Fragrances

Le seul indice qu'il restait sur la scène de crime était un parfum fleuris. Wieslaw laissa la fragrance envahir ses narines pour se la remémorer.

— Retournons au poste ! dit-il dépité.

Son équipe le suivit, lui-même repris le chemin du poste pensivement. Une odeur de fleur. Qu'est-ce que ça pouvait bien signifier ? Wieslaw était fou. Le criminel aux fragrances comme l'avait surnommé la presse lui échappait encore et toujours. Il ne laissait rien derrière lui à part ces parfums entêtants, toujours différents, comme pour le narguer, aucun indice, rien qui puisse permettre de remonter jusqu'à lui. Pas une trace, pas une emprunte. On ne savait même pas si c'était une femme ou un homme, un gobelin ou une autre créature. Rien.

La presse était séduite par ce criminel qui leur permettait de remplir leurs journaux de vide sensationnel qui attirait l'attention de tous. On publiait des récits détaillaient de chaque crime, ou mille théories sur leur auteur, cela plaisait aux gens qui avaient tous leurs avis. Mais lui était mortifié. Cette affaire était un échec.

Il écrivit son rapport rageusement, la patronne ne serait pas ravie de ne voir aucune évolution. Sa carrière était en danger. Il se leva pour se rendre chez un des parfumeurs de la ville. Il le connaissait maintenant et l'amena tout de suite au laboratoire.

— C'était un parfum fleuri cette fois. Juste des fleurs.

Anka la parfumeuse lui en fit respirer un premier. Il n'y avait aucune correspondance. Elle passa à un autre flacon. Puis un autre. Son nez ne reconnaissait pas le parfum. Finit par ne plus rien reconnaître.

— Décidemment je ne trouverais jamais le bon parfum !

— Revenez plus tard sinon, je vous ferez sentir les fleurs que nous avons. Peut-être qu'une vous évoquera quelque chose.

Il repartit au bureau sans la moindre piste. Le capitaine n'allait pas apprécier. En effet à peine mit-il un pied au poste qu'elle l'interrogea :

— J'espère que tu as une piste cette fois Wieslaw ?

— Non madame toujours rien.

— On ne te paye pas à rien faire ! Si tu continues je vais refiler l'affaire à Marzena ! Ca avancera peut-être enfin.

— Je fais de mon mieux capitaine mais sans indice c'est difficile !

— Le président exige des réponses ! Si je n'en ai pas à lui apporter d'ici ce soir c'est un changement d'enquêteur que je lui donnerais.

Henryk débarqua alors précipitamment :

— Le criminel aux fragrances à encore frappé ! Un meurtre cette fois !

Il se leva, appela ses agents mais la capitaine intervint :

— Marzena accompagnez-les !

Les agents échangèrent un regard sombre, la jeune gobeline hocha la tête et se mêla au groupe la tête basse.

— Je suis navré Wieslaw, dit-elle sur le chemin, je n'ai pas demandé à récupéré le cas.

Il grogna, ne voulant pas adresser un mot à celle qui prendrait son enquête. Les autres agents lui jetèrent également des regards peu amènes. Tous savaient l'intérêt que lui portait le président qui trouvait la jeune créature à son goût depuis sa visite au poste de police et qu'il poursuivait de ses assiduités. Il avait dû demander à ce qu'elle soit nommée.

Elle avança tête haute, ignorant leurs regards.



*****


La scène du crime était intacte à part une forte odeur qui prenait au nez. Un mélange de fleurs et d'herbes aromatiques songea le chargé de l'enquête. Tout ce qu'il aperçut fut le cadavre, allongé au sol sans la moindre blessure. Il était juste mort.

— Marcin, interpella-t-il le médecin légiste, dis-moi tout !

— Le criminel a visiblement ensorcelé le cœur pour qu'il arrête de battre. Rien de plus.

— Qui était la victime ?

— Un potier sans histoire. Le criminel n'en avait pas pour son argent il n'a rien volé.

— Bon interrogeons le voisinage ou les clients, il a peut-être un ennemi.

Probablement qu'ils ne trouveraient rien, encore une fois. Le criminel aux fragrances semblait choisir ses victimes au hasard. Rien ne les reliait. Marzena l'accompagna pour interroger des voisins et les résultats n'eurent rien de surprenant. Pour la forme il fit quand même venir au poste des clients mécontents ou endetté, un fils avec qui il s'était fâché mais chacun avait un solide alibi et n'avait aucun lien avec les autres victimes. Il repartit chez la parfumeuse et renifla les branches, identifia quelques ingrédients. Anka lui promit de lui envoyer une liste des parfums les contenant.

Le soir approchait et il n'avait toujours rien à présenter. Désespéré il fit venir le jeune Henryk dans son bureau. Ce dernier s'entendait très bien avec la jolie Danuta, une reportrice en charge de couvrir l'affaire. Wieslaw l'appréciait toujours plus que la foule de bonimenteurs venue trouver des détails croustillants qu'ils gonfleraient dans leurs saletés d'occasionnelles qui s'arracheraient comme des petits pains. Elle au moins avait de l'éthique.

— Contact Danuta, partage-lui tout ce qu'on a s'il faut mais je veux entendre ses pistes et idées.

Il hocha la tête et se mit au travail, lui réfléchit. A qui ce crime pouvait bien profiter. Henryk revint les joues rouges de plaisir.

— Elle n'au aucune preuve chef mais elle se demande si quelques grands noms du parfum ne serait pas derrière ça, ou une grande marque qui veut se lancer il parait que les parfums Wera veulent lancer une gamme de parfum reprenant les fragrances du criminel.

— Comment les auraient-ils identifiés ?

— Ils les auraient recrées avec les informations de la presse.

— Bon on à rien à perdre, tentons de voir ce qu'on peut en tirer.



****


Wieslaw fut découragé à peine arrivé, il lui suffit de respirer les parfums nommés selon les rues des crimes pour comprendre que la personne n'avait rien à voir. Il n'avait pas la même odeur, pas les mêmes ingrédients. Mais en retournant au bureau la liste était arrivée. Il respira un échantillon de chacun et trouva le bon parfum. En se rendant dans la boutique qui le produisait il identifia chacun des parfums laissés par le criminel, tous produits ici. Il avait trouvé un lien. C'était un début.

La capitaine put annoncer au président et à la presse que les parfums avaient été identifiés, il transmit même les noms à Danuta pour la remercier. Lui interrogea les employés de la boutique tandis que ces hommes interrogeaient les quelques clients qui avaient achetés les parfums de la liste. Le criminel devait être parmi eux.

Mais le soleil se leva sans qu'ils n'aient rien trouvé.

— Il y a la queue devant la boutique pour se procurer les parfums, affirma Marcin en arrivant au matin.

— Les gens sont fous ! commenta Marzena.

— C'est les parfums Wera qui doivent l'avoir mauvais, approuva l'inspecteur.

— Henryk n'est toujours pas là ? demanda un collègue.

— Je crois qu'il avait un dîner avec une charmante reporter hier soir, dit l'inspecteur. En tout cas c'est ce qu'il m'a dit pour ne pas s'attarder.

Et au vu de son visage après l'appel et en partant il n'avait aucune raison d'en douter. Il comprenait même son retard. Néanmoins quand son communiquer sonna ce fut le jeune gobelin à la voix défaite qu'il trouva à l'autre bout.

— Il a encore frappé !

— Quoi déjà ! Il est très actif depuis une semaine. Qu'est-ce qu'il a fait cette fois ?

— Un nouveau meurtre. Une famille entière. Rue du four.

— On arrive ! Rejoignez-nous là-bas !



***


Le jeune inspecteur y était déjà, ainsi que l'élégant reporter qui avait eu l'information. Il lui fit un signe de tête irrité qu'elle les ait devancés sur ce coup-là. Il ne comprenait pas les gens qui préféraient prévenir la presse plutôt que la police.

Il entra sur les lieux du crime et s'immobilisa. Il pensait toujours être habitué à tout après toutes ses années mais voir les petits corps sans vie d'enfants lui brisait toujours le cœur. Ils étaient trois, dont un nourrisson.

— Ca va se savoir très vite, le prévint la reporter. Le public sera touché et va demander des résultats.

Il le savait. Il lui en fallait.

Dans la journée il fit venir au poste le parfumeur, seul personne sans alibi. Il n'avait pas vraiment de motif à part s'enrichir mais ils devaient faire quelque chose. La garde à vue s'éternisa, sans résultat. Il affirmait être innocent, ils n'avaient aucune preuve pour le garder. Wieslaw n'ayant aucun autre suspect et sachant qu'on attendait des résultats prolongea le plus possible mais dû le relâcher.

Le parfumeur fit un scandale dans la presse de son traitement par la police et Wieslaw fut convoqué par la capitaine.

— En deux mois on a toujours rien Wieslaw. Je suis désolée mais je dois te retirer de l'enquête ! Transmet tes informations à Marzena !

La tête basse il rejoignit le bureau de sa collègue, lui déballa tout avec aigreur.

— Je suis désolée, affirma-t-elle. Je n'ai rien demandé, ni l'enquête, ni l'attention du président, vraiment.

Il n'en avait rien à faire qu'elle soit désolée. Il se leva en l'ignorant et rejoignit un bar où une bagarre avait éclaté. Il venait de rater sa carrière.



***


Après une arrestation réussie Wieslaw rentra au poste où Marzena l'attendait à son bureau.

— On va me retirer de l'enquête ! dit-elle.

Un nouveau président avait été nommé, un qui n'appréciait pas spécialement la jeune agente et détestait son absence de résultat. Il aurait pu se sentir amer mais après un an à la voir galérer il ne se sentit que compatissant.

— Tu veux qu'on aille boire un verre et oublier ce criminel après le travail ? proposa-t-il.

Elle accepta. Ils n'oublièrent pas ce foutu criminel qui avait gâché leur carrière mais lui se fit oublier. Depuis qu'un nouvel enquêteur avait été chargé de l'affaire il n'avait plus commis aucun crime. Plus rien. Les journalistes se désintéressèrent de lui, puis la population et enfin la police se désintéressa de cette affaire non résolu.

Wieslaw lui n'oubliait pas. Marzena non plus. Ils en parlaient souvent, maudissant cette affaire qui les avait obligés à ne poursuivre que des affaires de secondes zones. Sa carrière était passé sans aucune autre anicroche, sans aucune autre grosse affaire et un jour il s'était trouvé trop vieux pour continuer à poursuivre les bandits et avait pris sa retraite. Marzena étant plus jeune continuait de travailler encore quand lui tentait de profiter de la vie et de ne pas penser à ce criminel.

Ce jour-là comme les autres il savoura son infusion fleuris en feuilletant la révélation pour laquelle Danuta travaillait encore, comme patronne néanmoins, Henryk en paraissait très fier quand ils les retrouver pour un dîner. Il jeta un œil à la gazette et fut glacé de terreur devant le titre.

Le criminel aux fragrances est de retour !

Avant qu'il puisse lire un résumé des événements son comuniqueur sonna. C'était sa femme il décrocha :

— Il est revenu, un cambriolage, annonça Marzena. Viens au poste l'enquêteur veux nous parler !

Ce criminel ne le laisserait jamais en paix !


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