Chapitre 49


[Précédemment]

A la suite de la morsure perpétrée par serpent du seigneur Morgan, Moana se transforme en kelpie. La menace de mort qui pesait sur elle est levée. Folle de joie, Moana décide de quitter les terres d'Awilix mais les problèmes sont loin d'être finis. La guerre est inminente, elle doit faire un choix : renier son passé d'humaine et embrasser ses origines, ou oublier.

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Ses premiers pas sur la plage furent vacillants. La fatigue avait gagné son corps pendant le voyage entre les terres d'Awilix et Urquhart. Elle avait dû laisser son instinct prendre le dessus lorsque les bancs de poissons l'avaient désorienté. Seule la détermination à arriver avant que la guerre n'éclate l'avait empêché de faire demi-tour, sachant pertinemment qu'Egon ne lui fournirait plus aucune aide.

Un hennissement se fit entendre, Moana chercha l'origine du son mais distingua rien. L'averse écossaise l'empêchait de voir plus loin que l'ombre imposante du château. La femme rejeta d'un geste agacé une mèche de cheveux qui s'était collée à ses lèvres humides.

Elle s'attendait à ce que quelqu'un vienne la chercher —Lorna, Isobel, Braïn ou encore Yain ou Emrys—. Si on ne l'accueillait pas les bras ouverts, quelques insultes lancées en souvenir du bon vieux temps auraient étaient bienvenue. Elle avait envie de revoir Isobel et continuer à parler de Colette pendant qu'elles travaillaient la terre et s'abîmaient les mains à la laverie.

Mais c'était pire que tous les scénarios imaginés : on l'ignorait ! De quel droit l'ignorait-on ? se renfrogna Moana. Elle méritait de la reconnaissance. Elle n'allait pas jouer la fausse modestie en affirmant le contraire.

Elle s'avança sur la plage en soulevant des mottes de sable. Les grains chatouillaient ses sabots la faisant se dandiner de manière ridicule. De grosses gouttes d'eau s'écrasaient sur sa robe bleutée en une litanie irritante pour ses sens nouvellement éveillés. 

Depuis sa transformation, son ouïe était plus fine, son odorat plus sensible et sa vue plus acérée que jamais auparavant. Pendant son trajet de retour, Moana avait découvert l'odeur vivifiante de l'océan et la sensation suave, presque rassurante, de l'eau glissant sur son corps. Elle se sentait plus forte aussi, et son attitude défensive s'était dissipée avec ses dernières peurs.

Soudain, le bruit éclata autour d'elle, si fort que Moana crut que ses tympans allaient éclater. Un tintement strident de cloches toutes proches perçait le rideau d'eau. On courrait dans tous les sens, on criait des ordres à vives voix pour se faire entendre par-dessus le son des cloches.

Confuse, elle attrapa par le bras un jeune homme qui passait devant elle.

— On nous attaque, cria-t-il en réponse à sa question muette.

— Qui ?

— Les Humains.

— Mais... et la barrière ? N'était-elle pas invisible pour eux ? pressa-t-elle.

Il secoua la tête, ses yeux vaguaient d'un bout à l'autre de la cour. L'envie de se mettre à l'abri était papable et faisait tressauter ses jambes. Tout en maudissant l'envie aussi de lui porter secours.

— La seule explication possible est que l'un des nôtres tente d'abattre la barrière.

— Est-ce qu'il peut réussir ?

Il la regarda comme si elle avait perdu la raison.

— Nous sommes tous les fils et les filles d'Awilix.

Moana hocha la tête comme si elle comprenait alors que le souvenir peu réjouissant de la déesse lui revenait à l'esprit. Le jeune kelpie en profita pour partir. Elle le perdit de vue quelques secondes après.

Les cloches installées sur les remparts du château sonnèrent à coups redoublés alors que la lumière qui émanait de la barrière d'Urquhart se faisait de plus en plus forte. Ils se retrouvèrent bientôt baignant dans l'aveuglante lueur avant qu'un bruit de verre brisé ne se fasse entendre. Des fragments de magie jaillirent vers le ciel et retombèrent au hasard en une fine pluie de particules bleutés. 

Le pouvoir de la Déesse se mélangea aux gouttes de pluie qui ricochaient contre les pavés et aux flammes de l'explosion qui rasa les écuries et une bonne partie du réfectoire. Le sang des blessés gicla sur la pierre nue en des flaques gélatineuses qui tremblèrent avant de glisser vers leur propriétaire.

Le déclic d'une arme rompit le fascinant spectacle.

Les claymores sortirent de leur fourreau.

Personne ne sut qui avait lancé le premier cri.

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