✨Chapitre 3✨Partie 3✨
Le lendemain, il se réveilla une fois de plus avant sa mère. Il entra dans la cuisine et découvrit qu'elle lui avait préparé un petit déjeuner avant d'aller se recoucher. C'était son jour de congé. À coté du bol de céréales, se trouvait un papier, signé. Le formulaire d'inscription pour le club cinéma. Il se rappelait vaguement l'avoir laissé traîner avec le reste de ses affaires sur le plan de travaille la veille. Il avisa son sac posé un peu plus loin dans lequel les cahiers qu'il avait également laissés sortis avaient été rangés. Son premier réflexe fut de s'énerver. De quel droit sa mère fouillait ses affaires ? Mais il se contint. Cette colère, il commençait à la connaître. Elle était violente, infondée et surtout, une fois que la vague était passée, il la regrettait toujours. Alors il choisit, au moins ce matin, de l'enfouir en lui, de ne pas l'écouter.
Son déjeuner englouti, il passa son sac à dos et claqua la porte de l'appartement, non sans avoir jeté un regard vers Moustic qui dormait dans le canapé et s'être demandé s'il devait le prendre pour le déposer chez Calixte.
Une fois sortit, il se posta sur les marches, devant la petite cour où il avait l'habitude de faire du skate étant gosse. Il dégaina son smartphone et envoya un message à Macéo.
A Macéo :
J'suis devant l'immeuble, bouges-toi si tu veux qu'on prenne le bus ensemble
La réponse ne tarda pas à arriver, sous la forme d'un petit brun essouflé, il avait dû courir dans les escaliers, de peur de rater sa chance.
« Je suis là ! » Éructa-t-il entre deux respirations laborieuses.
Il avait le don de pointer du doigt les évidences.
Filipin lui accorda un petit sourire avant de se mettre en route. Sur ses talons, Macéo tentait toujours de reprendre une respiration normale. Il n'y parvint qu'une fois assis dans le bus et Filipin lui dit :
« T'étais pas obligé de courir tu sais. »
« Tu te fous de moi ? Tu veux que je te relise le message que tu m'as envoyé ? » S'indigna le plus petit.
« Je t'aurais attendu. »
« Bah la prochaine fois fais-le savoir plus clairement ! »
Son ton était boudeur, mais Filipin savait qu'il ne lui en voulait pas vraiment. Intérieurement, il était ravi d'avoir dissipé le malaise entre eux deux.
En ayant fini avec son petit côté râleur, Macéo se tourna vers Filipin, soudain comme captivé par une idée :
« Dis, j'ai vu que tu parlais à ce garçon, dans l'immeuble d'en face. Comment tu l'as rencontré ? Il sort jamais de chez lui à ce qui parait. »
« Comment tu sais ça ? »
« Qu'il sort pas ? Ou que tu le connais ? »
« Les deux. »
« Je t'ai vu parler avec lui l'autre jour. Je revenais de la boulangerie, parce que j'avais eut une soudaine envie de chouquettes, mais bref ça on s'en fout, et vous étiez tous les deux devant la porte de l'immeuble. Et je sais qu'il sort pas de chez lui parce que ma mère est allée aider la sienne une fois, pour une histoire de litige avec leur proprio. »
La mère de Macéo travaillait comme conseillère juridique et il n'était pas rare qu'elle dépanne gratuitement dans le voisinage pour des cas relativement simples.
« Donc, comment vous vous connaissez ? »
« Une histoire de chat. Il a trouvé un chat abandonné une nuit, j'l'ai vu le récupéré et depuis je le garde chez moi la nuit et le lui redépose le matin. Ses parents, je sais plus si c'est sa mère ou son père, sont allergiques, alors il peut pas l'avoir chez lui quand il sont là. »
« En gros t'es un genre de garderie pour chat ? »
« Nan. Il a insisté, c'est pour ça que j'ai accepté, mais ça ne me fais pas plus plaisir que ça. »
« Je sais pas pourquoi, mais j'ai un peu de mal à te croire. »
Filipin haussa les épaules, comme pour signifier à son ami que ce qu'il croyait lui importait peu.
« Au début, j'ai cru que t'essayais de me remplacer par le type de l'immeuble en face, mais en fait j'avais tout faux. La vérité c'est que vous avez adopté un chat et que vous faites la garde alternée. C'est mignon, on croirait un vieux couple de deux papas gays divorcés. » Le taquina-t-il.
« Premièrement tu racontes n'importe quoi, et deuxièmement, même si c'était le cas, je vois pas en quoi ce serait mignon. » Soupira-t-il. « Et je suis pas gay. » Crut-il nécessaire d'ajouter.
« Oh s'il te plait, ne me dis pas que mon plus vieux pote va se révéler, un beau matin, comme tous les autres matins, dans le bus pour aller au lycée, être un connard homophobe. » Se lamenta Macéo, dramatique.
« Ça n'a rien à voir. Juste dire qu'un couple gay est mignon juste parce que c'est un couple gay, c'est stupide et ça peut-être blessant. J'sais pas, la sexualité ce n'est pas la seule chose qui définit une personne. Faudrait arrêter de couler sur le dos de n'importe qui des stéréotypes bidons à cause de ça. »
« Mec, j'trouve ça admirable que t'aies à coeur de défendre les minorités, mais ce que je disais mignon, c'était juste le fait de faire de la garde alternée pour un chaton. » Rit Macéo.
Filipin se rendit compte qu'il s'était peut-être emporté un peu trop vite. Il savait même pas pourquoi. Comme si le sujet lui tenait à cœur, le concernait. Il pensa à Calixte. Aux choses que le garçon éveillait en lui. Et si c'était plus que ce qu'il s'était figuré ? Il n'était pas certain d'avoir envie de le découvrir, d'autant plus que pour cela, il faudrait qu'il se réconcilie avec lui, et il ignorait comment faire. Il avait toujours été nul pour présenter ses excuses.
« Filipin ? »
« Oui ? »
Il se tourna vers Macéo qui était debout.
« Bah tu viens, on est arrivés. »
Il releva la tête et vit qu'ils étaient déjà devant le lycée. Macéo lâcha un petit rire moqueur devant l'air désorbité de Filipin.
« T'as l'air complètement dans le gaz, t'es sûr que t'as pensé à dormir genre... ces deux derniers mois ? »
La question était ironique, réthorique, alors Macéo ne prit pas la peine d'attendre une réponse, qui dans le cas contraire aurait été négative.
Non. Non il n'avait pas prit le temps de dormir correctement. Pas depuis un moment déjà.
Au sortir du car, ils allèrent directement rejoindre leur groupe d'amis, et Filipin fit un effort pour prendre part aux discussions, pour s'y intéresser vraiment, sans écouter la petite voix en lui qui soufflait que s'il faisait cela, s'il retournait dans la peau de l'élève un peu moyen, qui aime s'amuser plus qu'étudier, et rayonne au sein du groupe, s'il redevenait la copie conforme de celui qu'il était avant, ce serait comme si rien avait changé, comme s'il reniait la mort de son père, exactement comme sa mère.
Il parvint à ignorer cette idée pourtant déjà bien implanté et dans sa tête et dans son âme, pendant toute la matinée. Et il avait presque l'impression de respirer à nouveau. Mais bien vite la culpabilité, les remords et la rage le rattrapèrent. Aussi, il choisit de s'isoler le temps du repas. Il prétexta un rendez-vous bidon et se rendit au deuxième service de la cantine.
Il alla s'asseoir à une table libre au fond de la cantine, seul. D'un regard presque dédaigneux, il avisa les trois items présents su son plateau. Une compote à la banane -quel était l'idiot au conseil d'admin qui avait choisi de commander ce parfum ?-, une assiette avec un genre de steak -végétal- perdu au milieu d'une dizaine de grains de riz à la couleur douteuse et un petit pain blanc à moitié cuit. Appétissant...
Il aurait dû se préparer un repas chez-lui avant de partir. Il se le répétait tous les jours depuis son entrée au lycée sans jamais vraiment passer à l'acte, mais ces derniers temps il avait l'impression de se faire de plus en plus la réflexion. Peut-être parce qu'il passait de plus en plus souvent le temps de midi perdu dans ses pensées, sans conversations avec ses amis pour le distraire du goût peu ragoûtant de ce qu'il y avait dans son assiette
Du bout de la fourchette, il tâta sa viande -conglomérat de légumes ?-, chassant les grains de riz sur la croûte, et au terme d'un effort intense, il en coupa un morceau et le porta à ses lèvres. Mais au dernier moment, une main se posa sur son épaule, le bousculant, entraînant la chute de son bout de nourriture non-identifiée directement sur son pantalon.
« Tiens ! »
Une barquette de salade de carottes sans doute faite maison apparut directement sous son nez, accompagnée d'un parfum doux de fleurs d'été alors qu'une mèche de cheveux blonds tombait dans sa nuque.
Il sursauta.
« Des carottes ? »
Il ne comprenait pas pourquoi Kara se tenait devant lui, un grand sourire aux lèvres avec à la main une salade de carottes. Ceci dit, cette salade avait l'air bien plus appétissante que ce qu'il avait dans son assiette. Il s'en saisit.
« Oui, ça rend aimable. Je me suis dit que tu en aurais plutôt besoin. »
Il regretta. Il aurait dû la lui laisser entre les mains. Il hésita une seconde à la lui rendre, mais un coup d'œil à son plat de cantine le décida à ne pas le faire. Il se contenta de lui jeter un regard mauvais, ce à quoi Kara répondit par un sourire encore plus éclatant, fière de sa petite pique, et elle s'installa à sa table, sur la chaise à côté de lui.
Il choisit de ne pas faire de remarque, et commença ses carottes. Kara de son coté sortit une petite boite à repas aux couleurs pastels à l'intérieur de laquelle tout était trié, agencé à la manière d'un joli Tetris coloré. Après avoir installé toutes ses petites affaires, elle releva le visage, parcourut la fouille du regard et, avec un sourire, elle se leva spontanément pour faire signe à quelqu'un.
Quelques secondes plus tard, Flora les rejoignit à son tour et s'installa face à Kara.
« Salut Bichette, regarde, j'ai amené des carottes à notre ami Filipin. Comme cela il sera peut-être un peu plus conciliant tout à l'heure pour les activités de club. »
« Tu m'en vois ravie. Peut-être aussi que ça le rendra plus tolérant. »
Celle-là, il l'avait plutôt mérité. Il laissa passer la remarque, le regard sur ses carottes, mais le blanc qui s'en suivit l'obligea à relever la tête.
« C'est le moment où tu t'excuses. » Souffla Kara, comme s'il s'agissait d'une messe-basse, mais que toute la tablée pouvait entendre.
Presque forcé il s'obligea à relever le regard, croiser celui de Flora et il lui dit :
« Désolé. Pour la dernière fois. J'ai été con. »
Il était néanmoins sincère. Il n'aurait pas dû se comporter si mal avec la jeune fille la dernière fois qu'ils se sont vus. C'était simplement un mauvais moment dans une mauvaise journée -dans une mauvaise vie, aurait voulu rajouter sa conscience, perfide-.
Flora ne répondit rien, le laissant dans un espace de malaise, parce qu'il ne savait pas s'il devait considérer qu'elle avait accepté ses excuses ou bien qu'il devait en rajouter une couche. Il ne voulait pas paraître insistant, mais il avait fait une erreur, il le reconnaissait, et il ne voulait pas que la jeune fille reste blessée à cause de cela.
C'est Kara qui dissipa le malaise. Avec une invitation.
« Vous savez qu'Aline et Hugues organisent une soirée ? Ils veulent fêter leurs deux mois ensemble et se sont dit que se mettre une race avec tout le lycée était une meilleure idée qu'un diné au chandelles. Tu y vas toi Filipin ? »
« Euh... J'en sais rien... »
Il n'avait aucune idée de l'existence de cette soirée, et pourtant, les deux organisateurs faisaient parti de son cercle d'ami. C'était bien la preuve de son inattention. Il se laissait porter par le courant, suivait le groupe, mais ne leur accordait plus toute l'importance qu'il leur devait.
« C'est quand ? »
« Je sais pas trop, à la fin de la semaine je crois. Attends, je vais demander sur le groupe. »
Elle sortit son téléphone à la coque en fausse fourrure et pianota rapidement dessus.
Filipin osa un regard vers Flora.
« Tu... tu comptes y aller à cette fête ? »
« Pourquoi j'irais pas ? » Répondit-elle, presque avec dédain.
Filipin se décomposa.
Merde. Il avait encore dit un truc qui fallait pas ?
Mais contre toute attente, la jeune fille éclata de rire. Un rire chaud qui illuminait son visage. Elle rayonnait.
« C'est bon, j'te fais marcher. Ça dépends de quel jour ce sera. Parce que ce week-end je dois garder des gosses. »
« Tu fais du babysitting ? »
« Et même pas rémunéré ! C'est de l'abus de mineur, je me tue à le dire à mes parents, mais ils répètent que non, c'est comme ça en famille, on se serre les coudes et on s'entraide. Donc pendant que ma cousine va passer une soirée pépouze avec son gars, moi je me tape ses mioches à border. En plus je suis sûre que leur programme c'est genre Netflix and Chill. Comme s'ils pouvaient pas le faire avec leur gosses dans la chambre d'à côté ! »
« L'écoute pas rager. En fait, elle adore ses petits cousins. A chaque fois qu'elle doit les garder, elle me spam de cent photos la minute. Je connais leur emplois du temps en temps réel, mieux qu'une enquêtrice du FBI. » Rectifia Kara en souriant.
Filipin trouvait leur compagnie rafraîchissante. Il se sentait un peu mal de penser cela, parce que ça revenait à dire que ses amis l'ennuyaient, mais traîner avec elles deux sortait de la routine, faire de nouvelles rencontres, c'était un changement bien trop appréciable dans sa vie monotone du moment.
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