✨Chapitre 1 ✨Partie 1✨
Les vacances d'été étaient passées à une lenteur abominable. D'ailleurs, pour Filipin, elles n'avaient rien eut de vacances. Deux mois d'angoisses et de douleurs, tout au plus. Sa mère s'était soudain prise d'une passion dévorante et chronophage pour son travail, tant et si bien qu'elle prenait autant d'heures supplémentaires qu'il lui était possible. Hormis cela, rien n'avait changé. Ils n'avaient même pas abordé le sujet une seule fois. Bien sûr il y avait eut un enterrement. Un enterrement avec un cercueil vide. Encore un simulacre, un rituel empli de fausseté. Le genre de chose que Filipin détestait. Tout ce qu'il voulait, c'était hurler, crier, pleurer du plus fort qu'il pouvait. Montrer au monde entier à quel point il allait mal. Mais pourtant, il n'avait pas versé une seule larme le jour de l'enterrement. Tout ce qu'il avait été capable de ressentir était une fureur, presque de la haine, immense. Et depuis, elle ne cessait de croître. Tant que ça en devenait effrayant. Il avait peur que s'il la laissait grandir encore, elle finisse par le bouffer, tout entier. Il ne savait même pas contre qui diriger sa haine, alors il la laissait s'en prendre à tout le monde, parce qu'au fond, celui a qui il en voulait le plus, c'était peut-être lui-même.
Dans un soupir, Filipin se releva de son lit dans lequel il était resté affalé toute la journée. Cette journée et celle d'avant, celle d'encore avant également. Il aurait aimé que sa mère le secoue, lui dise de mettre le nez dehors, qu'importe. Mais elle n'était presque jamais à la maison pour le voir. Elle avait toujours beaucoup travaillé pendant les périodes de vacances, mais jamais à ce point-là. Et en même temps, à chaque fois qu'il la croisait, il ne pouvait s'empêcher d'être désagréable, cassant. Parce qu'il ne supportait sa manière de faire comme si rien ne c'était passé. Bordel, son père était mort ! Ce n'était pas rien cela quand même ! Et pourtant le monde entier semblait l'ignorer. Même à lui il pouvait pendant quelques secondes certains jours lui arriver de l'oublier, tant rien n'avait changé. Parce que son père avait toujours été à l'autre bout du monde, pour son travail, il n'avait jamais été le genre de parent à venir le border le soir. Ça rendait le manque plus ténu mais ne réduisait en rien la douleur. Pourtant, la terre ne s'était pas arrêtée de tourner, le soleil se levait toujours chaque matin, rien, strictement rien n'avait changé. Et la rentrée avait toujours lieu en septembre. Dans moins d'une semaine. C'est quand il pensait à cela que la lenteur avec laquelle s'étaient écoulés les deux mois de vacances prenait toute sa dimension paradoxale, parce qu'il lui semblait que la rentrée arrivait bien trop rapidement. Il n'avait aucun envie de se remettre dans la peau de l'élève de classe de terminale, qui n'a en tête que l'obtention de son bac à la fin de l'année.
Debout au milieu de sa chambre, il fit quelques pas et se pencha à la fenêtre. Le ciel était noir, constellé d'étoiles. Les étoiles. C'était l'obsession de son père. Ce pourquoi il était partit travailler aussi loin et ce pourquoi il n'était jamais revenu. Les étoiles l'avaient englouti, au sens propre comme au figuré. Et il leur en voulait terriblement pour cela. Il les blâmait de tout son être, les détestait. Il aurait voulu pouvoir les souffler, toutes d'un coup, comme de simples bougies. Les éteindre, les faire disparaître. Comme si les voir briller était un affront. Mais cela était impossible et il n'avait d'autre choix que de supporter leur chatoiement insolent heures après heures, nuits après nuits.
Il faisait face à un incroyable manque de sommeil, au point que ses paupières semblaient aussi lourdes que des portes de prisons, drôle de choix de mot d'ailleurs, parce qu'à chaque fois qu'elles se fermaient, c'était bien dans une prison mentale qu'il s'enfermait. Un cachot qui recelait de tant et tant de souvenirs qu'il refusait de classer comme tels. Il refusait d'accepter qu'ils ne fussent plus rien que de vieux moments avec un arrière-gout de jamais plus. Alors pour s'échapper de cette geôle, il luttait contre le sommeil, gardait les yeux ouverts tant qu'il pouvait, parfois jusqu'aux aurores. Qu'importe s'il devait s'en détruire la santé.
Le jour de la rentrée ne fit pas exception, et c'est les yeux ensommeillés, les cils presque collés entre eux, qu'il se leva. Il était 06h37, soit presque une heure avant que son réveil ne sonne, mais cela faisait déjà plusieurs heures qu'il était allongé dans son lit à fixer le plafond froid, et il savait qu'il ne dormirait plus. Il descendit les escaliers sans faire de bruit, pour ne pas réveiller sa mère. La veille encore, elle avait fait des heures supplémentaires jusque tard dans la nuit. Une fois dans la cuisine, il prit une simple biscotte et un café, noir. Mauvaise habitude qu'il avait prit pendant ses révisions pour le bac de français il y a de ça quelques mois. Tout cela semblait si lointain. Au début, il trouvait la boisson infâme et l'arrière-goût persistant le dégoûtait, mais c'était un stimulant dont il avait besoin lors des longues soirées à faire des fiches de révision. Maintenant, il était loin d'en avoir besoin, ce serait plus des tisanes nuit calme qu'il lui faudrait, mais l'habitude était restée, et le goût ne lui semblait plus si âpre.
Il déposa sa tasse dans l'évier et caressa un instant l'idée de préparer un petit déjeuner pour sa mère quand elle se réveillerait, après tout il en avait largement le temps, mais il n'en avait pas l'énergie, ni l'envie. C'était horrible à avouer, mais il n'avait pas envie de lui faire plaisir. Il se doutait pourtant que c'était dur pour sa mère comme pour lui, peut-être même plus, mais sa façon de faire comme si rien n'avait changé l'énervait au plus haut point. Tant et si bien que rien que le fait d'avoir une simple discussion avec sa mère pouvait le rendre furieux, irascible. Alors il ne s'attarda pas plus et quitta l'appartement.
Le mois de septembre était froid et venteux. La simple veste en jean noire qu'il portait était un peu jeune pour la saison. Il aurait au moins dû mettre une écharpe. Ça le tuait de l'admettre, mais sa mère avait raison quand elle lui avait dit la veille de s'habiller chaudement. Il glissa ses mains dans la poche kangourou de son sweat et, tête baissée pour se protéger du vent, il avança jusqu'à l'abris bus. Le prochain adage était prévu pour dans quelques minutes. Filipin était en avance, de beaucoup, il pourrait prendre le temps de faire un arrêt en ville prendre un autre café, histoire de se donner un peu de courage avant d'affronter cette journée de rentrée. Terminale. L'année du bac. Si d'aucuns avaient hâte ou se sentaient enthousiasmés par cette perspective, ou juste terrorisés, pour Filipin, il n'en était rien. Tout ce qu'il voulait, c'était rester roulé en boule dans sa chambre, que le monde soit témoin de sa souffrance. Il voulait aller pleurer dans les bras de sa mère et que cette dernière le berce comme lorsqu'il était enfant. Il avait besoin d'elle, de sa maman. Mais cela, il était incapable de se l'avouer. Il le gardait terré au fond de lui-même, l'occultant méticuleusement, comme on cache un secret trop honteux.
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{J'ai décidé de diviser mes chapitres en 4 sur cette histoire, pour qu'ils aient plus ou moins le même nombre de mots que ce que je publie habituellement, en plus c'est ainsi plus facile pour vous de vous arrêter et de reprendre la lecture plus tard que sur un chapitre de 6 000 mots. BREF, n'hésitez pas à me donner votre avis, sur cette première partie et les suivantes, elles arrivent dans la foulée ♥️♥️}
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