Chapitre 46


Ecosse, forêt d'Édimbourg, bunker militaire, neuf heure dix du soir, distance d'Urquhart : quatre heure et vingt-quatre minutes.

Le général Richard Caster regarda encore une fois son téléphone avant de le ranger dans sa poche. Il attendait désespérément qu'il vibre contre sa cuisse, mais rien ne venait perturber la tranquillité du bunker.

Avec sept de ses meilleurs hommes, il était venu se cacher dans ce bunker militaire des années mille neuf cent quarante. Abandonnée après la Seconde Guerre Mondiale, le bunker avait appartenu à l'armée secrète de Churchill, une unité destinée à défendre le Royaume-Uni contre une invasion allemande qui n'eut jamais lieu. 

Tenue secrète, cette unité était composée de locaux volontaires spécialement entraînés pour contrattaquer l'ennemi via de dangereuses opérations de sabotage. Ils maniaient les explosifs tout comme ils maniaient le meurtre.

Le pied droit du général Richard Caster se mit à battre la mesure sur le sol, faisant rebondir son genou osseux. Ils étaient ici pour se battre jusqu'à la mort, mais Richard espérait que ses hommes ne finiraient pas comme les scallywags (voyous en français) dont l'espérance de vie dépassait à peine la douzaine de jours. 

Il s'y voyait déjà : un cadavre parmi les autres, recouvert de crottes de chauve-souris et dévoré par des insectes nécrophages, ayant pour seul spectateur son âme promue au statut de fantôme. Ils s'engageaient dans une mission suicide et à part leur esprit héroïque, personne ne les sortirait d'ici.

Caché au milieu des racines et des fougères, le bunker était la planque idéale. L'intérieur était formé d'une arche en fer rivetée placée au-dessus d'un sol bétonné. On pouvait aussi trouver des lits superposés, une table en métal, un poêle de cuisson, des conserves, une trousse de secours et plusieurs caisses d'armes.

Richard regarda furtivement sa montre puis avala un soupir d'agacement. Sans indic', ça n'allait pas être de la tarte. S'étaient-ils retournés contre lui, regrettant amèrement leur trahison, ou avaient-ils été découverts ? 

Il sortit le mouchoir qu'il gardait dans la poche de poitrine de son uniforme. Depuis la mort de Colette, sa patience fut mise à rude épreuve. La disparition de sa sœur le transforma en une bête guidée par la haine et la rancœur, avide de sang et de vengeance. Il résista à l'envie de ressortir le téléphone de son treillis, sachant pertinemment que la messagerie serait vide. Au lieu de cela, son pouce traça les initiales « R.C » brodés au fil d'or. 

Colette avait commencé la couture à la naissance de sa fille. Cependant, elle avait vite renoncé à l'idée créer une garde-robe complète pour Moana. Elle cousait assez mal, brodait moins bien. Le mouchoir que Richard gardait si précieusement était la seule et dernière tentative de broderie qui ne se révéla pas être un ratage complet. Richard sourit avec fierté. Au coin opposé de ses initiales, Colette avait brodé un bambou à huit tiges pour lui porter chance. 

Soudain, la sonnerie de son téléphone retentit et brisa le calme qui régnait dans le bunker. Richard sursauta. Ignorant les regards braqués sur lui, il décrocha à la deuxième sonnerie.

— Caster, répliqua-t-il.

À l'autre bout du fil, la voix était rauque et fatiguée. La voix de son lieutenant était dépourvue d'émotion, et cela lui fit plus peur que s'il avait maudit à voix haute. Bon Dieu, il aurait préféré ressentir sa colère au lieu de cette froide indifférence.

Braïn était mort au cours de la nuit, il avait été retrouvé au petit matin près des écuries. Tué avec une détermination et une violence inouïes, son corps mutilé était méconnaissable. Il ne restait plus rien de palefrenier excepté son souvenir. Il fut ramassé à la petite cuillère et enterré hors des terres SAQUA, tel un paria.

Quand à Lorna... Un frisson glacé parcourut Richard. 

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