✨Chapitre 6✨Partie 3✨

En remontant dans sa chambre, il choisi de téléphoner à Kara. Il ne savait pas pourquoi, mais une petite voix le poussait à partager sa décision avec elle. Peut-être parce qu'il avait été assez odieux à chaque fois qu'elle lui avait parlé de rencontrer cette femme et que finalement s'il avait été capable d'en apprendre plus, c'était grâce à elle. Elle avait raison, il sentait que s'accrocher à cela, se donner un but lui faisait du bien.

« Allô ? Filipin ? »

« Ouais, c'est moi. »

« Pourquoi tu m'appelles si tard ? »

Il jeta un œil à son réveil, il était 22h. Plus trop le moment de déranger les gens chez eux. Tant pis.

« Je vais à Paris. Dimanche. Assa, la fille des lettres, elle donne un concert. »

« Je... attends Wow, c'est soudain comme changement d'avis, mais je suis contente. Je suis sûre que tu fais le bon choix. »

« J'voulais te demander... »

« Oui, dis moi ? »

« Tu voudrais m'accompagner ? »

« Vraiment ? »

« Ouais, je suis pas sûr d'avoir le courage d'aller au bout si je suis seul. Je pourrais me défiler, faire demi-tour à deux pas du but. »

« Oui. Oui, ce serait super, bien sûr que j'accepte ! T'as prévu de partir quand ? Expliques moi tout. »

Son enthousiasme conforta un peu Filipin dans son choix. Et c'était un peu étrange, mais depuis qu'ils avaient eut cette discussion le soir de la soirée, même si elle s'était soldée par un rejet, il se sentait plus proche d'elle. Alors il se lança dans les explications, et plus il lui parlait, plus son idée lui semblait sensée. Et Kara qui s'émerveillait à l'idée d'aller à Paris ne l'aidait pas à remettre en perspective cette idée assez fantasque.

« Oh ! Tu sais quoi ? On va dire à Flora de venir aussi. Comme ça quand tout sera fini, on pourra un peu visiter Paris entre amis, ce sera sympa. D'ailleurs tu pourrais aussi dire à Macéo de venir. Même à... »

« Hé doucement, c'est pas une colonie de vacances, on part une journée, on fait l'aller retour. »

« Ok, Ok. J'm'emporte un peu. Mais on peut quand même au moins demander à Flora. En plus elle vient de me dire que son frère repart dans sa coloc, que le début du trajet est sur la même route alors il pourra nous éviter un peu du trajet en train. »

« Donc tu lui as déjà demandé... pourquoi tu me demandes mon accord si tu l'as déjà fait ? »

« Question de principe. » Pouffa-t-elle. « Et puis tu sais, elle est en froid avec ses parents depuis la soirée, on a oublié ses cousins et on est restées dormir chez Hugues. La baby-sitter est restée toute la soirée, jusqu'au retour de ses parents, et ils ont pas trop apprécié de découvrir une inconnue dans leur salon à 4h00 du matin. Elle a un peu besoin d'un petit voyage comme ça pour prendre un peu d'espace. »

« C'est d'accord, on y va tous les trois. » Concéda Filipin.

Les deux filles l'avaient rejoint devant chez lui un peu avant l'aurore. Il était sortit en douce, pour ne pas réveiller sa mère, il n'avait pas trouvé comment lui dire, alors il avait choisi de garder le silence. Avec un peu de chance, sa mère ne remarquerait pas son absence, c'est vrai que ces derniers temps leurs emplois du temps étaient assez incompatibles, ils se voyaient peu. Et si elle découvrait, elle commencerait sûrement par l'appeler et alors il pourrait prétexter passer la nuit chez un ami, avec une invitation de dernière minute.

Un peu plus loin, il remarqua la voiture du frère de Flora. Le trajet n'allait pas être de tout repos, le modèle était ancien, et ils allaient devoir s'entasser s'ils voulaient tous passer. Néanmoins, désormais la décision était prise, Filipin ne ferait pas un pas en arrière. Adossé à la carrosserie beugnée çà et là, le frère de Flora, qui fumait une cigarette en les attendant. Super, il pouvait ajouter odeur de cigarette à la liste des inconvenants de ce voyage. Mais au moins il était gratuit.

« Bon, on y va ? » demanda Kara.

Filipin acquiesça, puis, au dernier moment, s'arrêta. Il tourna la tête vers son balcon, puis celui d'en face. La chambre de Calixte. La fenêtre était entrouverte, comme souvent. Alors il dit :

« Ok, attendez moi juste cinq minutes, j'ai oublié un truc. »

Et il remonta en trombe dans son appartement sans laisser le temps à qui que ce soit de protester. Il débarra la porte, traversa le salon et ouvrit la baie vitrée, tout cela en tentant d'allier silence et efficacité.

En le voyant sur le balcon, Flora lui dit, dans un espace de cri chuchoté :

« Tu te fous de nous ? Tu nous retardes juste pour regarder une dernière fois la vue depuis ton balcon ? Tu sais que tu vas revenir quand même, c'est pas comme si on allait mourir pendant ce voyage. »

Elle le vit enjamber la rambarde. Kara mit une main sur sa bouche, partagée entre crainte, surprise et appréhension.

« Ok, j'avais tords, tu peux carrément mourir pendant ce voyage, je reconnais mon erreur, maintenant tu peux te remettre du bon côté du garde corps et redescendre ? »

Il ne l'écouta pas et d'une poussée, s'accrocha au balcon d'en face, non sans un glissement qui arracha un cri à Kara.

Une fois sur le balcon de Calixte, il ouvrit un peu plus largement la fenêtre et pénétra dans la chambre. Il se rendit compte en observant ce décor qui lui était inconnu, que c'était la première fois qu'il venait chez le bouclé.

Ce dernier était paisiblement assoupi sur le lit au fond de la pièce. Il semblait s'être endormi sans le vouloir réellement, car il était au dessus de drap, couvert d'un simple plaid en pilou, la joue posée sur un livre ouvert et des lunettes de lecture qui remontaient un peu.

Filipin ne put s'empêcher de lui trouver un certain charme. Endormi ainsi, comme sur le vif, ses bouclettes encadrant son visage même pas sur l'oreiller, il était adorable. Tant, qu'il hésita un instant à s'approcher. Comme s'il ne voulait pas troubler ce si joli tableau. Mais d'un autre côté, il était attiré vers lui comme un papillon par la lumière. Il fit un pas, puis un autre, et encore un, jusqu'à se retrouver juste au bord du lit. Il tendit une main, et, du bout des doigts, effleura la joue de Calixte. Ce dernier gémit dans son sommeil, comme en proie à de désagréables songes. De plus près, il n'avait plus l'air si paisible. Et Filipin voulu faire un pas en arrière, pour retrouver la quiétude de tantôt. Il n'en eut pas le temps, Calixte se réveilla, presque dans un sursaut, et, distinguant la silhouette proche de son lit ne put retenir un cri avant de sauter sur l'interrupteur de sa lampe de chevet. Ses yeux, tout comme ceux de Filipin, mirent un temps à s'adapter à la luminosité ambiante, et à reconnaître la personne qui se tenait en face de lui.

« Mais ça va pas, tu m'as foutu une de ces trouilles, t'es malade de faire ça ! Et puis comment t'es rentré ? »
Son ton état un mélange entre le choc, l'énervement et le soulagement de voir qu'il ne s'agissait que de Filipin, le tout chuchoté, comme pour le pas déranger la nuit elle-même.

« J'suis passé par mon balcon. Ta fenêtre était ouverte. D'ailleurs tu devrais la fermer quand tu dors, c'est dangereux, n'importe qui pourrait rentrer. Imagine si j'avais été un type louche. »

« Mais t'es un type louche ! Tu viens chez moi en pleine nuit ! »

Calixte était sur la défensive et Filipin ne comprenait pas trop pourquoi. Il pensait -peut-être naïvement- que leur discussion l'autre matin avait suffit à passer l'éponge sur leurs différents.

« J'voulais juste te proposer de m'accompagner à Paris. »

« Qu... Quoi ? Mais c'est du délire, tu le sais ça ? Ok, je sais, j'ai rêvé que je me réveillais mais en vrai je dors toujours, un peu comme dans inception de Christopher Nolan. T'es juste une création de mon subconscient. »

« T'es vraiment bizarre, tu le sais ça ? »

« Dixit le mec qui s'introduit chez ses voisins en pleine nuit pour leur proposer un voyage à Paris. »

Calixte tordait nerveusement ses doigts, comme s'il n'arrivait pas à calmer son agitation. Filipin qui l'avait toujours vu plutôt calme, posé, ne comprenait pas trop son attitude. Il voulait lui poser la question, pour savoir ce qui n'allait pas, mais il ne trouvait pas les mots pour la formuler. Un simple ça va lui semblait bien trop vide de sens, sans saveur. Parce que la plupart des gens quand ils le demandaient n'attendaient pas de réponse sincère, c'était plus comme une formule de politesse, parce qu'il était d'usage de sembler s'intéresser un minimum à son interlocuteur.

Un ange passa avant que Calixte ne demande :

« Bon, c'est quoi le bail, tu m'expliques ? »

« Je veux retrouver la femme qui envoyait les lettre à mon père. Tu sais, les lettres que tu as trouvées. »

Calixte se crispa, presque imperceptiblement, mais cela n'échappa pas au châtain. »

« J't'en veux pas tu sais. D'avoir fouillé. Je pense même qu'en un sens, ça m'a aidé. J'aurais jamais eut les tripes de le faire seul, ouvrir cette boite. Et aussi, je suis désolé de t'avoir foutu dehors et de ne pas m'être excusé avant. J'ai pas assuré. »

« Ok. »

« Ok ? Genre c'est tout ? »

« C'est juste que... » Il eut l'air de réfléchir à la tournure de sa phrase, puis se jeta à l'eau. « Tu sas, j't'ai dit pour la phobie sociale... et bah à cause de ça, j'ai jamais invité personne à venir chez moi, pour jouer, ou faire des devoirs. Et... ça a l'air tout con dis comme ça, mais t'es la première personne que je fasse rentrer dans ma chambre. Bien que techniquement, tu t'y es plutôt invité de toi-même. En fait, t'es la première personne à me donner l'impression d'être normal. Et je dis pas ça parce que tu es aussi giga bizarre et qu'a côté je pourrais passer pour sain d'esprit, juste parce que je me sens bien avec toi. »

Il eut peur d'en avoir trop dit, quand seul un silence concerné de la part de Filipin lui fit écho. Alors il ajouta :

« Mais BREF, je suis désolé si j'ai l'air un peu nerveux. C'est juste que voir quelqu'un dans ma chambre c'est bizarre. Même mes parents évitent d'y entrer le plus possible. C'est comme mon cocon personnel, que personne ne peut souiller. »

« J'ai fait une connerie en venant ici ? J'veux dire ça te met mal à l'aise que je sois là ? »

« Ça, j'ai pas encore décidé. Mais comme je t'ai dit, tu me fais me sentir bien. Même maintenant. »

Filipin remercia le fait que la petite lampe de Calixte n'éclaire pas grand chose, ainsi, le bouclé n'aurait pas à discerner les rougeurs qui lui courraient sur les joues, et il n'aurait pas à les expliquer.

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