Rien à perdre

Un couteau en main l'autre la menace, mais elle ne peut abandonner son butin. Dans la rue il faut savoir défendre coûte que coûte sa nourriture, on ne sait jamais quand on aura une autre occasion d'en trouver. Elle examine l'homme devant elle, un vrai, pas un qui a encore un pied dans l'enfance comme elle. Comment tenir bon face à lui ?

– Eh toi ! fait une voix.

Le même éclair de panique brille dans les yeux de l'agresseur et de l'agressée. Aucun d'eux n'aime la police. Ils s'apprêtent à fuir mais l'homme qui s'avance n'est clairement pas un flic. Il est grand, majestueux, ses cheveux blonds commencent à fuir ses tempes , il porte un long impair sombre et garde les mains dans ses poches.

L'homme au couteau se tourne vers lui et Alise en profite pour fuir. Il vaut mieux ne rien voir quand on vit dans la rue. Une fois un peu à l'écart elle reprend un rythme de pas normal et s'assoit au bout de quelques rues pour manger son sandwich. Dès la première bouchée le plaisir s'empare d'elle. C'est si bon ! Combien de temps cela fait-il qu'elle n'a pas mangé quelque chose de frais ?

Mais une ombre se dresse devant elle, l'homme blond, l'inconnu qui n'est pas de la rue. Elle prend peur. Elle sait très bien ce qu'on peut faire aux jeunes filles, encore plus quand elles ne sont personne, comme elle. Mais il va découvrir qu'elle a des dents. Elle se dresse comme prête à attaquer.

— Tu n'as plus rien à craindre de lui. Viens que je te ramène chez toi !

Elle range son sandwich et se lève l'air docile. Mais une fois debout, elle lui envoie un coup de pied dans les parties avant de courir. Mais d'un coup, sans qu'elle comprenne pourquoi, elle ne peut plus bouger, pas même un doigt. Elle tente pourtant de se débattre, mais en vain. Elle reste immobile.

— Je vais te relâcher jeune fille. Ne t'en fais pas. Moi c'est Gareth ! dis l'homme. Je pense vraiment que tu ne devrais pas trainer dehors.

— C'est chez moi dehors ! cracha-t-elle.

— Ah oui ? Je pense que tu serais mieux en foyer.

— Non ! s'écria-t-elle automatiquement.

On l'y avait déjà envoyée, à chaque fois qu'elle se fait prendre par la police dehors. Et elle déteste ces endroits trop pleins de règles, trop enfermé, elle aime la liberté. L'autre semble comprendre. Son regard se fait triste.

— Je vois. J'ai été orphelin quand j'étais jeune.

Comme si elle en a quelque chose à faire ! Comme si sa compassion pouvait lui apporter quoi que ce soit.

— Parfait ! Je peux partir ?

Il lui sourit et l'examine. Elle n'aime pas ça.

— Si je te faisais une proposition....

— Vous savez ou vous pouvez vous la mettre ?

— Pas de ce genre ! Tu ne te demandes pas comment je fais pour t'immobiliser comme ça ?

Elle veut hausser les épaules, mais paralysée elle en est incapable.

— Je suis magicien.

— Si vous croyez que ça me fait peur !

— Non. Je sais que tu en a déjà tellement vu... Je suis à la recherche d'un apprenti. Tu auras un toit, des repas, mais pas mal de liberté.

Elle le dévisagea méfiante.

— Tu apprendras la magie bien sûr. Et un jour tu prendras ma place. Pour cela néanmoins il va falloir que tu quittes l'Angleterre, que tu me suives loin d'ici.

— Pourquoi je vous croirais ?

— Tu n'as rien à y perdre et tu as déjà constaté que mes dires étaient vrais. De plus, si j'avais voulu abuser de toi j'aurais très bien pu le faire non ?

Il pose sur elle un regard perçant qu'elle défie. Certes il disait vrai, mais elle ne peut pas espérer. Elle ne peut pas croire que cela lui arrive. Sa vie est une succession de malheur et le resterait probablement jusqu'à la fin. Ce genre de chose ça n'arrive pas en vrai, c'est bon que dans les histoires. Et pourtant elle sait ce qu'elle a vu.

— Je te laisse quelques jours de réflexion. Retrouvons-nous ici dans six jours d'accord.

— Pas besoin de réfléchir je viens !

S'il part elle se mettrait à douter. Or il lui propose quelque chose d'incroyable. Une chance unique.

— Tu n'as rien à emporter je suppose.

Non. Elle ne possède rien. Rien de personnel en tout cas.

— Non et rien à perdre non plus !

Il lui adresse un sourire qui semble plus triste, désabusé, que joyeux. Il pose une main sur son épaule, avant qu'elle la dégage par réflexe un frisson s'empare de son corps. Et elle disparait avec lui.


Préquel à l'apprenti du magicien

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