne cliente et vieille amie. Je l'ai perdue il y a une quinzaine d'années, m'avoue-t-il alors que la tristesse envahit ses yeux bleus.

— Je suis vraiment navrée, je ne savais pas... Je vais y aller je pense.

— Ce n'est pas grave. Au revoir et bonne journée dans ce cas.

— Au revoir et bonne journée à vous aussi. »

Je ressors de la boutique joyeuse, mais également troublée, il me reste encore plusieurs points à éclaircir. Cependant, je sens l'allégresse s'emparer peu à peu de moi. Je me mets donc à trottiner gaiement, avant de m'arrêter rapidement, je suis trop encombrée. Je regarde mes mains pleines, puis la cage d'Athéna. Celle-ci ne dit rien mais je sens bien qu'elle n'est pas à l'aise enfermée. Je la libère donc et elle s'envole, soulagée, comme délivrée d'un poids. Je m'en veux de ne pas y avoir pensé plus tôt.

Je décide de profiter du fait que la cage soit vide et encore propre pour m'en servir de sac. J'y range mes vêtements et mes livres. Je sais que ça peut paraître ridicule, mais au moins mes bras sont libres maintenant. Et surtout, ça y est, j'ai enfin terminé mes emplettes. Alors que je devrais attendre Rogue ici, je ne peux m'empêcher de céder à l'impatience et l'excitation procurées par l'acquisition de ma baguette qui sont renforcées par ma curiosité et de déroger à la règle. Je longe la rue jusqu'à Gringotts. Puis je continue au-delà, tourne au coude du Chemin de Traverse, et dépasse un panneau qui indique... L'Allée des Embrumes.

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